C’est vrai, ces dernières semaines n’avaient pas été de tout repos. Depuis son overdose, il avait enchaîné les rendez-vous chez les psychologues, le monde entier pensant qu’il avait voulu mettre fin à ses jours. Puis ses parents n’avaient pas arrêté de lui tourner autour, pour trouver la meilleure parade afin de l’enfermer dans une cure de désintoxication. Ce qui était débile, il n’était pas un grand drogué. Il avait fait un mauvais pas, un seul! Ses amis leurs avaient succédé pour blablater le même discourt. Il s’était disputé avec la moitié de la terre, pour finalement perdre la guerre. Une semaine après son hospitalisation, il s’était retrouvé enchaîné à une maison de fou. Deux longues semaines. On lui interdisait trop de visites, pas de téléphone, pas de musique, rien. Que lui et ses pensées monotones. Heureusement que Domi était venue le voir, malgré les réticences du personnel hospitalisé. Elle avait rendu son monde tellement rose. Il l’avait fait ce jour là... Il avait eu Domi, rien que pour lui. Et depuis, il n’avait que de cesse d’y penser. Il la désirait encore, et tant. Pourtant, plusieurs semaines plus tard, il ne l’avait toujours pas revu. Ils ne faisaient que s’échanger des sms, nombreux certes, mais c’était bien loin de remplacer ses baisers, ses caresses et son parfum. Elle lui avait pourtant promis qu’elle viendrait, et lasse d’attendre, il lui avait donné un rendez-vous fixe, ce soir. Ce qu’elle avait accepté.  

19h. L’heure du jour J. Il avait tout prévu. Il n’était pas doué en cuisine, alors il avait demandé à un traiteur de lui préparer un bon petit plat, une entrée, et un bon gâteau au chocolat en dessert. Qui résisterait au chocolat ? Comme ça, il n’avait que les plats à réchauffer, et la table à mettre. C’était rapide, deux couverts, deux verres. Il avait tout de même joué sur un peu de décoration, le tout, sur la table basse du salon. Il avait fait un grand ménage chez lui aussi, tout était nickel pour recevoir Domi au mieux. Et surtout, pouvoir lui montrer qu’il était un homme responsable... Que lui aussi, il pouvait être un bon mari par exemple ? Ouai, il n’était pas très serein de la savoir à vivre sous le même toit qu’un autre homme, alors il comptait sur sa maturité - oui oui! - pour que peut-être, elle finisse par sauter le pas, quitter Owen, et officialiser leur relation. Un jour. Pas trop loin, ce serait bien!  

L’heure passait, et elle n’était toujours pas là. Elle lui écrivait des sms, prétextant être en réunion. Il soupirait en les lisant, reposant son téléphone sur la table, en s’enfonçant dans le canapé. Puis finalement, il s’était occupé avec une émission débile à la tv, jusqu’à ce qu’enfin, elle toque à la porte. Avant d’aller ouvrir, il vérifiait l’heure sur son téléphone. 21h passé. Elle avait intérêt à ne pas partir trop tôt! Un peu vexé par son retard, il allait donc ouvrir la porte, tout en passant ses mains dans ses cheveux, pour s’assurer être resté présentable. Il avait pris soin de lui pour cette soirée! A peine avait-il déverrouillé la porte, qu’une tornade était entrée.  « Bon, j’espère que tu es bien reposé, voici un petit quelque chose à signer rapidement, c’est un accord où tu promets d’être aussi mignon et gentil que tu n’essaies de l’être devant le public. » Pas un regard, pas un bisou, rien ? Laissant la porte se refermer, il en avait lâché la poigné, il la regardait sans trop comprendre. Droit comme un poteau. Qu’est-ce qu’il avait encore fait pour avoir droit à si peu d’attention ? Il était resté sagement chez lui, puis chez Rinrin. Il n’avait parlé à personne, vu personne. C’était quoi encore... ? Arquant un sourcil, suspicieux, il s’avançait lui aussi vers la table sur laquelle elle venait de déposer des papiers. « Donc pour une lecture rapide, tu t’engages à voir un psychologue deux fois par semaines pour des séances d’une heure, tu dois commencer un traitement antidépresseurs au plus tard la semaine prochaine pour une période de trois mois, tu ne dois pas te promener seul dehors, tu dois toujours être accompagné même si c’est par des amis et… C’était quoi déjà le dernier ? » Oh oui c’était quoi le dernier ? Ses sourcils se fronçaient, tandis qu’il posait ses mains sur ses hanches. Sans trop savoir pourquoi, il sentait que son cœur s’emballait dans sa poitrine. La colère montait en lui en fait... Parce que non, son accord ne lui semblait pas bon du tout. Soudainement distant lui aussi, il prenait place à ses côtés, tout en laissant un bel espace entre eux, puis il prenait en main son papier, commençant la lecture du manuscrit. Plus ses yeux déchiffraient, et plus il serrait les dents. « Ah oui, tous les soirs à 22h tu dois envoyer un message à ton manager pour lui dire que tu vas bien, sans quoi, une milice sera envoyée ici pour être sûr que tu n’aies pas eu une autre overdose. » Une milice ? Ils cherchaient donc à l’emprisonner, encore plus que l’avait fait son ancienne agence, au Japon ? C’était le pompom... Et elle osait lui demander de signer ? C’était une mauvaise blague ? Furieux, il reposait la feuille, non délicatement sur la table, puis il braquait un regard assombrit sur Domi. Il était peut-être son amant, mais il n’était pas non plus sa petite chose. Fallait peut-être qu’elle se mette des limites.  

« C’est une plaisanterie ?! »

S’exclamait-il, espérant qu’elle ne faisait que lui jouer une mauvaise blague pour rassurer ses employés, mais qu’elle ne lui demandait pas réellement de faire ça. Posant ses doigts sur la feuille, il la faisait glisser vers Domi, le long de la table, sans y apposer la moindre signature.

« Je suis désolé Domi, mais je ne signerais pas ça! »

La colère montait tellement en lui, qu’il se demandait même si un jour, il s’était réellement senti dans un tel état. S’il n’y avait pas sa carrière en jeu, il aurait déposé sa démission sur le champ. Mais il y avait là, ses albums en préparations, sa tournée, puis sa petite femme... Qui n’allait pas le rester si elle ne s’occupait pas un tantinet plus de lui, ou même... Si elle osait se ranger du côté des managers avec ce contrat stupide!  

« Qui a écrit ça ? C’est le pire des chantages qu’on m’ait fait! Même sous le label d’Eita j’étais moins censuré! J’ai bientôt 30 ans, je n’ai pas besoin qu’on me materne comme ça! Je vais bien, j’ai eu un accident, et je passe à autre chose! J’ai pas d’idée noire, j’ai aucune drogue ici, et je n’ai pas besoin de parler à un taré qui ne sait même pas écouter! Putain mais c’est pas possible Domi! »

Il se relevait pour faire les cents pas, tout en ébouriffant sa tignasse. S’il n’avait pas eu si peur de devenir chauve avec le temps, il se serait probablement arraché tous les cheveux, tant il était nerveux.  

« Si la seule chose qui t’as motivé à venir ici, c’est pour que je signe cette connerie, tu peux repartir tout de suite... »

Lançait-il après un court silence, debout, non loin d’elle et le bleu de ses yeux, s’étant arrêtés sur sa jolie silhouette. Son cœur, emballé, se serrait maintenant, sous ses mots. Mais il avait comme l’impression que peut-être, au centre, elle s’était jouée de lui plus qu’autre chose. Elle avait eu ce qu’elle voulait, elle s’était envoyée en l’air avec un petit jeune, elle avait pris son pied, puis maintenant, elle n’avait plus besoin de lui. Si ce n’est d’en faire le pantin parfait pour redonner de jolies couleurs à son label ? Sans lui... Il la fixait avec une telle déception sur le visage. Ses yeux même, le piquaient tant il avait envie d’en pleurer, furieux.  

Elle s’était levée, en énonçant son nom. Lui, il n’avait pas cillé. Les yeux toujours aussi sombres, il la fixait avec dédain, franchement frustré et agacé qu’elle ait pu songer une seule minute, à le materner de la sorte. « a ne me fait pas plaisir tu sais… Mais tu dois vraiment signer cette feuille, d’accord ? Les choses sont… Un peu compliquées avec ce qui s’est passé. S’il te plait, fais un effort. Tout le monde panique. Je sais que c’était un accident, je te crois. Mais ce n’est pas encore le cas de tout le monde… » Cette fois, il échappait un petit rire ironique, même nerveux. Il se reculait, pour sortir des mains de Domi. Il n’avait guère l’envie du moindre câlin maintenant. Il avait plutôt envie de tout plaquer et envoyer chier tout le monde. C’était sûrement une réaction excessive, mais il avait bien trop souffert de la pression qu’on lui imposait au japon. Il avait tout quitté pour la liberté que lui offrait les States, pas pour un stupide contrat... « C’est tout ce qu’on a trouvé pour calmer les marques et les partenaires qui te soutiennent… Si tu n’envoies pas de messages à ton manager une soirée ou deux, personne ne le saura, ça restera juste entre nous… ? » Elle lui volait un baiser, et lui il détournait bien vite la tête, boudeur. Elle tentait une nouvelle approche, en passant ses bras autour de son cou. Il l’ignorait toujours autant, bouillonnant de l’intérieur comme jamais. « Dis-moi ce que tu veux pour compenser d’accord ? Et je te le donnerai. Mais s’il te plait, s’iiil te plait, tu dois vraiment signer ça. C’est pour toi que je fais ça et aussi pour ta carrière. » Elle avait conscience qu’elle avait à faire à une tête de mule ? Et que bien que faible à sa jolie frimousse, il n’était certainement pas aussi bête qu’elle semblait le penser. Être son amant oui, son pantin, non. Soufflant, il s’enfuyait de son étreinte qu’il ne savourait de toute façon pas, puis il revenait vers le canapé. Il se penchait vers la table basse, et attrapait ledit contrat entre ses doigts. Sans une seule once de culpabilité, il le déchirait en deux, tout en serrant les dents. Puis chacune des deux parties, il les redéchirait en deux. Puis tous ces petits papiers, il les gardait en main pour rejoindre la cuisine, et les jeter dans la poubelle. Il cherchait ses mots pour être le plus clair possible avec elle, alors il était resté silencieux. L’ambiance était soudainement pesante, mais il n’en souffrait même pas. Il en avait besoin, pour lui faire comprendre qu’il se sentait vraiment pris pour un imbécile. Alors marchant vers elle, il s’arrêtait face à Domi, enfonçant avec insistance, ses yeux dans les siens.

« Arrête de me prendre pour un imbécile avec ta petite voix charmeuse! Sérieusement Domi, tu te rends compte de ce que tu fais ?! »

Il était tellement sidéré qu’elle puisse en venir là. A jouer de ses petits regards pour le supplier d’en faire un parfait petit pantin. Ce n’était pas pour ça qu’il s’était engagé avec elle, encore moins pour ça qu’il avait signé avec son label. La colère l’entourait tant, qu’il n’arrivait plus du tout à faire descendre cette pression.  

« Je m’en fous de ce que pense les gens. Si j’ai signé avec tes studios, c’était pour sortir de la merde qui m’étouffait à Tokyo. Je retomberais pas là-dedans! Je ne dois rien à personne, encore moins à tes petits soldats. J’ai pas besoin d’être materné! »

Pouffant encore, il lui adressait un dernier regard froid, avant de se rediriger vers le canapé. Là, il se laissait retomber dedans, croisant ses bras contre son torse avant de finalement en relever un, pour se mordiller l’ongle de son pouce, tant il était nerveux.

« Si j'veux sortir je sors, et tout seul! Va falloir que je prenne même un rendez-vous et une heure fixe pour aller pisser ?! Sérieusement... Si t’en a d’autres des idées aussi connes, garde les pour toi. »

Il venait poser l’un de ses pieds sur la table basse, pour la pousser. Il n’avait plus faim. Plus envie de câlin non plus. Elle l’avait déçu et franchement, s’il s’écoutait vraiment, il l’aurait mise à la porte toute de suite. Il se retenait sans même savoir comment. Il avait mal au cœur tant elle était en train de lui faire du mal. Il avait réellement l’impression qu’elle s’entichait de lui juste pour en faire ce qu’elle voulait. Après tout, c’était peut-être ça. Elle a Owen, il ne répond plus à ses attentes, alors elle songe à adopter un petit lionceau tout frais, qu’elle pourrait forger à sa manière ?

« Je suis désolée, je ne pensais pas à mal. C’est juste que c’est tout ce que j’ai trouvé. Je me disais que juste pour quelques semaines ce serait supportable. … Ok. Je trouverai autre chose. » Elle s’était installée dans un fauteuil, en face de lui. Il n’y prêtait même pas attention, trop en colère pour ça. S’il levait le moindre regard vers elle, malgré ces jolis yeux bleus, se serait pour la fusiller de ses belles prunelles. Non, il restait silencieux, les dents serrées, et boudeur. Il ne voulait rien signer, rien. Il voulait juste être lui-même, et ne surtout pas être enfermé dans quoi que ce soit. S’il avait envie de sortir, il sortirait. Tout comme s’il avait envie de se saouler, ou de sauter à l’élastique. Il n’était plus le gamin qu’il était quand sa carrière a débuté au Japon. Il était adulte non ? « Je crois que je vais abandonner NY Studios quelques temps. » Il voulait lui faire la tête, longtemps, peut-être même jusqu’à la fin de sa vie, tant il était agacé. Mais la réplique de Domi l’arrêtait net. Perplexe, il détournait les yeux vers elle, et non pas pour la fusiller. Certes, ses sourcils restaient froncés, mais bien plus par incompréhension. « Je crois que… Je n’arrive plus à rien. C’est vrai, tout le monde pense que je suis puissante et inébranlable, c’est peut-être le cas, je ne sais pas. Mais ces dernières semaines je crois que je suis en train de toucher la limite. » Est-ce qu’elle pensait tout ça à cause de lui ? Parce que franchement, des gros scandales, il n’y en avait pas non plus centre mille ? Jahed et son histoire avec la petite mineure pourquoi pas, et encore. Misha se doutait bien que rien n’était vrai là-dedans. Il n’y avait que lui qui provoquait des séismes, mais elle le savait avant même de l’engager non ? Il avait déjà secoué plus d’une fois Tokyo quand il était sous Eita. La presse l’adore rien que pour ça. S’il arrêtait, Closer se nourrirait de quoi ? « J’ai l’impression de tout rater en ce moment. Et… Je voulais juste passer une bonne soirée avec toi pour compenser. Je n’imaginais pas qu’on se dispute comme ça. Je suis désolée. Pas parce que je suis ta patronne, mais parce que tu es important pour moi, et que je ne veux pas que tu te sentes mal. Et encore moins à cause de moi. » Elle était loin de tout rater pourtant. Si sa maison de disque en était arrivée là, c’était bien grâce à elle et uniquement à elle. Ouai, il aurait eu des tas de choses à lui dire pour lui remonter le moral et la pousser à rester. Sauf qu’il était tellement en colère, qu’il gardait le silence, se contentant de baisser les yeux. « Est-ce qu’on peut essayer de passer une bonne soirée tous les deux… ? Ou… Tu préfères que je m’en aille… ? » Il haussait simplement les épaules, parce qu’il n’avait plus envie de lui adresse la parole. Puis après un long silence, il poussait un franc soupir, avant de lever un court instant ses yeux vers elle. Sans croiser les siens, il les fuyait plutôt. Mais juste assez pour que son cœur se serre dans sa poitrine, à la voir aussi mal. Pourtant, il ne fallait pas qu’il se laisse faire. Il avait bien trop l’impression qu’elle voulait faire de lui son pantin. Il ne devait pas faiblir devant sa, peut-être, mise en scène...

« Ecoute... Je sais pas ce qui se passe là-haut dans vos bureaux, mais je doute que le problème ce soit toi. Ta maison de disque, tu la gère depuis assez longtemps pour que tout le monde sache que tu fais bien les choses. Ou à quelques choses près, si on oublie ce stupide contrat... »

Il parlait froidement, mais il espérait qu’elle comprenne là où il voulait en venir.

« T'es douée et faite pour ça. Je suis pas certain que si tu sature, le problème ce soit ton boulot. »

Il marquait un très court silence, le temps de fixer sa silhouette. Et surtout, pour qu’elle puisse y réfléchir deux secondes. Non, le problème de Domi, il est dans sa vie privée, pas dans son travail.

« Tu t’ennuies chez toi. Et tu prends pas les devants. Tu mènes tout d’un bras de fer au travail, mais chez toi, tu sais pas remettre les choses en ordre. J’suis sûr que tu me considère comme la solution à tout ça même, que je vais combler ton ennuie. Mais ça ne fait que repousser ton éternel problème. T’as besoin de respirer dans ta vie, pas au travail. »

Et il fallait surtout qu’elle en parle avec son mari, et qu’ils prennent une décision une bonne fois pour toute. Qu’ils tentent de sauver leur mariage, ou qu’ils s’arrêtent là. A quoi ça rythmait ? Elle se bousille dans un ennui marital, elle culpabilise et stresse à tromper son mari... Et lui dans tout ça, il se mage en pleine figure tout ce qui la démange, à travers un stupide contrat ?

« Si quand on se voit c’est pour entendre parler du boulot, j’ai pas envie Domi. J’veux pas que tu sois là à épier chacun de mes fais et gestes. Ni à m’imposer des couvres feu. J’suis pas un môme. Encore moins un pantin. Et ce soir, tu m’as juste donné cette impression. Je sais que je peux être marrant, et que je suis sûrement le mignon petit jeune qui s’est intéressé à tes beaux yeux. Mais c’est pas pour autant que je suis là juste pour faire joli. Et j’aimerais avoir quelque chose de sérieux peut-être une fois dans ma vie. C’est pas comme ça que je les imaginais les choses... »

Lui il se voyait plutôt aller au cinéma mains dans la main, se pointer ensemble à de superbes soirées mondaines, et éblouir tout le monde sous les flashs des photographes. Or Domi elle, elle ne semble que vouloir faire de lui la petite starlette parfaite de son label, qui serait disponible pour ses petites envies de tendresses. Tout ça pour nier l’évidence que son mariage est un vrai massacre. C’était peut-être une belle connerie de lui avoir couru après comme ça. Il voulait s’amuser, et puis finalement, il en vient à rêver de bien plus... C’était tellement bête. Qu’est-ce qu’il pouvait attendre d’une femme mariée ? Et sa patronne de surcroît. Frustré et déçu, il rabaissait ses yeux vers la petite table pour se servir un bon gros verre de vin. Et il le sirotait comme un jus d’orange, ne se souciant guère des interdictions infligées par ses médecins.