Ce voyage à parcourir Paris, New York pour entamer une nouvelle vie a été particulièrement épuisant. Ça commence à me saouler et à m'engourdir le cul à force de rester assis pendant des heures. D'après l'hôtesse de l'air, on devait arriver dans cinq minutes. J'avais hâte de pouvoir poser mes pieds sur le sol américain et de faire une surprise à mon frère en l'appelant pour venir me chercher. J'admire la descente depuis mon hublot. La ville est définitivement plus belle la nuit. L'obscurité faisait ressortir les lumières des bâtiments. – enfin c'est ce que je voyais sur un ordinateur lorsque j'étais encore au collège. –

L'avion atterrit sur le tarmac et le stress montait de plus en plus. Ça m’angoisse de croiser les douaniers. On sait tous qu’ils sont blindés de préjuger, alors un petit français d’origine algérienne qui débarque pour vivre le rêve américain, c’est un peu bizarre pour eux. Je me dis qu’il y aura très certainement une foule de policier pour accueillir les étrangers comme moi puis très certaine un petit cortège pour nous escorter dans un bureau pour nous interroger sur la raison de notre visite. C’est une belle bande de chacal. Je déteste ces flicailles quand ils fouinaient dans tous les recoins pour trouver le criminel parfait pour pouvoir monter en grade. Mais je garde espoir, si mon frère peut vivre dans cette ville, c’est qu’il n’y a pas de problème à avoir.

J'attends patiemment mes bagages pour pouvoir partir tranquillement et pour pouvoir envoyer un message sur messenger à Mohamed histoire qu'il vienne me chercher. Je n'ai pas l'intention de prendre le taxi, je veux éviter tout contact avec les personnes qui parlent anglais. Je ne vais pas engager une conversation avec un chauffeur puis pour savoir dire une adresse d'une rue, vaux mieux que je laisse tomber. Une fois mes valises récupérer, je me fais contrôler puis me laisser partir rejoindre l'entrée de l'aéroport. Je regarde les alentours avant de me dire que New-York, c'est la même ville que Paris mais avec des américains – et encore, je n'ai pas vu le reste- je prends mon téléphone, j'envoie un message à Mohamed sur messenger pour lui dire que je suis arrivé dans sa nouvelle ville. Faut bien qu'il vienne me chercher et qu'il vienne m'accueillir tel un prince. (prince du bled) Je sens que l'attente va être longue alors autant s'asseoir par terre avec les bagages à mes côtés. Le premier qui me donne de l'argent parce qu'il croit que je suis un sans-abri, je l'explose.

@mohamed sayah

Il est en met du temps à venir me chercher. J'avais le temps de visiter New York voir même de braquer la maison blanche (elle est bien à New York hein ?) Il y a tellement de ville dans ce pays qu'on ne sait même pas où se donner de la tête. Je sais qu'à Los Angeles, il y a des meufs en string alors j'espère que ça va se trimbaler comme ça dans les rues. J'ai vraiment l'impression d'être à Paris, les gens n'ont pas le temps, ils tracent en marchant à croire qu'ils sont recherchés par la police. C'est dans ces moments-là que je doute de mon frère. Est-ce que ce con est vraiment aux Etats-Unis ? Ne me dîtes pas qu'il a menti sinon les clichés sur les algériens font faire ravage dans mon cerveau. Puis je ne peux pas faire marcher arrière pour retourner en France.

J'ai hâte de découvrir son petit univers, j'ai hâte de pouvoir retrouver cette petite racaille et voir son évolution. Je me souviens des personnes que j'avais massacré lorsqu'ils disaient de la merde sur lui. Je n'aurais pas laissé des petites sous-merdes dire du mal et des fausses informations sur mon frère. Les gars de la cité sont parfois tarés du cerveau et raconte n'importe quoi pour avoir de l'importance, mais une fois que les poings percutent leurs petites gueules, ils ne disent plus rien. J'espère seulement que la loi du plus fort ne domine pas ce pays sinon je suis mal barré. Je suis venu ici pour éviter de refaire les choix que j'ai pu faire à Saint Denis. Je vais en profiter pour travailler honnêtement et faire ma petite vie tranquille.

Le voilà qu’il me cherche en secouant son billet d’un dollar avant de le laisser tomber sur mes jambes. « Wesh respecte ton frère, je t’allume sinon. T’as cru que j’allais t’attendre debout ou quoi ? » Sympathique les retrouvailles. Il aurait pu se jeter sur moi, mais monsieur, c’est un bad boy qui ne montre pas sa joie de voir son petit-frère. « Détends ton string, c’est toi le roumain wallah. » C’est un fou ce mec-là, il a cru qu’il allait pouvoir me taquiner longtemps lui ou quoi ? Je vais le marave. Bon après je ne vais pas trop faire le malin, il doit sans doute connaître des gangsters plus féroces que ceux que j’ai pu côtoyer à la cité.

Je lève et j’essuie le derrière de mon pantalon histoire qu’il n’y ai pas de poussière. C’est toujours un plaisir de voir Mohamed, il m’a quand même manqué ce con. Mais ça fait quand même bizarre de le voir ici. J’espère qu’il va m’aider à trouver mes marques et me conseiller sur ce que je dois faire pour être droit - chose que n’est pas facile avec une tête brûlée comme moi – « Terroriste moi ? Tu veux que je t’explose maintenant ? Comparé à l’autre, j’ai pas besoin d’avion pour faire un attentat. » C’est super touchant pour des retrouvailles entre frère. « On fait quoi ? Tu m’emmènes à ton appart ? Je vais pas garder les valises avec moi si tu décides de me faire visiter ta ville. » Je ne sais pas ce qu’il a prévu alors autant qu’il annonce les choses comme il se doit. Après tout, c’est le grand-frère.

Il est trop à l'aise pour pouvoir me parler comme ça, il a cru que j'étais la daronne à sa future meuf ou ça se passe comment ? Son langage n'est même pas crédible à cause de sa tête de victime et de gamin, mais bon, je ne peux évidemment pas le détester. Heureusement que c'est mon frère qui me parle parce que si c'était une autre personne, elle aurait fini à l'intérieur d'une boite en bois. « Tu sais que c'est à la mode la barbe en ce moment ? si je pouvais me faire les cheveux longs comme les rappeurs français, je te jure que je le ferai wallah. » N'empêche, je suis enfin heureux de pouvoir le revoir bien que je ne pourrais pas voir ma mère et ma petite sœur pendant un petit bout de temps.

Le mec se met bien dans ce pays, il a une bonne qui fait le ménage. J’espère au moins qu’il a pu la tambouriner comme il fallait -mais faut qu’il évite d’être le DSK rebeu des Etats-Unis parce que j’aurais honte d’avoir un frère qui s’affiche- Je l’écoute attentivement me dire qu’il n’était pas prêt à m’accueillir, qu’il ne voulait pas que j’arrive dans un taudis. Mais qu’est-ce qu’il me raconte ? Taudis ou pas, qu’est-ce que je m’en fiche. J’ai vécu dans une citée, dans le taudis que les français ne supportent plus à cause des gens qui font des conneries. « Alors tu sais très bien qu’on ne prévient jamais quand on doit venir habiter à côté de notre famille ou de venir rendre visite, ça ne s’est jamais fait. On aime les surprises donc maintenant que je suis là, on a qu’à patienter comme deux grands garçons que ta bonne fasse le ménage, monsieur je suis riche. » lançai-je en venant lui prendre son paquet pour lui gratter une clope. Dans tous les cas, je pense que je vais me plaire dans ce pays. Ce nouveau départ va me faire énormément de bien. Je lui rends son paquet avant de sourire sur ce qu’il venait de dire. « La même frérot, c’est toujours un plaisir de te voir. » On n’est pas trop démonstratif chez nous, c’est fou.

Je n'ai pas eu le temps le remercier de m'aider à prendre un sac qu'il me dit de venir avec lui. On allait prendre un Uber ? Wesh, j'ai jamais pris ça de ma vie, j'espère qu'ils roulent bien aux Etats-Unis sinon je rentre direct à Paname. C'est mieux de rouler en motocross mais avec des valises ça va être un peu tendu tu vois le genre ? « Maman et Rabia ? Elles vont bien, je pense qu'elles étaient tristes de savoir que je partais de la cité. En tout cas, je sais que tu leurs manques énormément. T'as jamais songé à les faire ramener ici ? » Je pense qu'elles auraient voulu être près de Mohamed surtout Maman, pour toujours avoir un œil sur nous. On est des bébés à ses yeux. « Après, je te cache rien, j'ai fait des conneries en France, je me suis jamais fait choppé et je suis ici pour éviter de faire les mauvais choix que j'ai pu faire à Saint-Denis. J'ai cassé la gueule à certaines personnes qui parlaient trop sur toi. Ça balançait des rumeurs, je te jure quand ils m'ont vu arriver, ils ont commencé à prier en je sais pas quelle langue. » Dis-je en suivant Mohamed. « J'ai plus envie d'entendre parler de ça de toute façon, je veux pas savoir si c'est vrai ou non. Je veux juste vivre tranquillement maintenant. » Tu m'étonnes, j'ai pas envie de parler des sujets qui fâchent. « Tu racontes quoi toi ? Me dit pas que t'as ouvert une épicerie parce que tu serais le pire cliché du monde. »