Sur le tapis rouge d’un énième évènement, les célébrités s’y dandinaient, posant devant les nombreux paparazzi Dissimulée derrière le crépitement des flashs d’appareils photos, Megumi en faisait partie ce soir, photographiant mécaniquement les célébrités avec un soupire. Plus le temps passait, plus elle se rendait compte à quel point ce métier ne lui convenait plus. Mais il fallait bien qu’elle ait de quoi payer son loyer et tout le reste, alors elle s’en contentait pour l’instant. Peut-être que ça irait mieux une fois qu’elle et Edward aient fini leur roman, et qu’elle se sera assurée que Smith ne pourrait plus être un problème. Elle courrait partout depuis quelques mois, mais ce n’était pas de refus, au moins elle ne pensait plus à Tino, qu’elle avait aperçu au Macumba lors de la Saint-Valentin. C’était sans grande conviction qu’elle faisait son boulot de paparazzi, alors quand elle reçut une notification de la radio, elle y jeta un œil et plus rapidement qu’il n’en faut pour le dire, la radio avait toute son attention tandis qu’elle fixait le nom de Tino affiché, d’un regard absent. Pendant un instant, elle se demandait s’il ne s’agissait pas d’une mauvaise blague. Quelques mois plus tôt, sans doute l’aurait-elle pensé, et n’y aurait pas cru. Mais elle n’était pas si surprise, et ce n’était pas plus rassurant. Megumi ne pensait pas pouvoir être de nouveau déçue depuis qu’elle l’avait vu dans les bras d’une brune au Macumba, première fois qu’elle l’avait revu depuis l’attaque de Smith. Ils ne s’étaient plus parlé pendant des mois après ça, c’était probablement naïf de sa part d’avoir pensé qu’ils pourraient reprendre où ils en étaient la prochaine fois qu’ils se verraient. Quand elle s‘attachait réellement, elle pouvait passer des mois sans contacter l’autre, sans que ses sentiments ne faiblissent et c’était sans doute ça sa plus grande erreur. Si elle avait juste arrêté de se soucier de lui, elle n’aurait pas eu le cœur brisé une deuxième fois. Le pire, et ça la blessait de se l’avouer, était que ce n’était pas une si grande chute, contrairement à Rio. Sans l’avoir senti venir, depuis qu’elle était revenue vers lui, cela n’avait été qu’une déception progressive. L’avoir vu au Macumba avait juste été plus douloureux que n’importe quoi d’autre, parce qu’elle avait réellement eu le sentiment de n’avoir été qu’un pansement temporaire, rapidement jeté et remplaçable par la suite.

S’il y avait bien une chose qu’elle ne supportait pas, c’était se sentir aussi négligée, aussi… optionnelle. La colère avait rapidement pris le dessus après qu’elle soit sortie de la boîte de nuit, les larmes aux yeux mais refusant de verser la moindre larme. Elle comptait si peu pour lui ? Très bien, elle arrêterait de se préoccuper de lui dans ce cas ! Avec au fond, la tristesse de savoir qu’il n’essayerait jamais de reprendre de ses nouvelles, parce que depuis le début, elle est celle faisant tout le travail dans leur relation. Et pourtant, malgré ce dont elle s’était convaincue, cet article lui prouvait le contraire, lui prouvait que malgré tout ça, il restait encore des résidus de respect, d’affection peut-être, pour lui. Mais cette rumeur était une nouvelle déception qui balayait le peu de respect laissé, devant l’homme pitoyable qui apparaissait, qu’elle ne reconnaissait plus. Comme un réflexe, la colère l’enveloppe et avant même de le savoir, elle avait envoyé un sms à Luca. Puis un autre, et encore un autre. Peu attentive à son travail ce soir, qu’elle continuait malgré tout, en fouillant le reste des rumeurs parues ce soir, celle sur un mariage lui rappela soudain la bague « empruntée » à l’ex de Tino des mois plus tôt, qui prenait encore la poussière dans un des tiroirs de son bureau. Elle était parfois retombée dessus après avoir aperçu Tino un mois plus tôt, avait même hésité à s’en débarrasser, mais ne l’avait pas fait pour une quelconque raison, puis, elle ne l’avait plus vu et avait oublié sn existence, jusqu’à maintenant. Il fallait bien qu’elle prenne une décision, il était temps. Hésitant à la jeter, ou à accomplir une petite vengeance puérile, qu’elle partagea à Luca, visiblement très intéressé pour l’aider à emmerder Tino, elle se concentra sur le reste de son travail, mais acceptant l’aide de l’agent pour retrouver l’ex de Tino, si elle ne changeait pas d’avis plus tard. Le reste de la soirée s’écoula au compte-goutte, avant qu’elle puisse enfin rentrer chez elle quelques heures plus tard, et elle s’endormit immédiatement. Elle réfléchira le lendemain à ce qu’elle allait faire, afin d’avoir les idées plus claires, une première pour elle, il faut l’admettre.

Après une nuit de sommeil, l’idée de se pavaner avec la bague devant Nina ne lui semble plus aussi attrayante, à présent que la colère passagère avait disparue. Elle avait déjà dépensé trop d’énergie pour Tino, continuer sur cette voie en allant voir Nina juste pour lui mettre des bâtons dans les roues, elle n’en avait pas envie, elle s’en rendait bien trop compte à présent qu’elle y réfléchissait davantage. Le voir en personne pour lui rendre cette bague serait rapide, et ne lui coûterait pas grand-chose après tout. Et elle avait sûrement un peu envie de pouvoir mettre les choses à plat en personne, alors elle lui envoya un message pour qu’ils puissent se voir. La jeune femme n’était pas sûre de ne pas regretter son geste, mais au moins elle ferait ça correctement pour une fois. Si elle ne le voyait pas en tête à tête, il y aurait toujours une part d’incertitude : elle n’en voulait pas.
Le jour J, Megumi attendit qu’il soit l’heure du rendez-vous pour sortir de son appartement, et en moins d’une minute, elle pénétrait à l’intérieur du bar. Elle aperçut vite Tino à une table, et le rejoignit, s’asseyant en face de lui. Ni sourire, ni bonjour, elle n’avait pas envie de faire semblant que tout allait bien. Il s’était douté que ce n’était pas un rendez-vous léger, elle l’avait bien senti dans ses sms, et à présent, il n’y avait plus de doute. Au moins, il savait à quoi s’attendre. Sans un mot, elle plongea sa main dans son sac, attrapant la bague dans son poing puis la déposa sur la table, la poussant doucement vers l’hispanique.


Sa voix était presque un murmure, le regard fixé sur la bague. Elle ne parvenait pas à regarder Tino en face, quelque part, elle voudrait juste qu’il la prenne et que ce soit finit là, mais il y avait aussi des centaines de choses qu’elle voulait lui dire. Mais elle n’était pas certaine d’être capable de le regarder, comme si soudainement, elle avait peur de faire face à un parfait inconnu. Au fond, n’était-ce pas ce qu’il était devenu… ?


Un rire sans joie lui échappa, réflexe pour alléger ses propos, mais ça ne trompait pas son ton froid. Elle prenait ses distances, s’affaissant même davantage contre le dossier de sa chaise, à croire que même être trop près de lui était trop à présent.


Le regard glissant sur le côté, elle tripotait distraitement le menu avec ses mains. Étrangement, dire ça à voix haute lui faisait moins mal que ce à quoi elle s’attendait.

L’atmosphère est lourde, plus que gênante, mais Megumi ne fait rien pour arranger ça, gardant ses distances, évitant son regard. Elle sait ce pour quoi elle est venue, mais elle est toujours aussi perdue sur ce qu’elle ressent. Plus que tout, elle a peur de le regarder et de se rendre compte que ses sentiments n’ont pas changés. Ça ferait bien trop mal. Bien sûr qu’elle lui en veut. Bien sûr qu’elle est déçue et bien sûr qu’il lui a brisé le cœur. Et malgré ces faits, elle ne parvient pas à comprendre comment elle se sent, comment elle est sensée se sentir. Devrait-elle être furieuse, déçue, triste… ? Elle est passée par ces émotions, toute seule, loin de lui, depuis des mois. Cette rumeur ravive des sentiments, des souvenirs qui n’ont plus de place à l’heure actuelle. Peut-être que si elle l’avait confronté au Macumba au lieu de prendre la fuite, elle n’aurait pas eu ce problème. Sans doute qu’ils n’auraient pas eu de conversation calme non plus. Elle est perdue, alors elle cache la moindre émotion, elle lui offre l’indifférence, le pire que l’on puisse donner. Sa protection de dernier recours, quand elle ne peut pas se cacher derrière la colère ou une assurance trompeuse. Derrière son expression indifférente, c’est pourtant un beau bordel. Avoir tout raconter à Edward ne lui a pas éclairci les idées, elle n’a toujours aucune idée de ce que Tino est pour elle à présent. Un inconnu ? Un homme détestable ? Ou bien ne peut-elle pas s’empêcher de s’accrocher à cette image qu’elle a de lui, à la relation qu’ils partageaient autrefois ? Elle ne sait pas, Meg.
Sans explication, elle lui donne cette bague, celle de son ex. Elle lui dit qu’elle ne pouvait pas la donner directement à la principale concernée parce qu’elle ignore où elle habite. Mais elle ne lui précise pas qu’elle lui a plus ou moins volé cette bague. Elle ne la lui donne pas directement non, plus la posant simplement sur la table et la poussant de son côté. Il pense que Nina l’a perdu, et la paparazzi porte la main à son visage, jouant avec les mèches de sa frange, comme pour cacher son visage.


Elle souffle, n’avouant qu’à demi-mots la vérité. De toute manière, ce n’est pas le sujet, n’est-ce pas ? Megumi tourne autour du pot, ce n’est pas dans ses habitudes. Elle y fait finalement référence. A toutes ces filles. C’est léger, mais la reproche est là. Et étrangement, elle ne se sent pas particulièrement mal de dire ça à haute voix. De se rappeler à elle-même qu’il s’était engagé à d’autres femmes, contrairement à un mois plus tôt, où son cœur s’était brisé en le voyant avec une brune. Et ça la soulage un peu de s’en rendre compte. Elle avait peur de se sentir prise au piège, de ne pas parvenir à lui dire ce qu’elle pense, faire ce qu’elle sait être la bonne solution. Il prend mal sa pique, elle l’entend, à défaut de le voir. Haussant un sourcil, elle répond du tac au tac sans réfléchir.


Pas de trace de malice dans sa voix, elle ne se moque pas vraiment de lui pour ne plus avoir d’emploi. Elle se demande comment il a pu renoncer à cette dernière pour ce concours mais soit. Elle sait qu’il n’en était pas satisfait, il le lui avait dit quelques mois plus tôt. Mais c’était par ennui, par désir d’action. Peu probable qu’il trouve ce genre d’action dans une carrière de chanteur. Enfin bon, ce qui est fait est fait. S’il tenait à avoir son avis sur la question, il l’aurait contacté. Elle soupire à sa remarque. Ce serait plus facile : une gifle, une réplique bien sentie et elle se tire. Sauf qu’elle sait que ça ne va pas la soulager.


Leur relation a été bien trop entachée pour que tous leurs problèmes puissent être mis derrière avec une simple gifle. Elle a besoin d’en parler. Des excuses, en veut-elle ? Son regard glisse enfin vers Tino, sans rencontrer son regard. De quoi s’excuserait-il ?


Elle se mord la lèvre, essayant de prononcer ces quelques mots qui verbalisent tout le problème. Si rien ne s’était passé entre eux, elle aurait peut-être été surprise d’apprendre qu’il ait trompé sa petite amie, ça ne correspond pas à l’image qu’elle a de lui. Mais pour autant, elle ne lui en aurait pas particulièrement tenu rigueur. Sauf qu’il s’est passé quelque chose entre eux, qu’elle venait de finalement réaliser les sentiments qu’elle n’assumait pas à son égard, et que de l’espoir pour plus entre eux s’est créé. Et c’est ça le problème. Qu’il ait fait tout ça, comme si elle-même n’était qu’un simple coup d’un soir, comme si elle n’avait pas de sentiments pour lui, comme si elle n’était personne en particulier à ses yeux. Mais elle n'y parvient pas.


La tromperie de Tino ? Aucune importance. Ce n'est pas à ça qu'elle pense actuellement, ce dont elle parle. Elle pense à ces soudains aveux au club de danse, à ce silence radio qui a suivi, de cette mise en couple avec une autre femme. Elle tapote contre la table, elle est nerveuse de ce qu'elle s'apprête à faire, à demander. Croisant enfin son regard, elle ose souffler une question.


Elle est là, la peur de n'être qu'une personne remplaçable et jetable à ses yeux. Ancrés dans les siens, elle craignait ce moment, ignorant ce qu'elle verrait, ignorant ce qu'elle ressentirait à ce moment. Et pourtant, tout est clair en le regardant enfin, calmant la tornades qui agitait son esprit

Sa remarque sur son absence d’emploi semble l’avoir fortement vexé, bien qu’elle n’ait pas dit ça méchamment. Il se montre immédiatement plus froid, et Megumi reste muette devant ce qu’il lui dit. Vient-il vraiment de déclarer ce qu’elle a entendu ? Elle se demande bien quelle mouche l’a piquée. La japonaise n’a pas l’impression d’avoir été dure avec lui au point de mériter ce genre de remarques. Prise de court par son comportement, elle tâche de l’ignorer, essayant maladroitement d’exprimer son problème. C’est pour ça qu’elle l’a fait venir après tout, pour essayer de mettre les choses à plat. Elle ose enfin un regard vers lui, et est rassurée en voyant qu’elle ne ressent rien de particulier. Elle craignait que ses sentiments n’aient pas disparus, qu’ils l’empêchent encore d’y voir clair et la poussent à de nouveau ignorer ses propres problèmes pour l’aider. Tout est balayé au murmure de Tino, qui la blesse bien malgré elle. Il trouve qu’elle lui fait une scène… ? Sa voix meurt dans sa gorge, alors que la désagréable sensation d’être une nuisance pour lui fait son chemin. Elle fronce les sourcils, détestant le voir balayé d’un revers de la main et minimiser ce qu’elle tentait de lui dire. L’incompréhension se fait plus forte quand il lui parle du Japon, la colère aussi. Il essaye vraiment de lui reprocher d’être parti chez ses parents ?


Elle ignore comment, mais elle parvient à rester silencieuse alors qu’il continue de se dédouaner de toute responsabilité. Et elle sent son agacement monter en flèche, plus il parle. Vaguement interrompu par la surprise en apprenant que la brune avec qui elle l’avait vu n’était pas « réellement » sa petite amie. Ça ne change pourtant rien, le mal a déjà été fait. Apprendre que ce n’était que pour une enquête ne la soulage pas vraiment, si ce n’est que cela apporte plus de logique à Tino, qu’elle ne voyait pas tromper sa copine. Au moins n’est-il pas devenu une personne entièrement différente. C’est ce qu’elle pense un court instant, avant qu’il n’explose littéralement à son encontre, la faisant reculer légèrement contre son tabouret, muette de stupeur. Sa dernière phrase la blesse, l’atteint avec une force inouïe, et elle retient les larmes qui lui montent aux yeux, coup final d’une série d’événements qu’elle a affronté sans verser de larmes. Elle ne comprend pas le soudain énervement de Tino, a à peine le temps de procéder aux horreurs qu’il vient de lui balancer, qu’il est déjà debout, sa veste en moins. Megumi tente de calmer sa respiration, bouillonnant de l’intérieur. Qu’il parte, elle n’allait pas lui courir après. Elle se mord la lèvre, les yeux fixés sur le bar, essayant vainement de se calmer, de ne pas réagir à son départ. Puis, c’est comme un déclic soudain.
Mais quel putain d’enfoiré.
La jeune femme se lève vivement, plaquant ses mains sur le comptoir du bar, le son raisonnant dans la pièce. Elle tourne la tête dans sa direction, et cette fois-ci, elle ressent bien à nouveau quelque chose de puissant en le regardant. Elle a rarement haï quelqu’un Meg, sûrement parce qu’elle ne se soucie pas assez des gens en général. Mais à cet instant, elle le hait tellement Tino, bien plus qu’elle ne l’a détesté après Rio, bien plus que n’importe qui. Oh, elle l’avait aimé, que ce soit platoniquement ou romantiquement parlant, énormément. Et ça n’alimente que davantage la répulsion qu’elle ressent dorénavant à son égard. Ses paroles ont dégénéré avec une incroyable rapidité, faisant tomber ses dernières barrières. L’amitié et l’amour disparus, la nostalgie de leur passé commun, de leur amitié commune à présent entaché par la rancune. D’un regard des plus noirs, elle reprend la parole, d’une voix gardée basse mais chargée d’amertume.


Ils sont crachés avec colère ces mots. Ses mains tremblent presque sur le comptoir, mais elle les maintient ferment contre ce dernier.


Elle regrette tellement d’avoir ravalé ses mauvaises habitudes au fond d’elle, d’avoir fait fi de sa fierté, tout ça pour dépenser tant d’énergie inutilement pour lui. Si elle avait su que ce serait ça le résultat, elle aurait fait taire sa loyauté et son affection bien plus tôt. Visiblement, il ne se souciait que de sa rupture et de lui, sans songer un seul instant à comment elle se sentait. Elle ne le laisserait pas se faire passer pour la victime alors qu’elle a été aussi loyale qu’elle le peut, alors qu’elle vivait avec des problèmes bien plus graves qu’une pauvre rupture lorsqu’elle se démenait pour lui sortir la tête hors de l’eau. Les mains précédemment mises à plat sur le bar sont à présent serrés, et elle les ramène le long de sa taille, tandis qu’elle se retourne pour lui faire véritablement face.


Son regard vacille un instant, en réminiscence d’anciennes émotions auparavant éprouvées, et Megumi ferme les yeux un instant avant de le regarder à nouveau, l’étincelle disparue au profit d’une sourde colère.  


Si elle n’était pas si énervée, s’il ne lui avait pas remis la faute dessus, sans doute aurait-elle été capable de voir ses propres tords, comme elle avait pu un mois plus tôt. A ce moment, elle était blessée, mais ne le considérait pas seul fautif. Mais là, elle ne peut pas l’admettre, et elle ne veut pas, la colère est trop présente.


Elle ne peut juste plus compter sur lui, pas tant qu’il est dans cet état en tout cas. Megumi se rappelle les brusques changements de ces derniers mois ; Smith, cette protection du FBI, ce déménagement, ses animaux qu’elle n’avait plus, ce roman en cours d’écriture… Il n’avait rien fait pour l’aider dans cette situation, ne la soupçonnait même pas. Et malgré ça, il était persuadé qu’elle était celle lui tournant le dos. Quelle blague. Amère, déçue, mais surtout… lasse.


Avec un soupir, elle ramasse son sac, son contenu brûlant contre sa hanche. Une autre preuve de sa stupidité. Elle le fixe un instant, convaincue que le Tino qu’elle a connu, il n’existe plus et ne reviendra pas. Il n’y a plus qu’un homme triste et pathétique, sans aucun but. Elle le dépasse, commence à s’éloigner vers la porte avant de s’arrêter, une main contre son sac. Elle hésite un court instant puis son regard se durcit en se rappelant ses précédentes paroles. Il veut faire le tri ? Très bien, elle n’allait pas se gêner alors.


Sa gorge se serre, elle sait que ça n’arrivera jamais à présent. Elle se demande depuis quand elle signifie si peu pour lui, et chasse cette pensée pour tourner la tête vers lui. Ce qui était autrefois une vue qui la rassurait, l’emplissait de rancœur à présent. Le regard noir, presque triste de la colère qu’il lance. Elle ne pensait pas que ce serait à lui qu’elle lancerait ce genre de regard un jour, qu’elle lui révélerait ce genre de vérité juste pour le blesser.


Elle part sans un mot de plus, se retenant de claquer la porte du bar derrière elle. Megumi s’arrête, reprenant son souffle. Elle vient vraiment de faire ça ? Le cœur battant encore fort dans sa poitrine, elle fouille dans son sac, d’un geste presque rageur, et en sort le petit tambour du Brésil, pas plus grand qu’un dictionnaire. L’un des premiers souvenirs qu’elle a ramené des missions dans le Sud, le pilon est encore dans son appartement. Sa main tremble légèrement pendant qu’elle y jette un bref regard, nostalgique d’une époque dorénavant derrière elle, ou du moins, qui ne serait plus jamais la même. Se mordant la lèvre en sentant ses yeux devenir brûlants à force de retenir les larmes qui menacent de monter, elle le jette impétueusement au sol, regrettant d’avoir eu la mauvaise idée de l’emporter, d’avoir eu la stupidité de penser qu’ils pourraient repartir du bon pied. Elle s’éloigne aussitôt, se dépêchant de retourner chez elle. C’est bien la dernière fois qu’elle essaye de régler quelque chose avec diplomatie.