C’est la fête dans les coulisses. Tout le monde s’agite autour de Mohamed, oubliant presque Maria, Julian et Tino, qui rasent les murs pour rejoindre leurs loges, afin d’éviter d’être bousculé. Ils sont invités à une fête après, l’after, avec une fontaine de champagne, en l’honneur de Mohamed. Mais si Tino sourit et remercie l’invitation, promettant d’y faire un tour, il sait bien qu’il a un tout autre programme. Il est heureux pour Mohamed c’est vrai, mais encore plus pour lui-même. Il est sorti de ce jeu, enfin. Dobby est libre, c’est con, mais c’est comme ça qu’il se voit à cet instant précis, alors qu’il rassemble ses affaires dans son sac. Il a promis à Nina, au début du prime, qu’il viendrait la voir après l’émission. Et elle lui a presque supplié de le faire, qu’importe soit l’heure. Fermant la fermeture du sac, il jette un œil à sa montre. Presque minuit. Encore une heure descente pour Nina. Il hésite à lui envoyer un message, pour la prévenir qu’il est en route, mais il s’en abstient. Elle l’attend, de toute façon.  

Il n’a pas sa voiture ici, restée chez Alex. Faudra qu’il aille la chercher d’ailleurs. Si elle ne l’a pas faite emmener à la fourrière, après tout ça. Entre leur rupture et le fait qu’il ait découvert qui elle est vraiment, il sait qu’il va devoir se tenir sur ses gardes. Que ses sbires vont lui tomber dessus à un moment ou l’autre. Ou bien qu’elle fera le travail elle-même. Du moins tentera. Parce que le gars qui mettra Tino Ramirez à terre n’est pas encore né. Même sans insigne officielle, il n’en reste pas moins le même soldat. Le même agent. Avec la même rage.  

En attendant, sa pauvre rage de perdant elle s’engouffre dans le métro. Casquette sur la tête, il se cache encore, la notoriété du jeu mettra certainement un peu de temps à redescendre. Bonne ou mauvaise d’ailleurs. Parce que si certains le regardent curieusement et avec le sourire, d’autres ne le jugent qu’aux rumeurs stupides qui coulent sur l’internet. La dernière étant certainement des pires. Si elle a amusé Elizabeth, lui, elle lui a donné le dernier coup de massue. Nina n’a clairement pas apprécié, et comme elle ne sait plus si elle peut lui faire confiance...

Quelques arrêts plus tard, il arrive au quartier de Nina. Il sort des souterrains, mains dans les poches de sa veste. Il fait nuit, il sait que personne ne viendra l’emmerder. Il traverse la rue, sac sur l’épaule, puis arrive enfin devant l’appartement de la jeune femme. Il lève les yeux vers le haut, vérifiant qu’il y a encore de la lumière à l’une de ses fenêtres. Ce qui est le cas. Alors il s’avance puis s’arrête devant l’interphone. Il s’apprête à appuyer, mais un gars sort justement du hall, et lui tient la porte. Tino entre alors, le remerciant, tout en le suivant des yeux alors que le type disparaît dans la pénombre. Complètement con celui-là. Il fait visiblement entrer n’importe qui dans la résidence. Bon, le voilà reparti, il grimpe deux à deux les marches, puis enfin, il s’arrête devant cette porte qu’il a manqué de défoncer la semaine précédente. Il toque doucement, pour ne faire aucun bruit. Il ne veut pas réveiller les voisins, il est déjà presque une heure du matin. Il attend sagement devant la porte, le doigt encore collé à celle-ci, prêt à retoquer si jamais Nina ne l’a pas entendu. Il suffit qu’elle ait encore ses satanés écouteurs sur les oreilles...

Là derrière cette porte, il se sent étrangement angoissé. Mal à l’aise. Incertain. Inquiet aussi. Il a peur de faire quelque chose qu’il regrettera. Peur qu’elle lui échappe. Peur qu’elle le repousse. Ou que lui le fasse. Peur de passer à côté de quelque chose de merveilleux, ou au contraire, de se faire mal, encore et encore. Comme un couteau qu’on enfonce un peu plus en plein cœur. Qu’est-ce qu’elle attend de lui ce soir ? Il n’est pas bien dans ses baskets. Et ça n’a rien à voir avec sa défaite. Non, ça, c’est déjà loin de lui. Très loin. Demain il s’inquiétera surtout de se trouver un job. Ce soir, il veut juste reprendre sa vie en main.

Une soirée collée à ses écrans, la TV allumée sur le prime de la finale de The Artist, émission dans laquelle Tino était finaliste et le téléphone dans les mains depuis les nouvelles rumeurs de l’instagram de New York. On prêtait une nouvelle aventure à Ramirez. A bout de nerfs après ces deux semaines d’attente, sans savoir ce qu’il adviendrait d’eux deux, elle avait commenté cette rumeur, telle une gamine et, surtout, elle lui avait envoyé un message à lui. Elle n’arrivait plus à savoir ce qu’elle devait croire, elle avait besoin de le voir, de le retrouver et Rudy, sa cousine, ne l’aidait pas à y voir clair non plus.

Elle s’en voulait autant qu’elle doutait. Ses émotions ne cessaient de faire les montagnes russes et ils avaient fini par convenir que Tino vienne chez elle après l’émission. Etait-elle trop naïve ou avait-elle raison de croire en leur histoire ? Dans tous les cas, elle en avait marre de ces SMS, elle avait besoin de le voir et de lui parler, vraiment. Face à lui, elle saurait s’il était sincère, elle en était persuadée.

Plus le temps passait et plus les émotions se mélangeaient : l’appréhension, l’inquiétude, l’excitation de le revoir et surtout l’interrogation sur leur avenir. Tino avait toujours été plus réticent dans leur histoire, Nina, elle était sûre de ce qu’elle voulait, elle l’avait toujours su. Peut-être était-ce la jeunesse mais elle était sûre que Tino n’était pas l’homme qu’on décrivait sur les réseaux, elle le connaissait, elle voulait croire qu’il était l’homme qu’elle avait rencontré un an auparavant. Il était perdu autant qu’elle l’avait été mais, elle, elle n’avait jamais rêvé de la vie de couple, jamais avant lui alors, quand leur relation s’était arrêtée, elle n’avait jamais songé à répéter l’expérience, préférant les multiplier plutôt. Etait-ce mieux ? Pas vraiment. L’image qu’on avait d’elle se rapprochait de plus en plus des filles faciles ou totalement désespérée.

L’émission se termina, Tino n’avait pas gagné et elle ne savait même pas si cela comptait pour lui, elle n’aurait jamais parié sur le fait qu’il veuille participer à ce genre de concours. Etait-ce un signe du fait qu’il n’était peut-être pas l’homme qu’elle pensait ? Elle chassa rapidement cette idée saugrenue de son esprit. Il fallait qu’elle arrête de se torturer les esprits. Elle n’avait plus d’ongle et passait son temps à grignoter, beaucoup plus que d’habitude.

Elle hésita à lui envoyer un message et se ravisa. Il devait la contacter elle pour venir, elle devait patienter. Ils avaient sans doute des choses à faire. Alors, elle patienta, les doigts cloués à son tactile, vérifiant toutes les deux minutes ses notifications. Au bout de quasiment une heure sans nouvelles, et à force que ses amis lui répètent d’arrêter d’espérer, elle posa son smartphone et partit fermer la porte à clefs.

Elle alla ensuite directement dans sa chambre, se posant sur son lit pour allumer l’ordinateur. Elle resta habillée cependant, gardant l’espoir qu’il vienne même si aucun message ne lui était parvenu. Son épisode de « Friends » démarrant à peine, elle entendit frapper à la porte. Elle vérifia son téléphone une nouvelle fois, rien et le prit dans ses mains avant de se lever. Elle regarda à travers l’œil de judas et le vit, devant la porte. Il était bien venu. Le cœur battant, la respiration haletante, elle tourna la clef et ouvrit la porte. « T’es venu ! » dit-elle aussi soulagée que stressée. « Entre… » ajouta-t-elle en s’écartant. Elle ne savait pas vraiment comment agir, la dernière fois, il était tellement mal qu’elle n’avait pas eu d’autres choix que de l’asseoir, là, il était aussi sobre qu’elle, aussi conscient de ce qu’il faisait. Il portait un sac, il avait donc bien quitté l’hôtel de l’émission. C’était fini, vraiment ? « Je .. je suis désolée que tu n’aies pas gagné. » reprit-elle tout de même, n’osant pas engager l’autre sujet de conversation.

Finalement, après une courte attente – qui lui parut une éternité, tant de choses luis sont passées par la tête -, elle ouvre la porte. Il se redresse, puis la toise un instant, ne sachant que dire. Il est stressé, mal dans ses baskets, et vu la tournure des événements, terriblement honteux. « T’es venu ! » Elle a l’air soulagée, mais pas pour autant sereine. Alors timidement, pinçant ses lèvres pour acquiescer, il entre. Elle ferme derrière lui, et les voilà là, plantés dans son hall, immobiles, nerveux, et silencieux. « Je .. je suis désolée que tu n’aies pas gagné. »

« Oui moi aussi. » Dit-il machinalement, avant de se reprendre en grimaçant légèrement. « Enfin non, c'est mieux comme ça. Enfin je crois. »

Il passe nerveusement une main dans ses cheveux grisonnants, avant de laisser la bretelle de son sac glisser le long de son bras, pour le déposer au sol. Il sourit nerveusement à Nina, ne sachant pas trop comment entamer la discussion lui non plus. Il passe rapidement ses yeux sur la décoration, comme si cela allait combler le gros blanc qui vient de s’installer. Evidemment, non, ça ne fait qu’empirer les choses. Alors il inspire, son corps et crispé, ça se sent.

« Hum... Ecoute, le truc de la radio ce soir, je te jure que c’est que des conneries. »

La crispation sur les traits de son visage deviennent soudainement plus désolés, alors qu’il ramène son regard à Nina. Il sent que son cœur se serre dans sa poitrine. Ce qui est stupide, ils ne sont plus ensemble, il n’a pas à se prendre la tête comme ça sur ce qu’elle peut penser. Mais c’est plus fort que lui.

« Elizabeth, on est amis depuis le lycée. Et il ne s’est jamais rien passé entre nous. Ils m’ont certainement vu souvent traînant avec elle, et ils en profitent pour sortir des conneries pareilles. J’suis même sûr que le petit japonais ne la connait pas! »

Là c’est moins sûr, mais il n’a jamais osé poser la question à la blonde. Ça ne le regarde pas de toute façon, elle couche avec qui elle veut. Ou avec qui elle doit, parce que travaillant dans le milieu des films pour adultes, il se doute que parfois, certains de ses collègues, elle ne les porte pas pour autant dans son cœur. Enfin, ce n’est pas non plus ses oignons, et en fait, il s’en fiche un peu. Dans tous les cas lui, le japonais, il ne le connait pas.

« Bref, je... Je vais repartir, si... Enfin j’sais pas trop ce que je fous là en fait. »

Il se penche pour rattraper la bretelle de son sac, réalisant qu’en fait, il ne sait pas quoi dire, pas quoi faire, et que Nina est probablement encore braquée avec cette rumeur. Il n’a plus envie de se prendre la tête avec toutes ces histoires, et entre Nina et lui, c’est toujours que des histoires d’engueulades. Si elle avait vraiment quelque chose à dire, elle l’aurait dit, non ?

Il était là, il était venu et, elle n’était pas à l’aise, car rien n’était naturel entre eux. Ils s’étaient dit des choses, avouer leurs sentiments réciproques par message plus d’une fois et pourtant, elle ne savait pas par où commencer. Elle avait beau se dire que ce genre de blogs étaient bourrés de connerie, l’absence, le manque et la nouvelle notoriété de Tino avaient été compliqués à assimiler pour la jeune femme.
C’est Tino qui reprit la parole après qu’elle ait évoqué sa non victoire à l’émission de talents. D’ailleurs, il ne semblait pas y être sensible. « Hum... Ecoute, le truc de la radio ce soir, je te jure que c’est que des conneries. » Elle l’écouta s’expliquer, cette Elizabeth était une amie, il ne niait pas ce point. Nina était bien placée pour savoir qu’il ne fallait pas toujours se fier aux journalistes et encore moins à la presse à scandale. Elle se sentit idiote d’abord, idiote de le voir se justifier ainsi. Mais, elle se sentait aussi rassurée, parce qu’elle voyait que Tino n’était pas à l’aise, pas comme un enfant prit en faute mais plutôt comme quelqu’un de dépassé par la situation. Il n’avait pas nié la fois devant, pourquoi mentirait-il cette fois-ci ? Et pourquoi serait-il venu chez elle, plutôt que de rester avec les autres. Elle s’en voulait d’avoir douté, même si son infidélité était quelque chose qu’elle n’aurait jamais pu imaginer de sa part. « Bref, je... Je vais repartir, si... Enfin j’sais pas trop ce que je fous là en fait. » ajouta-t-il ensuite en reprenant son sac.

Instantanément, elle le bloqua dans son geste, sans réfléchir pour une fois. « Je n’ai pas de droit de réponse ? Ou alors, tu t’es vraiment perdu en chemin ? » fit-elle avant de lâcher le sac. « Je te crois… » commença-t-elle « … j’étais perturbée, je suis désolée. Je n’aurais pas dû réagir comme ça. » s’excusa-t-elle, sincère. Elle se rapprocha ensuite de lui, tout en le regardant dans les yeux. Elle voulait qu’il la croie aussi, qu’il ait confiance en elle, en eux.
« Ensemble aveuglément, c’est ce que je veux, c’est ce que j’ai toujours voulu et c’est ce que je voudrai toujours. » dit-elle, en référence à son SMS, avant de poser ses doigts sur l’une de ses mains. Elle posait chaque groupe de mots, voulant qu’il comprenne qu’elle savait ce qu’elle disait, qu’elle savait ce qu’elle voulait contrairement à ce qu’elle avait pu lui laisser penser. Son amour pour lui était bien l’une des seules certitudes de la jeune femme.
« Je vous aime Tino Ramìrez. » enchaîna-t-elle, un sourire se dessinant sur ses lèvres. Un sourire léger, reculé par la peur, peur qu’une nouvelle fois il décide de tout arrêter avant de recommencer, qu’il se mette à douter à nouveau, à lui rappeler leurs déboires et leur différence d’âge. Elle ne voulait pas le perdre, plus jamais. Des efforts, elle allait devoir en faire, surtout après que son visage ait fait la une de plus d’une publication internet mais, qui ne n’en fait pas dans un couple ?

Elle se hâte de lui bloquer le chemin, sans réfléchir, comme si son geste était instinctif. Pourtant terriblement irréfléchi, il le sait. « Je n’ai pas de droit de réponse ? Ou alors, tu t’es vraiment perdu en chemin ? » Il s’arrête, il la laisse faire alors qu’elle empoigne son sac, et le relâche au sol. Il abaisse ses yeux vers celui-ci, avant de remonter jusqu’au regard de Nina. « Je te crois… J’étais perturbée, je suis désolée. Je n’aurais pas dû réagir comme ça. » Ho si elle en avait tous les droits. Il n’a fait que des conneries ces derniers temps. Et des grosses. Il est normal qu’elle n’ait plus confiance. C’est justement plutôt cet acharnement à s’accrocher à lui, qu’il a du mal à comprendre. Elle se rapproche de lui, il sent son cœur rater un battement, puis cogner contre sa poitrine. Ses yeux l’observent, tandis que sa respiration se fait plus difficile. « Ensemble aveuglément, c’est ce que je veux, c’est ce que j’ai toujours voulu et c’est ce que je voudrai toujours. » Les doigts de Nina se posent sur l’une des mains de Tino, mais il est immobile, il l’observe toujours avec autant d’intensité. Il n’ose même pas la couper, parce qu’il ne saurait que dire, et que de toute façon, elle n’a pas fini, il le sait ça. « Je vous aime Tino Ramìrez. » Elle parvient à lui arracher un sourire. Il baisse les yeux, se pinçant la lèvre. Pourtant il le sait qu’elle l’aime. Mais l’entendre dire, c’est toujours plus joli encore. Il inspire, de cette respiration tremblante. Puis il repose ses yeux sur elle. Il est silencieux Tino, conscient qu’il a merdé, qu’aucun mot ne rattrapera ce qu’il a fait. Conscient aussi qu’entre eux, rien ne sera jamais terminé. Alors ses doigts, près de ceux qu’elle a posés sur sa main, s’entrelacent aux sien, doucement, pour que leurs mains se joignent. Et il la serre doucement.

« Même si j’ai merdé ? »

Murmure-t-il d’un petit sourire, amusé, mais anxieux aussi. Ou coupable plutôt. Il est incertain sur lui-même, mais ce dont il est sûr, c’est que Nina, il l’aime comme un fou, et n’aimera probablement jamais personne comme ça. Il y a bien une raison au fait que cette page, aucun des deux n’ait été capable de la tourner.

« Même si j’suis au chômage ? Et que j’ai perdu un show télévisé ? Que j’ai des tas de haters sur le dos ? Et des ménagères endiablées aux pieds ? »

Il rit légèrement sur sa dernière phrase, pourtant vrai. Tino, il était le candidat des ménagères. Il le prend bien évidemment, espérant juste qu’elles l’oublient très vite, pour que sa vie reprenne son rythme normal.

« Et que j'ai des cheveux blancs aussi ? »

Il se rapproche un peu plus, il relâche sa main, d’un franc sourire amusé. Il la pose alors sur la hanche de Nina, tandis que son autre main vient se poser doucement entre le cou et la joue de Nina. Ses yeux s’enfonçant au même moment, dans le bleu des siens.

« Je suis désolé. D’avoir été... Vraiment nul sur toute la ligne. Je n’aurais jamais dû te laisser partir. J’aurais dû te rattraper. J’aurais dû... Ignorer les regards dans la rue. Les jugements. Je ne sais pas ce qui se passe entre toi et moi. Mais je ne peux pas me battre contre ça. Je suis fou de toi, Nina. Je suis incapable de penser à quelqu’un d’autre. J’ai pourtant essayé, crois-moi, j’ai vraiment essayé. »

Il martyrise légèrement sa lèvre alors que son pouce caresse doucement la joue de Nina. Ses yeux eux, vagabondent toujours sur le visage de la jeune femme.

« Je... Je ne cesserais jamais, de t’aimer, Nina. Et pourtant, je le fais si mal, que j’aurais aimé que toi tu t’en détache. Que tu trouves quelqu’un de tellement mieux. Plus jeune, plus romantique, plus.... Moins... Moins moi. »

Son sourire devient plus gêné, alors qu’il reprend un peu sa respiration, si instable. Il lâche la hanche de Nina, il pose son autre main sur la seconde joue de la jeune femme.

« Mais je sais que c’est impossible. Parce que... Je pense sincèrement, que beaucoup de personnes sur cette planète, ne rencontrent jamais la personne qui est faite pour elle. Alors soient ils vagabondent, soit ils s’engagent, mais sans folie, ou ils divorcent, et continueront de se tromper, encore et encore. Mais il y a ceux qui tombent, par le plus grand des hasards, sur la bonne personne. Celle qui est... Une moitié, celle dont l’amour ne peut pas se ternir, même avec le temps, la distance, ou la séparation. Un truc, aussi beau que qu'effrayant, et aussi bon que douloureux. Je n’aime pas ce mot, j’y ai jamais crus, mais je crois qu’on appelle ça l’âme sœur. Et... Je ne peux pas me battre contre cette définition. Il y a Ross et Rachel, il les homards aussi, qui sont comme ça. Jack et Rose, et puis Nina et Tino. »

Il s’arrête juste quelques secondes, cherchant ses mots, sans même se rendre compte qu’il est en train de lui faire, peut-être, la plus belle déclaration de toute une vie.

« Tu es... Cette moitié, qui me manquait. Une partie de moi, sans laquelle je pourrais certainement vivre oui, mais avec un trou, un trou impossible à refermer. J’fais n’importe quoi quand tu n’es pas là. Et je continuerais jusqu’au bout s’il le faut, parce que... Parce que je peux respirer sans toi, je peux avancer sans toi, mais je ne peux pas vivre sans toi. Je n’ai jamais compris, je comprends pas, mais je crois que je n’ai pas envie de comprendre. Je veux juste... J’veux juste vivre ce truc. Et je m’en fous de tout le reste. »

Il ne réfléchit pas beaucoup plus non plus. Il avance son visage, il ferme ses paupières, puis laisse ses lèvres s’écraser contre celles de Nina. Il l’embrasse, comme il en rêvait depuis des mois. Comme si c’était leur premier baiser. Après tout, c’est le premier d’un nouveau chapitre. Il entrouvre ses lèvres, il pince les siennes, il laisse à ce baiser, toutes les libertés du monde. Il veut lui faire comprendre à quel point c’est physique entre eux, à quel point c’est fort, incontrôlable, et que ça ne le sera jamais. Son cœur tambourine dans sa poitrine, ses tempes, ses mains trembles, mais qu’est-ce qu’il est bien. Soulagé. La chaleur l’envahie, il l’aime Nina, comme jamais il ne saura aimer autrement. Qu’importe leurs vingt ans d’écarts, qu’importe ce qu’en diront leurs entourages, les parents de Nina, leurs amis. Il ne veut plus se prendre la tête avec tout ça. Il veut juste être avec elle. Ce n’est pas un crime. C’est juste de l’amour. Ça ne fait de mal à personne, si ce n’est eux.

La main dans celle de Tino, serrée l’une avec l’autre, Nina se sentait de mieux en mieux. Ils allaient peut-être enfin pouvoir avancer. « Même si j’ai merdé ? » La jeune femme voulut lui répondre mais il poursuivit et elle préféra se taire. « Même si j’suis au chômage ? Et que j’ai perdu un show télévisé ? Que j’ai des tas de haters sur le dos ? Et des ménagères endiablées aux pieds ? » Elle fronça les sourcils, amusée. Elle aussi après tout avait sans doute des hommes qui lui en voulaient même si ce n’était pas pour les mêmes raisons. Quant à la médiatisation, c’était autre chose mais elle se sentait capable de l’assumer. « Et que j'ai des cheveux blancs aussi ? » Elle leva ses yeux pour regarder sa tignasse et sourit de plus belle. « Désolée de te décevoir mais tu en avais déjà avant. » le taquina-t-elle tandis qu’il se rapprochait d’elle.

Le cœur battant de plus belle, Nina se sentit toute chose lorsqu’il posa une main sur le bas de son visage, l’autre sur sa hanche. Un léger frisson la parcourut et elle ferma les yeux un instant avant de les replonger dans le regard du guatémaltèque. Tino commença ensuite par s’excuser, s’excuser de l’avoir laissé partir et de ne pas avoir assumé leur relation aux yeux de tous. « Je... Je ne cesserais jamais, de t’aimer, Nina. Et pourtant, je le fais si mal, que j’aurais aimé que toi tu t’en détache. Que tu trouves quelqu’un de tellement mieux. Plus jeune, plus romantique, plus.... Moins... Moins moi. » La française posa à son tour une main sur le visage de Tino, tandis que lui venait prendre son visage dans ses mains. Elle n’aimait pas qu’il pense comme cela mais la suite la surprit davantage. Une déclaration des plus troublantes et romantiques, au-delà de toutes les espérances de la jeune femme.

Elle laissa retomber sa main sur le poignet du poivre et sel, les yeux s’embrumant d’émotion. Des mots qui la firent chavirer, toujours plus, qui la transperçaient au fur et à mesure qu’il parlait. Elle se senti fébrile, tant elle avait attendu et espéré ce moment. Elle avait même fini par mettre une croix sur cette possibilité, qu’il assume son amour et surtout, qu’il pense comme elle, vraiment. Elle fut si touchée qu’elle n’arriva pas à trouver les mots dans l’instant, le laissant rapprocher son visage avant de venir poser ses lèvres sur celle de la blonde. Vacillant et explosant, Nina prit le visage de Tino dans ses mains, les faisant glisser dans ses cheveux, tout en accentuant la pression de leurs bouches avant de la relâcher et de le regarder, leurs visages toujours tellement proches.

« J’ai pas envie de trouver quelqu’un de moins toi, j'en ai jamais eu envie, je t’aime pour ce que tu es, tout entier. Je sais pas vivre sans toi non plus et j’en ai aucune envie. C’est moi qui ai merdé, en claquant cette porte, j’aurais jamais dû, plus jamais… » dit-elle avant de déposer un nouveau baiser sur ses lèvres. « On est ensemble maintenant, tous les deux, c’est tout ce qui compte, j’ai pas envie qu’on repense à ce qu’il s’est passé avant. J’veux qu’on avance. » termina-t-elle, caressant sa barbe naissante. Ses doigts effleurèrent les lèvres de Tino, faisant monter la chaleur en elle. Ses lèvres, sa peau, son odeur, elle en avait tellement rêvé que son corps avait du mal à se contenir. « J’ai envie d’être nulle part ailleurs. » murmura-t-elle avant de revenir goûter à ses baisers, comme si cet instant pouvait s’arrêter à tout moment. Un baiser fougueux et passionné, certainement bien plus que ceux qu’ils avaient pu échanger lors de leur premier round, quelques mois plus tôt.