“ What now ?

 
Ça y’est, Noel était passé et le nouvel an approchait à grands pas. Domi était bel et bien de retour dans les locaux de NY Studio INC, et le moins qu’on puisse dire, c’était que la patronne avait retrouvé son immense pêche d’antan. C’est-à-dire, les murs qui tremblent quand elle crie et les employés qui s’enfuient sur son passage, en abusant à peine. Après tout, à présent, elle se sentait si heureuse, si libre. Elle passait des heures au téléphone avec ses amies pour leur parler de ce seul et même sujet : son insémination qui aurait lieu la semaine prochaine. Elle était encore en plein dans les bilans de santé, les prises de sang et tout le reste pour être sûr que tout allait bien. Mais savoir que bientôt, son vœu le plus cher se réaliserait et qu’elle aurait enfin un petit bout dans son ventre, la rendait plus que joviale. Son divorce était enfin devenu public, elle l’avait annoncé dans une émission deux jours avant et avait même ajouté que le prochain qui osait l’appeler encore Mme Legends se prendrait un coup de poing dans le nez. C’était Mitchell maintenant. Na !


Evidemment, partout où elle allait, les paparazzis, les journalistes et animateurs lui posaient toujours cette même question. Où les choses en étaient-elles avec Misha Lukasz ? Ce n’était pas une surprise pour elle étant donné que tout le monde attendait la suite de l’histoire, comme s’il s’agissait d’un feuilleton. Alors chaque fois, elle répondait par cette même phrase. « Je suis heureuse. Il semble heureux aussi. C’est tout ce qui compte. » Le reste ne regardait absolument personne, de toutes façons. Et c’est encore ce qu’elle avait dit ce matin, avant de revenir dans ses bureaux, saluant à peine sa secrétaire à la porte, et jetant ses chaussures à gauche et à droite comme s’il s’agissait de sa chambre. Reprenant son téléphone entre son oreille et son épaule, elle prit un magasine sur son bureau et l’ouvrit avec un sourire.


- Les nouvelles collections sont superbes, tu as vu ça. Je vais faire mon défilé retour en Janvier, je devrais en profiter tant que je n’ai pas un énorme ventre haha.


Elle courut devant son miroir pieds nus afin de regarder sa silhouette. Le mannequinat lui avait pas mal manqué, ça faisait bizarre de reprendre. Mais c’était comme la cerise sur le gâteau de son bonheur actuel. Non, rien ne pouvait la rendre plus heureuse. Elle s’était même un peu coupé les cheveux pour la changer. Pageant son magasine de mode, elle continua sa conversation en se retournant :


- Ca m’avait manqué les podiums, j’espère que je serais à la hauteur…


Quelque chose l’interrompt. Une présence qu’elle était loin d’imaginer voir dans son bureau. Son sourire disparu doucement et son regard figé sur lui ne bougeait plus. Son amie continuait de parler au téléphone, mais c’était comme si voir Misha l’avait complètement téléportée dans une autre dimension. Elle ne l’avait pas revu depuis le gala, où elle avait refusé catégoriquement et froidement qu’il lui adresse la parole.


- Euh… Je te rappelle.


Domi raccrocha immédiatement et ferma le magazine, croisant les bras, peu sûre d’elle. Elle se demandait ce qu’il faisait ici. Dans ses souvenirs, depuis sa présence à NY Studio, il n’avait jamais mis les pieds dans son bureau. Alors pourquoi… ? Elle baissa la tête un moment. Depuis quand il était là d’ailleurs ?? Si ça se trouve elle était tellement obsédée par sa conversation qu’elle ne l’avait même pas remarqué depuis qu’elle était entrée. Il l’avait peut-être vue jeter ses chaussures comme une gamine.


- Salut. Je… ne t’avais pas vu. Que puis-je… ?

Il avait bien réfléchi. Depuis Noël, il avait tourné ça en rond dans sa tête. Tout avait commencé au lendemain du gala de charité. Un homme de chez Sony Music lui avait demandé une entrevue, qu’il avait accepté, sans trop savoir pourquoi. A bout, fatigué, et encore presque ivre mort de la veille. Lunette de soleil sur le nez malgré le temps grisâtre, il avait caché ses cernes derrière ses carreaux teintés, afin de savoir pourquoi ce gars tenait tant à lui parler. Et bien vite, face à l’homme en costume noir, il avait compris et déduit les choses. Les rumeurs vont vites, et chez Sony, on avait eu vent qu’entre Misha et Domi, plus rien n’allait bien. Or d’après eux, Misha était une poule aux œufs d’or. Faut dire que chez NY Studios, bons nombres d’artistes pouvaient se vanter d’être en haut des top 50, mais trois d’entre eux y régnaient d’une main de maître : Abel, Jahed et Misha. Si Domi ne voulait plus soigner son petit poulain, eux étaient prêt à le faire, et très cher. On lui faisait de belles promesses, un avenir des plus brillants. Et en vue de son état, il était plutôt facile de l’amadouer. Il ne pensait qu’à une chose : S’éloigner de Domi. Il avait conclu ce rendez-vous d’une poignée de main, en expliquant qu’il y réfléchirait. Dans le fond pourtant, sa décision était déjà prise. Il devait quitter les studios de Domi. Rien n’irait bien autrement. Elle se vengerait probablement sur lui pour rien. Et raser les murs à chaque fois qu’il se rend au label, allait être vite stressant et lourd. Il lui suffisait juste de l’affronter, une dernière fois. Il ne voulait pas qu’elle apprenne ça de son manager, encore moins par un type de chez Sony ou dans la presse. Il était quand même un minimum adulte, il pouvait régler ça tout seul.

Alors ce matin-là, il avait poussé les portes des NY studios bien matinal. Sans même adresser un regard à qui que ce soit, d’un pas déterminé, pourtant bien angoissé, il s’était engouffré dans l’ascenseur pour se rendre aux étages supérieurs. Le couloir face à lui, dès l’ouverture des portes, il l’avait traversé si vite, que même la secrétaire de Domi n’avait eu le temps de réagir. Il s’apprêtait à toquer à la porte du bureau, quand il réalisait que cette dernière n’était que poussée, et non fermée. Ses petits yeux bleus, encore si fatigués, s’étaient penchés doucement vers l’encolure. Domi était là, gigotant du bureau jusqu’à un miroir. L’oreille collée à son téléphone. Elle était souriante, vivante, bien plus que la dernière fois. Ce qui ne faisait qu’accentuer son mal être. Son cœur était toujours aussi fermé, serré, et vide. Et tandis que ses yeux suivaient la fine silhouette de celle qui le faisait tant souffrir, ce sentiment devenait encore plus oppressant. Il savait bien que tout cela était de sa faute, mais d’un autre côté, il ne pouvait plus supporter une relation si cachée, si officieuse. Domi n’était-elle pas plus libre et plus heureuse loin d’Owen ? Lui, il était persuadé que si.  

Maladroitement, il toquait discrètement à la porte avant de la pousser. Domi ne semblait pas l’avoir entendu, mais il savait qu’elle ne tarderait pas à réaliser sa présence. Alors il fermait la porte délicatement derrière lui. Se tournant vers la silhouette de Domi, il se raclait la gorge, tentant de se faire savoir présent. Le temps qu’elle ne le réalise, il passait ses yeux sur l’intérieur du bureau, songeant enfin qu’il ne s’y était encore jamais rendu. Elle l’y avait invité plus d’une fois, mais il avait toujours refusé. Soit parce qu’il avait peur qu’on les surprenne, ou parce qu’il boudait. Dans sa contemplation des lieux, il revenait à lui quand le silence fut. Domi avait bugué, et seule la personne à l’autre bout du fil faisait la conversation. Alors timidement, les yeux océan de Misha s’étaient arrêtés sur Domi, qui lui tournait encore le dos. Mais dans le miroir, il pouvait voir cette mine surprise qu’elle affichait. « Euh… Je te rappelle. » Non, il n’avait pas entendu toute sa conversation, ni même ne l’avait vu jeter ses chaussures. Ce qui était peut-être bien dommage, parce qu’il aurait trouvé ça mignon. « Salut. Je… ne t’avais pas vu. Que puis-je… ? » Un silence s’en suivait. Misha ne savait pas vraiment par où commencer, et la simple présence de Domi, à seulement quelques mètres de lui, le déstabilisait fortement. Alors ravalant difficilement sa salive, dans cette gorge si asséchée, il faisait quelques pas vers le bureau de Domi. Ses doigts venaient se poser sur le dossier arrière du siège “invité” face au bureau, et timidement, il laissait l’azure de ses yeux venir affronter ceux de sa patronne.  

« Je... Je dois te parler. »

Nerveusement, il serrait le dossier de cette chaise dont ses doigts semblaient se servir pour canaliser tout le stresse. Non seulement il était difficile de faire face à celle qui hantait tant ses pensées, mais d’autant plus quand il s’agit d’annoncer à sa patronne, qu’on démissionne.  

« J'ai pris une décision, pour ne plus t’importuner. »

Importuner, il ne savait même pas où il avait appris ce mot. L’anglais n’étant pas sa langue natale, il employait souvent des thermes plus simplistes.  

« Chez Sony, ils m’ont contacté cette semaine. Ils veulent que je signe chez eux. Alors je pense que je vais accepter. Comme ça, tu seras tranquille. »

Il n’avait imaginé qu’une telle décision, serait si difficile à prendre. Au moment même ou il l’avait dit, assumé, ses yeux s’étaient embués. L’envie de pleurnicher était de retour, mais il ravalait ses larmes dans un reniflement. NY Studios, c’était avec eux que tout avait commencé. C’était eux qui étaient venus le chercher à Tokyo. Eux qui lui avaient proposé de quitté Eita Ent, et B.A.G. Eux qui lui avaient donné une chance immense, de devenir plus grand, de devenir Misha Lukasz, et non pas juste Misha, le leader des B.A.G. Si aujourd’hui, il voyage à travers le monde entier pour performer, c’est grâce à eux. Ou grâce à Domi, car dans le fond, c’est certainement elle qui leur a demandé de le ramener ici. Et c’est aussi par elle que tout finirait dans ces studios là. L’histoire continuerait pour lui, sous un autre contrat. Pas grand-chose ne changerait dans le fond, si ce n’est qu’après ça, ils n’auraient plus à faire semblant tous les deux.

“ What now ?

@Misha Lukasz

Un long silence s’était installé, Domi ne quittant pas le jeune artiste des yeux. Un silence qui en disait long pour la patronne, qui sentait tout de suite que quelque chose d’inhabituel allait se passer d’ici quelques secondes, quelques minutes. Misha semblait comme ne plus oser ouvrir la bouche. Le cœur battant, Domi resta dans l’attente, retenant presque son souffle. « Je... Je dois te parler. » Elle l’observait s’approcher et serrer le dossier du siège, sentant que de l’angoisse était en train de hanter son ex-amant. « J'ai pris une décision, pour ne plus t’importuner. » Tout de suite, elle fronça les sourcils et entrouvrit les lèvres, dans l’incompréhension. Une décision pour ne plus l’importuner ? Qu’est-ce que s’était que ça ? Elle entendait de la culpabilité dans sa voix, comme une volonté de s’automutiler ou de se punir. « Chez Sony, ils m’ont contacté cette semaine. Ils veulent que je signe chez eux. Alors je pense que je vais accepter. Comme ça, tu seras tranquille. »


Domi ouvrit des yeux énormes. Une longue minute de silence s’écoula, son cœur battait si fort dans sa poitrine qu’elle pouvait presque l’entendre. Un mélange d’émotions était en train de l’envahir. De la colère ? De la tristesse ? Elle ne savait plus, peut-être un sentiment nouveau ? Les mots de Misha résonnaient dans sa tête. Sony. Je vais accepter. Tu seras tranquille. Pourquoi disait-il une telle chose maintenant ? Elle poussa d’une voix à peine audible, remplie de questionnement :


- Quoi… ?

Il voulait partir. Quitter Ny Studio. Ces connards de Sony l’avaient approché dans le dos de la patronne et l’avait attiré avec peut-être une offre intéressante, ou quelque chose d’autre. Mais quoi ? Pourquoi venait-il à prendre une telle décision, qu’avaient-ils put faire de si incroyable pour le convaincre ?? Il avait tout ce dont il avait besoin à NY Studio. Il était l’un des artistes que la compagnie traitait comme des princes. Alors que voulait-il de plus ? La paix ? La tranquillité intérieure ? Calmer cette voix en lui qui lui disait qu’il avait fait une faute et qu’à présent il devait rester loin d’elle ? Les pensées de Domi se transformèrent en un véritable champ de bataille, elle n’était même plus sûre de pouvoir répondre quelque chose de correct. Alors, complètement prise dans les sentiments, elle marcha rapidement jusqu’à sa chaise et eut un faible sourire, la main sur la souris, les yeux sur l’écran de son ordinateur.


- Ces mecs sont nuls… Ils sont nuls à chier chez Sony, qu’est-ce que tu leur trouves ?? Je suis meilleure qu’eux sur tous les plans, je rapporte plus d’argent, j’ai plus de pouvoir. Ny Studio s’entend avec les plus grandes salles qui soient, les meilleures émissions, ces idiots ont juste des artistes au rabais alors pourquoi tu…


Sa voix faiblissait de plus en plus, au fur et à mesure qu’elle parlait. Elle reposa les yeux sur lui, comme pour chercher quelque chose.


- Dis-moi ce que tu veux. Quoi ? Une meilleure paie ? Un nouvel appart ? Je peux te donner tout ce que tu souhaites ici, Sony ne vaut même pas la moitié de ce bâtiment, alors pourquoi tu veux partir ???


Comme réponse, elle entendait cette phrase qu’il avait prononcé quelques minutes plus tôt, et étrangement, son cœur se déchira. « Comme ça, tu seras tranquille. » Avait-il dit. Il voulait simplement éteindre l’incendie qui s’était allumé entre eux avec le temps et qui les avaient réduits à néants… En s’éloignant d’elle. Et quand elle remarqua les larmes dans les yeux du jeune homme, un poids s’installa dans son estomac et sa gorge se serra. Elle se serra si fort qu’elle n’osa plus dire un mot, de peur qu’il perçoive le brisement qui commençait à naitre en elle. Non pas un brisement commercial ou financier dut au départ d’un artiste, mais plutôt émotionnel. Quand la dernière page du livre est tournée et qu’il ne restait plus qu’à le fermer pour de bon.


- A Sony ils sont… Nuls.

Quand la voix de Misha s’éteint, il y eu dans le bureau, un profond silence. Un silence gênant, qui ne faisait qu’accentuer le mal être de l’artiste. Il était persuadé que, son cœur battant si fort dans sa poitrine, elle allait finir par l’entendre, tant il n’y avait ici aucun bruit. Le plus étrange, restait tout de même la réaction de la jeune femme. Elle s’était arrêtée, comme en état de choc. Les yeux grands ouverts, elle semblait dans une incompréhension des plus totale. « Quoi… ? » Finit-elle par murmurer, avant de se diriger vers son ordinateur, tombant sur sa chaise de bureau. Sa main s’abattait sur sa souris, sans que Misha ne comprenne ce qu’elle pouvait bien avoir d’urgent à chercher sur le net. Perplexe, paumée, et toujours aussi mal, il la fixait de ses yeux bleus, à son tour sans n’y rien comprendre. « Ces mecs sont nuls… Ils sont nuls à chier chez Sony, qu’est-ce que tu leur trouves ?? Je suis meilleure qu’eux sur tous les plans, je rapporte plus d’argent, j’ai plus de pouvoir. Ny Studio s’entend avec les plus grandes salles qui soient, les meilleures émissions, ces idiots ont juste des artistes au rabais alors pourquoi tu… » Cette fois, vraiment, Misha n’y comprenait plus rien. Elle semblait mal le prendre, elle s’offusquait, alors que quelques jours plus tôt, elle lui avait bien fait comprendre de se tenir loin d’elle ? Quand les yeux perçant de la dirigeante, se reposaient sur lui, Misha se redressait brutalement, presque tétanisé. Il ne trouvait rien à dire, tant il nageait dans l’obscurité. Les paroles de son ex-maîtresse, en total désaccord avec ce qu’elle avait pu demander plus tôt. « Dis-moi ce que tu veux. Quoi ? Une meilleure paie ? Un nouvel appart ? Je peux te donner tout ce que tu souhaites ici, Sony ne vaut même pas la moitié de ce bâtiment, alors pourquoi tu veux partir ??? » C’était donc ça ? Qu’une question d’argent ? Ne représentait-il plus rien à ses yeux, qu’un bon paquet de billets ? C’était une vraie descente émotionnelle. Les lèvres tremblotantes, autant que ses membres, il finit par se laisser tomber dans le siège “invité”, face au bureau de Domi. Le dos raide, les mains sur ses cuisses, il baissait les yeux, comme un enfant face à la directrice de l’école après une grosse bêtise. Pourtant, là, il n’avait rien fait de mal. Il voulait juste éteindre l’incendie. Il était passé telle une tornade dans la vie de Domi, il le savait bien. Maintenant, il fallait qu’il assume, qu’il aille voir ailleurs, et qu’elle, elle se reconstruise. C’est ce qu’elle veut. Elle le lui a bien fait comprendre. « A Sony ils sont… Nuls. » La respiration aussi tremblante que lui, il reniflait encore, et discrètement, il venait essuyer le coin de ses yeux, avec son poignet. Il ne voulait pas pleurer, pas devant elle. Pas maintenant. Ses yeux pourtant rougis, c’était comme tel.

« Y’a donc que l’argent qui compte... »

Murmurait-il, brisant le silence installé depuis plusieurs secondes. Sa voix toute aussi brisée, il ne pouvait pas cacher le mal être intérieur qui le rongeait. La culpabilité, mais aussi la déception. Il penser compter un peu plus que ça pour elle, mais finalement, il n’était qu’une rentre de plus ?

« Je m'en fous, d’un appartement, ou de plus d’argent. Tu m’as demandé de te laisser tranquille... »

Il s’arrêtait, quelques secondes. Son regard bleuté se relevait doucement vers Domi, hésitant, et désillusionné. Même dépité. Il l’avait blessé, il le savait. Mais il ne méritait quand même pas de n’être plus vus comme autre chose qu’un contrat, et des billets verts ? Lui aussi se sentait blessé, autant qu'elle maintenant. Entre ce qu'elle lui avait fait subir au gala, et maintenant, il avait l'impression de mourir de l'intérieur.

« Je ne comprends pas... Je comprends plus. Domi, c’est toi qui voulais ça. Si je reste ici, ça ne rimera à rien! J’vais raser les murs, par peur de te croiser. Si on ose s’adresser la parole, le monde entier nous juge! … Je voulais juste m’excuser, au gala. Et tu m’as envoyé bouler comme jamais. Je me suis éloigné, pour ne pas t’étouffer, pas pour t’abandonner! Et franchement, je comprends plus rien! »

Sans vraiment s’en rendre compte, les larmes s’étaient échappées de ses paupières, roulant le long de ses joues et son menton, mal rasé. Il était fatigué, dans le fond, il ne maîtrisait plus grand-chose. Il ne comprenait plus rien non plus, et il était si à bout, qu’il n’avait même plus la force de tenter de comprendre.

“ What now ?

@Misha Lukasz  

Domi ne parvenait plus à détourner le regard, ses yeux étaient figés sur Misha, comme n’osant plus regarder ailleurs, comme si elle avait peur de perdre la moindre miette de ses gestes. Voilà qu’il s’écroulait sur le siège, l’air dépité, et Domi avait juste une crainte épouvantable : que sous le poids de tout ça, il finissait par lâcher et se mette réellement à pleurer. La patronne pouvait voir qu’il retenait ses larmes. Elle qui avait accumulé tellement de haine et de colère contre lui avec le temps, et encore plus en le voyant à ce gala avec cette fille… Le voir aussi misérable ne pouvait certainement pas la laisser indifférente. Comme si dans le fond, il se forçait à partir, et tout ça pourquoi ? Pour qu’elle soit tranquille ??? « Y’a donc que l’argent qui compte... » Non !!! Mais ce cri était resté quelque part au fond de ses pensées. Bien sûr que non que l’argent ne comptait pas, à vrai dire, elle s’en fichait complètement à ce moment précis. Mais de l’autre côté, elle refusait catégoriquement de s’avouer qu’elle ne voulait pas qu’il s’en aille comme ça. C’est vrai, elle voulait la paix, elle voulait être seule, qu’il la laisse tranquille. Elle avait accepté ses excuses par texto, désirait plus que tout tourner la page et passer à autre chose, mais ce gala avait réveillé comme une trahison pour elle. Comme si le destin avait focus la lumière sur la réalité, oui elle était en colère, mais si elle en avait réellement fini avec ce Misha Lukasz, elle n’aurait pas eu cette crise de colère au gala en le voyant avec une blonde. Mais non. Jusque maintenant elle refusait de l’avouer.


« Je m'en fous, d’un appartement, ou de plus d’argent. Tu m’as demandé de te laisser tranquille... » Pourquoi est-ce qu’elle avait aussi mal alors que c’était exactement ce qu’elle voulait, qu’il la laisse tranquille ? Ses pensées n’avaient plus le moindre sens. Cette fierté dont elle avait toujours fait preuve la poussait à se mentir à elle-même. Et quand le chanteur posa ses yeux bleus sur elle, impossible pour Domi de tenir son regard. Elle le détournait immédiatement, parce qu’elle savait que dans un moment pareil, pas le moins du monde elle ne pourrait l’observer larmoyant… Sans se mettre à pleurer elle aussi. « Je ne comprends pas... Je comprends plus. Domi, c’est toi qui voulais ça. Si je reste ici, ça ne rimera à rien! J’vais raser les murs, par peur de te croiser. Si on ose s’adresser la parole, le monde entier nous juge! … Je voulais juste m’excuser, au gala. Et tu m’as envoyé bouler comme jamais. Je me suis éloigné, pour ne pas t’étouffer, pas pour t’abandonner! Et franchement, je comprends plus rien! » La tête baissée, chaque mot que Domi entendait était comme une lame. Elle triturait ses doigts sur ses genoux, sans savoir quoi dire. La voix triste et brisée de Misha la paraissait comme insurmontable. Et alors qu’elle leva les yeux sur lui pour lui répondre, ces larmes qui avaient parcouru la joue du jeune homme la terrassèrent en une seule fois. Rapidement, elle cacha ses yeux derrière ses mains, comme pour ne pas à voir une telle chose. La voix brisée, elle finit par ouvrir la bouche, toujours derrière ses mains.


- Je voudrais te parler, mais si tu pleures… Je ne vais pas y’arriver…


S’il ne changeait pas de décision au niveau de son départ chez Sony, elle se devait au moins d’être la plus honnête possible avec lui, et ce, même si ça lui coutait. Il avait eu l’audace de se présenter à son bureau dès le matin et de lui dire tout ça. Peu d’hommes auraient fait une chose telle. Elle baissa ses mains et regarda en l’air comme pour retenir ses larmes et continua :


- C’est vrai, j’ai été terriblement froide au gala mais j’étais tellement en colère. J’ai eu l’impression que tu te fichais de moi. A te pavaner là avec cette fille, si jolie. Flirter avec elle devant tout le monde. J’ai pensé que tu te jouais de moi pour faire une chose pareille alors je voulais que tu restes loin de moi et que tu ne m’approches plus, j’étais tellement en colère, j’étais jalouse.


Combien de temps est-ce qu’elle se retiendrait de verser une larme ? Pas si longtemps que ça, ses yeux étaient déjà bien trop humides pour en contenir plus. Elle baissa la tête regardant ses mains et murmura :


- J’ai plus envie de souffrir Misha, j’ai supporté avec Owen je ne veux juste pas que ça recommence. Alors je me suis entourée d’une muraille en me promettant de ne plus faire n’importe quoi, de ne plus souffrir comme je l’ai fait, je ne veux pas vivre ça deux fois.


Elle essuya ses yeux d’un revers de la main, quand une pensée lui traversa l’esprit, une pensée qui la rendait à nouveau froide, blessée et en colère :


- Cette fille est chez Sony, donc tu veux la rejoindre ?

Désemparé, le souffle irrégulier, il baissait honteusement les yeux, alors qu’elle, elle cachait les siens derrière ses mains. Toujours forte, impassible, et pourtant ce matin, elle se cachait. Elle cachait une émotion. Mais Misha ne parvenait pas à savoir si c’était de la colère, ou de la tristesse. Est-ce qu’elle avait juste l’impression qu’un pigeon aux œufs d’or lui échappait, ou bien avait-elle encore un semblant de sentiment, qui se brisait à le savoir s’éloigner ? Il espérait la seconde option, il l’espérait vraiment fort, le cœur serré dans sa poitrine. Mais il avait juste l’impression qu’elle avait tiré un trait, en gras, sur leur idylle, et qu’elle n’espérait que de sa part, du silence. Alors il n’arrivait pas à rester optimiste, persuadé qu’elle ne voyait plus qu’en lui, un paquet de petits billets. « Je voudrais te parler, mais si tu pleures… Je ne vais pas y’arriver…» Il inspirait, fermant sa bouche, tentant de contrôler ses émotions, comme si elle venait de lui en donner l’ordre. D’un revers de main, il s’essuyait les joues, puis de ses paumes, les yeux. Il reniflait, n’osant toujours pas la regarder. « C’est vrai, j’ai été terriblement froide au gala mais j’étais tellement en colère. J’ai eu l’impression que tu te fichais de moi. A te pavaner là avec cette fille, si jolie. Flirter avec elle devant tout le monde. J’ai pensé que tu te jouais de moi pour faire une chose pareille alors je voulais que tu restes loin de moi et que tu ne m’approches plus, j’étais tellement en colère, j’étais jalouse. » Jalouse ? Se frottant nerveusement les mains, posées sur ses cuisses, il relevait tout doucement ses yeux bleus. La jalousie n’est-elle pas un sentiment d’attache ? Son cœur s’était à nouveau resserré, mais il n’osait toujours dire un mot. Sa bouche semblait s’entre-ouvrir, mais aucun son n’en sortait. « J’ai plus envie de souffrir Misha, j’ai supporté avec Owen je ne veux juste pas que ça recommence. Alors je me suis entourée d’une muraille en me promettant de ne plus faire n’importe quoi, de ne plus souffrir comme je l’ai fait, je ne veux pas vivre ça deux fois. » C’était compréhensible. Et Misha était plutôt doué lui, pour faire souffrir les gens. Il finit toujours par faire une connerie, ou plutôt LA connerie, qui ruine tout. Comme avec son idole japonaise, qu’il avait trompé bêtement. Il voulait s’expliquer, mettre au clair sa relation avec Nina, la couper dans ses pensées totalement fausses, mais le visage de Domi avait changé radicalement. Et elle reprenait, avant même qu’il n’ait le temps de retrouver sa voix. « Cette fille est chez Sony, donc tu veux la rejoindre ? » Automatiquement, il hochait la tête, rapidement, pour se défendre.

« Non, pas du tout! Elle n’est même pas dans ce milieu! »

Il se sentait un peu blessé, que Domi s’en prenne à Nina, qui pourtant, n’avait rien fait, rien demandé. Elle n’avait même pas à en être jalouse, Nina n’avait pas de sentiment amoureux pour Misha, et vice versa. Leur relation était amicale, bien qu’ils partageaient leurs nuits, comme pour se consoler mutuellement. Une sex-friend, finalement. Elle aime Tino, d’un amour indétrônable. Et lui, il ne se sortait pas vraiment Domi de la tête. Ça n’avait rien de sérieux entre eux, si ce n’est l’amitié qui elle, devenait de plus en plus forte.

« Nina, elle est étudiante. Et... On est juste amis. Elle en aime un autre, très amoureuse même. Elle souffre parce qu’il l’a rejeté, en même temps que nous, on s’est séparés. Alors tous les deux, on se soutient. On fait passer la pilule comme on peut... »

Ses yeux s’étaient rabaissés, bien qu’il semblait contrôler un peu plus le trop plein d’émotions en lui. Les larmes étaient ravalées, pourtant, il ne parvenait pas à ôter cette pression dans son torse.

« Je suis désolé, je voulais pas te faire de mal... Je voulais juste... Pas qu’on en vienne là. »

Il se taisait un instant, cherchant ses mots, sa respiration, qui se saturait. Soupirant, il relevait ses yeux vers le mur derrière Domi, fuyant encore ce regard qui ce matin, lui faisait autant de mal qu’il le terrassait. Elle était dure Domi, pourtant, c’était ce sale caractère qui l’avait tant fait flamber. Elle était telle une muraille, qu’il voulait faire tomber. Qu’il voulait séduire. Si seulement tout avait été différent.

« Si tu veux être tranquille, je m’en vais. J’le fais pas par choix, parce qu’ici, c’est toi qui m’a donné ma chance. C’est toi qui es venu me chercher à Tokyo. C’est toi qui a fait oublier le Misha des B.A.G, et qui a fait de moi Misha Lukasz. Mais j’peux pas continuer, pas comme ça. J’y arriverais pas... »

Ses yeux retombaient sur ses pieds, son visage pâlissant, et les traits tirés. Fatigué, épuisé, autant physiquement que moralement.

“ What now ?

@Misha Lukasz  

« Non, pas du tout! Elle n’est même pas dans ce milieu! » Domi avait son regard plongé dans celui de Misha, un regard dur, demandant des comptes, des explications. Son ressenti enfoui était en train de revenir à la surface. Lui qui disait l’aimer et qui se retrouvait avec une blonde dans un gala. Bon sang, elle qui pensait avoir effacé le tableau, il restait encore des traces. Et à présent qu’il était face à elle, tentant de lui décrire le pourquoi du comment, Domi se sentait comme aigrie, suffisante. « Nina, elle est étudiante. Et... On est juste amis. Elle en aime un autre, très amoureuse même. Elle souffre parce qu’il l’a rejeté, en même temps que nous, on s’est séparés. Alors tous les deux, on se soutient. On fait passer la pilule comme on peut... » On fait passer la pilule comme on peut. Disait-il. La patronne rebaissa la tête, comme touchée par une flèche en plein cœur. Qu’est-ce que cela sous entendait au juste ? Il utilisait cette jeune femme juste pour passer le temps, pour oublier ? Oui, mais… En faisant quoi exactement. Ah, non. Rien qu’à se l’imaginer, c’était comme appuyer sur une blessure ouverte. Elle restait silencieuse, ne voulant pas poser cette question. Elle en aurait honte et puis, la réponse était bien trop évidente. S’ils se consolaient l’un l’autre, et pour être aussi proches au gala… Ils ne devaient pas que boire un verre et se serrer la main pour se vider l’esprit. Et c’était fou comme l’image de Misha touchant une autre femme la rendait folle, tellement folle. Qu’est-ce qu’elle aurait donné pour crier là tout de suite, de tristesse, de colère, elle ne savait même pas. Mais après tout, qui était-elle ? Après tout ce qui était arrivé… Ils n’étaient plus rien. Pas un couple. Pas des amants. Juste rien. Alors pouvait-elle vraiment lui demander des comptes ? Oui, criait son cœur, bien sûr que oui. Quant à son cerveau, lui, toujours sur la terre ferme, il se contentait de rouler des yeux et de dire à quel point, quand on était amoureux, on pouvait être stupide.


« Je suis désolé, je voulais pas te faire de mal... Je voulais juste... Pas qu’on en vienne là. » Retenir ses larmes devenait de plus en plus compliqué. Beaucoup trop. Mais elle ne voulait pas pleurer. Ou alors, peut-être pas devant lui, au moins ça. Juste tête basse, Domi restait silencieuse, ne désirant même plus écouter ce qu’il avait à dire. Elle semblait comme ailleurs. « Si tu veux être tranquille, je m’en vais. J’le fais pas par choix, parce qu’ici, c’est toi qui m’a donné ma chance. C’est toi qui es venu me chercher à Tokyo. C’est toi qui a fait oublier le Misha des B.A.G, et qui a fait de moi Misha Lukasz. Mais j’peux pas continuer, pas comme ça. J’y arriverais pas... » Discuter avec Misha en cet instant, c’était un peu comme prendre un médicament douloureux. Cela faisait mal, mais il fallait passer par là pour guérir. Oui, Misha avait du talent et Domi était toujours persuadée qu’il n’avait pas encore montré tout son potentiel. C’était un plaisir pour elle de le mettre en avant avec les autres grands artistes de NY Studio INC. Et oui, ça avait été du travail. Gérer sa carrière, le conseiller, tenter de le canaliser et effacer toutes les bêtises qu’il avait put faire jusqu’ici. Misha était d’une telle fougue. Jamais elle n’aurait cru pouvoir ressentir ce sentiment à nouveau, et envers un homme si jeune. Pourtant, elle ne savait trop comment, il l’avait rendu et donné tout ce qui lui avait manqué depuis toutes ces années. Chaleur, tendresse, attention. La fin avait été chaotique, oui. Mais tout ce qui s’était produit avant n’était que pur bonheur, elle ne pouvait pas le nier.


Tout de suite, la première chose que Domi souhaitait faire, était mettre de l’ordre dans ses idées. Bien cachée derrière sa muraille, elle réfléchissait à quoi dire, quoi répondre. Bien qu’elle savait déjà parfaitement ce qu’elle désirait et ne désirait point. Toujours tête basse, elle ouvrit enfin la bouche.


- C’est ma tranquillité que tu veux…


Elle entendait la culpabilité le ronger dans sa voix. Les larmes de Misha ne pouvaient pas mieux prouver sa sincérité et sa blessure face à tout ça. Dans le fond, la patronne sentait comme un soulagement, d’entendre qu’il était conscient de tout ce qui était arrivé et à quel point elle avait put se sentir misérable dans tout ça. Elle qui était convaincue qu’il n’en avait plus rien à fiche et s’était enfui en se cachant le plus loin possible d’elle… La preuve du contraire était devant elle.


- Qu’est-ce qui pourrait bien me rendre tranquille. Pas ton départ en tout cas. Je ne veux pas que tu t’en ailles, je veux que tu restes ici.


Au final, elle l’avait dit sans maquillage, sans passer sa volonté comme un point commercial et professionnel. C’était sorti tel quel, sans plus réfléchir, bien qu’elle se retenait de donner plus de détails sur ses émotions actuelles. Elle redressa la tête, cherchant le regard du jeune homme et continua :


- Je n’ai pas été parfaite non plus dans cette histoire Misha. Et… A aucun moment j’imaginais, qu’on pourrait, toi et moi… Perdre le contrôle, de tout ça. Je veux dire, le perdre à ce point, comme ça. J’ai été aussi stupide de penser que les choses seraient faciles. J’ai tellement confiance en moi des fois. Je suppose que c’est mon côté mégère.


Domi posa doucement son doigt au coin de son œil, essuyant une larme s’apprêtant à lui échapper, puis une autre. Elle réfléchissait à ses mots et évitait maintenant le regard du jeune homme.


- Je voudrais qu’on soit… Je ne sais pas. Que tout redevienne… Normal ? Normal, comme avant qu’on… Commence à discuter à China Town. Avant tout ça. Où nous étions juste… Un artiste et une productrice. C’est dur de le dire, mais après tout ça je pense que… C’est ce qu’il y’a de mieux à faire. Ne t’en va pas… Reste avec moi. S’il te plait.


Sa voix avait finis par se briser. Et au final elle était en train de craquer. Le trop plein eut raison d’elle. Domi finit par s’effondrer en larmes, se cachant derrière ses mains. La boule au ventre, se sentant vide de l’intérieure et complètement à découvert.


- Pardon, je sais que je ne suis pas très démonstrative. J’ai tant perdu depuis. Je sais que c’est difficile, mais si tu t’en vas aussi, il ne me restera plus rien.


Et au final, elle ôta ses mains sur son visage et se mise à crier soudainement, comme pour tout laisser sortir en une seule fois :


- Et je déteste l’idée que tu aies touché cette fille, je me fiche de savoir si c’était sérieux ou pas je me sens tellement en colère que tu puisses te montrer avec une femme sans que personne ne dise rien, sans que personne ne juge, tandis que tous les deux c’est toute la planète qui essaie de nous tuer !! Je déteste ça, que n’importe quelle fille puisse être avec toi sans être jugée et que moi je sois « la grande connasse qui a trompé son mari », et je me répète, mais je déteste l’idée que tu puisses coucher avec une autre fille, qui qu’elle soit, elle ou même toutes les autres !!!


Elle avait fini par hurler. Même pas pour le juger ou lui reprocher quelque chose. C’était comme si elle hurlait au monde à quel point il était cruel, à quel point elle le trouvait injuste. Il rendait tout compliqué, quand tout pouvait être facile. Deux personnes qui s’aiment, tout simplement.

« C’est ma tranquillité que tu veux… Qu’est-ce qui pourrait bien me rendre tranquille. Pas ton départ en tout cas. Je ne veux pas que tu t’en ailles, je veux que tu restes ici. » Misha, dans tout ça, il ne comprenait plus rien. Elle voulait qu’il la laisse tranquille, mais elle ne voulait pas qu’il parte ? Il pensait avoir pris la meilleure des décisions, en s’enfuyant chez Sony, pourtant là, il ne savait plus. Lui, qu’est-ce qu’il voulait ? Reprendre sa vie en main, avancer, et voir Domi s’épanouir. Même si c’était loin de sa propre personne. Pour ça, il le savait. S’ils n’étaient plus rien, il devait s’éloigner. Sortir de sa vie. « Je n’ai pas été parfaite non plus dans cette histoire Misha. Et… A aucun moment j’imaginais, qu’on pourrait, toi et moi… Perdre le contrôle, de tout ça. Je veux dire, le perdre à ce point, comme ça. J’ai été aussi stupide de penser que les choses seraient faciles. J’ai tellement confiance en moi des fois. Je suppose que c’est mon côté mégère. » L’écoutant, Misha gardait les yeux baissés, incapable d’affronter la vision d’une Domi prête à craquer. Les larmes se voyaient en coin de ses yeux, et lui qui l’avait toujours connu en femme forte, avait l’impression que son cœur se brisait comme du verre contre le sol. Et puis... Il ne comprenait plus. C’était comme si Domi parlait une autre langue. Les mots, il les comprenait oui, mais pas le sens de ses phrases. Pas le fond. Elle voulait qu’il reste ? Elle voulait qu’il la laisse tranquille ? L’un n’allait pas avec l’autre. « Je voudrais qu’on soit… Je ne sais pas. Que tout redevienne… Normal ? Normal, comme avant qu’on… Commence à discuter à China Town. Avant tout ça. Où nous étions juste… Un artiste et une productrice. C’est dur de le dire, mais après tout ça je pense que… C’est ce qu’il y’a de mieux à faire. Ne t’en va pas… Reste avec moi. S’il te plait. » Ses doigts se serraient contre son pantalon, et sans qu’il ne contrôle rien, les larmes avaient de nouveau envahi ses joues. Ses lèvres tremblotaient, et il reniflait, d’une respiration toute aussi tremblante. Les mots de Domi se voulaient sûrement rassurant, mais ils sonnaient douloureusement. C’était vraiment la fin. Elle sous-entendait quand même cette phrase bateau que tout le monde déteste “Restons amis”. Non, lui, ça il ne pouvait pas. Parce que Domi, il l’aime, il est attiré par elle comme un aimant. Alors la voir tous les matins, et faire comme si de rien n’était, ne l’aiderait en rien à tourner la page. Il pleurait, silencieusement, assez pour savoir qu’elle en faisait de même. « Pardon, je sais que je ne suis pas très démonstrative. J’ai tant perdu depuis. Je sais que c’est difficile, mais si tu t’en vas aussi, il ne me restera plus rien. » Mais lui, que représentait-il ? Ses doigts serrant plus fort encore, le tissu de son pantalon, il relevait doucement les yeux, se risquant à une vue dont il se serait bien passé. Domi était en larme, sur son bureau. Cette femme si forte, si impassible, presque froide, elle était en train de craquer, de fondre en larmes devant lui. Son cœur s’en serrait tant dans sa poitrine, qu’aussitôt, après un sursaut dans sa respiration, il rabaissait le regard. Et Domi reprit, d’un ton si élevé, brusquement, qu’il en sursautait, fermant ses paupières et cachant ainsi, le joli bleu de ses yeux, si rougit ce matin. « Et je déteste l’idée que tu aies touché cette fille, je me fiche de savoir si c’était sérieux ou pas je me sens tellement en colère que tu puisses te montrer avec une femme sans que personne ne dise rien, sans que personne ne juge, tandis que tous les deux c’est toute la planète qui essaie de nous tuer !! Je déteste ça, que n’importe quelle fille puisse être avec toi sans être jugée et que moi je sois « la grande connasse qui a trompé son mari », et je me répète, mais je déteste l’idée que tu puisses coucher avec une autre fille, qui qu’elle soit, elle ou même toutes les autres !!! » Quand la voix de Domi s’arrêta, le silence reprit place, aussi brusquement qu’il s’était brisé. Tétanisé, Misha n’osait plus bouger. Les mots de Domi, ceux-là, il les avait compris, ou à peu près. Et ils résonnaient comme une réprimande, une jalousie, en totale opposition avec ce qu’elle avait pu demander un peu plus tôt. Qu’ils soient comme avant, juste l’artiste et la productrice. Espérait-elle qu’il postule dans un monastère ? Combien de temps s’était écoulé, depuis que les lèvres de Domi s’étaient à nouveau réunies ? Il ne savait même pas. Il ne pouvait rien répondre, il était sans voix, perturbé. Devait-il en déduire qu’elle l’aimait toujours ? Ou au contraire, qu’elle voulait qu’il disparaisse complètement de la planète ? Il inspirait, difficilement, sa respiration continuait de se casser, tandis qu’il paniquait de plus en plus, à la simple idée de laisser là, un trop gros silence après ce qu’elle venait d’avouer.

« Les gens sont des idiots... »

Murmurait-il finalement, les yeux toujours rivés sur ses pieds. Bien qu’il ne percevait pas ses baskets tant les larmes lui floutaient la vue.

« Le seul à juger dans cette histoire, c’est lui. »

Il parlait d’Owen. Owen qu’il avait vu de ses propres yeux, frapper Domi. Une image qu’il ne parvenait pas à oublier. La douleur qu’il avait ressentie lui, blessé ce soir-là, des poings du même homme, il ne s’en souvenait pas. Mais celle que lui avait infligé la simple vue de cette gifle qu’il lui avait mis, ça, il n’en n’avait rien oublié.

« Domi je t’en prie. »

Le torse se relevant sous sa forte respiration, il relevait le visage, et braquait l’azure de ses yeux sur l'hispanique. Il ne parvenait même plus à déglutir, tant il se sentait mal dans ses baskets. Il aurait aimé se relever, et fuir cette pièce pour ne plus jamais y revenir. Pourtant, il devenait un homme, et il était peut-être temps d’abandonner la lâcheté. Dans deux mois, il fêterait ses 29 ans, ne fallait-il pas laisser le Misha, le gamin, bien loin derrière lui ?

« Je peux pas faire comme si rien de tout ça n’avait... Existé. J’étais bien à China Town, et j’aurais aimé que ça ne s’arrête jamais! Alors non, j’veux pas faire comme si tout allait bien, alors qu’aucun de nous ne va bien. Si tu ne veux plus de moi, je ne ferais pas semblant! S’ils sont si nuls que ça chez Sony, j’irais remonter le niveau! »

Il inspirait plus fort, redressant son dos et ses épaules.

« Moi non plus, j’veux pas te voir avec un autre. Et si je reste ici, c’est ce qui m’attend. Je ne peux que te souhaiter ça, bien évidemment... Mais je préfère être loin quand ça arrivera. »

Domi méritait sans nul doute, de trouver un homme, un vrai, capable de la rendre heureuse. Un type comme ce milliardaire qui courrait après Lou au gala. Riche, imposant, et surtout, plus âgé que lui. Il avait quoi à offrir à Domi ? A part sa connerie et son immaturité, pas grand-chose.

« Je suis désolé d'avoir tout gâché dans ta vie... »

Ajoutait-il en baissant de nouveau les yeux, ses doigts resserrant une nouvelle fois son pantalon, si nerveusement, qu’il en retenait de nouvelles larmes. Il se pinçait les lèvres, d’où résidait maintenant un petit gout salé à cause de toutes ces larmes en question. Il était dans un tel état de mal être intérieur, qu’il aurait aimé pouvoir mourir en un claquement de doigt. On dit toujours que ça passera, qu’on ira mieux avec le temps, mais lui, plus le temps passe, et plus il en souffle de toute cette histoire. Il n’arrivait pas à regretter d’avoir briser le mariage d’Owen et Domi, tant ce type était une ordure. Mais il voyait bien qu’elle, elle surmontait mal tout ça, et c’était si difficile à admettre et à regarder.

« Je suis désolé... Que tu ais... A regretter tout ça. »

Il aurait tellement aimé que même si leur histoire touche à sa fin, elle ne regrette rien. Qu'elle ne garde que du bon de lui. Au lieu de ça, tout était si noir.

“ What now ?

@Misha Lukasz  

« Les gens sont des idiots... Le seul à juger dans cette histoire, c’est lui. » Lui, elle ne voulait même plus y penser. Il s’était réfugié dans son orgueil depuis l’incident, et il n’y avait rien de plus important pour lui désormais, que de salir l’image de son ex-femme et la bourrer de soucis financiers administratifs, dont la patronne se serait bien passé. Il voulait simplement lui pourrir la vie. Domi savait que ça finirait par lui passer, qu’il se lasserait. Mais quand. Là était la véritable question. Qu’il s’en prenne à elle était encore tolérable, elle le connaissait par cœur et savait toujours comment réagir. Mais qu’il puisse un jour toucher Misha, d’une manière ou d’une autre… Elle le lui ferait payer au maximum, surtout que le chanteur était bien connu pour avoir du cran et ne pas se laisser faire non plus.


« Domi je t’en prie. » Qu’est-ce qui était le plus gênant maintenant. Le fait qu’ils se disent toute la vérité face à face aussi dure soit elle, ou le fait qu’ils soient en train de pleurer tous les deux à chaudes larmes sans pouvoir rien y faire. Tout était embarrassant dans tout ça, Domi se sentait comme dénudée, complètement mise à nue. Elle qui gardait toujours le contrôle sur elle-même, tout lui avait échappé. Et voir Misha dans un tel état lui brisait le cœur en plus de tout ce qu’il y’avait déjà à côté. Elle commençait vraiment à se demander s’ils pouvaient ressentir quelque chose de pire que ça, si c’était possible d’être dans un moment bien plus obscur dans cette relation. Affronter son regard, ses yeux mouillés, son visage si triste, c’était comme si la divorcée se faisait du mal toute seule, comme si elle s’automutilait. Bon sang, que ça faisait mal. « Je peux pas faire comme si rien de tout ça n’avait... Existé. J’étais bien à China Town, et j’aurais aimé que ça ne s’arrête jamais! Alors non, j’veux pas faire comme si tout allait bien, alors qu’aucun de nous ne va bien. Si tu ne veux plus de moi, je ne ferais pas semblant! S’ils sont si nuls que ça chez Sony, j’irais remonter le niveau! » Elle aussi elle était bien à China Town. Tout était simple, personne ne se posait de question. Ils prenaient un verre, discutaient, se confiaient. C’était beau, doux, comme glisser dans une pente de roses. Mais la chute avait été bien terrible. « Moi non plus, j’veux pas te voir avec un autre. Et si je reste ici, c’est ce qui m’attend. Je ne peux que te souhaiter ça, bien évidemment... Mais je préfère être loin quand ça arrivera. » Domi avait bien du mal à s’imaginer avec quelqu’un tout de suite. Elle ne l’avait pas fait ces derniers mois. Elle avait tracé sa vie dans sa tête : étant seule, libre, sans la moindre chaine, passant du temps dans sa carrière et dans le mannequinat, avec un bébé sous neuf mois. Aucun homme n’était dans son projet, pas même Misha. Pourtant cette discussion avait l’effet d’ouvrir de force la porte derrière laquelle elle dissimulait éhontée ses ressentis envers le garçon. Comme un bélier qui fonçait dedans, chaque coup étant de plus en plus douloureux. Soudainement elle se posait la question. Qu’est-ce qui ferait le plus mal ? Laisser cette porte fermée et subir les coups ? Ou l’ouvrir et prendre le risque d’avoir à nouveau mal ?


« Je suis désolé d'avoir tout gâché dans ta vie... » La phrase de l’artiste la sortit de ses pensées. Les yeux rougis, elle l’observait sans bouger, sans dire le moindre mot. « Je suis désolé... Que tu ais... A regretter tout ça. » Un long silence s’installa, la brune ne parvenait plus à le quitter des yeux. Ce n’était pas possible qu’il se leurre autant. Il fallait qu’elle réagisse, il fallait qu’elle parle. Quitte à ouvrir cette porte cadenassée, juste un petit peu… D’une voix bien plus calme et douce, elle reprit la parole :


- Tu n’as pas tout gâché dans ma vie… J’étais heureuse avec toi, tu étais tout ce qu’il me fallait, tout ce dont j’avais besoin, je ne voulais rien d’autre que toi, je me fichais du reste. Je pensais à toi constamment. Je me sentais revivre.


Domi prit une pause comme pour chercher ses mots, avant de reprendre.


- J’aurais voulu que ça dure plus longtemps… Bien plus longtemps. Pour toujours en fait. Tu seras toujours cher à mon cœur Misha… Non, en fait tu es cher à mon cœur maintenant, mais il me faut du temps… S’il te plait, laisse-moi juste du temps. Il nous faut du temps à tous les deux, ne rien précipiter, juste prendre le temps de guérir et de peut-être…


Elle n’osait pas terminer sa phrase. A la place, elle essuyait les larmes qui avaient coulés sur son visage, se frottant les yeux un peu plus avant de les lever au ciel.


- Je sais pas… S’aimer comme avant ?

Il était loin de s’imaginer qu’un jour, Owen pourrait s’en prendre à lui. Candide peut-être, ou juste bien trop ignorant. Il ne savait même pas que le quarantenaire en faisait voir de toutes les couleurs à Domi depuis cette histoire. Persuadé qu’il se faisait petit depuis, et qu’il s’en était allé fouetter d’autres moutons. D’autant plus qu’il n’allait plus tarder à être jugé, pour coups et blessures sur Misha. Un procès au quel le chanteur ne comptait pas assister, et dans le fond, l’issue ne l’intéressait même pas tant que ça. C’était juste jouissif, de savoir qu’il emmerdait le businessman, encore un peu.

La voix de Misha s’était éteinte, et le silence avait repris dans la pièce. Trop lourd, trop pesant, et trop long, selon le chanteur. Pourtant, il était incapable de le briser. Les choses qu’il aurait encore envie de dire, il ne le pouvait pas. Domi et lui, c’était fini, elle venait de le dire. A quoi bon tenter de sauver leurs sentiments ? Ce serait se heurter à un mur, comme l’autre soir, au gala. « Tu n’as pas tout gâché dans ma vie… J’étais heureuse avec toi, tu étais tout ce qu’il me fallait, tout ce dont j’avais besoin, je ne voulais rien d’autre que toi, je me fichais du reste. Je pensais à toi constamment. Je me sentais revivre. » La voix de Domi, venant de percer, enfin, ce silence, semblait bien plus apaisée, et calmée. Alors ses muscles se détendant, ses doigts relâchant son jogging, Misha osait timidement relever son visage, et ses yeux, vers sa productrice. Elle séchait ses larmes, de ses fins doigts, et lui, bien moins élégamment, en faisait de même, d’un revers de main. Ses mots, ils étaient aussi rassurants que le son de sa voix. Et pourtant, ils perçaient son torse et son ventre, comme des lames aiguisées. Tout ça, n’était-ce pas lui qui avait tout gâché ? « J’aurais voulu que ça dure plus longtemps… Bien plus longtemps. Pour toujours en fait. Tu seras toujours cher à mon cœur Misha… Non, en fait tu es cher à mon cœur maintenant, mais il me faut du temps… S’il te plait, laisse-moi juste du temps. Il nous faut du temps à tous les deux, ne rien précipiter, juste prendre le temps de guérir et de peut-être… Je sais pas… S’aimer comme avant ? » S’aimer comme avant ? Immobile, comme figé dans le temps, Misha restait bouche bée face à elle, les yeux rivés sur son visage. Là, vraiment, il n’y comprenait plus rien, plus rien du tout. Domi, elle semblait ne pas savoir vraiment ce qu’elle voulait. Le repousser, l’éloigner, le garder près d’elle, en ami, puis finalement... ? Son cœur en avait fait un tel bon dans sa poitrine, qu’il en avait eu un sursaut dans sa respiration. Et tout à coup, il y avait comme un orchestre dans sa tête et son torse. Son cœur avait repris un vrai marathon, tambourinant jusque dans ses veines. Il ne savait plus quoi répondre, parce qu’il avait peur de la heurter. Il marchait sur des œufs avec elle, ce matin. Dans le fond, elle était sûrement paumée, aussi paumée que lui. Et c’était déstabilisant, parce que Domi, elle avait toujours su ce qu’elle voulait. Avec ambition, détermination, et assurance. Ce n’était pas cette Domi qu’il avait face à lui. C’était une femme si différente. Une vraie femme en fait. Contrairement aux apparences, Domi à ses faiblesses. Et... Misha en serait-il une ?

« Je n'ai... Je n’ai jamais cessé de t’aimer... Comme avant. »

Murmurait-il d’une si petite voix presque chuchotée, et tremblante. Raillée. Son visage pâle reprenait des couleurs, parce qu’il rougissait de son aveu, baissant d’ailleurs timidement le regard.

« Quand je l'ai dit, cet été, je le pensais vraiment. Et non... Contrairement à ce que tu m’as dit au gala, l’autre soir... Je ne l’ai pas redit à une seule fille. »

Pas à Nina non plus. Nina, elle aime Tino. Lui, il aime Domi. Ce serait se leurrer. Il tentait d’inspirer un bon coup, mais il était si mal dans ses pompes, si angoissé, qu’il en manquait d’air.

« Si je reste ici Domi... C’est pour être avec toi. »

Il faisait une légère pause, le regard remontant jusqu’à celui de Domi. Il s’y encrait, presque avec insistance, parce que malgré son manque d’assurance ce matin, il voulait qu’ils prennent une décision, qu’ils se décident. Soient ils avancent ensemble, soient ils prennent des chemins différents. Mais il n’y aura pas de juste milieu. Pas avec lui. Il n’en n’était pas capable.

« Sinon, dès que je sors d’ici, je rappelle Sony, et je signe chez eux. Je suis désolé, Domi... Mais j’suis pas assez fort pour endurer... Plus longtemps. »

Inspirant encore, il détournait le regard, tandis que son visage prenait des traits plus durs.

« Si je pouvais, je t’emmènerais encore danser à China Town. »

C'était un chuchotement. Ouai, s'il pouvait, il remonterait le temps, et il agirait bien différemment, après leur premier baiser. Il n’irait pas à cette fichue soirée, ou il a fini à l’hôpital. Il inviterait Domi plutôt, elle finirait bien par accepter. Et puis Owen, il ne l’aurait pas agressé comme ça. Domi, jamais elle ne serait venue avec ses idées de stupides contrats, s’il n’avait pas autant déconné. Tout était de sa faute, absolument tout. Alors il en assumait les conséquences. Ses mains se redressaient, se posant sur les accoudoirs du fauteuil dans lequel il était assis. Prêt à se hisser d’ici, près à composer le numéro de Sony. Il n’y aurait pas de retour en arrière, aucun.

“ What now ?

@Misha Lukasz  

« Je n'ai... Je n’ai jamais cessé de t’aimer... Comme avant. » Domi reposa son regard sur Misha, l’espace d’une demie seconde, avant de regarder un peu dans tous les sens. Redressant les épaules et se serrant les doigts, une rougeur intenable venait s’installer sur son visage, impossible de le contrôler. Ce qu’il venait de dire lui avait foncé directement droit au cœur, brisant toutes les barrières autour sans jeter un œil en arrière. « Quand je l'ai dit, cet été, je le pensais vraiment. Et non... Contrairement à ce que tu m’as dit au gala, l’autre soir... Je ne l’ai pas redit à une seule fille. » Son cœur battait à nouveau la chamade, comme les toutes premières fois où ils se voyaient discrètement, ne faisant que discuter, où elle sentait le départ d’un renouveau, un peu comme avant d’ouvrir une boite à trésors. Elle se sentait précieuse, spéciale à ses yeux une nouvelle fois. « Si je reste ici Domi... C’est pour être avec toi. Sinon, dès que je sors d’ici, je rappelle Sony, et je signe chez eux. Je suis désolé, Domi... Mais j’suis pas assez fort pour endurer... Plus longtemps. Si je pouvais, je t’emmènerais encore danser à China Town. »


Le jeune homme n’avait pas changé depuis le temps. Toujours aussi entier, sans la moindre mesure. Le cœur battant de Domi montrait aussi de la peur. De la peur face à ce qu’il disait. S’ils ne se remettait pas ensemble, il s’en irait loin d’ici. Non pas que la patronne ne souhaitait pas une nouvelle histoire avec lui, bien au contraire… Mais, comme ça ? Sans laisser le temps au temps, sans se mettre à l’aise l’un envers l’autre comme autrefois, juste…. Effaçons le tableau et embrassons-nous ? Oui, c’était bien du Misha, elle reconnaissait parfaitement cette attitude. Mais la brune, elle, ne se sentait pas prête à sauter tout de suite le pas. Peut-être était-elle vieux jeu, elle ne savait pas… Une chose était sûre, c’est qu’elle était bien loin du rythme de la fougue de Misha, qui était peut-être aussi le résultat de sa jeunesse. Domi devait songer à y croquer aussi pleinement, à cette fougue-là, et en prendre un peu pour elle… Plutôt que de réfléchir constamment. Une vie sans folie n’était pas une vie. C’était ce que lui disaient constamment ses amies. La première réaction de Domi face aux aveux de Misha, c’était de sourire. Un sourire timide, mais malgré tout sincère. Elle se sentait fondre à nouveau, même si elle gardait une main sur le bord pour ne pas tomber complètement. Elle passa un long moment à regarder Misha, fixant le bleu de ses yeux, puis doucement, une main sur sa bouche, elle se mis… à rire. Elle passa ensuite une nouvelle fois ses mains sur ses yeux pour les essuyer une dernière fois… Marquant une pause, et se penchant pour poser ses mains sur le visage de Misha, essuyant doucement ses joues humides et le bas de ses yeux, profitant de la douceur de sa peau.


- Tu n’as pas changé…


Murmura t’elle son regard plongé dans le sien. Elle ne parvenait pas à retirer ses mains de lui caressant simplement son visage, un air plus que bienveillant dans les yeux.


- Tu es toujours mon petit Misha.


Sauf que pour le moment, elle ne savait pas quoi dire. Elle ne pouvait pas juste décider comme ça, elle était bien trop effrayée pour prendre une décision maintenant, effrayée de le regretter après. Il lui fallait du recul. Du recul que ce monsieur, ne semblait pas pouvoir lui donner.


- Je ne veux pas que tu t’en ailles. Je veux que tu restes près de moi. Je te promets d’être honnête et droite avec toi, si tu attends d’ici la fin de la semaine, je te donnerai une réponse définitive, c’est promis. Peux-tu me faire cette petite faveur… ? Juste deux ou trois jours. S’il te plait. J’ai besoin de régler certaines choses avec moi-même.


Ses mains se reposèrent sur la table, dans l’attente de la réponse du plus jeune. Domi savait combien il pouvait être têtu. Mais elle aussi l’était. Et elle ne voulait pas se lancer dans quelque chose sans y avoir réfléchit, du moins, pas pour le moment. Elle se gratta doucement la nuque et continua le regard ailleurs :


- Et si tu vas chez Sony… Je débarquerai et j’étranglerai Winston, parce que je suis sûre que c’est lui qui t’as tourné autour. Je ne serais même pas étonnée qu’il prévoit de débaucher mes autres artistes. Depuis que je ne m’appelle plus « Legends », certaines personnes ont une attitude un peu plus… Irrespectueuse avec moi, mais je saurai leur faire payer.


Winston était l’un des grands dirigeants de Sony, et comme tous les autres producteurs musicaux, Domi l’avait pour horreur, c’était réciproque. Maintenant qu’Owen n’était plus dans les parages pour la protéger elle et sa boite, il se permettait certainement de faire des approches, se disant qu’il n’encourrait pas le moindre risque. Mais vouloir piquer Misha à Domi était certainement l’une des pires erreurs de sa carrière, et que Misha y aille ou pas, la patronne de NY Studio INC se promettait de faire regretter à ce Winston d’avoir effectué une tentative.

Misha, il n’a jamais vraiment été dans la demi-mesure. Il est impulsif, fougueux, un peu trop rêveur et idéaliste. Et ça, ça ne changera probablement jamais. Il a presque trente ans, et il ne tient toujours pas en place, comme quand il en avait huit. Quand sa mère le passait de spécialistes en spécialistes, persuadée qu’il avait un gros problème de suractivité, ou un peu d’autisme. Non, Misha va bien, il est juste... Misha. Et Domi, c’est sûrement ce qu’elle aime chez lui. Elle en retrouve le sourire, elle échappe un petit rire. Ce qui détend quelque peu le chanteur, qui étirait à son tour, un léger sourire en coin de ses lèvres. Un sourire fatigué, et nerveux, mais un sourire. Et puis elle se penche vers lui, alors qu’ils ne sont séparés que par le bureau. Ses mains effleurent son visage. Il ne dit plus rien, se contentant de profiter de cette douceur, de cette tendresse. Ses yeux rivés sur les siens, presque suppliants. Il voulait qu’elle lui donne une réponse, qu’il sache où ils allaient, pour de bon. « Tu n’as pas changé… Tu es toujours mon petit Misha. » Petit ? Il tirait une drôle de petite mine à cette réflexion. Il n’aimait pas vraiment quand on le traite de petit, se sachant... Pas très grand. Mais ce qui le gênait surtout, c’était que Domi lui parle comme à un enfant. Oui il avait dix ans de moins, mais il en reste un homme. Un homme qui l’aime. Un homme capable de faire sa vie avec elle. Capable de lui faire des enfants, capable de l’épouser, capable de vieillir à ses côtés. Le comprendrait-elle un jour ? « Je ne veux pas que tu t’en ailles. Je veux que tu restes près de moi. Je te promets d’être honnête et droite avec toi, si tu attends d’ici la fin de la semaine, je te donnerai une réponse définitive, c’est promis. Peux-tu me faire cette petite faveur… ? Juste deux ou trois jours. S’il te plait. J’ai besoin de régler certaines choses avec moi-même. » Ça, il le pouvait oui. Il ne lui demandait pas de répondre toute de suite, dans la minute. Il voulait juste avancer. Faire disparaître cet épais brouillard qui planait sur leur histoire, depuis trop longtemps d’ailleurs. « Et si tu vas chez Sony… Je débarquerai et j’étranglerai Winston, parce que je suis sûre que c’est lui qui t’a tourné autour. Je ne serais même pas étonnée qu’il prévoit de débaucher mes autres artistes. Depuis que je ne m’appelle plus « Legends », certaines personnes ont une attitude un peu plus… Irrespectueuse avec moi, mais je saurai leur faire payer. » Ça, c’était sa Domi. Les yeux amoureux, il l’observait d’un petit sourire. Cette femme, elle est si belle. Un peu dominatrice, certes, mais, il adore ça. Être sa chose. Et puis dans le fond, il est un peu comme un dompteur de lionne. Même si parfois, c’est vrai, elle lui fait encore peur. Enfin, seulement quand ils ne sont plus rien. Il lui avait tenu tête, quand ils étaient “ensemble” et qu’elle essayait de lui faire signer des contrats stupides.

« Je ne t'ai pas demandé une réponse trop tôt, Domi.. »

Murmurait-il, se penchant légèrement vers le bureau, seule barrière entre eux.

« Je veux juste savoir. Si tu m’aime, ne serait-ce qu’encore un peu. Si tu arrives à t’imaginer avec moi. Tu sais, j’y ai beaucoup réfléchis, ces derniers temps. Et je me rends compte, que je ce que je regrette vraiment, ce qui me faisait flipper, c’était... C’était cet anneau que t’avais à ton doigt. »

Et qu’elle ne porte plus. Son regard était tombé pourtant, sur la main de la jeune femme. Des bagues, des bijoux, mais pas d’alliances. Plus d’alliance. Ni même ce diamant qui allait avec, bague de fiançailles qui datait sûrement de bien longtemps. Peut-être l’avait-elle rendu à Owen.

« Parce qu’il nous empêchait d’être... D’être vraiment nous. Je pensais que je voulais juste m’amuser, t’aimer secrètement, et que ça me suffirait. Mais c’est faux. Peut-être parce que je vieillie, peut-être... Je sais pas. Mais j’ai pas juste envie d’un flirt, d’un jeu, d’un truc dans le vent. Je veux m’engager, je veux avoir... Pour la première fois de ma vie, je veux avoir une vraie relation. Bâtir quelque chose. Je sais pas, je ne dis pas que je veux tout ça demain, loin de là. Mais je veux me marier un jour, avoir des enfants, avoir une vraie vie de famille. Et si je continue à batifoler comme j’le fais, je n’aurais jamais ça. Et ce truc... J’ai pas envie de me l’imaginer avec quelqu’un d’autre, que toi. »

Il remontait doucement son regard jusqu’au sien, le visage sérieux, pensif, mais bien là, concentré sur elle, et uniquement elle.

« Et je m'en fous, que les gens parlent. Qu’ils jugent. Que je sois trop jeune, que tu sois ma productrice, que je t’ai volé à ton mari. Je m’en fous, parce que je t’aime, et que personne ne m’enlèvera ça. »

Sur ses mots, il se relevait de sa chaise, la poussant en arrière. Il se redressait, fixant toujours Domi.

« Quand tu seras prête, dis-le-moi. Et quelle que soit ta réponse, je la comprendrais. »

Il aurait aimé l’embrasser, ne serait-ce que sur la joue. Mais il ne voulait pas s’octroyer un droit non acquis. Il fallait qu’elle se décide, qu’elle prenne une décision, qu’elle réfléchisse. Si elle lui dit oui, il y en aura bien d’autres des baisers. Si elle préfère que tout s’arrête, ils resteront dans sa tête. Alors, certes angoissé, mais libéré d’un poids, il se tournait vers la porte, qu’il poussait légèrement, avant de se retourner vers Domi, un sourire plus grand aux lèvres.

« J'vais pas rappeler Sony toute de suite, ne commet pas un meurtre d’avance. »

“ What now ?

@Misha Lukasz  

« Je ne t'ai pas demandé une réponse trop tôt, Domi.. Je veux juste savoir. Si tu m’aime, ne serait-ce qu’encore un peu. Si tu arrives à t’imaginer avec moi. Tu sais, j’y ai beaucoup réfléchis, ces derniers temps. Et je me rends compte, que je ce que je regrette vraiment, ce qui me faisait flipper, c’était... C’était cet anneau que t’avais à ton doigt. » Automatiquement, Domi posa son regard sur sa main gauche, où il n’y avait désormais plus la moindre alliance. Juste une simple marque à peine visible, que l’anneau lui avait laissé après être resté à ce doigt tant d’années. Comme un souvenir pour lui rappeler par quoi elle était passée. Les mauvais souvenirs, mais les bons aussi. Il serait égoïste de la part de la brune de croire que se lier à Owen ne lui avait apporté que du malheur. Elle voulait oublier le passé malgré tout, tellement la fin avait été pitoyable et regrettable. Et l’avenir… Était peut-être juste en face d’elle.


« Parce qu’il nous empêchait d’être... D’être vraiment nous. Je pensais que je voulais juste m’amuser, t’aimer secrètement, et que ça me suffirait. Mais c’est faux. Peut-être parce que je vieillie, peut-être... Je sais pas. Mais j’ai pas juste envie d’un flirt, d’un jeu, d’un truc dans le vent. Je veux m’engager, je veux avoir... Pour la première fois de ma vie, je veux avoir une vraie relation. Bâtir quelque chose. Je sais pas, je ne dis pas que je veux tout ça demain, loin de là. Mais je veux me marier un jour, avoir des enfants, avoir une vraie vie de famille. Et si je continue à batifoler comme j’le fais, je n’aurais jamais ça. Et ce truc... J’ai pas envie de me l’imaginer avec quelqu’un d’autre, que toi. » Domi l’écoutait sereinement, son regard plongé dans le sien, sans cligner de l’œil. Pourquoi Misha qui parlait de mariage, d’enfants et de stabilité, lui faisait si étrange. C’était une bonne chose qu’il aie ce souhait pour sa vie un jour… Et c’était plus que touchant qu’il lui dédie ces mots. Cela fit sourire de nouveau la patronne.


« Et je m'en fous, que les gens parlent. Qu’ils jugent. Que je sois trop jeune, que tu sois ma productrice, que je t’ai volé à ton mari. Je m’en fous, parce que je t’aime, et que personne ne m’enlèvera ça. » C’était certainement ce que Domi admirait le plus chez Misha. Au départ, quand il avait rejoint NY Studio INC et qu’elle avait réalisé à quel point il pouvait faire n’importe quoi et assez fréquemment, elle s’était juste dit, bon sang. Encore un de ces jeunots capricieux à qui on avait tout donné dans cette industrie, et qui se croyaient capables de faire tout et n’importe quoi sans en assumer les conséquences. Elle le trouvait irresponsable, immature, enfantin, et mettait une pression inimaginable à son manager pour qu’il le canalise un minimum. Hors, en apprenant à le connaitre, elle avait réalisé à quel point elle avait put se tromper. Misha faisait ce qu’il voulait pour la simple et bonne raison qu’il se fichait totalement du regard des gens et de leur jugement. C’était peut-être handicapant par moment, mais cela représentait une sacrée force. Une force que même Domi n’avait pas. Et elle admirait ça. Tous les mots qu’il prononçait allait tout droit jusqu’au fond de son cœur et la touchaient profondément.


« Quand tu seras prête, dis-le-moi. Et quelle que soit ta réponse, je la comprendrais. » Domi l’observait sans rien dire, hochant juste doucement la tête. Il lui donnait ce qu’elle voulait, du temps pour se poser et réfléchir. Elle ne voulait plus laisser son cœur tout contrôler et faire n’importe quoi. Mais ce cœur qui avait été si longtemps mis de côté avait juste soif de tout ce que Misha pouvait lui offrir. Et elle voulait aussi le contenter au mieux et lui donner ce dont il avait besoin, qu’ils puissent simplement grandir tous les deux, main dans la main. Alors qu’il se dirigea vers la sortie, la poignée en main, il se tourna vers elle et ajouta : « J'vais pas rappeler Sony toute de suite, ne commet pas un meurtre d’avance. » Elle haussa un sourcil, puis une épaule, avant de souffler l’air bien sournois, un petit sourire aux lèvres.


- J’essaierai.


Et quand il s’en alla et que la porte se ferma derrière lui, elle saisit immédiatement son téléphone dans une seule idée : buter Winston. Non mais pour qui se prenait ce type ?! Elle lui ferait payer cet affront pour sûr. Et alors qu’elle s’apprêta à composer un numéro, son téléphone s’illumina, lui indiquant un appel. Elle fronça légèrement les sourcils, ne reconnaissant pas le numéro affiché et répondit d’un allo interrogateur. Une voix féminine se fit entendre. « Mme Mitchell ? Ici, l’hôpital. Nous avons vos résultats d’examens concernant votre insémination. Et… Il faudrait que vous veniez de toute urgence, dès cet après-midi afin que nous puissions en discuter tranquillement. » Domi la mine inquiète s’empressa de répondre :

- Est-ce qu’il y’a un problème ?


« Mme Mitchell… Vous devriez vraiment venir à l’hôpital très vite, ordre du médecin. 15h30 cela vous convient ? »
FIN