“ What elese ?
Déphasé, n’était-ce pas plutôt lui qui l’était ? Ne surmontant pas le départ de sa femme, s’enfermant dans le travail, les femmes, et le Whisky. Il en oubliait la vraie vie, celle qui fait mal, celle qui vous prend pour un punching-ball. Il préférait sa relation sans retour, avec ses robots, ses circuits électroniques, et ses équations informatiques. Là-dedans il se sentait à son aise, et en sécurité. Il aurait sûrement mieux à faire, comme gérer des rendez-vous, s’occuper de la commercialisation, des négociations, des partenaires, de la paperasse. Mais il déléguait tout le sale boulot. Sans trop s’en rendre compte. Il ne calculait plus son égoïsme, plus rien ne semblait vraiment compter. Dans le fond, se souciait-il réellement de son entreprise ? Il avait assez de rentes pour vivre dès à présent, comme un petit prince, même à la retraite. Néanmoins, il y avait une chose qui ne le quittait pas, même après quatre ou cinq Whiskys purs : Sa créativité scientifique. Ses neurones ne s’arrêtaient jamais. Il lui arrivait même de passer de longues nuits blanches à réfléchir, à résoudre des problèmes mathématiques, afin d’atteindre son but, mettre sur pied une folie robotique qu’il avait subitement pensée. S’en était d’ailleurs une énième qui l’occupait depuis des semaines. Il avait fait des plans détaillés, il n’avait plus qu’à mettre en œuvre son imagination. A peine avait il fuit ce lit, occupée par une jeune femme de la moitié de son âge, dont il ignorait même le nom, qu’il s’était déjà enfermé dans son atelier. Il n’avait que grignoté, quand il était absorbé par quelque chose comme ça, il ne pouvait se résigner à prendre une pause, par peur de perdre du temps. Il n’avait pas vu l’heure défilé, pas plus qu’il n’avait réalisé que dehors, le soleil se couchait déjà.
«
Bonsoir. » De petites lunettes en plastique, de protection, sur le nez, il était occupé à souder un circuit électrique, minutieusement. Alors il n’avait pas levé un œil vers la jolie blonde, se contentant d’un léger hochement de tête. «
Je vous ai répertorié toutes les personnes que vous devrez appeler pendant ces deux prochaines semaines ainsi que leur numéro sur la gauche. A droite, ce sont tous vos rendez-vous. J'ai essayé de vous les programmer à des horaires qui vous arrangez. A l'arrière, vous avez le prénom et nom des nouveaux employés et des anciens, aussi. Ils vous aideront pendant mon absence. Gregory est excellent dans l'organisation des plannings. Si vous avez besoin de remettre un rendez-vous à un autre jour, il sera là. J'ai parlé à Mallory et elle est prête à s'occuper de toutes ces femmes avec lesquelles vous passé une nuit. Vous pouvez lui faire confiance, elle est géniale et très probablement plus douce que moi. Michael s'est montré partant aussi mais le connaissant, je ne vous conseille pas d'aller le voir, lui. Il est pire que... » Il n’écoutait que d’une oreille, mais la blonde parlait beaucoup, elle qui d’habitude, n’avait pas de question, et savait parfaitement quoi faire, ou, comment, et sans même qu’il ne le demande. Alors bien que ses yeux fatigués scrutaient et étudiaient, avec attention, sa soudure, il fronçait légèrement les sourcils.
«
Allez droit au but Mlle Bennett. »
Grognait-il presque, réalisant qu’il n’était guère satisfait de son travail. «
J'ai besoin de faire une pause. Deux semaines, pas plus. Je ne pense pas les avoir volées. Surtout quand on sait que je suis beaucoup plus utile à virer vos bimbos de vos bras qu'à occuper mon réel poste de secrétaire. » Ho non, une crise existentielle. Comprenant bien rapidement que sa secrétaire allait le lâcher, et l’abandonner, comme son ex-femme, il se redressait sur son tabouret tournant. Il le fit tournoyer pour faire face à Holly, tout en restant assis. Il gardait son calme, un calme même surprenant, quand on sait que sa boîte avait manqué de couler sans Piper. Ne serait-ce pas définitivement la fin, si sa remplaçante prend son envol ?
«
C'est une crise de jalousie ? »
Demandait-il avec malheureusement, tant de sérieux. Il pouvait aisément régler ce problème, après tout, il ne l’avait pas engagé pour son cv, soyons honnête. Il avait suffi d’admirer ses lèvres pulpeuses, et son joli décolleté, pour l’engager les yeux fermés - mais les gardant ouverts. Evidemment, il retenait cette précision. Manquerait plus qu’il ne se retrouve avec une plainte sexiste sur le dos. «
Excusez-moi, c'était terriblement déplacé. Est-ce que je peux faire une dernière chose pour vous ? » Un léger sourire en coin de ses lèvres se dessinait, alors qu’il ôtait ses lunettes de protection. Il les posait sur le bureau derrière lui, remplit de matériaux en tout genre, et de papiers brouillons, ou encore de plans.
«
Vacances refusées, je suis navré mais j’ai besoin de vous. Pour... Tout ça là! »
D’un geste ennuyé, et presque écœuré par cet amas de travail, il désignait les papiers qu’elle lui avait laissé.
«
Je suis rien sans vous, alors je vous accorde les bimbos. Et la crise de jalousie. Vous pouvez hurler si vous voulez, j’aime bien ce jeu, mon ex-femme adorait aussi. »
C’était à se demander si le ton qu’il employait était sérieux, ou ironique. Dans tous les cas, il s’en amusait. Il se hissait sur ses jambes, quittant son tabouret. Ce n’est que là qu’il réalisait à quel point, il y était resté assis trop longtemps. Ses jambes et son dos en étaient meurtris. Il n’en laissait rien paraître, si ce n’est une main qui venait légèrement frotter ses reins. Ses yeux étaient scotchés au doux et angélique visage de sa secrétaire, ne cachant guère leur satisfaction d’ainsi pouvoir admirer sa beauté. Ne laissant que peu de distance entre eux, il ajoutait d’un fin sourire charmeur, songeant peut-être qu’ainsi, pour ses beaux yeux, elle changerait d’avis.
«
Si c’est une augmentation que vous voulez, ça je peux vous l’accorder! »