La mi-temps

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Is this the end ?
Louana & ShaynEnfin rentré chez lui. Mais peu lui importait, pour être honnête. Il se foutait pas mal d'être dans la rue ou dans son lit. Il était épuisé, physiquement et mentalement. Jetant son sac d'affaires dans sa chambre, il se dirigea jusqu'à la salle de bain et ouvrit le placard qui surplombait le lavabo. Une boîte de pillules qu'il trouva et dont il versa le contenu dans le creux de sa main. Il n'en restait presque pas à vrai dire, tant il en avait consommé ces derniers temps. Quitte à être camé, autant l'être en prenant deux médicaments aux effets différents. L'un l'empêchait de dormir, l'autre le défoncait tellement qu'il lui enlevait la sensation de souffrance, le faisant planer à la place. Physiquement, il commençait à faire peur aux gens; amaigri depuis quelques semaines, des cernes et le teint aussi creusé que pâle, une sacrée combinaison qu'il masquait toujours par du maquillage. Mais pas ce jour-là. Il était épuisé, son corps le lâchait, après une garde de trop. Il vacillait, subissant entre autres des maux de tête et des acouphènes, déformant de par leur intensité sa perception de la réalité. Il était méconnaissable. Mais où était passé le jeune homme souriant, plein de vie et d'entrain qui passait son temps à sourire ? Où était-il ? Lui même n'aurait sû le dire.
L'heure était matinale et il ne voulait pas réveiller sa soeur. Il l'évitait au maximum, ne voulant pas lui montrer l'importance de sa déchéance. Il sombrait et refusait de s'accrocher aux personnes pouvant l'aider à s'en sortir. C'était sa merde, point barre. Sauf qu'il était tellement embourbé dedans qu'il ne savait même pas s'il allait réussir à s'en sortir. Il n'avait plus rien à donner, du moins, plus rien de positif. Il était rempli de négativité, de sentiments noirs tels que la colère, la frustration ou la tristesse. Tout ce qu'il y avait de positif l'avait quitté, laissant à la place un vide qu'il n'était pas en mesure de combler. Il s'était réfugié dans des artifices qui lui permettaient de s'échapper de cette réalité, cette vie qui devenait un enfer pour lui. Quelques marques de piqûres sur les bras et on l'aurait pris pour un drogué en pleine crise de manque.
Shayn n'aurait pas même pas été capable de dire quelles étaient les doses de médicaments qu'il prenait, ne faisant plus attention à prendre une, cinq ou dix gellules d'un coup. Il aurait pu frôler l'intoxication sans problème, cela n'y changeait rien.
Ce jour-là, obnubilé par sa migraine, il s'était précipité dans son armoire à pharmacie, gobant ce qu'il restait de la boîte comme s'il ne s'agissait que de vulgaires bonbons. Il se changea ensuite, mettant un simple jean à trous et une veste à capuche par dessus son débardeur, puis, il sortit. Pas besoin de son portable, ni de son casque ou de sa musique. La réalité vrillait devant ses yeux tandis qu'il se retrouvait dans la rue, sous des trombes d'eau. Il avança, marchant doucement et mettant les mains dans ses poches. Ses habits fûrent trempés alors qu'il n'avait même pas parcouru cinquante mètres mais peu importe, il voulait juste sortir et marcher. Il ne savait même pas où il allait, marchant encore et encore, sans vraiment regarder devant lui. Il se mit à tituber, étant pris de vertiges. Le monde tournait autour de lui et sa main se rattrapa à une voiture garée là, tandis qu'il s'appuyait sur la vitre pour ne pas tomber. La surface était froide, glaciale comme cette journée là. Pourtant, il continua, refusant de s'arrêter.
Le jeune homme avait du mal à mettre un pied devant l'autre. Les gens passaient, le dévisageant comme ils l'auraient fait pour un sans-abri ou un ivrogne apparaissant complètement bourré dans la rue. Il leva la tête, ne sachant pas où il se trouvait. Il ne reconnu pas la rue et se demanda depuis combien de temps il était dehors. Mais il n'avait rien sur lui, même pas ses papiers; seulement ses clefs d'appartement. Il était aussi perdu à cet instant que dans sa vie en général. Shayn commença à grelotter, à force d'être assailli par les grosses gouttes d'eau qui tombaient du ciel.
"Tomber", c'était ce qu'il s'apprêtait à faire. Sa vision se troublait, ses maux de tête s'intensifièrent tandis que le fond sonore n'était plus qu'un long sifflement aigu. Son pied s'avança mais il heurta quelque chose. Sans doute un trottoir. Il était dépourvu de réflexes et se laissa tomber en avant avant de rencontrer le sol. Même pas de douleur, rien. Il ne sentait rien. Aucune autre sensation que celle de l'énergie qui quittait peu à peu son corps. Couché à plat ventre au milieu de la rue, le corps étendu sur l'asphalte détrempée. Il aurait pu se noyer, le visage à demi sur la couche d'eau qui recouvrait le goudron. Ses vêtements ne le couvraient plus de rien désormais mais il ne sentait pas pour autant l'humidité sur sa peau. Il ne ressentait plus rien. Ses yeux se fermèrent tandis qu'il acceptait son sort.
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Louana n’avait pas dormi depuis presque trois jours. La noirceur revenait peu à peu la hanter. Depuis qu’elle avait aperçu sur le journal que son abominable « violeur » était de retour, le stress l’a submergeait en permanence. Elle avait décidé enfin d’être heureuse, de sourire, de prendre en compte chaque moment comme de belles expériences même si celle-ci pouvaient s’avérer mauvaises. Elle se raccrocha au fait que même si celui-ci se trouvait à New-York, les chances seraient minimes de la retrouver. Elle était complètement abasourdie, déstabilisée. Ça s’était répercutée sur son travail la veille. Beaucoup moins avenante envers ses patientes, et ses collègues, on lui avait dit de se ressaisir. Facile à dire. Elle était en permanence tolérante envers les autres, mais il suffisait d’une seule journée où elle n’était pas catégorisée de « Parfaite » pour qu’on remette toutes ses compétences en jeu. Elle détestait ça. Heureusement, c'était son jour de repos, il fallait qu’elle marche avant de trop craquer. Ses émotions divaguaient, elle se retenait de hurler de douleur, comme si elle pouvait ressentir de nouveau cet homme qui l’avait sali. Elle pouvait ressentir son corps froid contre sa peau, avec une telle violence, avec une dureté sans nom. Elle ne pouvait pas rentrer chez elle, impossible. Il fallait qu’elle respire, un grand coup, quitte à avoir froid, c’était la dernière des choses auxquelles elle pouvait penser. Une pluie fine s’était déversée sur la ville. Louana voulait se concentrer sur le maximum de choses qui pourrait lui faire oublier cette sensation de mort imminente de « son âme ». Elle pouvait entendre les gouttes d’eau crépiter contre le sol du goudron. La pluie avait chassé la plupart des promeneurs, la ville semblait si calme pour une fois. Elle observa les contrastes de couleurs qui pouvaient se dégager. Réfléchir de manière positive lui rappela qu’elle avait la chance d’être en vie et d’avoir un toit, et elle voyait la ville plus belle, et plus lumineuse. Alors qu’elle s’était enfin calmer, son acoustique lui fit parvenir un sifflement. Elle se retourna. Un homme, dépravé, à moitié saoule, s’approchait de plus en plus d’elle tout en lui faisant des gestes sexués. Louana ne pouvait plus se contrôler, elle était morte de peur, paniqué, son cœur palpitait. Elle se mit à courir sans savoir où elle se dirigeait. Toute sa poitrine lui faisait mal, la sueur et la pluie ne jouait pas en sa faveur. Elle tourna dans une ruelle en ayant l’espoir d’avoir échappé à ce monstre, « pas une deuxième fois » se répéta-t-elle. Elle s’arrêta et voulu contrôler sa crise de panique, Louana commençait à hyperventiler. Les larmes coulaient à flots. Soudainement, elle entendit un bruit brut, comme si quelqu’un était tombé. La réalité revenait la parcourir , ses pensées s’estompèrent quand elle vit un peu plus loin, tout près d’un trottoir, un jeune homme gisant par terre. Elle ne réfléchit pas une seule seconde, et alla assister cet homme qui était à deux doigts de se noyer dans les grosses flaques que la pluie avait créée. Elle vérifia sa respiration, son pouls, et le mis en position latérale de sécurité. Elle enleva sa veste, malgré le froid glacial, cet homme en avait plus besoin qu’elle. La jeune femme vérifia ses pupilles. Cet homme semblait pâle, visiblement creusé, tout portait à croire à une overdose mais elle préféra ne pas s’avancer à un diagnostic de suite. L’avis de ses confrères lui donnerait un peu plus confiance. Elle resta près de lui, et appela les secours. Elle lui glissa au creux de l’oreille avec la plus grande des douceurs : « Je suis là, vous n’êtes pas seul, nous ne sommes jamais vraiment seul même dans les moments les plus noir de notre vie, je ne vous lâcherai pas ».

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Louana & ShaynDepuis combien de temps était-il allongé ? Dix secondes ? Quinze minutes ? Impossible à savoir. Pour lui, tout ceci n'aurait pu être qu'un mauvais rêve et il se serait réveillé quelques minutes plus tard, en sueur dans son lit. Son cerveau s'était déjà appliqué à supprimer les souvenirs de sa chute, de la raison qui l'avait amené ici, dans cette rue. Il n'arrivait même pas à distinguer le vrai du faux. Shayn ne ressentait aucune douleur, aucune sensation, agréable ou non. Il n'avait strictement aucun ressenti.
Soudain, et malgré le fait qu'il ai gardé les yeux fermés, il entendit vaguement des bruits de pas qui accouraient sur la route mouillée. Il sentit qu'on vérifiait ses signes vitaux lorsque des doigts se posèrent contre sa carotide. Alors ce n'était pas un rêve, tout cela était donc bien réel. On lui posa une veste dessus après qu'il ai été mis en position latérale de sécurité. Il ignorait à qui il avait affaire, sûrement un bon samaritain qui passait par là. Quoi qu'il en soit, à cet instant là, il lui devait sans aucun doute la vie. Il entendit sa voix, cette douce voix féminine qui venait de prendre soin de lui; contre son oreille.
- Je suis là, vous n’êtes pas seul, nous ne sommes jamais vraiment seul même dans les moments les plus noir de notre vie, je ne vous lâcherai pas. lui déclara l'inconnue.
Il ne savait pas qui elle était mais il lui faisait confiance, rien que par le fait qu'elle soit venue à son secours. Si il avait dû se mettre à délirer, il aurait sans doute imaginer qu'elle était un ange avec de grandes ailes blanches, venue auprès de lui pour l'accompagner jusqu'à sa dernière demeure.
Instinctivement, sa main se posa sur celle de cette femme, doucement. Elle était son seul réconfort, elle était sa bouée de sauvetage, la seule à pouvoir le ramener sain et sauf sur la terre ferme. Et il ne voulait pas la perdre.
- Je... M'appelle Shayn. murmura-t-il en gardant les yeux fermés. Il s'en remettait entièrement à elle.

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@Shayn Dawkins

La bonne vieille adrénaline lui procura un état de bienveillance décuplé. Elle n’était plus la petite victime salie, laissée sur le bord d’un trottoir rêche à moitié nue, elle était « la sauveuse » cette fois. Elle se sentait complètement vivante quand elle pouvait apporter son aide à quelqu’un, elle n’était plus que douceur . Elle était une rescapée de la vie, et elle voulait étaler tout ce qu’elle pouvait de bien auprès de ceux qui en avaient besoin. Cet homme lui rappelait beaucoup son passé, son état de détresse à l’époque, et elle aurait voulu qu’on l’aide à ce moment-là. Alors, elle prenait revanche sur la vie ; c’était à son tour d’être présente pour quelqu’un, qui d’apparence, semblait tomber dans les ténèbres. Les minutes paraissaient si longues, Louana arrivait à garder son calme et sa patience mais elle s’étonna du temps que pouvait mettre les secours à arriver. La jeune brune fut surprise lorsqu’elle sentit la délicate main de ce jeune homme se poser sur la sienne. Elle inspira un grand coup, elle n’était pas du genre tactile, surtout après ce qui venait de se passer. Elle mit ses flash-back de côté et pensa plutôt au bien-être de cet homme qui voulait se sentir rassurer, il en avait besoin. Louana lui serra de nouveau un peu plus fort. Elle voulut ouvrir la bouche pour lui demander son prénom, mais celui-ci lui murmura plus vite qu’elle : « Je…M’appelle Shayn ». Louana acquiesça un sourire et lui répondit :« Shayn… Les secours arrivent, je ne vous lâche pas, je suis du monde médical ». Les lumières bleues illuminèrent la ruelle qui désormais, était bien sombre par ce ciel grisant , et avec cette pluie de plus en plus virulente, les conditions devenaient de plus en plus compliquées. Elle le protégeait tant bien que mal.
« Ah oui,dit-elle en bafouillant et en frissonnant, je me prénomme Louana . Louana Gray.»

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Louana & ShaynElle lui serra la main. C'était la première sensation qu'il avait depuis de nombreuses minutes. C'était également la première touche d'humanité qu'il recevait depuis plusieurs jours. De nombreuses journées passées à donner sans rien recevoir en retour. Trop de temps était passé et la flamme qui brûlait dans son coeur avait fini par presque s'éteindre, faute d'attention. Si il avait longtemps pensé qu'il pouvait donner sans recevoir en retour, il se rendait compte ce jour-là qu'il s'était trompé. Il avait lui aussi besoin de bonne énergie; qu'on lui transmette de bonnes ondes et c'était exactement ce que venait de faire cette femme en lui prenant la main en retour. Shayn entendit sa voix au loin, tandis qu'elle le rassurait, le prévenant de l'arrivée iminente des secours et de sa fonction dans le monde médical. Il était déjà entre de bonnes mains, il n'en avait aucun doute. Le pompier qu'il était avait naturellement compris chacun des gestes qu'elle avait fait et s'en était rassurant pour lui. Son corps se détendait peu à peu au fur et à mesure que les secondes passaient; il n'avait cependant aucune idée de ce que cela signifiait. Etait-il simplement en train de se rassurer ? Ou était-il plutôt en train de s'enfoncer ?
La jeune femme s'appelait Louana. Il lui devait une fière chandelle. Malgré les acouphènes qui bloquaient partiellement son ouie, il entendit au loin les sirènes caractéristiques d'une ambulance. Et voilà que quelques secondes plus tard, sans même s'en rendre compte, deux ambulanciers le posèrent sur un brancard. Une lumière passa devant chacun de ses yeux, tour à tour. Il entendit les mots "mydriase bilatérale" et comprit que c'était certains des effets provoqués par son ingestion de médicaments. Quel idiot il était. Il s'en voulait mais il n'avait pas non plus la force de pleurer.
- Louana... murmura-t-il tandis que son esprit se rattachait à la seule chose positive de ces derniers jours; cette femme, dont il ne connaissait rien d'autre que le nom.
- Louana, reste avec moi... dit-il, sans se rendre compte de s'il parlait fort ou au contraire, trop doucement. Il n'avait même pas l'impression que les mots sortaient de sa bouche. Il ne savait même pas si elle était toujours là. Le jeune homme savait au fond de lui qu'elle avait une vie, comme n'importe quelle personne, qu'elle avait autre chose à faire que d'aller à l'hôpital, surtout pour accompagner un inconnu pseudo-camé aux médicaments.
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@Shayn Dawkins

Il y a bien longtemps que Louana n’avait pas tenu la main d’un homme. Elle, si craintive, ressentait pour une fois depuis trois ans, un geste vraiment tendre et sincère de la part du sexe opposé. Il était dans un état si faible et pourtant, il résistait à ne pas tomber dans les pommes. Cette sensation étrange de se soutenir l’un l’autre par un simple toucher, faisait énormément de bien à Louana. Elle avait si hâte d’admirer ses prunelles, son regard, pour apercevoir l’homme qui se cachait derrière ce masque de douleur, derrière la mydriase bilatérale. Elle était intriguée, en général elle côtoyait beaucoup plus de femmes dans la souffrance. Pour elle, les hommes étaient synonymes de monstres, de pervers, apparentés à de l’égoïsme et cruauté. L’ambulance arrivait enfin, que deux ambulanciers se chargèrent de sortir le brancard , tout en ignorant la jeune femme. Louana voyait bien qu’ils n’étaient pas dans l’empathie, ils ne s’adressaient ni à elle, ni à Shayn, ils effectuaient les gestes de façon routinière. Elle était timide, mais quand il s’agissait du corps médical, elle ne supportait pas de voir autant d’indifférence de la part de collègues. Évidemment sur le plan hiérarchique, elle était en droit de monter un peu le ton et de prévenir la société à laquelle ils étaient rattachés par leurs comportements exécrables mais elle n’était pas méchante. Elle les interpella d’une voix un peu plus autoritaire tout en leur montrant son badge de l'hôpital, elle ne voulait pas prendre à la légère le cas de Shayn. Louana leur adressa un rappel à l’ordre, et leur exigea de rester avec eux dans l’ambulance. Les deux ambulanciers s’excusèrent, et l’un des deux vérifia les pupilles du jeune homme qui s’était arrêté de communiquer. « Mydriase bilatérale » dit-il à voix haute. Merde, tout portait à croire que Louana avait bel et bien raison, une overdose ; pronostic vital engagé. Elle observa délicatement Shayn à l’autre bout du brancard pendant que l’ambulancier s’occupait du bilan. Des gouttes de sueurs trempaient le visage de Shayn, elle le voyait dans un état délirant. Louana était inquiètes, le pouls commençait à s’accélérer dangereusement. Le silence se répandait, mais la voix de Shayn , se fit entendre, un murmure tout d’abord : « Louana... », puis de façon bien portante cette fois-ci, presque en criant : « Louana, reste avec moi... ». Louana se jeta sur lui, lui prit ses deux mains et lui exprima « Shayn, bats-toi, tu t’emballes, bats-toi par pitié, tu as le droit de vivre, s’il-te-plaît, ta vie compte autant que celle des autres ».
Un son aigu retentit, l’arrêt cardiaque. « NON ! » cria t-elle. Il fallait faire vite, Louana plaqua ses deux mains l’une sur l’autre, et commença les compressions thoraciques.

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Louana & ShaynTout s'était accéléré en une fraction de temps. En moins d'une minute, son coeur avait cessé de battre. Shayn n'avait rien vu venir; il n'était même pas conscient de la gravité de ce qu'il se passait. Ce jour-là, dans son désir d'oublier ses souffrances, il était allé trop loin. Peut-être que tout aurait été différent s'il n'avait pas ingéré autant de gellules d'un coup; s'il avait pris le temps de regarder combien il en tenait dans la main. Mais non, son impulsivité, sa déchéance progressive des dernières semaines l'avait conduite à cette fatalité là. La mort, sa vieille ennemie des dernières années, l'avait rattrapé. Dans cette rue et sous cette pluie, elle l'avait fauché, le forçant à se plier à sa volonté. Et enfin, dans cette ambulance, elle avait arrêté son coeur. Un corps fatigué, meurtri; un mental qui avait fini par lâcher et une défaite cuisante contre la vie à l'arrivée. Tout ce qui le composait était en train d'abandonner la partie. "Echec et mat Shayn" semblait lui murmurer une petite voix à l'oreille.
Il fallait dire qu'il l'avait bien cherché. Cela faisait plus d'un mois qu'il faisait du grand n'importe quoi, ne lésinant pas sur les médicaments, dormant peu, buvant plus qu'à l'accoutumé. Il avait passé des heures à se regarder devant le miroir, à contempler son inévitable chute. Pendant tout ce temps, il avait maquillé ses pensées, aussi bien que son visage. Pendant tout ce temps, il s'était donné l'illusion d'être encore une belle personne. L'était-il encore ? Lui-même ne le croyait pas. Il avait même fini par adhérer à l'idée d'être devenu quelqu'un de mauvais, de néfaste pour les autres. Mais peu importait, au final, tout allait se jouer là, dans cette ambulance dans laquelle il était allongé.
Il ne voyait rien, n'entendait rien et ne ressentait rien non plus. Plus de douleur, plus de sifflements dans les oreilles, plus de maux de têtes intenses et interminables. Terminé les médicaments, les bouteilles d'alcool et les soirées en boîte, "juste pour oublier". Terminé la joie de vivre, les projets de vie, les préoccupations pour les autres personnes. "Etait-ce la fin ?"
Tout semblait terminé. Il se sentait léger; il avait l'impression de pouvoir voler, d'être enfin délivré des poids qui pesaient sur ses épaules. C'était sans doute la voie de la facilité, la solution pépère qui aurait mis fin à ses ennuis. Il se voyait déjà retrouver son oncle, ce pompier extraordinaire qui avait donné sa vie pour la bannière étoilée.

Il ouvrit les yeux. Les lumières au dessus de lui le firent cligner des paupières. Etait-il mort ? Etait-ce la vie après la mort ?
Il voulu parler mais sentit que sa gorge était obstruée. Une envie de vomir; une sensation d'étouffement. Des gestes maladroits et déshordonnés avant de réussir à arracher le dispositif qui l'aidait à respirer. Son cerveau se mit à fonctionner; brutalement. C'était une sonde d'intubation reliée à un respirateur.
- Mais c'est quoi ce bordel ? pensa-t-il.
Ou était-il ? Que s'était-il passé ? Il ignorait tout de sa présence ici et ne se rappelait pas de son dernier souvenir.
Il regarda autour de lui, il semblait être dans une chambre. Dans un hôpital à en croire par les couleurs. Mais il ne comprenait pas. Il regarda ses bras, il était perfusé à de multiples endroits. Il voulu parler mais aucun son ne sortit de sa bouche.
- P*tain mais qu'est-ce qu'il m'arrive ? se demanda-t-il.
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En général, elle réanimait des cœurs de nouveau-nés, rarement ceux des adultes. Son corps été épuisé, dévasté par la fatigue et l’anxiété de ces derniers jours , mais Louana ne lâcha rien. Ses yeux vacillaient entre le visage inanimé de Shayn et le témoin du rythme. Le temps et l’espace n’existaient plus, son cerveau n’était concentré que pour lui. Elle était en apnée. Subitement, l’ambulancier sortit de bon coeur : « On a un rythme ! ». Soulagement. Jamais elle n’aurait cru réussir une réanimation. Elle ne se déconcentra pas pour autant, surtout que l’hôpital n’était pas à proximité. La jeune femme, avait pris la sale habitude d’avoir des petits flacons dans son sac de plusieurs médicaments différents, car dans sa tête c’était pour le « on sait jamais ». Elle savait qu’elle serait peut-être poursuivie au niveau judiciaire étant donné qu’elle n’était pas en poste ; elle ne devait pas injecter des doses de quoique ce soit hors service, mais peu importe, son petit côté rebelle mais bienveillant avait trop pris le dessus sur elle. Louana rassura l’ambulancier, il ne serait pas mis dans le coup, c’était sa propre responsabilité. Peu importe si elle serait virée, mais il fallait agir vite, Shayn n’était pas à l’abri d’un deuxième arrêt et elle refusait de le voir mourir, sur ce vieux brancard. Elle injecta « la noxalone » afin de renverser les effets de l’overdose. Elle chuchota à l’oreille de Shayn « Ce n’est pas la fin ». Son état se stabilisait, mais sans l’insufflateur manuel, il ne pouvait respirer seul. Dix minutes étaient passées lorsque l’ambulance s’arrêta au point mort. Louana se permit d’indiquer au médecin les gestes qui avaient été réalisés. Celui-ci sans grande surprise, se mis à monter dans un vacarme épouvantable « Mais depuis quand êtes vous autorisez à vous promener avec de la Noxalone ? Vous auriez dû demander , appeler un médecin vous le savez ! Vous connaissez le protocole, vous risquez votre licence, votre carrière alors que vous êtes une sage-femme excellente ! Que croyez-vous qu’il va se passer maintenant ? »
Louana bouillonnait de l’intérieur. Son côté colérique pouvait ressortir d’un moment à un autre et quand elle surgissait, impossible de la calmer. Alors donc ? Elle aurait dû ne rien faire jusqu’à l’arrivée à l’hôpital ? Il aurait fallu le laisser mourir ? Apparemment. Les médecins d’aujourd’hui étaient connu pour leurs égos surdimensionnés. Comme si personne ne leur arrivait à la cheville. Celui-ci oubliait vite que derrière, elle avait eu quand même, cinq ans d’études.
Louana se sentit rejetée quand on lui annonça qu’elle ne participerait pas à la suite des soins de Shayn, elle devait attendre dans la salle d’attente. Elle le comprenait, elle n’était pas du même service et souvent, on catégorisé les personnes par leurs spécialités.
L’attente…l’interminable attente. Louana ne connaissait pas beaucoup « l’autre côté ». Elle ressentit une vague de souvenirs, oui elle avait attendu comme ça lorsque sa mère avait mis au monde ses sœurs. Ce mélange de joie et de destruction qu’elle avait ressentit ce jour-là était indescriptible. Elle vivait affreusement mal l’attente, elle ne voulait pas que Shayn y reste comme sa petite maman.
Dix-sept-heures et des brouettes, Louana commença à faire les cents-pas, elle ne cessa de se répéter qu’elle ne laisserait plus jamais aucune famille être dans l’attente comme ça, c’était presque à se demander comment les gens faisaient pour ne pas devenir fou. Une infirmière arriva enfin lui expliquer tout ce qui avait été fait. Louana reçut les informations en plein visage telle une claque. Shayn était resté trois minutes sans oxygène lors de son arrêt. Le pire était passé d’après les médecins, mais ils avaient dû l’intuber. Il ne s’était toujours pas réveillé, et personne n’avait aucune idée sur les séquelles ou non qu’il aurait. En attendant, il était dans le coma, et personne n’avait d’information à son sujet, ni sur sa famille. Louana annonça à l’infirmière qu’elle resterait près de lui et qu’elle veillerait sur cet homme jusqu’à son réveil. Elle reçut par la même occasion, quitte à bien finir sa journée, une mise à pied de 12 jours. Elle était dégoûtée mais elle le savait elle avait pris des risques et c’était son choix. Ne plus exercer son métier pendant douze jours serait un calvaire pour elle. Elle se sentait à la fois euphorique pour sa bonne action, et à la fois désemparée par les répercussions.

- Trois jours suivant-

Louana n’avait toujours pas beaucoup dormi ; voilà six jours que ses yeux tiraient pour les garder ouvert. Il n’y avait toujours pas d’amélioration sur l’état de Shayn, ce qui l’inquiéta fortement. Ellese sentait protectrice envers celui qu’elle avait « à moitié » sauvé. La brune était perplexe, son esprit tournait tel un manège dans sa tête. « Et même s’il se réveille, si il a des séquelles, il m’en voudra c’est certain… Je n’aurai plus de boulot, plus aucun sentiment de reconnaissance, je reviendrai au fond ce que j’ai été, ni plus, ni moins », elle était désespérée. Elle arriva à l’hôpital à la première heure, et toucha la main de Shayn, pour lui signifier qu’elle ne l’avait pas abandonné. Elle s’était installée sur le fauteuil à sa droite comme à son habitude depuis trois jours. Elle vadrouillait sur le portable quand elle sentit un mouvement de panique,. Le dispositif du respirateur avait volé d’un trait.
« Shayn… dit-elle d’un ton si calme, je sais que tu as peur, je sais que tu ne comprends pas tout ce qu’il se passe, mais tu seras vite au courant, je ne sais pas si tu te rappelles de moi, mais aie confiance, je viens de sonner les médecins pour qu’il puisse t’enlever la sonde d’intubation. Tu es en vie ». Louana lui adressa un sourire mélodieux et soulagée.

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Louana & ShaynQue se passait-il ? Telle était la question qui passait en boucle dans son esprit. Un terrible sentiment d'incompréhension, accompagné de peur l'habitait depuis qu'il avait ouvert les yeux. Son corps ne demandait qu'à céder à la panique tandis qu'un instinct, ancré profondément en lui, l'en empêchait. Il commencait tout de même à hyper-ventiler et les battements de son coeur à accélérer, faisant au passage réagir les alarmes des appareils de surveillance sur lesquels il était branché. Sa vision restait relativement floue malgré l'effort d'accoutumance de ses yeux à la lumière blanche. D'un geste brutal, il arracha l'une des voies veineuse de son bras, faisant à la suite jaillir le sang sur les draps restés jusque là, parfaitement propres. Il ne comprenait foutrement pas ce qu'il faisait là. Mais le pire dans tout cela, c'est qu'il ne se rappelait pas d'avant. Avant d'être arrivé dans ce lieu, dont il ignorait tout pour le moment, que s'était-il passé ? C'était le vide total. Un néant. Aucun souvenir, pas la moindre image, ni la moindre sensation, ni aucun son. Qui était-il ?
Une voix lui parvint aux oreilles, une femme, sans aucun doute. "Shayn..." entendit-il. Comme un écho, comme si la personne qui lui parlait n'était pas vraiment présente dans la pièce avec lui. Shayn ? Qui était Shayn ? Lui ?
"Tu es en vie." continua la voix. En vie ? A supposer alors qu'il était mort ? Non, cela n'avait aucun sens. Il entendait un mot sur deux que la femme prononcait; rien de très perceptible, rien de très concluant. Rien qui l'aidait à comprendre dans quelle m*rde il se trouvait. Il aurait voulu parler mais aucun son, aucun mot ne sortait de sa bouche. Comme si c'était paralysé, comme si quelque chose ne fonctionnait pas. Pourtant, il se l'entendait dire dans la tête. Il allait devenir fou, prisonnier de son esprit.
- Je comprends pas, qu'est ce qu'il se passe ? pensa-t-il demander alors que sa bouche restait désespérément fermée. Une larme coula sur sa joue, seule symbole de sa souffrance intérieure. Ses mains se crispèrent sur les barrières tandis qu'il cherchait une voie de sortie, une solution. C'était un rêve, un mauvais rêve. P*tain mais le rêve de qui d'ailleurs ? Il allait finir par paniquer, il le sentait. Trop de questions dans sa tête, aucune réponse et l'impossibilité de communiquer. Rien de tout cela n'allait. Alors qu'il était sur le point de céder au stress qui l'envahissait, un rideau noir passa devant ses yeux. Il s'évanouissait. Peut-être était-ce finalement la meilleure chose pour lui après tout. :copyright: CRIMSON DAY

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Le vacarme des machines. Du sang étalé dans tous les sens, notamment nappé sur les draps blancs de l’hôpital. C’était à se demander effectivement pourquoi la couleur choisie était le blanc vu tout ce que le corps humain pouvait rejeter de liquides biologiques. Louana commençait à se sentir impuissante, elle parlait à Shayn, elle essayait de le rassurer, mais cette fois, impossible de le calmer. Le jeune homme était en hyper-ventilation. L’inquiétude de la jeune femme se dessinait sur son visage, elle espérait entre autre, qu’il n’arriverait pas à la distinguer nettement. Elle regardait ses pupilles, afin de lui montrer que malgré tout, elle était là dans ce moment difficile. Une larme se dessinait sur la joue de Shayn, elle culpabilisa. S’il souffrait, c’était peut-être de sa faute, peut-être que son choix aurait été vraiment d’en finir, et Louana n’avait pas respecté ça. Elle se souvenait concrètement par la suite de comment, celle-ci se sentait quand elle fut hospitalisée par une tentative de suicide. Elle était d’une colère et d’une triste tellement immense, que personne ne pouvait réussir à l’apaiser, à la mettre en sécurité. Aujourd’hui, même si elle avait encore beaucoup de séquelles, la vie lui avait offert une nouvelle chance de l’apprécier et de vivre des moments merveilleux. Ce n’était pas tous les jours faciles, elle se battait contre elle-même. Il n’y avait rien de pire que de ne pas s’aimer. Elle voulait donner à ce jeune homme, cette fameuse chance de déguster chaque chose qu’on pouvait lui apporter. Il était terrifié, qu’il se laissa succombé dans l’inconscience. Peut-être valait-il mieux ça pour le moment. L’équipe médicale prit le relais, et Louana fût «jetée » de la chambre pendant les soins. Le manque de sommeil, le manque d’hydratation et de se nourrir , lui fit se poser un milliard de questions. Perdue, elle était. Ses images traumatiques refaisaient surface, elle ne s’était pas retrouvée avec elle-même depuis la nouvelle de la réapparition de son violeur. Elle avait mis tout ça de côté, elle était épuisée d’un coup, mentalement et physiquement. Elle s’était mis dans une empathie folle envers Shayn. Elle eu un haut-le-cœur, accompagné d’un vertige. Elle avait décidé de s’asseoir et de se concentrer sur sa respiration afin de calmer son anxiété face à la situation. L’impression de ne pas avoir fait le bien. Elle se sentait honteuse de faire subir cela à Shayn. Sa gorge était sèche, elle passa son temps à la racler. L’attente. Encore une longue attente, celle ou on lui donnerait des nouvelles. L’impuissance. C’était bien le pire dans tout ça, surtout en tant qu’elle-même soignante. Quelle place avait-elle dans tout ça ?
Le sommeil l’emporta dans cette salle d’attente sombre et froide.

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Louana & ShaynUn deuxième réveil dans une chambre vide et lugubre. C'était en tout cas, tout ce qu'inspirait les lieux au jeune homme. Il ne comprenait rien à ce qu'il se passait. Des médecins, des infirmières, tout un tas de blouses blanches qui passaient le voir, tentant de comprendre comment il en était arrivé là. Mais lui-même ne le savait pas. Il ne se souvenait de presque rien. Quelques détails lui étaient revenus mais cependant, il lui en manquait encore beaucoup. L'un des médecin, plus doux que les autres, plus patient également, resta avec lui afin de lui expliquer ce qu'il se passait.
- Ecoute moi. Tu souffres d'amnésie partielle. Tu ne te rappelle pas grand chose et je ne sais pas si le reste te reviendra. Je vais prévenir la jeune femme qui attend. Sache qu'elle est venue te voir chaque jour depuis ton arrivée. Elle t'as sauvé la vie. lui déclara l'homme en lui souriant. Il affichait un air désolé, comme s'il s'agissait de sa faute. Shayn n'était pas sûr de grand chose à ce stade mais cet homme n'avait rien à voir avec son état; c'était une certitude.
Il se demanda qui était cette femme dont il parlait. Elle lui avait sauvé la vie ? Mais que s'était-il passé ? Il n'avait aucun souvenir d'avant son arrivée à l'hôpital. Mais peut-être que cela expliquait aussi son état. Tout était à la limite du compréhensible pour lui. C'était compliqué; c'était comme se réveiller dans un cerveau vidé de tout son vécu. Il regarda son bracelet d'hospitalisation, il était seulement inscrit "Shayn". dessus. Cela devait être son prénom. Il s'appelait donc comme cela. Pourtant, aucun souvenir de son nom de famille, ni même de ses parents ou de ses proches. Quelques noms lui venaient en tête, sans qu'il sache pourquoi. C'était comme un immense puzzle qu'il devait construire pour comprendre qui il était.
Une femme entra, la même qu'il lui avait semblé voir lors de son précédent réveil. Ce devait être elle, la personne dont lui avait parlé le médecin. Celle à qui il devait la vie. Instinctivement, il lui tendit la main. Il n'avait aucune raison de se méfier d'elle, après tout, elle était apparemment la seule à être venue le voir.
- Merci. arriva-t-il difficilement à prononcer. Les mots lui revenaient, il retrouvait doucement la parole. Il lui fit un sourire; pour la première fois depuis son retour chez les vivants, il se sentait calme. Pas apaisé pour autant, certes mais il n'avait pas non plus envie de s'agiter.
- Etes-vous ma petite amie ? lui demanda-t-il sans vraiment réfléchir. La question était sortie toute seule et il n'avait pas envie de retenir ses mots. Maintenant qu'il pouvait communiquer, il n'allait pas s'en priver.:copyright: CRIMSON DAY

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Un homme la suivait. Elle était par terre en une fraction de seconde. Le souffle coupé, incapable de fuir, elle était au sol. Le jour était achevé, la nuit avait pris le relais. Un ricanement diabolique. Sentiment de désarroi, de panique. Elle le poussait. Une claque. Une résistance. Un étranglement. Une douleur. Ses mains entraient dans sa chair. Et le reste. À vif, à sang. Elle étouffait. Les images s’entremêlaient : Un miroir brisé. Plusieurs séjours à l’hôpital. Du sang sur les poignets. Fœtus. Dépression. Gestes sexués.

« Madame, excusez-moi tout va bien ? Vous criez depuis un petit moment dans votre sommeil » informa une jeune infirmière qui avait la main posée désormais, sur l’épaule de Louana.

Louana se sentait honteuse. Les cauchemars étaient bel et bien revenu, elle devaient affronter de nouveau ses flash-back. Ses yeux étaient humides, elle ne devait plus ressembler à grand-chose. Elle était vidée de toutes ses forces. La page avait du mal à se tourner. La douleur s’était abattue au moment où elle ne s’y attendait le moins. Fort heureusement, on lui annonça que Shayn avait repris connaissance et qu’elle pourrait enfin le voir. Elle prit deux minutes pour se rafraîchir. On aurait dit une morte-vivante, elle se trouvait si laide. Elle était persuadée qu’elle ferait plus peur au jeune homme plutôt que de lui faire du bien. Des frissons de panique lui parcouraient encore son corps, il fallait faire attention à ce qu’elle allait lui dire. Elle n’était plus à la place du soignant. Le plus important n’était pas de le blesser encore plus que ce qu’il ne l’était. Louana savait qu’elle était maladroite, surtout pour rencontrer des gens, des inconnus. Le docteur l’interpella avant d’entrer, et lui expliqua en résumé sa perte de mémoire. Louana grimaçait, elle était déçue. Elle ne trouva pas vraiment l’utilité de rester. Après tout Shayn pourrait éventuellement la mettre dehors. Le sentiment de rejet restait une blessure émotionnelle qui pouvait s’enraciner au fond de l’âme pour le reste de ses jours. Sentiment dangereux. Son air inquiet et attristé se lisait assez facile sur sa facette. Ce docteur, qu’elle ne connaissait pas, prit le temps pour la mettre en confiance. Il la valorisait, ça lui faisait du bien. C’était bien rare les personnes qui lui faisaient redonner ce sentiment d’apaisement. Oui, après tout, personne ne pouvait s’en sortir seul, Louana se devait d’être présente pour accompagner Shayn. Elle finit par frapper et entrer dans cette pièce qui semblait si sombre. Elle l’aperçut, fixé sur son bracelet. Elle fit le choix de ne dire aucun mot afin de ne pas l’effrayer et le couper dans ses pensées de façon brutale. La gestuelle, c’était leur premier lien, et ses yeux s’écarquillèrent au moment où Shayn fût le premier à tendre sa main. Elle ne s’y attendait pas du tout. Elle lui rendit la sienne, délicatement. Un « Merci » de sa part fut prononcé difficilement, affiché d’un sourire tout naturel. Louana ne put s’empêcher de lui rendre, malgré son mélange d’émotion. Elle sursauta et lui lâcha la main dès que Shayn, lui posa directement de façon franche la question « Êtes-vous ma petite amie ? ». Louana s’agita, mais préféra lui dire la vérité, elle ne voulait pas que celui-ci ressente un trop grand sentiment de solitude, mais elle ne pouvait pas mentir. Ils étaient passés d’un tutoiement à leurs premières rencontres, à désormais le vouvoiement, elle était déstabilisée.

« Non, je ne suis pas votre petite amie. J’espère que vous vous remettez bien. Je m’appelle Louana, dit-elle hésitante… On ne se connaît pas pour vous dire toute la vérité, mais si vous voulez que je parte n’hésitez pas à me le dire, je ne veux absolument pas être une source de stress pour vous » ; elle fit un mouvement de recul et abaissa ses yeux au sol, gênée.

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Louana & ShaynAvait-il dit quelque chose de mal ? Il l'ignorait. Il ne pouvait que le supposer, à en croire la réaction de la jeune femme. Il ne se souvenait pas d'elle, ni de son prénom, ni de quoi que ce soit qui aurait pu la concerner. Mais malgré tout cela, elle était présente avec lui et d'après le docteur, c'était grâce à elle qu'il était en vie.
Pourtant, il ne comprenait pas. Pourquoi s'était-elle éloignée d'un coup après lui avoir pris la main ? L'avait-il blessée par mégarde ? Tant de questions qui se rajoutaient à la liste déjà immense qu'il avait en tête.
Elle lui demanda s'il voulait qu'elle s'en aille, ce à quoi il répondit par la négative d'un signe de la tête. Elle n'était pas une source de stress, elle était une énigme parmis toutes celles qu'il avait déjà devant lui. Il ne demandait qu'à comprendre.
- Vous pouvez rester. Je ne... Me rappelle pas, c'est tout. lui dit-il en grimacant. Elle lui avait avoué qu'ils ne se connaissaient pas, alors pourquoi était-elle présente malgré tout ? Pourquoi elle et pas des membres de sa famille ? Cela n'avait aucun sens.
- Qu'est ce qu'il m'est arrivé ?lui demanda-t-il. Si Louana l'avait sauvé, alors elle devait sans doute savoir ce qu'il s'était passé. Peut-être que cela l'aiderait à retrouver la mémoire. Au pire des cas, il comprendrait enfin ce qu'il faisait dans un lit d'hôpital, perfusé et anciennement sous respirateur.
- Je vous prie de m'excuser si j'ai fais quelque chose de mal. déclara-t-il à la suite. :copyright: CRIMSON DAY

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- Vous pouvez rester. Je ne... Me rappelle pas, c'est tout. » grimaça le jeune homme. Elle se sentit ridicule, elle était consciente qu’elle avait effectué un geste brusque en lui lâchant la main sans prévenir. Elle était mauvaise pour ce genre de chose, sur les sujets portant sur l’amour. Et pourtant, elle n’avait pas de quoi se sentir bête, elle disait la vérité après tout. Il voulait qu’elle reste. Elle voulait rester. Si Shayn pouvait être apaisé un minimum par sa présence alors, ça lui convenait. Elle devait mettre de côté ses flashs, sans trop lui montrer quoi que ce soit de sa souffrance intérieure, il n’avait pas besoin de subir de mauvaises ondes. Elle sentit la chaleur lui parvenir à travers sa peau. Elle rougissait maintenant jusqu’aux oreilles, son côté réservé refaisait surface. Elle tourna la tête afin qu’il ne la dévisage pas. Il fallait qu’elle lutte, il fallait qu’elle se fasse confiance, elle pouvait lui apporter du bon. Le mieux était de s’asseoir, oui se mettre à sa hauteur pour une meilleure communication. Quelque chose chez lui se dégageait, comme si elle pouvait lui faire confiance, mais elle avait du mal à se l’autoriser.

« Qu'est ce qu'il m'est arrivé ? » demanda-t-il. Il surenchérit en lui affirmant « Je vous prie de m'excuser si j'ai fais quelque chose de mal. »

Elle lui annonça difficilement : « Pardonnez-moi, je.. on ne se connaît pas… Je n’ai pas l’habitude à ce qu’on me tende la main, mais ce n’est en aucun cas contre vous ». Elle fixa ses pupilles avec un air désolé. L’annonce venant d’une autre personne autre que le médecin, lui provoquerait peut-être un traumatisme en plus, mais Shayn avait besoin d’information, elle le comprenait.

« Je passais par là, par hasard. » Elle déglutit, et reprit une grande inspiration avant de lui annoncer « Vous étiez par terre, gisant sous la pluie. Vous étiez calme, un peu trop à vrai dire. Vous n’alliez pas bien, je ne rentrerai pas dans les détails, mais je vous ai mis en PLS et je suis resté près de vous jusqu’à l’arrivée des secours. Vous aviez l’air d’être dans une grande souffrance psychologique mais vous ne m’avez pas fait part du pourquoi ni du comment. Au vu de vos symptômes, j’ai compris que vous aviez fait une overdose, aux médicaments. Vous me réclamiez souvent dans l’ambulance jusqu’au moment où votre cœur s’est arrêté, je vous ai massé jusqu’à vous faire revenir à mon grand soulagement. Je suis restée à votre chevet jusqu’à votre réveil, vous étiez dans le coma depuis trois jours ».

« J’espère que vous n’êtes pas trop effrayé, mais sachez que je suis là pour quoique se soit, et notamment pour vous aider à recouvrir votre mémoire. La problématique est que je ne connais rien de vous » afficha-t-elle profondément attristé.

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Son annonce lui fit l'effet d'une claque.
Alors comme ça, il était si désespéré qu'il avait voulu en finir ? Des médicaments, une overdose, tout ça pour quoi ? Pour se retrouver allongé en plein milieu de la rue, dans une flaque d'eau, à attendre de mourir. Ca n'avait aucun sens. Mais c'était la vérité. Il ne s'en souvenait pas pour autant et c'était plus que frustrant. Il n'avait pas la sensation d'être mal dans son corps ou dans sa vie. Du moins, c'était vite dit, étant donné qu'il ne se souvenait pas.
Quant à elle, à Louana, elle semblait elle aussi poursuivie par des problèmes. Ne pas avoir l'habitude qu'on lui tende la main ? Que lui était-il arrivé pour qu'elle pense et réagisse de la sorte ?
Tout cela le perturbait. Il se rallongea au fond du lit et poussa un gros soupir. Ainsi, il avait perdu la mémoire par sa propre faute, en voulant en terminer. Ainsi, il n'avait pas réussi à vouloir profiter de la vie. C'était complètement dingue. Qui était-il avant pour voir les choses de cette manière ? Qu'avait-il vécu, enduré ? Il devait y avoir une explication.

Louana était prête à l'aider, même en ne le connaissant pas plus que cela. Cette jeune femme était remplie de bonté et de bienveillance, il le sentait. Là ou d'autres seraient partis, elle était restée. Il lui devait déjà la vie et il allait lui devoir peut-être aussi la mémoire.
- Merci de m'avoir dit la vérité. Ca n'a pas de prix. lui déclara-t-il en lui souriant.
Recouvrerait-il seulement un jour la mémoire ? Il n'en savait rien. Il était une boîte vide, dépourvue de contenu. La seule chose qu'il ressentait était que son histoire était étroitement liée au feu et à la vie en elle-même. Il ignorait cependant pourquoi.
- J'aimerai qu'on sorte. Je vais bien, physiquement. Et rester ici ne m'aide pas. lui dit-il en s'asseyant au bord du lit. La médecine ne pouvait rien pour lui, elle allait devoir le laisser sortir. Il n'y avait que dehors qu'il pourrait comprendre, chercher des pistes. Même sans savoir par où commencer. Il était décidé à parcourir la ville, chacun de ces recoins, afin de savoir d'où il venait.
- Même si on ne se connaissait pas; et encore moins maintenant que je ne sais même plus qui je suis... Puis-je vous tutoyer ? lui demanda-t-il. Se sentir proche d'elle lui ferait le plus grand bien et cela commençait par la parole.

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Louana était nerveuse. Shayn désirait désormais sortir de l’hôpital, elle ne savait pas si cela était une bonne idée. Au moins, elle était rassurée, son faciès affichait un grand sourire dans sa direction. C’était profond, tendre. Peut-être voulait-il masquer sa souffrance ? Garder sa fierté et ne pas craquer ? Elle ne savait pas. C’était toujours difficile de suivre les hommes et leurs manières de penser. Mais ce qu’elle était sur c’était que sa perte de mémoire le perturbait au plus au point. Ça se comprenait après tout. Ne plus avoir le moindre souvenir, et ne plus savoir qui l’on est réellement, ressentir ce néant devait être terrible, mais d’une certaine manière, elle l’enviait pour les mauvais souvenirs. Sa fine bouche s’entrouvrit pour lui demander : « Même si on ne se connaissait pas ; et encore moins maintenant que je ne sais même plus qui je suis... Puis-je vous tutoyer ? »
Louana pencha sa tête de haut en bas pour lui donner sa réponse positive. Ça serait moins compliqué, moins « bizarre », l’atmosphère se détendrait un peu plus, elle l’espérait. Elle voulait être rassurée, et se redressa, un peu trop vite d’ailleurs ; un vertige lui tourna la tête. Elle ressentit cette sensation de creux au l’estomac. Ce qui lui amena à proposer à Shayn, d’aller faire un tour manger quelque part. Elle devait se ressaisir, il fallait qu’elle se sente mieux,car elle en avait oublié de dormir, de se nourrir et de prendre soin d’elle pendant ces trois jours. Prendre soin de soi pour mieux prendre soin des autres. Louana voulait s’imprégner des bonnes choses et lui transmettre, à lui. Le médecin accorda la sortie, tout en étant perplexe, mais Louana avait poussé les choses. Elle se portait garante, c’était la condition du médecin. Elle ne se sentait pas forcée, c’était toute sa bonté qui ressortait. Elle décida d’annoncer la bonne nouvelle à Shayn , tout en espérant qu’il ne l’a repousserai pas. Elle gesticulait dans tous les sens, mais dès que son regard croisa celui de Shayn, elle était apaisée, elle ne l’expliquait pas.

« J’ai fais pression au médecin, et tu peux enfin partir d’ici Shayn. J’espère que tu ne seras pas trop dégoûté si je t’annonce que tu ne pourras pas être seul durant les prochaines vingt-quatre heures. Étant donné que tu ne te souviens de personne dans ton entourage, alors je te propose de venir dormir chez moi, mais rassure toi j’ai deux chambres, mais bien évidemment, tu as le droit de refuser » dit-elle en rigolant.

Elle passa sa main dans ses cheveux tout en se rendant compte de ce qu’elle avait réussi à sortir de sa bouche. Inviter un homme chez elle. Merde, le flot d’émotion surgissait de nouveau, il ne fallait pas céder à la panique ou s’imaginer le pire. « Il ne t’arrivera rien, il ne t’arrivera rien » se répéta-t-elle en boucle dans son esprit.

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Il pouvait désormais la tutoyer. Voilà sans doute quelque chose qui allait les rapprocher, même un tout petit peu. Elle était pour l'instant le seul lien qu'il avait, les autres personnes ayant été effacées de sa mémoire. C'était un sentiment étrange que de ne pouvoir penser à personne d'autre que soi-même ou à elle, cette jeune femme qui avait décidé de l'aider. Elle aurait très bien pu sortir de l'hôpital après l'avoir amené, mais non, elle était restée. Il lui devait énormément, il en était conscient. A commencer par le fait d'être vivant. C'était comme s'il avait une dette gravée au fer rouge sur le coeur.

Elle lui annonça qu'il allait pouvoir sortir, non sans surveillance, puisqu'il devrait dormir chez elle. C'était étrange, de devoir aller chez une femme comme ça. Il ne se souvenait pas avoir été amoureux, avoir vécu ou avoir partagé des moments avec quelqu'un du sexe opposé. C'était perturbant et frustrant.
Sa précision quant à la présence d'un deuxième lit le fit sourire. Bien sûr qu'il n'allait pas dormir avec elle ! Voyons, qui aurait pu penser le contraire ?
Louana sembla soudain gênée, prenant un peu de recul suite à son annonce. Il n'avait aucune idée de ce qu'il se passait et il n'eut pas le temps de lui poser la question. Elle avait géré son émotion, visiblement. Quelque chose qui devait être ancré chez elle, sans doute.

- Je vous remercie. J'aurai même dormi sur le canapé s'il avait fallu. lui dit-il, sans réellement savoir si son trouble pouvait être lié à ça.

**

Il était dehors, enfin. L'air frais lui caressa le visage pour la première fois depuis plus d'une semaine. Il soupira et observa la ville autour de lui. C'était immense, c'était beau et bruyant. Une sirène hurla au loin, signalant la présence d'une unité sur la route. Il en était convaincu, son destin, sa vie, tout deux étaient liés à ces fameuses sirènes. Il ignorait cependant encore pourquoi.
- Je crois que je n'ai pas d'autre choix que de te suivre. déclara-t-il en lui souriant. C'était vrai, à présent, son unique option était de suivre la jeune femme dans les rues New-Yorkaises. Il était temps de tout mettre en oeuvre pour retrouver ses souvenirs.
- Et toi, d'où viens-tu ? lui demanda-t-il, subitement. Il venait de réaliser qu'il ne s'était jamais posé la question jusque là. Il ne connaissait presque rien d'elle et il était temps que cela change. Après tout, lui ne pouvait pas raconter grand chose. Alors qu'elle, était capable de lui conter son histoire.

Il la regardait, lui souriant de nouveau. Il se sentait mieux. Pas tout à fait apaisé mais plus serein quand même. Et elle y était pour quelque chose. Sans elle, il serait mort sans doute, ou seul, dans une chambre blanche et grise et d'hôpital.
Peu importait ce qu'il se passerait à l'avenir, elle resterait pour lui toujours le premier lien de sa seconde vie; de sa renaissance.

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Elle pouvait sentir la fraîcheur de cette fin de journée. Elle avait enfilé son gilet en laine et pu apprécier la légère brise qui enveloppait ses longs cheveux bruns. Ces trois jours avaient été intenses émotionnellement, alors Louana profita de ce petit silence dès la sortie de l’hôpital pour observer ce qui l’entourait avec détail. Profiter des petites choses, lui faisaient briller les yeux. Elle s’était laissé un peu aller, elle s’en rendait compte, et ce n’était pas comme ça qu’elle aurait voulu que Shayn l’observe, elle aurait voulu dégager un peu plus de beauté. Mais au final, elle l’avait vu au plus bas, et lui, pouvait la voir dans son plus grand naturel, sans artifice. Elle pouvait observer les voitures dévalées dans tous les sens ; les lumières jaillissant des grands immeubles ; la diversité des nationalités qu’on pouvait entendre dans n’importe quelles rues où ils pouvaient être, une ville sans limite. Le vacarme des sirènes retentissait, et par réflexe habituel, Louana tourna la tête en direction de celle-ci. Elle jeta un coup d’œil vers Shayn, qui paraissait perdu ou intrigué, elle n’aurait pas su dire. Un rappel de souvenir ? C’était bien trop tôt pour le savoir.
Elle fut littéralement surprise quand le jeune homme sorti de son silence pour lui demander « Et toi, d'où viens-tu ? » . Louana pensait que celui-ci serait centré sur lui-même étant donné la situation, mais visiblement elle se trompait, il voulait être à son écoute, s’intéresser à elle, ou bien… Faire preuve de politesse, lui souffla sa voix de méfiance intérieure. Le sourire de Shayn s’adressait au sien, et elle eu presque l’envie de le prendre dans ses bras pour le remercier de cette marque affectueuse. Elle ne devait pas, et elle s’avoua vaincue par sa timidité. Personne hors de son travail, lui affichait un sourire aussi sincère en tant normal. Il la prendrait également pour une débile de réagir de cette façon. Raconter sa vie était un effort incommensurable, mais elle se l’était promis, et également à son psy, qu’elle ferait des efforts.

« Je viens de France, plus précisément à Bordeaux, la ville du vin rouge » s’esclaffa-t-elle. « Ça te dit quelque chose ? »

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Louana Gray était donc française. Il ne connaissait pas grand chose à la France, mis à part la capitale de ce pays, à savoir Paris. Il en avait entendu des choses sur cette ville qui possédait la-dite plus belle avenue du monde.
En revanche, le nom de Bordeaux lui était inconnu. Quant à la question du vin rouge, bizarrement, il n'avait pas le souvenir d'en avoir bu, seulement la sensation qu'il n'aimait pas ça. Cela n'évoquait rien de bon dans son esprit, aussi lâcha-t-il une petite grimace en réaction à ce mot.

- Je ne connais pas ou du moins, je ne crois pas connaitre cette ville. Et je ne pense pas aimer le vin rouge, ça ne m'évoque rien de bon. lui répondit-il, un peu gêné. Il était content d'en apprendre plus sur elle, sa sauveuse. Il avait une dette envers elle, gravée au fer rouge sur son coeur et dans son esprit.
Il n'oublierait sans doute jamais ce qu'il venait de se passer ces derniers jours et le visage de Louana resterait celui qui reviendrait sans cesse.

- Viens, allons manger. lui dit-il en l'invitant à le suivre. C'était étrange. Il n'avait pas grand souvenir de la ville, ne se rappelait pas des adresses auxquelles il aurait pu se rendre et pourtant, après plusieurs centaines de mètres sans s'arrêter et alors qu'il balayait la ville des yeux, ses pas se stoppèrent devant ce qui semblait être un pub Irlandais. Ou un petit restaurant-brasserie, allez savoir. Shayn entra, invitant la jeune femme à le suivre à l'intérieur. Une petite musique à thème passait et mettait l'ambiance dans ce lieu pour le moins original. Un leprechaun était d'ailleurs peint au dessus du bar, habillé de son costume vert; il semblait observer la salle.

- J'espère que ce lieu te plaira. lui déclara-t-il en souriant. C'était clairement atypique comme endroit alors cela aurait tout aussi bien pu la mettre mal à l'aise.

- Que fais-tu dans la vie, Louana Gray ? Il est vrai que je ne sais rien de toi. Que viens donc faire une française si loin de son pays natal ? lui demanda-t-il, curieux de connaître les raisons de sa venue ici. Bien qu'elle ai l'air réservé, elle avait l'air intéressante et Shayn avait bien l'intention d'apprendre à mieux la connaître.
Son regard dans le sien, il sentit pour la première fois son corps se détendre, comme s'il parvenait finalement à s'apaiser. Un sourire se dessina sur son visage tandis qu'il s'interrogeait sur le vécu de Louana.

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« Je ne connais pas ou du moins, je ne crois pas connaître cette ville. Et je ne pense pas aimer le vin rouge, ça ne m’évoque rien de bon » lui avait-il répondu. Elle ne s’étonna pas de sa réaction vis-à-vis de Bordeaux. Les étrangers se référaient beaucoup plus à la capitale plutôt que les autres grandes villes de la France. Son visage affichait une grimace, Louana lui évoqua qu’elle n’aimait pas ça également. Elle se rappela des visages effarés de la population de Bordeaux quand elle refusait un simple verre de cette boisson infâme. C’était pathétique.
Shayn invita Louana à le suivre pour aller consommer un petit quelque chose afin de reprendre des forces, et par la même occasion, d’apprendre à véritablement se connaître. Shayn emboîtait le pas bien devant elle. Elle fut très surprise de voir que celui-ci avait pris cette initiative et surtout, s’arrêter brusquement devant un Pub Irlandais. Connaissait-il cette brasserie ? Louana espérait que des Flash lui reviendraient. Les bras croisés, elle avança en direction de l’entrée ou la couleur principale reflétait un vert éclatant. Il fallait se l’avouer, elle n’avait jamais eu l’occasion d’entrer dans un endroit aussi atypique. La vue américaine prenait une autre tournure dans ce restaurant; son imagination lui amena à se retrouver quelques minutes en Irlande, pays dans lequel elle n’avait jamais mis les pieds. L’ambiance se montrait chaleureuse, pas de gros lourds à l’horizon, elle était ravie et exprima à Shayn :

« Merci pour ce choix, ça me plaît beaucoup » lui dit-elle les yeux plongés dans ses yeux noisette. « Mais ne compte pas sur moi pour prendre de la bière » rigola-t-elle.

Elle se dirigea en direction d’un fauteuil, en face de Shayn. Son regard dévia vers ses fameux objets kitch typiquement Irlandais avec ces ancres de bateau qui ornaient les murs, ou bien même des roues de charrettes. Ce qu’elle aimait le plus c’étaient tous ces objets vintages, les matériaux, ce bois naturel qui l’inspirait, qui lui donnait envie de créer de nouvelles décorations dans son appartement. Louana sortit de ses pensées brutalement lorsque le jeune homme s’adressa de nouveau à elle.

« Que fais-tu dans la vie, Louana Gray ? Il est vrai que je ne sais rien de toi. Que viens donc faire une française si loin de son pays natal ? »

Comment raconter sa vie personnelle à un inconnu ? Elle était nerveuse, car au fond, tout devait être centré sur lui, mais ça ne se passait pas ainsi. Évidemment, quel sujet aborder à quelqu’un qui avait perdu la mémoire ? C’était complexe, mais elle devait se lancer. Shayn lui affichait un sourire rassurant, et automatiquement, c’était bien la première fois qu’un homme arrivait à l’apaiser un petit peu. Elle avait l’impression de lire dans le regard de Shayn, et vice-versa, que celui-ci avait l’air de la comprendre par le regard sans même la connaître. Elle retrouvait ce lien, ce ressenti quand elle l’avait vu à terre, son regard plongé dans le sien, ce feeling naturel qu’elle n’expliquait pas, qui l’a déstabilisait.

« Shayn au nom inconnu, il est vrai que tu ne connais rien de moi, mais j’espère bien pouvoir tirer quelques souvenirs de ta part afin que tu puisses me raconter quelques détails sur toi. Mais à vrai dire, j’ai une vie tout simplement , et tristement banale. » Elle abaissa son regard en direction de ses mains qui s’entrelaçaient sans s’arrêter signe de son stress.
« Je n’ai jamais quitté la France jusqu’à récemment. À vrai dire, j’avais besoin de renouveau dans ma vie. Je pense qu’on a tous des passades comme ça à un moment donné, mais je voulais me challenger, chose très difficile pour moi, mais je m’habitue bien ici » dit-elle avec un sourire en coin.

Une pensée noire la rattrapa. L’image à la télévision de son «monstre » revenu ici à New-York. Serait-elle vraiment heureuse finalement dans cette ville ? Elle respirait à peine de nouveau qu’elle se sentait déjà étouffée, avec une envie irrépressible de crier, de pleurer, de vomir de dégoût. Louana avait l’espoir que Shayn ne remarque pas son faciès perturbé. Elle détourna sa pensée pour lui demander : « Penses-tu être de New-York depuis toujours Shayn ? »

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