Ça n'allait pas le faire. Tout ça, c'était hors de question. Tu es le réseau influent de la ville, de tout New York, en terme de drogues. Puissant, imposant, indestructible. Mais il y a une raison pour ça: Tu prenais bien à coeur d'écraser la moindre compétition autour de toi. Même les petits réseaux sans envergure. Tu en faisais une affaire personnelle d'y mettre fin, trouvant toutes ressources possibles pour leur faire comprendre que New York, ça t'appartient. Ça appartient à Ezra. Aux Rosenbach. Pas à eux, ces inconnus sortis de nul part. Alors lorsque tu as entendu parlé de ce petit nouveau, de ce Daryl Crane, via un de tes indics, tu as agis. Rapidement. Si d'abord tu lui as volé des clients potentiels, tu savais que tu devrais aller plus loin. Car il se croit grand et fort, il semblerait. Comme un semblant de roi. Mais ne sait-il pas que sur l'échiquier, la reine allait le dévorer, l'abattre, d'un seul coup ? Libre de tout mouvements, il suffisait de se déplacer sans peur aucune entre les pions afin de soumettre le coup fatal.

Et le coup fatal, ça aura été un enlèvement. La seule façon pour lui détruire ses idées de grandeur, à tes yeux. Parce que tu en auras appris sur lui, via tes sources. Petit garçon venant d'une ville insignifiante, mais là-bas, c'était le chef. Là-bas, c'est lui qui dominait. Alors tu l'as fais retracé et rapidement, on lui a mis la tête dans le sac. Littéralement. Le détour d'une mauvaise ruelle et le voilà pris dans le coffre arrière d'une voiture. Ça te mettait en colère que l'on tente de percer, de te rattraper, qu'importe à quel point tu étais au haut de la chaîne et qu'il se retrouvait tout au bas. C'était le meilleur moment de toute façon, de lui faire peur, lui faire comprendre. Combien de trafic as-tu brisé de cette façon? Taper dans le nid avant qu'il ne prenne de l'ampleur, c'était toujours efficace.

Un bâtiment abandonné du Bronx, au sous-sol. Endroit sale, éloigné, délaissé depuis trop longtemps. Les structures ont commencées à être rongées par l'usure et le temps, l'humidité a gagné les lieux avec les températures froides qui s'abattent peu à peu sur New York. Ton regard clair et froid s'apporte une dernière fois sur ton téléphone afin de voir l'heure. Ils sont en retard. Deux minutes, tout au plus, mais ce n'était jamais bon signe malgré tout. Peut-être que le type a résisté, ce qui explique l'absence de tes employés. Mais d'autres pensées plus graves s'amènent à ton esprit. Peut-être as-tu sous-estimé ce gang ou bien tes employés eux-même. Peut-être qu'il n'était pas seul comme prévu et que tes employés ont été abattus. Tu inspires lentement alors que la lame d'un petit couteau se tapote contre ta cuisse, contre tes jambes croisées sur le petit meuble, nerveusement. Tu détestes ce genre d'attentes. Tu détestes quand tout ne va pas comme tu le souhaites. Peut-être que tu aurais dû envoyer Hayden, tout compte fait. Le priver de sa soirée, l'empêcher d'aller dormir tôt. Ou tard, peut-être même avec quelqu'un. Mais tu n'as pas voulu l'embêter, tu voulais lui laisser du temps libre.

La porte grince finalement et tu cesses de taper le couteau, décroisant tes jambes pour descendre du bureau finalement. « C'est pas trop tôt, enfin! » Que tu râles déjà et aussitôt, l'un des deux se confond en excuses pour t'expliquer les raisons de leur retard. Ta langue se claque d'agacement et tu soupires lourdement, ce qui le fait taire aussitôt parce qu'il comprend: Il t'ennuie avec ses raisons et tu ne veux pas l'entendre. « On règlera ça plus tard, attachez-le à la chaise. » Et il en faut peu pour qu'ils s'exécutent, sages employés fidèles. Le corps de l'inconnu se fait posé sur une chaise assez lourde, rien à voir avec ses petites chaises merdiques qui basculent en un moins de deux. Larges appuis-bras et pattes, il se fait attaché serré, le Daryl. Même que tu vérifies les noeuds toi-même pour t'assurer que ça va, ils n'ont pas merdé. C'est pas le moment.

Puis, lorsque tout est en ordre, que le sac est retiré et que l'identité de l'inconnu est confirmé, c'est un bruit sonore de peau contre peau qui résonne. Une gifle soigneusement collée à sa joue encore pâle, mais pas pour longtemps. « Allez, on s'réveille maintenant! » Parce que malgré tout, tu n'as vraiment pas que ça à faire.

Un membre de la famille de Jules, il semblerait. La nouvelle addition à ton équipe. Un hacker qui certes, débute encore, mais qui se sera valu efficace. Il avait passé tes tests et ça, c'était suffisant pour qu'il ne se mérite une place dans ton réseau. C'est son frère, tu crois. Faut admettre, tu as écouté d'une oreille distraite quand il aura appris qui tu avais décidé d'enlevé. Ou plutôt, quand tu lui auras demandé d'aller trouver des informations à son sujet pour mieux le retrouver. Une haine semblait l'envahir, une sorte de rancune. Et bon sang que tu pouvais le comprendre, ce petit Jules. Parce que toi aussi, tu as la rancune facile envers les autres. Envers les trahisons, envers les paroles de travers. Le ramener à lui une fois que tu avais terminé, rien que pour mieux lui dire que tu le détestes. Son ambition t'avait fait sourire et pour une rare fois, tu avais autorisé la suite des choses à se faire. Mais pour l'instant, tu te devais encore de faire souffrir ce connard qui se croyait mieux que d'autres. Mieux que toi. Et ça, tu ne pouvais pas le permettre.

La gifle éclate sur sa belle gueule et il se réveille. Lentement. Tu te redresses, tu croises les bras, couteau bien appuyé à ton bras dans l'attente de se voir possiblement utile. Tu aurais sans doute pu le réveiller autrement. Un coup de poing, un bras qui se casse, une tête qui se penche dans un seau d'eau jusqu'à étouffement, de quoi causer un bon réveil de panique. Mais non, tu as fais simple, tu as simplement collé une claque à sa peau pâle. Les yeux peinent à s'ouvrir et tu attends avec impatience la suite que tu connais peut-être un peu trop bien. La personne qui tente de bouger, d'utiliser ses mains pour se protéger de la lumière énervante et... Oh, la voilà. Cette sorte de panique dans le regard. Ce regard qui tente de rester fier, mais tu le sais, toi. Tu sais que la situation est loin de plaire. Parce que c'est le moment où on se constate attaché et là, le coeur se met à paniquer, la tête se remplie de question et les injures quittent d'elles-même pour les plus forts, les larmes se versent pour les plus faibles. Tes lèvres s'étirent d'amusement malsain quand tu le vois ainsi râler aussitôt, les doigts resserrant contre le manche de la lame. Tu ne bouges même pas, tu sais que tes deux gardes qui attendent sagement vont s'en occuper en premier. Toi, tu taperas plus tard. Là où ça pourra faire bien mal. Pour l'instant, l'un d'eux s'occupe de lui décocher un poing sur la mâchoire. « Ta pire ennemie. » Ce n'est pas même prétentieux. Tu le serais, de la tête aux pieds jusqu'au bout des ongles. Tu allais t'assurer qu'il ne pense plus un seul instant à possiblement devenir trafiquant. Qu'importe le domaine. Tu allais t'assurer qu'il sache qu'au moindre faux pas, tu serais là. Tu ferais de sa vie un enfer, s'il le fallait.

Tu décroises finalement les bras alors que tu t'approches, te penche vers lui. Rien qu'un peu, juste assez pour poser un bras contre le dossier de la chaise et de ton autre, libre, tu agrippes sa chevelure afin de tirer, afin de lui redresser la tête vers toi et la maintenir en place. Oh tu te doutes déjà que ce serait douloureux, tes doigts entre les mèches s'agrippant et tirant, laissant l'épiderme sensibilisé par un coup à la tête se faire maltraiter davantage. Tu crois même que les cheveux sont souillés, sans doute par une blessure que tu ne ressens pas encore, mais que tu saurais présumer. Ils n'y sont pas allés de mains mortes pour le capturer et tu présumes une confrontation musclée. Il est mécanicien, non? Probable qu'un outil aura attaqué son crâne, l'aura peut-être fendu un peu. La seule chose que tu espères, c'est qu'ils ne lui ont pas causés une foutue commotion cérébrale. Ce serait le bout du rouleau, ça. Mais pour l'instant, tu te contentes de tirer là où la peau est la plus sensibilisée pour l'instant. « Alors, mon p'tit Daryl. Dis-moi tout. » Ta voix est froide, menaçante, malgré ce sourire plaqué à tes lèvres. Tu tires encore un peu plus sur la chevelure. « Dis-moi comment tu croyais te ramener ici, toi, un moins que rien, et tenter de développer un trafic de drogues ici, à New York? J'crois on t'as bien fais comprendre que c'était déjà occupé, n'est-ce pas? »

Tu détestes la compétition, qu'importe l'échelle de celle-ci. Elle pourrait se voir minime comme grandiose que tu ne l'acceptes pas. C'est peut-être une question de ton passé, tout ça. Tu es, après tout, partie de rien du tout à la base. Tu es entrée comme une simple petite dealeuse de drogues avant de simplement faire un grand pas, un grand geste et tout ramasser, par un simple poison au creux d'un verre. Tu as été intelligente, maligne, et tu sais bien que d'autres le seront tout autant. Éliminer la compétition, c'est supprimer des possibles ennemis et effacer les risques que l'on te fasse du mal, que l'on te fasse tomber, ou que les même gestes se posent envers Ezra. Alors même si ce type devant toi n'a qu'un petit réseau, tu dois le faire tomber comme tout le reste.

Il fait l'idiot, l'imbécile, l'irrespectueux. Te sous-estime-t-il parce que tu es femme ou parce qu'il est un pauvre innocent ? Il a connu pire, qu'il dit. Bien pire, tandis qu'il te fixe dans les yeux. Ça te tire un rire, tout bas. « J'en doute fort. » Parce qu'il croit avoir vu quoi, lui, dans son petit Nevada de merde? Le petit chef du quartier est venu lui coller une raclée et depuis, il croit savoir ce qu'il y a de pire? Tu lui prouverais tord. On ne t'insulte pas de la sorte. On ne te manque pas de respect ainsi. Mais il persiste à s'enfoncer, le gamin. Il ne prend pas conscience que chaque parole portée, il s'enfonce toujours un peu plus dans le pétrin. Tu relâches sa tête entre temps, relâche la chaise, afin de laisser l'une de tes brutes lui dégommer un poing de plus. « Menacée? Ne te donne pas trop de valeur, Daryl. Tu es loin d'être une menace. Mais tu es tout de même dans mon chemin, aussi insignifiant que tu es, et c'est loin de me plaire. » Les paroles sifflent toujours entre les dents, dans cette même menace continuelle. Il tente de jouer les forts, les durs, mais tu sais bien qu'il finira par craquer. Tu sais bien qu'éventuellement, il va tomber. Ils le font tous, certains sont simplement plus idiots que d'autres pour t'affronter. Mais tu admires tout de même ne serais-ce qu'un peu sa force mentale. S'il est complètement fou de te défier, tu dois admettre qu'il a de la résistance pour ainsi sembler aussi défiant. Mais ça n'allait pas durer. Il obéirait ou mourrait, tout simplement.

Le bas de ton dos se presse au petit bureau tout près, lame bien en main, manche maintenu serré. Un autre rire, glacial, te quitte de nouveau. « "Déjà mort". Oula. Ce que t'es dramatique! T'es pas dans un film d'action, réveille-toi. T'es encore moins le héro, crois-moi Daryl. Ici, on ne fait pas les choses à moitié. Sois tu abandonnes tout pour me rejoindre, sois tu quittes les lieux dans quelques sacs poubelles. Ne fait pas l'idiot, ça n'a jamais été question de te "foutre la trouille". Nous ne sommes pas dans ton Nevada chéri. » Parce que tu sais tout, probablement trop, à son sujet. Merci Jules sur ce coup, il t'aura bien aidé à en découvrir sur l'homme face à toi. Il en aura dit, beaucoup. Il t'aura permis de te créer un profil assez complet de l'idiot face à toi.

Puis, ta mâchoire se serre. "Ma jolie". Comment il te dégrade, d'un seul coup. Si le regard se voulait froid, il est désormais noir. Il y a même tes brutes, tout juste à côté, qui semblent se communiquer du regard. On t'appelle une fois. "Boss?" Mais tu ne réponds pas. Tu ne dis rien, pas tout de suite, revenant vers le corps qui, tu en étais persuadée, terminerait bientôt dans un sac de plastique afin de le couler dans un lac quelconque. La lame se tourne dans ta main afin de s'abaisser dans la cuisse de l'homme. Lame affutée, heureusement pour lui, elle glisse aisément, se faufile dans la chair tel du beurre. Un coup, sec, mais tu es calculatrice: Si ton geste est impulsif, tu le sais non-destructeur sur le long terme. Tu n'es pas encore rendue à l'étape de le rendre handicapé de façon permanente. « Tu crois vraiment parce que tu as survécu ton petit accident que tu es intouchable, hein? T'es autant atteignable que tout les autres, Daryl. » Et tu tords la lame, rien qu'un peu, juste assez pour amplifier le mal. Tes doigts, eux, restent fermement accrochés au manche du couteau alors que ta voix se baisse. Comme une confidence, comme une menace supplémentaire. « T'as envie de suffoquer sous l'eau encore une fois, l'Intouchable? Ça peut s'arranger. T'es déjà mort après tout, on peut tester les limites si t'en as envie. » Et il n'y avait qu'à regarder tes iris clairs prisent dans cette tornade de colère et de haine pour comprendre aisément que tu ne rigolais pas, que tu en étais très bien capable.

Il ose, pauvre innocent. Il ose garder tête droite devant toi. Peut-être qu'il ne sait pas à qui il a affaire. Il ne se doute peut-être pas que tu es à la tête du trafic pour lequel tu parles, pour lequel tu lui fais subir la torture. Et tu es une personne pleine de ressources, Snake. S'il le savait, sans doute ne ferait-il pas l'imbécile de la sorte à tenter de te tenir tête. S'il savait à quel point ton cerveau peut déraper vers des idées complètement glauques, il se tiendrait droit dans ses bottes. S'il savait toutes les idées qui se plongent dans ta tête pour lui faire du mal et supprimer ce sourire de cette jolie gueule d'enfoiré, il cesserait de parler et demanderait pardon.

Appuyée contre le bureau, tu hausses un sourcil de curiosité en l'entendant te provoquer encore une fois. Un rire, court et sec, t'échappe. C'est plus fort que toi alors que tu le vois ainsi faire le malin, ou du moins tenter. Pauvre inconscient. Il apprendrait rapidement de ses erreurs. « Un métier? Ton petit réseau de merde, c'est ça que t'appelles un "métier"? Pathétique. » C'est quasi lancé avec humour, comme s'il te disait une bonne blague en fin de compte. Parce que c'est drôle, c'est minable. Franchement, où comptait-il aller dans New York avec ce petit trafic ? Rapidement, il allait manquer d'argent. Surtout lorsqu'il perdra tout ses clients. C'est quasi une bonne action, au fond. Tu veux l'aider à comprendre sa place et lui permettre de vivre un peu plus aisément. « Plus vite que tu comprendras ta place, mon coeur, mieux tu te porteras. C'est pour ton bien que j'dis ça, vraiment. » Fausse affection, fausse tendresse et pourtant c'est vrai: Moins il résisterait, moins il serait dans un piètre état en sortant d'ici. Si il sort vivant, du moins.

Puis, c'est le mot de trop, l'insulte qui a pris sa place une fois de trop. Tu n'es pas reconnue pour ta patience, Alex. Au contraire, elle se défait bien trop rapidement et c'est quasi surprenant, dans les faits, que tu n'as pas simplement demandé son exécution, telle une César des temps modernes. Il te fait perdre patience, alors il subit. Et cette fois, c'est une lame dans sa cuisse qui s'incruste avec beaucoup trop d'aise. Beaucoup trop d'assurance, aussi. Ce n'est pas ton premier couteau implanté, il doit sans doute le savoir. Parce que tu ne bouges même pas quand tu creuses la lame. Tu le regardes lui, le fixe dans les yeux, avec toute l'assurance d'une criminelle qui n'en est pas à sa première torture. Et tu démontres alors tes talents de détective, lâchant des parts d'informations ici et là. L'accident. Tu devais remercier Jules, pour ça. Contrairement à cet imbécile qui se tient difficilement sur la chaise depuis la lame, tu fais tes recherches. S'il avait pris soin de fouiller un peu, ne serais-ce qu'un peu, dans le monde illégal de la population New-yorkaise, il aurait compris qu'il y a un certain Snake à la tête. Il aurait compris les menaces, les risques et probablement les avertissements que d'autres ont dû lui fournir. Du moins, logiquement. Mais toi, tu sais faire pression et la meilleure façon c'est au travers des recherches. Alors tu délaisses la bombe de l'accident et tu observes avec amusement les réactions, le changement.

Il perd d'abord parole, puis la colère le gagne. Il fallait bien se douter qu'il réagirait de la sorte, qu'il cacherait la possible panique sous un éclat de rage. Toi, tu restes pourtant là, à proximité, maintenant la lame bien cachée dans la cuisse. Puis, c'est la fausse nonchalance qui le prend. « Oh Daryl, trésor. » Ta voix se mélange d'une douceur et d'une froideur, rendant le résultat sans doute bien plus inquiétant qu'il ne le faudrait. « C'que tu peux être idiot, j'te jure ! "Rien à perdre". Vas-y, continue de me faire croire. » Un autre rire, pressant qu'un peu sur la lame pour ensuite la retirer, d'un geste vif. Tu aurais pu le faire lentement, faire durer la douleur lancinante, mais tu sais bien que la plaie désormais à découvert se voudrait bien pire que le brûlement de la lame qui frotte au creux de la chair. Le supplice ne faisait que commencer, après tout. « Ne sois pas stupide, on manque tous à quelqu'un. Ou plus d'une personne, souvent. Comme tes soeurs, par exemple. » Tu te redresses un peu, rien que pour le frapper au visage. Comme ça, parce que tu en as envie, parce que ça défoule sacrément bien. Tu n'as pas autant de force que tes colosses, mais tu as l'avantage de porter des bagues de façon continue. Tu sais frapper, fort, pas autant que d'autres, mais la force manquante se veut rattrapée par la sensation de métal s'écrasant contre la tendre chair du pseudo-trafiquant. Ça évacue la pression, même si tu sais qu'en bout de ligne, tu risques de te faire tout autant de mal par tes doigts coincés dans ces anneaux. « Comment elles s'appellent déjà? » Sourire mauvais aux lèvres, tu dévies qu'une seconde sur tes gardes, comme si ça allait t'aider à te rappeler. « Lisa, Nina et.. » Tu ramènes le bleu glacé de tes iris sur le pauvre type attaché. « Violet, n'est-ce pas? L'une dans le coin d'Harvard, l'autre dans ton trou perdu à Nevada City et si mes données sont encore exactes, la dernière serait à Nantes. » Tu lances les informations, tout sourire, toujours dans ce même esprit de menace tandis que tu rapproches la lame ensanglantée de son visage. « Ça repousse assez les limites pour toi, mon beau? » Tu laisses le sang colorer sa joue tandis que tu presses le dos de la lame contre celle-ci, menaçant de trancher. Le moindre mouvement et il se taillait lui-même la peau. « J'peux aller encore plus loin, si tu veux. Si elles n'en ont rien à foutre de toi, j'suis persuadée qu'elles sont assez unies pour pleurer sur le cercueil de l'une ou l'autre. Qu'est-ce que t'en dis? »

Il cherche, encore et toujours plus, Daryl. Il cherche les emmerdes, les ennuis, il te cherche toi. Tu lui as dis, à sa demande. Qui tu étais, qui tu seras pour lui désormais. Sa pire ennemie. Est-il assez idiot pour ne pas en comprendre toute la nuance, toute la réalité de ces paroles? Tu allais faire de sa vie un enfer, pourvu qu'il sorte vivant d'ici, pourvu que tu ne changes pas d'idées à mi-chemin. Tu feras d'un enfer cette torture, mais également chaque pas qu'il oserait poser sur cette terre en sortant d'ici jusqu'à ce qu'il comprenne que désormais, il serait plus sage de t'appartenir que d'être sur ses gardes continuellement. Et ça allait commencer au sens littéraire de la forme. Chaque pas serait un enfer car ce serait douloureux, car tu y as planté une marque qui sera longue à quitter son corps. Un couteau implanté dans la chair avec une facilité effarante, autant en terme d'insertion que par ce manque de réaction si ce n'est de l'amusement sur la douleur qu'il te transmet.

Mais ce n'est pas suffisant, alors tu persistes. Tu continues de lui démontrer qu'au fond, tu es réellement une ennemie et qu'il doit faire attention. Que tu peux attaquer ailleurs, bien plus loin. Que tu es réellement à craindre et qu'il est préférable de ne pas faire l'imbécile en ta présence. Tu ne lui as pas asséné un tir à la tête, il devrait déjà s'en compter chanceux. Mais tu lui fais tout de même comprendre en sortant ton plus beau jeu. Ses soeurs. Tu les as cherchées en sachant leur existence. Tu les as mises sur une carte afin de trouver leur destination. Elles ont de la chance de ne pas être à New York, surtout, autrement tu aurais probablement déjà installé une caméra de surveillance peut-être, histoire de lui faire voir à quel point tu es sérieuse dans tes dires. Mais elles sont loin et franchement, il ne mérite pas que tu te donnes tout ce mal. Pas encore, du moins. Tu doutes avoir besoin de faire autant de pression, par-dessus tout, mais tu sais que tu es capable de plus encore.

La panique semble se lire dans son regard qui tente de rester de marbre, te voulant assez près afin d'en déceler la fluctuation dans les iris. Tu as touché juste, il tente de se déprendre et maladroitement, il se coupe sur le couteau. « "Je te jure que". Je te jure que quoi, que tu vas me tuer? Bonne chance, bel abruti, c'est loin d'être gagné, ça. » Tu lâches un rire, le soufflant presque, sans voix. Tu es bien loin d'avoir peur d'une vermine dans son genre, après tout. Tes yeux, eux, restent coincés sur le regard tout près. Sur cette luisance qui semble apparaître sans se montrer davantage. Qui résiste, persiste à se faire discrète. Tu as touché au bon endroit, Alex.

La lame se décolle de sa peau dans une fausse caresse, le dos de la lame effleurant la joue pour la quitter tandis qu'il te parle encore et encore. « Ce que j'attends de toi? J'croyais m'être fait assez clair. » Le regard dur, tu te redresses finalement, n'empêchant pas même tes sbires qui s'approchent afin de coller son poing au niveau des côtes. Une fois. Deux fois. Le troisième se retrouve sur le visage. Comme une tentative de lui faire revenir les idées, la proposition. Mais ta voix s'élève afin de les arrêter parce que toi, tu as d'autres projets. Tu parles par-dessus les coups, au départ. « T'as peut-être besoin de te faire rafraîchir les idées, dans ce cas. » Tu soupires presque d'agacement, reprenant aussitôt. « Les gars, allez chercher le seau. » Ils s'arrêtent aussitôt, te regardant avec étonnement. Avec surprise que tu en viennes déjà à cette option. « Snake, vous êtes certaine? C'est pas un peu-...» Ton regard se noircit en moins de deux, fusillant du regard celui qui ose te parler, qui ose douter de ton ordre soudaine. « Le seau, j'ai dis ! Maintenant ! » La voix est plus colérique, plus impatiente.   L'un des employés quitte chercher un seau assez grand pour y être assis de façon coincé. Seau qui trainait là, un peu plus loin dans un coin de la pièce tandis qu'il s'occupe désormais à le remplir d'eau. L'autre, quant à lui, s'occupe de défaire les liens qui retiennent les chevilles à la chaise ainsi que le lien primaire retenant les poignets noués ensemble au dossier à barreaux.

Toi, pendant ce temps, tu t'approches de nouveau, t'accroupissant un peu alors que tu remontes légèrement le chandail afin d'en constater les ecchymoses qui apparaissent peu à peu. Sourire satisfait, tu reprends ton couteau correctement en main et tu laisses la lame faire le travail, traçant lentement une coupure au niveau du ventre. Lentement, alors que le clair de tes iris se ramènent dans les siens. « Une p'tite baignade, ça te dis? Ça devrait te remettre les idées en place et te rappeler mon offre. » Tu termines la coupure d'un geste vif et presse la cuisse heurtée entre tes doigts, pointant le bout de la lame vers le joli minois massacré, alors que tu siffles entre tes dents. « Et ne t'avise pas de faire un geste stupide comme tenter de fuir. Crois-moi, tu risques de bien mal courir avec une cheville cassée. » Les termes mis au clair, les menaces faites et l'annonce de ce qui l'attendait désormais annoncée, tu te recules et laisse, cette fois-ci, tes employés s'occuper de trimballer le corps. Le moins qu'il se débattait, le mieux il s'en sortirait. Mais juste à titre préventif, on lui colle aussitôt un coup derrière les genoux pour l'amener au sol et un autre au dos afin de s'assurer qu'il se penche, main maintenant l'arrière du crâne blessé. « Bonne noyade. » Et comme ça, rien que comme ça, tu le laisses se confronter à ses craintes de l'eau, la tête plongée sans même lui laisser le temps de retenir son souffle.

Il allait souffrir. Physiquement, mentalement, de toutes les façons possibles jusqu'à ce qu'il se laisse succomber ou que son corps ne le lâche. Ou jusqu'à ce que tu ne perdes patience et décide de tirer la gâchette à un moment ou l'autre. Parce que tu es comme ça, imprévisible jusqu'au bout des ongles et qui sait quand tu n'en auras pas soudainement marre et que tu laisseras tout tomber pour l'éliminer de cette terre. Ce n'est pas même de la compétition, il est tout simplement une nuisance. Rien de plus, rien de moins.

Il encaisse, persiste à résister les coups donnés avec aplomb de la part de tes employés. Ils savent bien frapper, tu les as engagés que pour ça. Ils frappent et lui, éventuellement, se met à cracher un peu de sang. Tant mieux, qu'il saigne, il le mérite pour ainsi te narguer aussi ouvertement. Pour te lancer ces conneries à la figure comme ça. Pour ainsi oser te défier et faire croire qu'il est plus fort, que tu ne lui fais pas peur. Peu à peu, tu sors les armes lourdes afin de lui faire comprendre à qui il a affaire. Puis, l'illumination. Il entend ton pseudo très connu dans le milieu et le répète, les yeux écarquillés. Ton sourire se fait mauvais, mutin, dans un amusement malsain. « Tout va bien, trésor? » C'est purement moqueur, sachant très bien qu'au fond il vient tout juste de réaliser qui se trouve devant lui. Snake n'a pas de sexe, dans le milieu. Personne ne sait si c'est un homme, une femme. Personne ne sait son âge, son status, son physique. Personne sauf ses employés et ceux qui ne sont plus là pour le raconter. Alors sans doute qu'il comprend ce que cela veut dire, s'il avait bien écouté toutes les rumeurs qui t'entourent, celles disant que tu as abattu ton propre chef afin de prendre sa place. C'est la vérité, certes, mais les façons dont tu l'aurais exécuté sont diverses. Alors il sait que soit il finira par travailler pour toi, soit il se retrouvera sans vie. Son destin est lié, scellé.

Le seau désormais remplis, les chaînes se défont afin qu'on puisse le bouger, gardant les liens à ses poignets, mais défaisant ceux qui le gardait à cette chaise où bien d'autres ont passés avant lui. Bien d'autres qui n'ont pas survécus ou qui ont fini par se ranger dans tes rangs, même dilemme. Il se débat, c'est automatique, c'était à prévoir, mais les coups, les blessures portées, lui font perdre de sa force habituelle et en un coup, on le met au sol. Toi, tu restes d'où tu es, lueur malicieuse et cruelle dans le regard. Tu restes là, tu attends sagement, tu l'observes se faire lancer la tête sous l'eau. On le garde là un instant, le temps de lui faire perdre un peu son souffle, le faisant remonter à la surface une seconde ou deux rien que pour le plonger de nouveau. De quoi lui donner assez d'eau d'avalé et de quoi le faire paniquer, lui faire perdre son souffle. Et la voix, rauque, se fait entendre jusqu'à toi. Un rire, encore une fois. On te fais rire de nouveau. « T'es déjà brisé, connard, cesse de jouer les durs. Tu sais que j'ai l'avantage sur tes beaux yeux. »

Et il persiste, encore et toujours, inlassable, inépuisable. Complètement chiant, en fin de compte. Tes souliers claquent sur le sol froid et dur, résonant dans la pièce alors que tu l'entends encore faire ses menaces. « Tu le seras, Daryl. Tu m'appartiendras. C'est ça ou voir ta famille s'effondrer, une personne après l'autre. » Tu t'accroupis à ses côtés, le corps maintenu par tes colosses. « Écoute-moi bien: Je vais te détruire, chéri. Je vais ruiner ta vie jusqu'à ce que tu n'aies plus rien et que tu viennes ramper vers moi pour me supplier de t'enlever la vie, parce que ce sera moins douloureux. » Tu es sérieuse dans tes paroles, plus que jamais, ton regard captant quelque chose qui brille. Quelque chose qui pend à son cou. Une chaîne avec une inscription, un prénom. Manon. Tu te souviens avoir vu ce prénom au travers des dossiers. « Et je vais commencer par ça. » Tes doigts agrippent la chaîne, l'arrache de son cou, brisant les maillons qui la maintient contre la nuque. Tu soulèves le bijou à hauteur de yeux, bien en vu pour le petit trafiquant près de toi. « Ta douce Manon. C'est ça? Et toi qui disait ne manquer à personne. À force de vouloir protéger tout le monde, tu vas tous les mener à leur perte, par ton idiotie et ta résistance futile! » Tu tends le collier à l'un des sbires qui ne maintient pas Daryl en place. Mine de rien, tu ne le dirais pas, mais tu n'en feras rien, de ce collier. Probablement même que tu lui rendras si un jour il se décide de faire le choix judicieux et de te rejoindre. Parce que tu en comprends l'importance, de cette chaîne. Tu en as une similaire autour de ton cou, après tout. L'anneau de ta défunte femme, celle qui ne te quitte jamais. Tu es peut-être cruelle présentement, mais tu as un coeur, même si ça ne semble pas le paraître.

« Je crois que t'as encore besoin de réfléchir, mettre tes idées au clair. » Et il suffit d'un regard vers celui qui le maintient pour que la tête se replonge sous l'eau, te redressant afin de l'observer, bras croisés. Et lorsque tu vois que ton employé va pour le relâcher, tu l'empêches de ton timbre de voix aussitôt. « Non, attend qu'il se débatte, qu'il s'étouffe comme il se doit. Ça lui servira de leçon. » La voix froide et le regard noir, tu restes fixée sur le corps, l'observant, testant sa résistance jusqu'à ce que le corps ne commence à se bouger par réflexe pur sous l'étouffement, sous la simulation de noyade. La tête enfin relâchée, tu fais un signe simple à l'armoire à glace pour qu'il le relâche, laissant ton pied partir de lui-même pour s'écraser contre les côtes probablement déjà abîmées depuis un moment, histoire de faire tomber le corps sur le côté, l'écraser au sol. « Toujours du même avis, alors? »

Si tu admires les forces de caractère, la force de l'esprit, tu as horreur de l'arrogance. Et ce type, ce Daryl tout juste en face de toi, il en est l'exemple de la tête aux pieds. Il t'énerve alors que pourtant, c'est un moins que rien. Tu aimerais qu'il abandonne comme les autres, mais tu sais que tu en serais déçue. Alors tu laisses ton tempérament de feu quitter ton corps, agacée par le fait qu'il ne t'écoute pas et reste têtu. Obstiné. Chiant. Ce sourire moqueur, tu comptais bien l'effacer de ses lèvres. Peut-être à jamais, s'il était assez faible pour se laisser faire. Se laisser briser. Il serait à ta simple merci à la fin de cette situation, rampant vers toi pour accepter ton offre. Il a de la chance que tu veuilles l'avoir avec toi, sans quoi il ramperait sans doute parce qu'il aurait les chevilles cassées. Alors pour l'instant, tu le confrontes à ses peurs, tu lui envahis la tête sous l'eau. Tu le laisses revivre une fausse sensation de noyade comme on t'a sagement confié. Une fois, d'abord, de courte durée, le voyant reprendre son souffle de façon pathétique. Il persiste à résister, te lançant de ces menaces comme s'il était soudainement un dieu. Comme s'il était immortel et intouchable.

Ou du moins jusqu'à ce que tu viennes poser les pattes sur ce collier. Vers ce qui lui semble précieux. Tu sais tout sur lui. Ou du moins, assez pour rendre sa vie infernale. N'en était-il pas conscient encore? Tu ne sais pas même pourquoi il résiste, c'était complètement inutile. Tu ne sais pas même s'il a conscience que par sa faute, tu allais devoir faire du mal à d'autres gens en plus. Des gens innocents qui auront eu le malheur d'être dans l'entourage ou la famille de ce type complètement borné. Mais ainsi va la vie de trafiquante, après tout. Il te file une interdiction, te somme de ne pas prononcer le nom de la douce Manon qui triomphe au bout de la chaîne. Tes yeux se braquent aussitôt sur lui. « Quoi? Tu oses réellement m'imposer une telle chose? » Tu délaisses un rire à ses paroles, visiblement amusée de son audace.

La tête replonge et cette fois, plus longuement. Tu empêches ton garde de lui relever la tête avant que tu ne lui imposes de le faire. Tu observes le corps qui résiste, puis qui de façon naturelle, tente de se relever, tente de se remonter. Tente de rester en vie, en somme. La beauté humaine à son meilleur. L'instinct de survie primitif dans toute sa splendeur. La proposition revient à ses oreilles quand il est finalement apte à te répondre, sauf que c'est peine perdue. Pire encore, il vient à parler de cette Manon, clamant que tu aurais finalement quelqu'un à ton niveau. Un autre rire. « Moi qui te croyait si "fort" et si "impossible à tuer". Voilà que tu en viens à admettre que ta tendre Manon se veut plus forte que toi. Où est passé ton orgueil si mal placé, trésor? » C'est moqueur et agressif, presque déçue, mais rien comparé à la suite des choses.

Que tu le tues. C'est ce qu'il te demande, alors qu'il se pose dos contre le sol. Avec presque de la flemme dans le corps, tu te bouges afin de t'approcher. Afin d'oser venir t'installer sur son corps, t'assoir au niveau de ses hanches, cuisses bien calées de chaque côté. Tu y presses ton poids, impose ta présence et l'empêche ainsi de bouger, de fuir. De faire un geste purement stupide. « Tu me déçois, Daryl. » Un soupire, main pressée au sol afin de le surplomber le temps de parler, puis tu te redresses qu'un peu le haut du corps pour prendre élan et lui asséner un coup bagué supplémentaire au visage. « T'es d'un pathétisme sans fin. Me demander de te tuer? Vraiment? » Second coup de poing. « Tu as conscience que ça ne m'empêchera pas de faire du mal à tes soeurs, n'est-ce pas? » Un rire échappe tes lèvres, quasi sinistre, alors que ta main tachée de sang s'appose à la gorge et presse pour l'étouffer. Pas assez, juste un peu. Juste pour qu'il sache que tu peux aller plus loin encore. Tout juste avant qu'il ne manque de souffle. « Tu dis sans cesse que je ne peux pas t'atteindre et pourtant, te voilà. Tu crois que j'ai demandé à me faire tuer, moi? » Tu presses encore un peu la gorge sous tes doigts. « C'est exactement pour cette raison que tu ne seras plus jamais un chef de trafic. Que tu mérites d'être sous mes ordres. » Tu te penches un peu afin de t'approcher de son visage. « Parce que t'es un lâche, Crane. Incapable de supporter la torture, demandant à te faire tuer dès qu'un peu d'eau s'amène dans tes poumons. Dès qu'il y a menace sur tes proches. Tu joues les durs, mais t'es rien, chéri. Rien du tout. » Tes lèvres s'étirent dans un sourire malsain, le regard de feu fixé au sien. Il résiste, mais à quoi bon?

Tu dis vrai, pourtant. Tu n'as jamais demandé à te faire tuer, toi. Quand tu as intégré le trafic comme simple dealeuse, quand le précédent chef cherchait à prouver tes capacités, tu as subit des coups, des blessures. On t'a menacée de tout réduire à néant autour de toi, de prendre la vie de ta mère adoptive. De celle qui aura été assez aimable pour te donner une vie avec ton père qui sera décédé à l'armée. On t'a menacée de tuer Nathan, ton ex. Jake, celui qui était tombé amoureux au point de fuir avec toi. On a tenté de tout t'enlever et tu n'as jamais succombé, leur disant qu'ils n'avaient qu'à prendre ce qu'ils veulent, que tu ne ramperais pas devant eux, que tu n'allais pas te laisser faire, acceptant les coups de plus jusqu'à t'évanouir. Et tu te souviens encore. Ça avait duré longtemps. Parce qu'une fois évanouie, ça recommençait au lendemain, jusqu'à ce que le chef décide de mettre fin en voyant que tu ne demanderais pas à te laisser tuer. Peut-être qu'au fond, tout au fond, tu cherches à retrouver cette même force de caractère chez Daryl. Tu cherches à lui donner leçon, à le rendre plus résistant pour la suite. Alors tu te redresses encore un peu et l'assomme d'un autre coup à la figure. « Tu me fais pitié, chéri! »

Tu le vois faiblir à vue d'oeil. Le sang, le souffle qui se veut difficile. Le regard qui cherche à te menacer, mais qui semble épuisé. La torture aura été brutale, longue. Tu as pris ton temps pour bien le martyriser et lui faire comprendre la situation. Lui faire comprendre qu'il était largement plus judicieux de se laisser aller, d'accepter la proposition que de faire l'imbécile comme ça, se retenir. C'était plus simple de se laisser faire. Plus simple de te dire oui et mettre fin à cette torture. Sauf qu'il persiste, qu'importe les menaces. Putain qu'il t'épuise, ce connard, incapable de se rendre à l'évidence même.

« Oh, y'a pas plus tarée que moi, chéri. » Un rire t'échappe, tandis que le "chéri" est presque craché en insulte. Et te voilà là, à embarquer sur lui, à y mettre le poids de ton corps pourtant fin, mais musclé. Te voilà à lui asséner d'autres coups. Une fois, deux fois, trois fois. Et hop, tu l'étrangles, tu continues encore et toujours. Pour le vice encore plus. Au moins, tu ne pèses pas de ton pouce sur la plaie à la jambe. Il est à bout de souffle et toi, tu ne l'écoutes presque plus, le laissant faire l'idiot encore et toujours, le laissant croire que ses paroles ont encore de l'importance. Tu te relèves finalement et croise les bras, l'observe galérer. L'observe avoir du mal à bouger, à respirer. Du mal à rire, même. Mal de vivre. Et toi, ça te fais tirer les lèvres parce que tu sais qu'au fond, tu as déjà gagné malgré les paroles.

Un soupire, un coup de pied qui se porte à son ventre sous un éclat de colère soudain, sous une impulsion. « J'aurai toujours un moyen de pression, t'as raison. Jusqu'à ce que tu changes d'idées ou que j'en aies marre de toi. Et quand ce sera le cas, quand j'serai à bout, ta pauvre petite vie de merde sera terminée. Et personne ne saura trouver ton cadavre, crois-moi, trésor. » Une dernière menace pour lui faire comprendre, lui expliquer. Parce que lorsque tu abandonnes, lorsque tu atteins le point de non-retour, ce n'est pas qu'une balle au travers du crâne. Du moins, ce ne sera pas le cas avec lui. Si tu l'as fais pour d'autres, pour ces idiots que personne ne viendra chercher, tu sais qu'il a des contacts. Alors lui, tu allais lui refaire le portrait en entier. Tu allais t'assurer que son identité ne soit pas reconnaissable, au point que le cadavre allait pourrir avant de découvrir quelque chose.

Un rire t'échappe, tout bas. « Sois pas idiot, Crane. Si je pointe un flingue sur l'une de tes soeurs ou ta femme, tu vas chialer et me supplieras de les laisser en vie et prendre la tienne plutôt. T'essaie de jouer les héros, Daryl, mais rien à foutre: tu finiras par accepter. Parce que t'es pas un putain de superhéros. » Tu l'observes de là, de haut. Ce qu'il est pathétique. Et pourtant, tu le gardes en vie. Parce qu'il y a quelque chose dans son regard, quelque chose dans sa résistance qui se veut intéressante. Tu sais, tout au fond, que tu saurais en faire quelqu'un de loyal s'il venait à joindre tes rangs. Il y a un potentiel qui t'empêche de tout simplement l'abattre, finalement.

« C'est ton choix, Daryl. Me joindre ou mourir. Si j'étais toi, j'ferai le bon, le plus évident. » Un regard à peine sur l'une de tes brutes qui lui colle un dernier coup de poing, qui termine de l'achever. Non pas dans la mort, mais dans l'évanouissement. « Réfléchis-y. » Que tu lances entre deux mouvements d'oeil qui tourne, l'observant faiblir et s'évanouir finalement. Et là, seulement là, que tu secoues un peu la main qui se veut douloureuse par les bagues qui ont tentés de se fondre à ta peau lors des coups. Aussitôt l'homme évanouit complètement, tu te mets en mouvement, commence à ranger la pièce et dicter tes ordres. « Amenez-le au local de Jules, il veut le voir. Et interdiction de merder, surtout. » La voix est autoritaire et la pièce s'anime, certains de tes sbires s'amenant à la suite d'un message texte pour désinfecter la place, retirer toute trace de sang et autres ADN pouvant s'être propagé dans la pièce. Et toi, tu devais retourner à l'appartement. Tu devais aller te nettoyer et changer pour aller travailler à ton second travail, profitant de la trajectoire pour diriger tes hommes de main en conséquence, afin de garder un oeil sur Daryl. Et une moue se propage sur ton visage quand tu constates ton chandail qui s'est sali de quelques gouttelettes de sang.

Putain, Hayden allait encore t'engueuler de revenir tachée.