Sybil pousse un long soupir tandis qu'elle se rassoit sur sa chaise, après que la porte de son bureau se soit refermée. Son boss vient juste de lui annoncer que, faute de preuves assez conséquentes, elle allait devoir libérer le suspect précédemment arrêté, et qui attend désormais en garde à vue. Arthuro Sanchez, le patronyme en dit long pour la police, mais la justice réclame davantage pour le considérer, lui et sa fratrie, comme les dealeurs qu'ils sont pourtant très probablement. Sybil, en tout cas, est convaincue de la culpabilité d'Arthuro, c'est d'ailleurs bien pour ça qu'elle l'a arrêté, et qu'elle a mené un bref interrogatoire qui n'a rien donné de probant. Le Sanchez s'accroche coûte que coûte à sa version : il n'y est pour rien et ne trempe dans rien de louche. Malheureusement pour lui, l'officier n'est pas facile à berner, et il s'avère en plus que l'objectivité de Sybil à son égard est mise en péril par une sombre histoire de meurtre dont, sans pour autant l'apprécier, elle connaissait la victime. Mais ça, il ne le sait pas. Il croit encore pouvoir lui raconter des salades en toute impunité, mais aux yeux de Honecker, ça n'est rien de plus qu'un criminel dont elle défait à présent les menottes, à contrecœur. Elle raccompagne l'interpellé aux portes du poste de police, le visage fermé. "Vous êtes libre, Sanchez. Profitez-en tant que ça dure", lui dit-elle tout bas.

Déjà pendant l'interrogatoire, l'interpellé s'est amusé. Réponses vagues voir insolentes, petites œillades douteuses... Clairement, il a fait le malin. La flic a l'habitude de ce genre de comportement, mais il vient généralement des prévenus n'ayant plus grand chose à perdre : les autres se tiennent à carreau. Tous, sauf Monsieur Sanchez, apparemment. Lui, il fanfaronne, il n'a pas peur, et c'est encore plus frustrant pour Sybil, persuadée d'avoir en face d'elle un dealer invétéré, en plus d'être un meurtrier - mais aussi dingue que cela puisse paraître, il a purgé sa peine, et on ne peut plus tenir ses agissements précédents contre lui. C'est dans la plus grande frustration que la jeune femme sent les menottes s'ouvrir sous ses doigts et qu'elle les glisse dans la poche de son uniforme. L'homme se tourne vers elle, peut-être pour la saluer... Mais non, il continue son petit jeu. Sybil ne bouge pas un cil devant ses avances au combien déplacées. "A bientôt", répond-elle simplement, l'air blasé. "Vous savez, si vous avez réellement envie de me revoir, vous avez qu'à me passer un coup de fil et on mangera ensemble… Vous aimez les dîner aux chandelles ?", continue-t-il pourtant. Sybil plante son regard dans le sien, laisse passer une seconde ou deux, un soupir se faufilant entre ses lèvres. "Bien essayé", lui concède-t-elle. "Mais vous savez quand même qu'on invite pas la police au restaurant avec de l'argent sale...". Elle ne sait pas bien pourquoi elle prend la peine de discuter avec lui, c'est un incorrigible. Mais vu son trop plein de confiance en lui, elle se dit qu'elle arrivera peut-être arrivera-t-elle à le prendre à son propre jeu.

Le fantasme de la policière est manifestement encore bien présent chez le sexe opposé : il suffit de voir la réaction de certains prévenus lorsqu'on leur passe les menottes, Arthuro Sanchez en tête. Le dealer enchaîne les écarts de conduite, il est incontrôlable, mais Sybil, lassée, renonce à l'arrêter à nouveau, cette fois-ci pour son attitude totalement inappropriée. Elle a bien compris que c'est un dragueur, et que paradoxalement, ses avances sont inoffensives. La seule chose qui pourrait ramener un gosse pareil à la réalité serait de se retrouver confronté à la gravité de ses agissements. Et Sybil ne pense pas forcément au fait de travailler dans la drogue en lui-même, mais plutôt aux personnes que le frère Sanchez a pu blesser dans le cadre de son activité, des victimes, au même titre que son oncle à elle. Elle n'a jamais appelé l'homme tué par Arthuro son oncle, puisqu'elle ne l'a jamais rencontré et qu'il n'aurait eu ce titre simplement par alliance. Mais tout de même : Sanchez a déjà tué, alors il ne doit pas être parmi ceux qui hésitent à user de la violence pour arriver à leurs fins. Devant le meurtrier, Honecker doit pourtant garder la tête froide, et le meilleur moyen de le faire, c'est de faire abstraction de la personne à qui elle parle, et de se contenter de décliner ses avances. Arthuro lui glisse un clin d’œil, elle roule les yeux en l'air. "Je suis à peu près sûre que les bons citoyens se tiennent davantage à l'écart du poste de police que vous", lui rétorque-t-elle. "Mais il n'est pas trop tard pour vous repentir !". Son ton est sarcastique, elle n'en pense pas un mot. Elle lui ouvre la porte du commissariat, attendant qu'il en sorte, mais il la questionne, et elle se retrouve donc également en-dehors de l'édifice. Evidemment, que s'ils avaient eu assez de preuves, ils l'auraient gardé. Mais elle ne veut pas s'avouer vaincue. Il est peut-être temps d'essayer une autre technique. "Ca vous importe, ce qu'on pense de vous ?", le questionne-t-elle.

Le regard satisfait qu'Arthuro lui lance régulièrement, ce trop-plein de confiance en lui quand il lui parle commence à interpeller la jeune policière. Est-il sérieusement en train de penser que son petit jeu de drague va fonctionner sur elle ? Quelle blague. Elle déjoue chacune de ses allusions, et il revient toujours au galop. Tiens, il vient de la tutoyer. Incorrigible. La flic durcit son regard tandis qu'il joue l'innocent, tentative de regagner un peu d'autorité sur l'ex-interpellé, à présent libre, qui continue pourtant à discuter avec elle. Il pourrait tout à fait partir : c'est donc bien qu'il a une idée derrière la tête. Mais elle aussi commence à élaborer un nouveau plan. Sa frustration se calme peu à peu, et elle réalise qu'elle peut tourner la situation à son avantage : si elle laisse son suspect penser que son charme fonctionne, elle pourrait se rapprocher de lui et, peut-être, récolter davantage d'informations, voire des éléments incriminants à son sujet. Pour cela, elle réalise qu'elle va devoir faire jouer ses talents d'actrice. Sybil regrette alors de ne pas avoir accompagné Lysander plus souvent au théâtre, malgré l'insistance de ce dernier. Alors qu'elle fait mine d'écouter Sanchez, son projet se dessine : jouer la flic facilement troublée et continuer son enquête en douce, jusqu'à ce que les efforts payent. C'est un travail de détective, et non plus de simple officier ; avec un peu de chance, si son plan marche, elle pourrait accéder plus rapidement au rang qu'elle a toujours visé au sein des forces de l'ordre. Motivée, l'officier prend une respiration : il ne faut pas qu'elle pense à ce que cet homme a fait, sinon elle n'y arrivera pas. Elle esquisse un léger sourire en guise de premier mensonge. "Face aux autres, votre vérité sera toujours la bonne", réagit-t-elle alors qu'il lui conte avoir toujours été considéré comme un outsider. "Il vaudrait en revanche mieux pour vous que cette vérité n'implique pas de crimes", continue-t-elle. Mince, il va falloir qu'elle se montre ouverte à la conversation. "Vous êtes arrivé ici à huit ans ? Où étiez-vous, auparavant ?". Elle fait mine de s'intéresser à sa vie et paraît plutôt convaincante. Finalement, c'est plutôt intéressant de jouer la flic bienveillante.