Une semaine. Voilà une semaine que Charlie avait débarquée dans la grosse pomme. Et les cartons d’emménagement traînaient encore dans l’appartement. Bon, pour sa défense, elle n’avait guère eu le temps de faire quoique ce soit depuis son arrivée. A peine eut elle posé un pied à NY, qu’elle avait été plongée dans le travail. Ses journées étaient bien chargées. Il a fallu prendre le temps de rencontrer tous ses collègues au bureau du procureur, se rendre au commissariat central histoire de se présenter et se farcir des déjeuners voire des dîners avec les juges les plus influents. Et bien sûr, reprendre les dossiers de son prédécesseur et commencer à travailler les nouveaux. Bref, elle se levait très tôt et rentrait très tard en ce moment. Mais, il faut bien le dire, elle adorait ça. L’adrénaline, le stress, crouler sous les dossiers, elle aimait ça.
Mais aujourd’hui, pas de dossiers à traiter, pas de nouvelles personnes à rencontrer, c’était son jour de repos. Et elle ne comptait pas le passer à défaire ses cartons et refaire la déco, non elle avait engagé des personnes qualifiées pour cela. Non, non aujourd’hui, elle avait prévu de rendre visite à son frère. Une visite surprise car elle n’avait pas prévenu Oliver qu’elle quittait San Francisco pour NY. Une semaine qu’elle était là et il ne le savait pas encore. Un an qu’elle ne l’avait pas vu. Certes, ils échangeaient régulièrement (comprendre plusieurs fois par jour) via WhatsApp, certes ils s’appelaient toutes les semaines mais ce n’était pas pareil.

Donc, en se levant ce matin-là, Charlie était d’excellente humeur. Même un énième message d’Alexander la suppliant de lui pardonner ne gâcha en rien sa joie. Alexander ? Mais si, le fiancé qu’elle avait laissé derrière elle à SF. Celui qui l’avait honteusement trompé, plusieurs fois je précise, avec sa secrétaire. Digne d’un téléfilm à l’eau de rose me diriez-vous. Mais le pire, c’était que c’était sa secrétaire à ELLE !! Une jeune femme bien sous tout rapport qui avait été embauchée au bureau du procureure quelques mois auparavant. Et il se l’était tapé !! Quel goujat ! Et dire qu’elle l’avait présenté à Oliver. Rendez-vous compte ! Compte tenu de leur relation fusionnelle, Oliver avait toujours eu tendance à effrayer ses précédents petits amis, alors quand elle lui en présentait un, c’est que c’était du sérieux. Et il l’avait trahi. Mais, ne vous inquiétez pas, elle s’était vengée bien comme il faut. Mais elle ne l’avait pas dit à son frère. Sinon il aurait été capable de tout lâcher et de parcourir les milliers de kilomètres pour lui casser la gueule. Evitons les scandales voulez-vous ? (heureusement qu’elle n’avait pas eu l’idée de traverser l’Atlantique ave Alexander et de le présenter à ses parents……elle en aurait entendu parler pendant des siècles)

Revenons au temps présent. Le message supprimé sans même y avoir jeté un coup d’œil, elle finit de se coiffer, traversa l’appartement en donnant ses dernières instructions au petit peuple qui était là pour finir de tout aménager et claqua la porte derrière elle. Oh, elle n’avait pas bien loin à aller, juste remonter la rue et elle arrivait chez Oliver. Bien sûr, auparavant, elle s’était assurée d’appeler son cabinet pour être sûre qu’il ne travaillait pas. Et à moins d’une urgence (bien qu’elle ne considère pas comme une urgence une starlette de pacotille voulant refaire ses fesses. Greffez leur un cerveau plutôt), il devait être chez lui.

Une fois devant sa porte, elle frappa gentiment et quand la porte s’ouvrit, elle lui sauta, littéralement au cou, sans lui laisser le temps de dire quoique ce soit.

« Oliiiii !Je suis tellement contente de te revoir ! Tu devineras jamais ! je suis tellement contente de te revoir ! Je suis procureure à NY maintenant. Je suis tellement contente de te revoir ! Je suis arrivée il y a une semaine mais je n’avais pas encore eu le temps de passer te voir et je voulais te faire une surprise ! Est-ce que j’ai dit que j’étais contente de te revoir ? »

Exit l’implacable procureure, la fière et hautaine fille Richards. Laissez place à la jumelle délurée !

Le silence d’un appartement vide, ou presque. Un gémissement d’enfant, une parole incompréhensible, un langage codé certainement, que seuls les bambins peuvent comprendre.  

« Dans quel sens ça se met ça ? »

Un rire de bébé, puis des jambes qui gigotent. Oliver est là, devant la table à langée portative, précaire et temporaire, à se battre avec une couche Pampers, sans savoir de quel côté sont les fesses, et le reste. Il tourne et retourne la culotte en coton, alors qu sa fille – dont il vient d’apprendre l’existence - allongée sur la table, joue avec ses pieds qu’elle mordille. Quelle agilité, déjà!

« D'habitude, ta mère, elle met les petits lions devant, ou derrière ? »

La petite l’observe de ses grands yeux bleus, sans rien dire, elle se contente de sourire. Elle lui sourit tout le temps d’ailleurs, c’est étrange. Un peu comme si elle sentait qui il est. Alors que lui, il est plutôt terrifié à la simple idée d’être plusieurs heures seul avec elle. Parce qu’Emy a des rendez-vous avec les services sociaux. Ou des entretient pour du travail. Il ne sait plus vraiment. Tout ce qu’il a retenu, c’est qu’il doit gérer un bébé, seul. Et ça, il ne sait pas faire. Il a vu ça comme un complot. Probablement qu’Emy veut le tester. Mais vous savez quoi ? Puisse le sort lui être favorable!  

« Devant hein ? »

Il enfile la couche autour des cuisses de Nyah, espérant l’avoir mise dans le bon sens, puis il habille la petite, sans même se rendre compte qu’il lui a mis son tee-shirt à l’envers. Et probablement la couche aussi. Puis plutôt fier de lui, il passe ses mains sous les bras de la petite, et vient la soulever contre lui pour l’entraîner vers le salon. Jusqu’à ce qu’il entende sonner à la porte. Là, il s’arrête, puis pose l’azure de ses yeux sur ceux de la petite – tout aussi bleus -. Qui peut venir le voir à cette heure-ci ? Alors qu’il est avec un bébé ? Son bébé. Il est pris d’une certaine panique soudainement, puis se tourne dans tous les sens pour chercher ou cacher Nyah. Un placard ? Ça rentre dans un placard un bébé, on est d’accord ? Il ouvre rapidement celui en dessous de l’évier de la cuisine, mais il se ravise... Si elle a peur du noir, elle va chialer, et ça s’entendra. Il se dépêche donc de monter à l’étage, dans la chambre d’ami ou loge Emy, puis il dépose Nyah dans son parc. Il lui fait chut avec ses doigts devant sa bouche, sans être certain qu’elle ne comprenne. Il largue plusieurs jouets à l’intérieur, avec elle, pour l’occuper, puis il redescend très très vite, pour ouvrir la porte à la volée.  

« Charlie ?! »

Sa sœur. Sa sœur jumelle. Qui normalement, vit à San Fransisco. Surpris de la voir ici, sur son palier, il est un moment immobile. Et elle en profite pour lui sauter au cou, heureuse de le revoir, alors que lui, tout devient la panique dans sa tête. Charlie et le bébé, dans le même appartement ?! « Oliiiii !Je suis tellement contente de te revoir ! Tu devineras jamais ! je suis tellement contente de te revoir ! Je suis procureure à NY maintenant. Je suis tellement contente de te revoir ! Je suis arrivée il y a une semaine mais je n’avais pas encore eu le temps de passer te voir et je voulais te faire une surprise ! Est-ce que j’ai dit que j’étais contente de te revoir ? » Procureur à New-York ? Genre... Là tous les jours ? Sa respiration se coupe un instant, tel un gros coup de massue dans la poitrine. Oui, il est heureux de revoir sa frangine. Non que dis-je, sa moitié, son âme sœur - mais fraternellement hein! -. Mais dans les conditions actuelles, c’est dangereux. Si elle vient à apprendre qu’il a mise enceinte une roturière, sans argent, sans rang, américaine, et hors mariage! Il risque fort de se faire déshériter. Et il ne préférerait pas. Vraiment pas. Surtout que papa à un sacré patrimoine.  

« Wow, mais sérieusement, New-York ?! »

Lance-t-il pour faire comme si la nouvelle l’enchantait énormément, surjouant peut-être un peu trop un visage enjoué, alors qu’il est crispé. Elle rentre, alors, il ferme la porte, et grimace de panique alors qu’elle lui tourne le dos. Evidemment, il retrouve un faux large sourire quand elle se retourne.

« Tu t'es installé ou ?! »

Faites qu’elle ait un appart et qu’elle ne soit pas là pour lui demander une colocation. Parce qu’il va finir par manquer de place dans cet appart. Ho non de dieu, derrière Charlie, une poupée. Les yeux exorbités, il contourne Charlie pour donner discrètement un coup de pied dans le jouet qui disparaît sous un meuble.  

« Tu veux boire quelque ? »

Il tire une chaise de la salle à manger, pour à tout prix éviter de l’installer dans le salon, qui ressemble plutôt à une salle de jeu. Nyah en a mis partout, sans compter la table à langer, entourée de couches usagées qu’il n’a pas eu le temps de jeter.  

« Installe toi, je m’occupe de tout! »

Oui c’est vachement dans ses habitudes d’ailleurs. Monsieur flemmardise. Il file dans la cuisine, ouvrant le frigo. Des petits pots, des purées, des légumes, que des trucs pour bébé. Ça lui donnerait presque envie de chialer, parce que si sa sœur s’en aperçoit, la comédie ne durera pas longtemps. Ho, on entend à l’étage, que Nyah appelle Maman. Ou un truc comme ça. Certainement pas papa, ni lui, ni Emy ne lui a appris ce mot. C’est genre, le mot qui fait peur. Il se redresse, un jus d’orange pour bébé en main, sans vraiment s’en rendre compte. Il file dans la salle à manger tandis que Nyah gémit encore à l’étage, un bruit sourd, à peine audible mais ses oreilles de papa suricate en alerte, l’entendent clairement.  

« Bouge pas, je reviens! »

Il largue le jus d’orange entre les mains de sa jumelle, machinalement, puis il grimpe les escaliers deux par deux pour entrer dans la chambre d’Emy. Nyah pleurniche toute seule. Il grimace un peu, inquiet, ne sachant guère comme gérer les deux filles sans qu’elles ne se croisent. Il prend la petite dans ses bras, la berce doucement, puis la repose dans le parc, lui tendant d’autres jouets.  

« Un doudou ? Une totote ? Oh je t’en prie, chut. »

Il est nerveux, enfournant une sucette dans la bouche du bambin, qui empoigne une grosse peluche avant de s’asseoir dans le parc, visiblement satisfaite. Rassuré, il inspire rapidement et s’enfuit vers la salle à manger, un peu essoufflé. Il se laisse retomber dans une chaise à côté de sa sœur, le dos contre le dossier, affalé, quand ses yeux tombent sur le jus d’orange. Merde.

« Tu savais qu’il a vachement moins d’additifs dans les produits pour bébés que les autres ? J’ai refais mon garde mangé! »

Bah voyons!

Sur le moment, Charlie mit la crispation de son frère sur le coup de l’étonnement. Oui, elle comprenait bien que lorsqu’on ouvre la porte et qu’on tombe sur une personne que l’on n’a pas vu depuis un an et qu’elle vous saute dessus, bah dans un premier temps, ça surprend. Mais, avec un temps de retard, il la serra dans ses bras également, alors Charlie mis l’étrange sensation de déranger qu’elle avait eu de côté. Enfin, pour quelques secondes seulement. Alors qu’elle s’attendait à un accueil beaucoup plus joyeux, des cris, des embrassades, des « Tu t’installes ici ? Mais c’est génial, attends je prends mon manteau et je t’emmène faire le tour de la ville », bref des trucs comme ça, ce n’est pas vraiment ce qui se passait.

« Wow, mais sérieusement, NY ? » Mouais…..un peu crispé le garçon quand même. N’importe qui serait tombé dans le panneau et aurait vraiment pensé qu’il était enthousiasmé, mais, hey, elle était sa jumelle que diable, elle le connaissait par cœur le loulou. Mais une fois de plus, elle ne dit rien et entra dans l’appartement. « Tu t’es installée où ? »

« Oh, juste à côté d’ici, tu descends la rue, en 2 minutes tu y es. Je te ferais faire le tour du propriétaire quand ils auront fini de déballer mes cartons. Mais vraiment juste à côté, on va pouvoir se voir très souvent ! »

Et elle comptait bien rattraper tout ce temps qu’ils ne s’étaient pas vu ! Le suivant dans l’appartement, elle répondit par l’affirmative lorsqu’il lui demanda si elle souhaitait boire quelque chose mais fut de plus en plus étonnée lorsqu’il la dirigea vers la cuisine et non vers le salon. Elle connaissait l’appartement, virtuellement parlant du moins. Via un appel vidéo, il lui avait fait faire le tour du propriétaire lorsqu’il avait emménagé. Alors elle savait pertinemment qu’il avait un grand et beau salon, bien décoré, agréable, avec une belle vue et un bel ensoleillement. Alors oui, la salle à manger était tout autant de bon goût, mais c’était étrange de ne pas se rendre au salon. Ils avaient tous les deux été élevés dans le respect le plus stricts de l’étiquette et des règles de bienséances anglaises. Et même si elle était sa sœur et qu’entre eux, c’était beaucoup plus soft, plus cool, l’un comme l’autre avait jusqu’à présent accueillis son jumeau dans la plus belle pièce de l’appartement, généralement le salon.

Elle haussa les épaules, classant cette nouvelle information dans un coin de sa tête, se disant, qu’après tout, peut être que son salon est en sacré bordel, elle ne l’avait pas prévenu qu’elle venait. Donc elle le suivit gentiment et s’assit dans la salle à manger. « Installe toi, je m’occupe de tout. »Okayyyyy…c’était de plus en plus bizarre cette histoire. Depuis quand il « s’occupait de tout » ? En temps normal, il l’aurait conduit à la cuisine et l’aurait laissé se servir, flemmard qu’il était. Mais, une fois de plus, elle ne dit rien, l’attendant patiemment alors qu’il lui criait de ne pas bouger avant de monter en vitesse à l’étage. En l’attendant, elle vérifia son téléphone, répondit à quelques mails et jeta un coup d’œil à ses réseaux sociaux…..et ceux d’Oliver. Elle avait beau suivre ses comptes, peut être qu’elle était passée à côté de quelque chose qui expliquerait sa bizarrerie ? Mais non….rien de nouveau.

Voilà qu’elle commençait à être un peu vexée. Aurait-il quelque chose à cacher ? A lui à cacher à ELLE ? Eux qui s’étaient promis tout petit de ne jamais rien se cacher histoire que l’autre puisse le couvrir devant les parents (promesse de sang avec le petit doigt et tout, super sérieux quoi). Mais alors qu’elle prenait une gorgée de la boisson qu’il lui avait jeté avant de courir comme un diable à l’étage, elle baissa les yeux vers la boisson, intriguée. Un jus d’orange, il lui avait donné un jus d’orange ! Elle avait quoi, 5 ans ? Et en y regardant de plus près, c’était même une boisson pour bébé ! Sa stupeur dut se voir sur son visage lorsqu’il revint s’affaler sur la chaise à côté d’elle. « Tu savais qu’il a vachement moins d’additifs dans les produits pour bébés que les autres ? J’ai refais mon garde mangé!» mais bien sûr ! Et la marmotte, etc…..

« Oli ? Quelque chose ne va pas ? y’avait le feu à l’étage pour que tu t’y rendes aussi vite ? Et c’est quoi cette histoire de jus d’orange. Tu me caches quelque chose là et….. »

Avant qu’elle ne se lance dans un grand argumentaire bien comme il faut comme lorsqu’elle se lance dans une plaidoirie(Procureure je vous le rappelle), elle est coupé sur sa lancée en entendant un drôle de bruit. Voyant son frère pâlir, elle lève la main pour l’interrompre avant qu’il ne dise quelque chose et écoute plus attentivement….hum….étrange, ça ressemble à….mais oui !

« Euh……c’est marrant j’entends un drôle de bruit comme si un bébé pleurait à l’étage. »

Et prise d’une soudaine idée, elle posa le jus sur la table, se leva d’un coup et se rendit rapidement au salon, ouvrant vigoureusement la porte. Et là, devant ses yeux ébahis, le salon était transformé en……salle de jeux ? Garderie ? Les mains sur les hanches, ressemblant plus que jamais à leur mère, elle se retourna vers son frère.

« Oliver William Richards ! Tu m’expliques ? »

Ça l’angoisse, la simple présence de Charlie l’angoisse. Parce qu’ils n’ont pas besoin de se parler pour se comprendre. Ils n’en n’ont jamais eu besoin. Déjà bébés, l’un à côté de l’autre, leur mère, puis leurs gouvernantes, avaient bien remarqué que leurs yeux le servaient de langage. Ils échangent en codes. Un code qu’eux seuls comprennent. Ils ont grandi dans le même ventre, tous les deux, main dans la main. Et ça, c’est un lien unique. Et là ou certains jumeaux prennent des chemins différents en grandissant, Charlie et Oliver eux, ne sont jamais vraiment séparés. Toujours en contacte, tous les jours, ne serait-ce qu’un message. Et jusqu’ici, ils se sont toujours tout dis. Absolument tout. Pourtant, l’un comme l’autre ces derniers mois, ils ont failli à cette règle. Elle, parce qu’elle ne lui a rien raconté sur son Alexander. Lui, parce qu’il ne lui a rien dit sur Nyah, et Emy. Ça ne leur est jamais arrivé, de se mentir, comme ça. Et lui, il culpabilise. Il s’en veut. Charlie pourrait être un sacré pilier dans cette histoire. Mais il a peur. Peur qu’elle panique, et qu’elle en parle à Billy, leur père. Alors il a préféré tout garder pour lui, songeant sûrement qu’il se débarrasserait de ce problème très vite. Mais il n’avait pas prévu que, même sans avoir les résultats du test de paternité fait la veille, il se rendrait compte de lui-même que Nyah est bien sa fille. Il a sorti ses vieux albums photo, quand ils étaient petits, lui et Charlie. Et Nyah, elle est leur portrait craché, si ce n’est qu’elle est rousse. Elle a les yeux bleus de son père, la bouille des Richards aussi, quelque chose de Charlie en fait. Tout en ayant le caractère de sa mère, ça se sent. Et sa chevelure, évidemment. Alors il ne sait plus comment s’en sortir. Parce que Nyah, elle ne sortira jamais de sa vie. Ça il en est certain. Emy pourra tenter de s’enfuir à l’autre bout du monde si elle le désire, il finira toujours par la retrouver. C’est instinct de papa suricate qui parle. Ouai il déteste les bébés, il déteste la vie de famille, il déteste avoir des responsabilités comme ça. Mais c’est plus fort que lui. C’est comme si quelque chose dans son corps avait changé. Comme si tout à coup, il était devenu le bodygard de cette poupée vivante. Et soyez en sûr : Aucun homme ne touchera sa petite poupée. Surtout pas des comme lui.

« Oh, juste à côté d’ici, tu descends la rue, en 2 minutes tu y es. Je te ferais faire le tour du propriétaire quand ils auront fini de déballer mes cartons. Mais vraiment juste à côté, on va pouvoir se voir très souvent ! » Merde... A coté comme, voisin ? A côté comme, elle va débarquer à n’importe quelle heure du jour et de la nuit ? Putain. Il panique encore plus. Et les gazouillis à l’étage ne l’aident en rien. Il s’enfuit donc s’occuper de sa chaire et son sang, rapidement, espérant qu’elle se fasse le plus discrète possible. Puis il revient, réalisant qu’il a fourré entre les mains de sa jumelle, un jus d’orange de Nyah. Excuse bidon oblige, mais excuse plutôt convaincante, non ? « Oli ? Quelque chose ne va pas ? Y’avait le feu à l’étage pour que tu t’y rendes aussi vite ? Et c’est quoi cette histoire de jus d’orange. Tu me caches quelque chose là et….. » Il tente de répliquer, sa bouche s’ouvre, mais Charlie avance sa main, et plutôt que d’entamer une discussion avec la paume plutôt charmante, de sa jumelle, il ferme son clapet. De toute façon, faut qu’il réfléchisse là. Faut qu’il trouve une parade. « Euh…… C’est marrant j’entends un drôle de bruit comme si un bébé pleurait à l’étage. »

« Un quoi ? »

Murmure-t-il nerveusement, tentant de paraître le plus surpris possible, de la réflexion de la jeune procureure. Puis il échappe un rire presque moqueur.

« Un bébé, non mais un bébé, tu m’as vu ? »

Il se désigne lui-même de ses deux mains, jusqu’à ce que Charlie se relève. Il ouvre grand ses yeux, puis la suit, tentant de la rattraper au passage.

« Non, attends! »

Trop tard, elle a admiré son si beau salon, recouvert de jouets, de couches. Sa superbe table basse ne verre, recouvertes de trace de doigts de bébé bien gras. Des bavoirs sales partout. Un parc, une table à langé, et pire que tout : Des affaires de femmes. Parce que oui, Emy est ici. Elle est installée ici. Alors elle lave son linge ici. Elle pli son linge et celui de sa fille ici. Et rien n’est rangé. Parce qu’Emy n’a pas eu le temps. Et que lui... Bah le ménage, le rangement, tout ça, c’est ps trop son truc. « Oliver William Richards ! Tu m’expliques ? » Quand elle use de son second prénom, c’est que franchement, ça pu pour son cul. Alors stoppé à un mètre d’elle, il se pince la lèvre, déglutissant quelque peu.

« C'est pas du tout s’que tu crois! »

Ou si complètement. Tout dépend de ce qu’elle pense. Mais il n’a pas kidnappé un bébé, c’est déjà ça. En même temps, ça aurait été bizarre de sa part. Lui qui préfère la fête à la famille, l’alcool aux enfants, un kidnapping de bambin, c’était peu imaginable. Et ça pleure à l’étage, maintenant, ça pleure franchement. Alors il déglutie encore plus, comme si lui-même allait se mettre à pleurer.

« J'reviens! »

Dit-il d’une toute petite voix aiguë, alors qu’il remonte les escaliers pour retrouver Nyah. Elle pleure à chaude larme dans son parc. Ce qui lui, lui brise son petit cœur de papa suricate, soyons francs. Surtout qu’il ignore comment on console un bébé. Alors il la prend dans ses bras, il la serre contre lui, tout en la berçant légèrement.

« Désolé, désolé, désolé, papa n’est pas très doué petite beauté. »

Papa ? Il a vraiment dit papa ? Non de dieu il a dit papa. Le réalisant, il recule légèrement son visage et la silhouette de Nyah pour la fixer dans les yeux, alors qu’elle s’est calmée.

« Ne répète jamais ça à ta mère! »

Elle sourit à nouveau, reniflant du nez qui coule. Puis elle lève son index vers le visage d’Oliver.

« Baba! »

Papa... ? Ses yeux manquent de sortir de leurs orbites. Pourvu qu’Emy n’entende jamais ça. Jamais. Et merde, Charlie! Il redescend rapidement les marches, la petite entre les bras, puis il s’avance vers sa sœur, la queue entre les pattes, comme diraient certains. Il est peu assuré, honteux même

« Heum... C’est une longue histoire. »

Il passe devant Charlie, la petite toujours dans les bras, puis il vient ranger un peu, de sa main libre, alors que Nyah le regarde faire. Il jette les couches sales, il tente de faire un peu de place sur le canapé. Puis voyant bien qu’il n’arrivera à rien avec la petite, il revient vers Charlie.

« C'est Nyah. Ma fille. »

Enfin, d’après les ressemblances hein, parce que le test de paternité n’a pas encore dit son dernier mot. Tentant de faire digérer la pilule à Charlie, il relève la main de Nyah pour qu’elle salut Charlie, et d’une petite voix imitant un bébé, Oliver reprend :

« Coucou Tata Charlie. »

Pourvu qu’elle tombe amoureuse du bébé, comme lui, et qu’ainsi, tout soit oublié dans quelques minutes. Ouai, il tend le bébé à Charlie, pour la lui fourrer dans les bras presque sans son consentement. Comme ça c’est sûr, tatie Charlie tombera amoureuse.

« J’te fais un résumé. Y’a presque deux ans, j’ai rencontré Emy, et... Neuf mois plus tard, Nyah. Sauf qu’Emy et moi on n’était pas vraiment... Amis. On n’était même rien du tout. Alors, elle a rien dit. Elle a fait sa vie avec la petite. Sans que je n’en sache rien... Mais... Les services sociaux sont sur son dos. Donc, elle a eu besoin de moi. Okay dis comme ça, c’est super pas glorieux pour elle. »

Pas du tout même. Les mains libres à présent, il les pose sur ses propres hanches, alors qu’il martyrise sa lèvre en cherchant comment tourner ses phrases le mieux possible.

« Ne dis rien à papa. S’il te plait. Il va me tuer. Il va me déshériter! Il va m’ordonner de la mettre à la porte. Il va m’enlever ma fille aussi! Ouai il va le faire! Si ça se trouve, il fera même en sorte que les services la sépare d’Emy! Ho la vache! »

Ouai il panique là. Son daron n’étant à ses yeux, qu’un bourreau pour les classes les plus basses, dont fait partie Emy. Il passe donc ses mains dans ses cheveux, très nerveusement, avant de reprendre sa fille dans ses bras, l’arrachant presque de ceux de sa sœur. Et machinalement, il la serre contre lui, ses lèvres frôlant le front de sa chaire et son sang.

« Ne lui dit rien, vraiment! »

C’est carrément supplié là. S’il pouvait, il se serait mis à genoux devant sa sœur jumelle!

L’esprit léger et le sourire aux lèvres, Emy marchait désormais avec plus d’assurance dans les rues de Manhattan. Elle sortait de son rendez-vous avec l’assistance sociale en charge de son cas et lui avait présenté le Graal, la dernière pièce manquante à la clôture de son dossier : un contrat de travail. Les conseils avisés de Roxanne ayant porté leurs fruits, Emy s’était empressée de lui envoyer un message pour lui annoncer la bonne nouvelle et la remercier de la petite séance de coaching improvisée à laquelle toutes deux s’étaient adonnées quelques jours plus tôt. La jeune maman était à présent employée dans un magasin de prêt-à-porter. Ce n’était peut-être pas le métier de ses rêves, mais il lui permettait désormais de bénéficier d’une remise intéressante sur les vêtements.

La rousse jeta un coup d’œil sur la route, puis la traversa en courant pour gagner le trottoir d’en face, pressée de retrouver sa fille. Elle s’engouffra dans l’immeuble qui abritait le luxueux appartement d’Oliver  où elles avaient temporairement élu domicile et releva le courrier qu’elle étudia de manière distraite en attendant l’ascenseur. Son œil fut attiré par l’adresse de l’expéditeur d’une grande enveloppe. Il s’agissait du laboratoire où devait être traité le test de paternité. Emy se figea. Oliver était le père de Nyah à n’en point douter, mais il avait totalement rejeté cette idée. Le test arrivait pile au moment où elle s’apprêtait à lui dire qu’elles ne seraient bientôt plus un problème pour lui. Refusant de laisser son esprit évaluer toutes sortes d’hypothèses, elle fourra la grande enveloppe dans son sac au moment où les portes de l’ascenseur s’ouvraient sur le palier de l’appartement. C’était calme.

Songeant que Nyah s’était peut-être endormie, la jeune maman ouvrit la porte le plus doucement possible. Son premier geste fut d’enlever les escarpins que lui avait prêté Roxanne pour l’occasion, grimaçant à la fois de douleur et de soulagement. Elle ôta ensuite son sac et sa veste qu’elle rangea à l’endroit prévu à cet effet. Elle défit son chignon pour laisser sa chevelure rousse - légèrement ondulées par la coiffure – retomber en cascade sur ses épaules et traversa le couloir pour gagner la cuisine en rêvant déjà de se prélasser sous la douche.

Lorsqu’elle redressa la tête, Emy se stoppa net. Elle assistait à une drôle de scène. Oliver se tenait au beau milieu du salon tenant Nyah comme il ne l’avait jamais fait auparavant. La jeune femme aurait pu s’attendrir de voir Oliver se montrer aussi paternel envers sa fille, leur fille, mais elle était davantage intriguée par l’inconnue qui se tenaient à leurs côtés. Elle eut juste le temps de l’entendre la supplier d’un : « Ne lui dit rien, vraiment ! ». Ils se regardèrent ensuite en silence et d’une telle intensité qu’ils ne semblèrent pas avoir remarqué son entrée en scène. Bien sûr, c’était sans compter Nyah. Lien mère-fille oblige, l’enfant avait immédiatement senti la présence de sa génitrice. « Mamamamama… ». Elle tendit les bras dans sa direction, allant même jusqu’à tortiller et pencher dangereusement son petit corps pour l’atteindre. La jeune maman sentit alors le regard des deux protagonistes se poser sur elle.

Emy étudia l’inconnue. C’était une femme d’une extrême beauté et d’une élégance qui rendit l’américaine aussitôt mal à l’aise. Son regard passa alors sur Oliver, puis sur Nyah, puis de nouveau sur l’inconnue. Emy sentit une bouffée de colère. Avait-il confié sa fille à une parfaite inconnue ? Ou Nyah était-elle devenue un appât permettant à Oliver d’attirer d’autres conquêtes ? Combien d’entre elles avaient gravité autour de sa fille à son insu ? La jeune femme sortit de son état de léthargie pour franchir les quelques mètres la séparant du salon et prit sa fille des bras d'Oliver. « Je peux savoir ce qui se passe ici ? » lança-t-elle.

« C’est pas du tout s’que tu crois ! » Vraiment ? Charlie leva un sourcil, geste très britannique tel un Alfred Pennyworth (petite parenthèse sur le fait que tout le monde devrait avoir un Alfred Pennyworth dans sa vie) afin de montrer clairement qu’elle était ô combien sceptique. Prends moi pour une truffe oui ! Un salon rempli de jouet pour bébé, des couches qui traînaient (Sérieux Oliver !) et…la bas dans un coin….des fringues de femmes ?!Mais WTF ? Elle était tombée dans un univers parallèle ou quoi ? Plus le coup du jus d’orange, elle était certaine que si elle filait dans la cuisine, en lieu et place des plats à emporter et des alcools chers qui se trouvaient habituellement dans la cuisine de son frère, elle tomberait sur tout un tas de nourriture pour bébé.

« J’reviens » et avant qu’elle n’ait pu dire quelque chose, il fila de nouveau en direction de l’étage……avant de redescendre avec une schtromfette dans les bras. Okay, maintenant ça devenait vraiment bizarre. Même si elle avait entendu le bébé pleurer, voir son frère avec un gosse dans les bras la perturbait au plus haut point. Bug dans la matrice. « Hum…..c’est une longue histoire » Non vraiment ? Attendant plus d’explication que « c’est une longue histoire », elle le suivit des yeux alors qu’il tentait, en vain, de ranger un peu le salon. « C’est Nyah. Ma fille »
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Attends quoi ???? Alors là, elle ne s’y attendait vraiment pas. Et sur le moment, elle pensa à une blague. Une blague nulle mais une blague. Sauf que là, il ne mentait pas, il était plus que sérieux en fait ! « Coucou Tata Charlie » et sans aucune façons, il lui colla la mioche dans les bras. Ce fut suffisant pour sortir Charlie de sa torpeur.

« Attends, attends, quoi ? Non mais y’a pas de Coucou tata Charlie enfin ! C’est quoi ce bordel ? D’où tu sors un gosse de nulle part ? Et puis reprends là, tu sais bien que les enfants et moi c’est pas le grand amour ! »

C’est peu de le dire. Charlie n’était pas fan des enfants. Ca crie, ça pleure, ça bave du ses vêtements qui valent une fortune. Bref, pas son délire. Et voilà qu’elle se retrouvait avec un bébé dans les bras. Sa nièce apparemment. Mal à l’aise, la tenant maladroitement, Charlie jeta un coup d’œil à la gamine. Mouais…..y’avait un air des Richards sur cette bouille. Mais ça ne prouvait rien, ça pouvait être juste une coïncidence. « J’te fais un résumé [….]Okay dis comme ça, c’est pas super glorieux pour elle »

« Donc tu es en train de me dire qu’une fille que tu t’es tapé il y a deux ans est réapparu un beau jour en prétextant que cette gamine était la tienne et que maintenant elle avait les services sociaux sur le dos ? Tu es sûre que c’est TA fille ? Et cette fille, tu la connais si bien ?Non parce que, ne pas donner de nouvelles pendant des mois et réapparaître dans la vie d’un homme riche avec une enfant quand on a des problèmes, ça donne plutôt l’impression qu’elle cherche à profiter de ton argent !Et puis on peut savoir pourquoi elle a les services sociaux sur le dos cette demoiselle ? »

Oui, bon, pas très sympa la fille. En même temps, vu de l’extérieur, c’est quand même l’impression que ça donne. Et l’un comme l’autre savait pertinemment que beaucoup de gens n’en voulait qu’à leur fortune et leur statut social. Alors oui, elle s’énervait un peu. Mais elle ne laisserait pas une croqueuse de diamant embrouiller son frère. « Ne dis rien à papa. [….]Ho la vache ! » Là, elle était carrément vexée. Comment osait-il penser qu’elle allait en parler à leur père ? Non mais franchement ! Il récupéra sa ( ?) gamine pour le plus grand soulagement de Charlie qui vérifia discrètement que sa veste de créateur n’était pas tâchée.

« Mais enfin Oliver, qu’est ce qui a pu te faire croire que la première chose que j’aurais faite, serait d’aller voir papa pour tout lui raconter ? Jumeaux, même bateau, tu te souviens ? Et pourquoi tu ne m’as rien dit ? Apparemment ça fait des mois que tu a la connaissance de l’existence de cette petite fille. Tu ne m’en a jamais parlé, pourquoi ? J’aurais pu t’aider ! Enfin, du moins on aurait pu en parler. »

Bon, à la voir comme ça, dans les bras d’Oliver, c’est vrai qu’elle avait l’air mignonne. Attention, ne croyez pas que Charlie était sous le charme d’un bambin ! Mais bon, si cette gamine était sa nièce (ce qui restait à prouver), elle se permettrait peut-être de la trouver adorable.

Quelle histoire ! Elle qui pensait faire une surprise à son frère, la voilà qui se retrouvait dans un épisode de télénova. Tout à sa surprise, elle n’avait pas entendu la porte s’ouvrir et une nouvelle arrivante faire son entrée. Ce n’est que lorsque l’enfant babilla qu’elle se rendit compte de la présence d’une quatrième personne « Je peux savoir ce qui se passa ici ? » Charlie regarda la rousse volcanique qui venait de débarquer. Allons bon, c’était qui celle là encore ?

Reprenant ses esprits, Charlie passa en mode « Richards ». C’est-à-dire la crème de la haute société anglaise. Elle s’assit élégamment dans le canapé que son frère venait de débarrasser et scruta la nouvelle arrivante de haut en bas. Vêtement de qualité moyenne mais bon goût, pieds nus (du mal avec les escarpins ?). Ce n’était pas une des jet-setteuse que son frère avait pour habitude de ramener. Au vu de la réaction de la gamine, c’est sans user de ses talents de déduction que Charlie devina qu’il s’agissait de la mère de l’enfant. La potentielle croqueuse de diamant donc. Et c’est avec son air le plus hautain, britannique et glacial possible qu’elle reprit la parole.

« Puis-je savoir à qui ais-je l’honneur ? »

« Attends, attends, quoi ? Non mais y’a pas de Coucou tata Charlie enfin ! C’est quoi ce bordel ? D’où tu sors un gosse de nulle part ? Et puis reprends là, tu sais bien que les enfants et moi c’est pas le grand amour ! » Ouai bah lui non plus ça n’avait jamais été le grand amour avec les gosses, sauf qu’il en est là, à en gérer un. Et tout seul là, comme un grand, depuis plus de deux heures. Et scoop, il s’en est sorti comme un chef. Comme si le sang qui coule dans ses veines, était celui d’un papa suricate en alerte depuis toujours. « Donc tu es en train de me dire qu’une fille que tu t’es tapé il y a deux ans est réapparu un beau jour en prétextant que cette gamine était la tienne et que maintenant elle avait les services sociaux sur le dos ? Tu es sûre que c’est TA fille ? Et cette fille, tu la connais si bien ? Non parce que, ne pas donner de nouvelles pendant des mois et réapparaître dans la vie d’un homme riche avec une enfant quand on a des problèmes, ça donne plutôt l’impression qu’elle cherche à profiter de ton argent ! Et puis on peut savoir pourquoi elle a les services sociaux sur le dos cette demoiselle ? » Bon c’est vrai que dit comme ça, ça semblait être un sacré coup fourré. Mais Emy ne semblait pas être... De ce genre-là. Enfin, il ne la connait pas, c’est vrai. Hésitant, il se retourne vers son salon, dans lequel la rousse s’est visiblement bien installé.

« Non... Non elle n’est pas... J’en sais rien, j’attends les résultats d’un test de paternité. Et je suppose que s’il a accepté que je le fasse, c’est qu’elle est sûre d’elle. »

Sinon elle l’en aurait certainement dissuadé, ça lui semble logique. A moins qu’elle soit franchement stupide, mais vu l’aisance avec laquelle elle s’occupe de Nyah, ça ne fait aucun doute qu’elle en a dans la tête la rousse. Il est impressionné lui.

« Elle a perdu son emploi, ça n’a pas d’argent, pas de logement, les services s’en mêlent, ça semble logique. »

Ouai c’est logique. Puis il l’a vu de ses propres yeux, la petite chambre qu’elle loue dans le centre d’aide. Elle est réellement dans la merde la rousse. Peut-être qu’elle profite de lui, peut-être... Mais si ce bébé est le sien, faut qu’il la caresse dans le sens du poil aussi, pour ne plus être séparé de sa progéniture, non ? « Mais enfin Oliver, qu’est ce qui a pu te faire croire que la première chose que j’aurais faite, serait d’aller voir papa pour tout lui raconter ? Jumeaux, même bateau, tu te souviens ? Et pourquoi tu ne m’as rien dit ? Apparemment ça fait des mois que tu as la connaissance de l’existence de cette petite fille. Tu ne m’en a jamais parlé, pourquoi ? J’aurais pu t’aider ! Enfin, du moins on aurait pu en parler. » Il a repris la petite, il panique un peu. Il la tient bien contre lui, comme s’il avait peur que Charlie elle-même vienne la lui reprendre, alors qu’elle déteste les bébés, certainement plus que lui encore.

« Ça ne fait que quelques jours qu’elle est là... J’ai vraiment pas eu le temps de t’en parler. Tout c’est fait vite... »

Trop vite. Et la petite gigote, gazouille, en se penchant. Rapidement, il réalise qu’Emy est là. Elle n’a pas l’air bien ravie en plus. Elle lui reprend Nyah des bras, toisant Charlie, qui en fait de même. Oliver lui, se raidie un peu plus, ayant la soudaine impression d’être l’arbitre d’un match de catch. « Je peux savoir ce qui se passe ici » Il aurait aimé que Charlie se montre chaleureuse. Ouverte. Mais comme à son habitude, à chaque fois qu’il lui présente une fille, elle se méfie. Elle y voit une croqueuse de diamant. Une pimbèche qui n’en veut qu’au portefeuille familiale. Elle se montre hautaine, le faisant rouler des yeux, mal à l’aise devant la scène. « Puis-je savoir à qui ais-je l’honneur ? » Il grimace, il aurait donné cher pour être loin d’ici. Alors sans bouger, il désigne des mains, Charlie.

« Charlie, ma sœur jumelle. »

Puis il désigne Emy.

« Emy, la mère de Nyah. »

Il inspire, puis il se dirige vers Charlie, allant s’accroupir devant la jeune femme, tout en posant sa main sur celle de sa précieuse sœur. Probablement la personne la plus importante de toute sa vie. Quoi que maintenant, elle va devoir partager ce trône avec Nyah, ça va de soi.

« Ecoute. Je sais que la situation semble un peu bizarre. Et crois-moi, ça l’est tout autant pour moi, et pour Emy. Mais regarde là... C’est ton portrait craché! Ou le mien! Je peux pas la renier. Et toi non plus. Alors doute d’Emy si tu veux, mais moi pas. Je ne me rendrais pas responsable de ce que les services veulent lui faire. Ma fille ne sera pas séparé de sa mère. J’ose pas croire ce que je vais dire mais... Je vais assumer mes responsabilités. »

Pas très crédible sorti de sa bouche, et pourtant, la sincérité se lit dans ses yeux. Les yeux d’un homme qui n’a jamais pourtant, su regarder tout ce qui l’entoure avec un âge mentale dépassant la quinzaine. C’est comme si en quelque jour, Oliver était devenu un autre homme. Dans le fond c’est probablement le cas. Et c’est certainement ce qui arrive à tous les pères. Sauf qu’eux, ils le prennent en pleine figure avec un bébé naissant dans les bras, et que lui, il a affaire à une petite fille qui gazouille déjà. D’ailleurs, elle se retourne dans les bras de sa mère, et tend une main vers Oliver, pourtant plus loin.

« Baba. »

Il sourit aussitôt, presque fièrement, alors que l’azure de ses yeux s’enfonce un peu plus dans ceux de Charlie.

« La vérité sort de la bouche des enfants. »

Il se pince malicieusement la lèvre, puis se redresse, revenant vers Emy. Le visage un peu plus incertain, comme un enfant qui vient avouer à sa mère, qu’il a fait une petite bêtise.

« Je suis désolé, ma sœur du caractère. Je suis sa moitié, et je crois qu’elle n’aime pas partager. Mais je ferais un bon avocat. Pour toi! »

Ou pas, parce qu’il n’a jamais le dernier mot avec Charlie. De toute façon, ça se voit au premier regard. C’est une dame imposante, chic, le regard haut et fier. Il lance un malicieux sourire à Emy avant de passer ses mains entre les bras de la rousse pour tenter de reprendre Nyah.

« Je ne l'ai eu que deux heures, je peux la reprendre un peu ? »

Pire qu’un enfant, oui, mais pour sa défense, il aime bien jouer avec cette petite poupée, qui vient de l’appeler deux fois, papa. Baba ok, mais on sait tous ce qu’elle voulait dire non ? Le petit cœur du papa suricate en alerte est tout fondu, laissez-le profiter un peu. Surtout qu’il a peur maintenant. Pur qu’Emy trouve un travail et s’enfuit en refusant de la lui laisser, ne serait-ce qu’un week-end sur deux.

« Puis-je savoir à qui ais-je m’honneur ? » lança la brune qui avait pris place sur un fauteuil avec la même grâce que si elle s’installait sur un trône. Emy nota tout de suite l’accent britannique, de même que l’air pincé et hautain qui lui déplut fortement. C’est vrai qu’elle ne s’était pas présentée, mais la vision d’une parfaite étrangère à proximité de son bébé lui avait fait perdre ses bonnes manières. Emy n’avait aucune idée qu’un drame familial était en train de se jouer sous ses yeux. Finalement, c’est Oliver qui intervint pour les présenter l’une et l’autre. La jeune maman se mit à pâlir d’un coup et lança un « Oh… », visiblement gênée et confuse. Elle ignorait totalement qu’Oliver avait une sœur – une jumelle, de surcroît – et comprenait à présent pourquoi l’ambiance était aussi palpable. « Bonjour. Et désolée. » reprit-elle à l’attention de Charlie. En voyant Oliver s’agenouiller auprès de sa jumelle (une situation qu’elle n’aurait jamais cru possible), Emy s’éloigna par respect – restant tout de même à portée de voix et d’oreilles – afin de laisser aux deux Richards un peu d’intimité.

L’américaine entendit d’abord Oliver plaider sa cause – ce qu’elle n’aurait jamais cru possible – mais, plus important encore, avouer à sa sœur jumelle que Nyah était sa fille et qu’il comptait assumer sa paternité. Emy peinait déjà à croire ce qu’elle venait d’entendre lorsque sa fille se pencha de nouveau en avant, réclamant : « Baba ». Son cœur loupa un battement. Ou deux. Curieuse sensation que de sentir à la fois son sang se figer et être envahie par l’émotion. Nyah venait-elle de l’appeler « Papa » ? Emy regarda sa fille, totalement hébétée, puis Oliver qui venait de les rejoindre en arborant une expression docile qu’elle ne lui connaissait pas. « Je suis désolé, ma sœur a du caractère. Je suis sa moitié, et je crois qu’elle n’aime pas me partager. Mais je ferais un bon avocat. Pour toi ! ». Emy se sentit rougir, sans même comprendre pourquoi. Pour tout dire, elle comprenait à peine ce qui se passait et se demandait même si elle ne se trouvait pas dans une 4ième dimension. « Je ne l’ai eu que deux heures, je peux la reprendre un peu ? » lui demanda-t-il avec ce même air malicieux qui l’avait séduite 2 ans plus tôt. Emy acquiesça. Elle déposa un baiser dans les cheveux roux de l’enfant et la fit glisser dans les bras de son père où elle semblait résolue à y retourner. « Je crois… Je crois que je vais vous laisser discuter entre vous. Je vais… Je vais à la buanderie pour finir de m’occuper du linge. Ouais, je vais faire ça. » balbutia-t-elle maladroite, encore complètement abasourdie par tout ce qu’elle venait d’apprendre. Emy commença alors à la hâte à rassembler toutes les affaires éparpillées à terre et dont elle n'avait pas eu le temps de s'occuper.

« Non….Non, elle n’est pas…..[….]Elle a perdu son emploi [….]ça semble logique. » Mouais, il n’avait plus l’air très sûr de lui là. Est-ce qu’elle avait réussi à lui mettre le doute ? Pas sûr, mais elle pouvait toujours continuer à essayer de rependre le doute. Comment ça ce n’est pas sympa ? Ah mais bien sûr, elle le savait et l’assumait totalement ! c’était son rôle de jumelle voyons ! Elle n’était pas sans cœur bien entendu, ce n’est pas qu’elle ne souhaitait pas le bonheur de son frère, bien au contraire, elle ne lui souhaitait que ça ! Mais il était de son devoir de vérifier que la personne choisie par Oliver était la bonne. Elle se souvenait encore de cette……Sandy ?.......Cindy ? bref de l’autre là, un été alors qu’ils avaient 18 ans. Issue d’une famille bourgeoise, elle avait décidé de mettre le grappin sur l’héritier Richards. Bon, Oliver n’avait pas eu besoin de Charlie pour s’en débarrasser hein, mais derrière, Charlie avait été une vraie garce, et sans aucun remords. Cette…..Sally ?.....Samy ? donc cette fille là, avait été blacklistée de toutes les soirées de la haute. Et il y en avait eu d’autre dans le même genre.

Tout ça pour dire qu’il était de son devoir de vérifier chaque fille qui tentait de conquérir son frère et il avait l’air accroché à celle là, alors elle devait creuser. Et puis, Oliver faisait de même hein. Chacun de ses petits amis avaient été passé au crible. Alexander était ressorti blanc comme un linge d’une de ces conversations avec Oli……tiens en parlant d’Alexander, il faudrait qu’elle lui en parle. Parce qu’il allait vite se poser la question. C’était l’amour fou entre eux et voilà qu’elle débarquait à NY sans lui, forcément c’est louche. Mais bref, ce n’était pas le sujet du jour, aujourd’hui, c’était Oliver qui se retrouvait avec un gosse sur les bras, pas Alexander (quoique…..si ça s’trouve, il l’avait mise en cloque la grognasse…..aïe une petite voix ressemblant fortement à celle de sa mère venait de dire « Langage jeune fille »)

Oliver donc. Focus. Charlie soupira, fatiguée d’avance du bordel que cette histoire allait créer Quand leur père allait entendre parler de ça…..et forcément un jour ou l’autre, si cette gamine s’avérait être vraiment une Richards, leur père allait le savoir.

« T’es sûr de toi ? A propos de cette fille ? De cette gamine ? Je me doute qu’un test de paternité est en cours. Et si c’est positif, il va falloir penser à ce qu’on va dire à papa. Parce que tu ne pourras pas la garder cacher pour toujours. Il va falloir mettre sur pied un plan de guerre là. Mais……comme toujours, tu peux compter sur moi. »

Adoucie la demoiselle ? En même temps, elle n’avait jamais pu rester en colère trop longtemps contre son frère. Et si cette enfant était vraiment sa nièce, ils ne seraient pas trop de deux pour contrer le tsunami que cette histoire allait créer. Mais ne vous y trompez pas, la mère en revanche, elle n’allait pas la lâcher. Même si Nyah était vraiment la fille d’Oliver, cela ne faisait pas de cette……Emy une fille bien. Bien au contraire aux yeux de Charlie. Coucher avec un homme riche et tomber enceinte ? C’était trop facile. Elle allait se faire un plaisir de juger cette femme elle-même. Et d’ailleurs, en parlant du loup……

Elle avait bien vu la grimace de son frère lorsqu’elle était passée en mode « Richards ». Lui plus tout autre savait très bien ce que ça annonçait (hey ! lui aussi avait ce « mode »là hein !) « Charlie, ma sœur jumelle. Emy, la mère de Nyah » Sans se détendre, Charlie lui accorda un léger hochement de tête afin de la saluer. « Oh. Bonjour et désolé . » Polie et en plus elle s’excuse. Mais Charlie étant…..Charlie, il était hors de question de se laisser attendrir par cette fille.

« Entrée fracassante Miss. Je dirais bien que je suis ravie de vous rencontrer mais ce n’est pas encore le cas. »

Pour la sympathie, il faudra repasser hein. Mais son visage de glace fondit comme neige au soleil quand Oliver s’accroupit devant elle. « Ecoute […..]Je vais assumer mes responsabilités ». Assumer ses responsabilités…..cela fit sourire doucement Charlie. Comme quoi, quand on dit que la paternité change un homme…..où était donc passé l’homme fêtard, enchaînant les conquêtes, la traînant dans des virées nocturnes de folies ? Elle avait devant elle une personne totalement différente à présent. Et si un psy se trouvait dans le coin, il dirait que c’est ce qui lui faisait peur. Voir son frère se transformer totalement lui faisait prendre conscience qu’il avait une vie loin d’elle. Presque une vie de famille. Et elle ne savait pas si elle avait sa place dans cette nouvelle vie. Peur de perdre son frère ?

Mais Freud étant indisponible, elle se pencherait sur se sentiment plus tard. Pour l’instant, elle avait une autre bataille à mener. Et Oliver semblait s’en douter vu qu’il se posa en avocat d’Emy. Pas de chance mon chou, c’est une procureure aguerrie que tu as en fasse de toi (et puis Oliver, entre toi et moi, quand as-tu eu le dernier mot dans une bataille avec ta sœur ? ) Le « baba » de sa nièce ( ?) la fit sourire et de voir son frère se précipiter pour récupérer la petite……Okay, elle fondait complètement devant cette scène.

« Je crois… Je crois que je vais vous laisser discuter entre vous. Je vais… Je vais à la buanderie pour finir de m’occuper du linge. Ouais, je vais faire ça. » Oula ma petite, où crois tu aller comme ça ? Hors de question de fuir Charlie lui fit son plus beau sourire de gala mondain (un sourire bien faux quoi) et tapota d’un geste léger la place à côté d’elle.

« Voyons…..Emy c’est ça ? Restez là, faisons connaissance. Il semblerait que vous allez faire partie de la famille, alors il est important que l’on se connaisse. Et laissez donc ce bazar, je ne doute pas qu'Oliver ait une femme de ménage pouvant se charger de cela »

Et son sourire glissa de « Ravie de vous revoir Mme de Glennwick » à « Je suis une Richards, ça va saigner ». Elle enleva du bout des doigts un jouet qui avait du passer du temps dans la bouche de Nyah et qui avait atterris sur sa jupe avant de reprendre.

« Alors Emy, dites en moi plus sur vous. Qu’est ce que vous faites dans la vie ? Vous vivez ici avec votre fille depuis combien de temps ? D’où venez-vous ? Comment avez-vous rencontré mon frère ? »

Quand on vous dit qu’elle va faire carrière en tant que procureure….Levant les yeux vers son frère, elle lui fit un petit sourire d’excuse avant de reporter son regard sur Emy.

« Et dites moi en plus sur cette merveilleuuuuse histoire entre vous. Vous ne vous voyez plus pendant quelques temps et vous réapparaissez d’un seul coup avec sa fille pour lui demander de l’aide. C’est si romantique. »

Inutile de préciser que le soupir attendrie et le rire allant avec cette phrase était totalement faux et totalement joué.

Quelqu’un aurait certainement dû prévenir Emy, que Charlie est une tornade. Non que dis-je, un ouragan. Elle prend la défense de son frère comme une lionne pour son lion. Si Oliver lui-même a toujours été derrière Charlie pour faire fuir les hommes qui l’approchaient de trop près, Charlie elle, était pire que ça. Oliver aimait les faire fuir. Charlie aimait les faire souffrir. Elle attendait le bon moment, dans l’ombre. Et quand la proie est attachée, scotchée au bras de son frère, elle lui fonce dessus pour tirer sur le scotch brutalement et lui en arracher les poils des bras. C’est comme ça qu’elle agit, Charlie Meagan Richards. Une vrai petite bitch, mais une putain de petite bitch pour qui son frère pourrait décrocher la lune. Alors forcément, comprendre qu’il y a entre la mère de sa fille, et sa sœur, des étincelles, c’est gênant. Malaisant. Pourtant Emy est polie. Elle s’excuse. Et puis dans le fond, elle pourrait ne pas s’y plier, à cette blonde sortie de nulle part. Elle n’est pas mariée à Oliver non plus. Ils ne sont pas un couple. Il ne sont pas... Ils sont comme une famille, mais une famille divorcée. Ça doit être un peu ça. « Entrée fracassante Miss. Je dirais bien que je suis ravie de vous rencontrer mais ce n’est pas encore le cas. » Et merde. Il roule des yeux, alors qu’il récupère Nyah qui s’accroche à son cou. C’est étrange comme un gamin peut s’attacher à quelqu’un aussi vite. Même pas une semaine qu’elle vit chez lui, et pourtant, elle a comme comprit qu’il est là pour elle. Qu’il est son père, tout simplement. Emy s’excuse encore, et prétend vouloir s’occuper de la buanderie. Il hoche la tête, rapidement, espérant qu’ainsi, Charlie ne lui cherche pas des noises. « Voyons….. Emy c’est ça ? Restez là, faisons connaissance. Il semblerait que vous allez faire partie de la famille, alors il est important que l’on se connaisse. Et laissez donc ce bazar, je ne doute pas qu'Oliver ait une femme de ménage pouvant se charger de cela » Il sent cette petite veine sous un œil qui se met à trembler. Charlie cherche la guerre, et quand Charlie veut la guerre, elle l’obtient. Pire encore, elle gagne toujours. Alors soupirant, son front se colle à celui de sa fille, comme s’il espérait cacher son visage dans le petit corps potelé de sa progéniture. Et Charlie ne s’arrête pas là. Elle se sépare d’un jouet qui traîne sur le sofa, en le pinçant entre deux de ses doigts, ne cachant guère son dégoût face au jouet collant et baveux. Il lève les yeux, fixant le mur d’en face, complètement déconfit. Si on lui avait dit un jour, qu’il serait pris en sandwich entre une femme, et sa frangine, à ce point-là...

« Elle ne bosse pas aujourd’hui. »

Marmonne le propriétaire des lieux, attaché à sa gosse comme si c’était sa bouée de secoure. « Alors Emy, dites en moi plus sur vous. Qu’est-ce que vous faites dans la vie ? Vous vivez ici avec votre fille depuis combien de temps ? D’où venez-vous ? Comment avez-vous rencontré mon frère ? » Il le croise bien son regard, mais alors qu’elle tente de lui sourire – ironiquement il le sait – lui la fusille du regard. « Et dites moi en plus sur cette merveilleuuuuse histoire entre vous. Vous ne vous voyez plus pendant quelques temps et vous réapparaissez d’un seul coup avec sa fille pour lui demander de l’aide. C’est si romantique. »

« Charlie! »

Siffle-t-il brusquement, s’offusquant, les sourcils froncés. Elle va un peu trop loin la blonde. Surtout que... On ne peut pas en vouloir à Emy d’avoir disparu, alors que c’est lui qui s’est enfuit au petit matin.

« Y'a rien de romantique. Elle n’est pas là pour mon lit, elle a besoin d’aide! »

D’argent plus exactement, mais il se doute que s’il use de ce terme, Charlie en profitera pour rebondir et la traiter ouvertement de croqueuse de diamant. Hors... Oui, il a vu Emy comme une proie il y a deux ans. Juste une proie. Un morceau de jambon. Mais aujourd’hui ? Aujourd’hui elle est la mère de sa fille. Et faut le reconnaître, elle l’impressionne. Elle a du courage d’avoir avancé seule, avec la mioche. Puis d’avoir affronté Oliver, même si à son gout, elle l’a fait un peu tard. Et puis... Il a toujours rit, de cette réplique stupide des films romantique : “Cette femme m’a fait le plus beau des cadeaux en mettant au monde mon enfant”. Ça sonne toujours, puéril, stupide, bêtement romantique, mais à l’eau de rose. Pourtant, là, il ne peut que reconnaître que c’est vrai. Ce bébé qu’il tient dans ses bras, c’est devenu, en quelques jours, la chose la plus importante qui soit sur cette planète. Et c’est l’œuvre d’Emy. Elle est la maman, il est le papa. Ils sont liés, et ce, jusqu’à la fin de leur vie. Alors ça lui fait quelque chose. Et voir Charlie s’en prendre à elle, ça l’exaspère. Jamais, ô grand jamais, ça n’est arrivé pourtant. Dans le passé, quand elle mordait l’une de ses conquêtes, ça le faisait sourire. Aujourd’hui, ça lui fait mal. Emy, c’est comme une petite pierre précieuse qu’il doit protéger. Sans vraiment savoir pourquoi. Alors après avoir mitraillé Charlie des yeux, il repose son attention sur Emy, avec beaucoup plus de tendresse. Un truc qu’il ne se croyait même pas capable, d’ailleurs. Et dont il ne se rend évidemment, pas compte.

« Ne réponds pas à ses questions, elle se prend pour Sherlock Holmes! »

Espérons juste qu’Amy ne monte pas sur ses grands chevaux, qu’elle ne rentre pas dans le jeu de sa frangine. Sans quoi, il n’a plus qu’à protéger Nyah des bombes. Parce que ça risque d’être sanglant.

Sous ses traits fins et délicats, Charlie Richards se montrait particulièrement glaciale et sans merci. C’était comme si elle déversait sur Emy tout son dégoût envers la classe moyenne. Face aux propos particulièrement tranchant qui visaient sûrement une réponse de sa part, Emy jugea qu’il était préférable pour elle de quitter la pièce. Bien qu’elle était le sujet central de la conversation, la jeune maman n’avait aucune envie d’y participer et d’assister potentiellement au déchirement d’un lien qui semblait être d’une fusion parfaite. Il fallait l’avouer aussi, une partie d’elle encaissait encore que sa fille venait « d’adouber » Oliver en l’appelant papa et que ce dernier se comportait en parfait gentleman en prenant sa défense contre sa propre sœur.

Pourtant, Charlie n’était pas prête à en rester là. Elle était prête à en découdre. Sa ténacité était telle qu’Emy arrivait même à la percevoir dans l’éclat de ses yeux de biche. Elle avait déjà vu ce même regard 2 ans auparavant. Le genre de regard d’un chasseur face à sa proie. D’un geste, la britannique tapota la place libre à ses côtés pour inviter Emy à s’y assoir. Elle n’en fit rien. Charlie commença alors son interrogatoire cinglant et bourré de préjugés.

Silence.

Comme promis, Oliver intervint en essayant tant bien que mal de prendre sa défense. Emy apprécia ce nouveau côté chevaleresque, mais il fallait bien avouer que son intervention ne l’aidait pas vraiment. Bien qu’elle tâchait de garder la face, le combat était plutôt intérieur. L’américaine passait par toutes les émotions et principalement la colère causée par un profond sentiment d’injustice. C’était comme si Charlie venait d’ouvrir la boîte de Pandore, ramenant la jeune maman à tout ce qu’elle avait enduré lorsqu’elle était enceinte : les regards de travers, les rumeurs et l’exclusion. Elle qui était jusqu’alors une jeune femme correcte et sans problème était devenue, à 21 ans, une femme aux mœurs légères qu’on fuyait comme la peste à mesure que son ventre s’arrondissait. Chacun de leur mot était comme la lame d’un couteau qui rouvrait une plaie loin d’être totalement guérie. « Ne réponds pas à ses questions, elle se prend pour Sherlock Holmes. » lança Oliver à son intention, espérant peut-être qu'elle se tairait. Sans même le regarder dans les yeux, Emy le fit taire d’un geste de la main. Si la jeune femme voulait un minimum de respect, c’était à elle de l'exiger.

Emy redressa les épaules, le menton et baissa simplement les yeux sans bouger la tête pour planter ses pupilles dans celles de Charlie qui était toujours assise. L’expression « prendre de haut » prenait alors tout son sens. Son visage était presque aussi inexpressif que toutes les clientes à la peau hyper tendue qui fréquentaient le cabinet d’Oliver : elle ne sourcillait même pas. Seul le rouge de ses joues indiquait à quel point Emy était en colère. Le temps était soudain comme suspendu. Elle garda le silence encore une poignée de secondes cherchant à régler le volume et le ton de sa voix avant d’ouvrir la bouche. Emy ne voulait pas perdre la face devant les Richards, mais, plus que tout, elle ne voulait pas élever la voix devant de Nyah. « Vous voulez en savoir plus sur moi ? Bien. Je ne suis pas britannique, pas très aux faits de vos coutumes, je ne connais pas la notoriété de la famille Richards Outre Atlantique, mais de ce que j’ai compris sans que vous n'ayez besoin d'y mettre les mots c'est que mon statut social n’est pas suffisamment « respectable » pour votre famille. Je suis une américaine sur le sol américain, MISS et bien que je n’ai pas votre classe, j’apprécierai que vous fassiez honneur à la vôtre en arrêtant de faire toutes vos suppositions déplacées devant ma fille. » reprit-elle calmement. Emy eut presque envie d’ajouter que Nyah était la seule chose concrète qui la liait aux Richards et qu’elle ne portait pas leur nom…

Dans cet appartement chic d’un quartier huppé de Manhattan, l’ambiance était plus que tendue. Les deux jeunes femmes se faisaient face pendant qu’Oliver tentait de calmer en l’ambiance en berçant sa fille. Digne d’un scénario hollywoodien.
« Charlie ! » La dite Charlie sursauta et se tourna vers son frère. Oh. Il avait pas l’air content. Voire même un peu en colère. Et l’espace d’un instant, cela fit vaciller la détermination de la jeune femme. La dernière chose qu’elle souhaitait était de se brouiller avec son jumeau pour une fille. Car, là maintenant tout de suite, elle n’était pas vraiment sûre qu’il ne l’éjecterait pas de sa vie s’il devait choisir entre les deux. « y’a rien de romantique. Elle n’est pas là pour mon lit, elle a besoin d’aide ! » Okayyyy, en fait non, elle allait continuer. Pas là pour son lit, elle a besoin d’aide ? Mais c’est pire encore ! Ca la rendait encore plus louche. En essayant de la raisonner, Oli avait simplement ravivé sa flemme de fervente défenseur de l’honneur de son frère ! (ouais bon, un peu trop mélodramatique mais que voulez-vous…..c’était dans sa nature.)

Reprenant ses esprits (et dire qu’elle avait failli se laisser attendrir), Charlie reporta son attention sur la rousse volcanique qui la toisait maintenant de haut. Littéralement de haut vu qu’elle était debout et Charlie toujours assise. Non elle n’allait pas se lever à son tour, elle était confortablement assise, merci bien. (Une fugace image lui vint tirer d’un film. McGonagall et Ombrage se disputant sur les marches de Poudlard, à chaque phrase, chacune montant d’une marche pour toiser l’autre.) Elle devait bien l’avouer, une Emy en colère pouvait être impressionnante. Visage neutre, seul un soupçon de rouge sur ses joues indiquant la colère bouillonnant en elle. « Vous voulez en savoir plus sur moi ? [….] J’apprécierai que vous fassiez honneur à la vôtre en arrêtant de faire toutes vos suppositions déplacées devant ma fille. »

Ambiance tendue, glaciale, les secondes passent et soudainement, Charlie sourit et éclata de rire.

« Eh bien, je suis presque impressionnée. Entre le visage de glace, la voix maîtrisée et les mots choisis, vous ne vous laissez pas faire et en beauté. Si nous étions amies, j’aurais plaisir à vous enseigner l’art et la manière de faire trembler les gens sans élever la voix, vous avez du potentiel. »

Lui enseigner tout comme on le lui avait enseigné plus jeune. Et aussi brutalement qu’il était arrivé, le sourire de Charlie disparut à nouveau, remplacé par la précédente froideur.

« Mais nous ne sommes pas amies. Mais il y du vrai dans vos propos Miss. Notre famille a une certaine notoriété, et le mot est faible. Et effectivement votre statut social n’est pas acceptable dans cette famille et ne le sera jamais. Prenez le temps de voir la situation de mon point de vue. Une femme d’un statut social ô combien plus bas que celui de mon frère débarque des années après une fugace liaison avec une fille qu’elle présente comme la sienne en demandant son aide. Au vu de la ressemblance, je ne peux nier que Nyah semble bien être la fille d’Oliver. Certes. Mais cela semble facile et ressemble à toutes ces filles qui n’en voulait qu’à son argent. Qu’est ce qui nous prouve le contraire ? Vous pouvez argumenter tout ce que vous voulez, il n’en reste pas moins que cela semble étrange. »

Puis, elle balaya d’un geste dédaigneux la dernière phrase d’Emy, levant les yeux au ciel.

« Oh par pitié, votre fille n’a même pas deux ans, elle est obnubilée par son père et ne comprends pas un mot de ce que l’on raconte. »

Oui, bon Charlie n’était pas au top de la psychologie infantile hein. Je vous rappelle que pour elle, les enfants sont des espèces de gremlins qui pleurent, qui hurlent et qui bavent alors bon….

« Et puis si vous et votre fille devez entrer dans la famille, ce genre de réflexion sera habituel. Votre statut social va alimenter les conversations et les scandales. Et ne parlons pas d’avoir un enfant hors mariage ! Dans le cercle restreint de la haute société dans lequel nous vivons, vous n’êtes rien. Ils passeraient à côté de vous sans vous voir. C’est cruel mais c’est le monde dans lequel vous entrez. Il falloir vous habituer à ce genre de réflexion, à vous blinder et à avoir du répondant…..ce que vous avez je dois bien l’admettre. »

Non vous ne rêvez pas.

Oui Charlie venait bien d’admettre à demi-mots qu’il y avait une éventuelle possibilité qu’Emy et sa fille fassent parties de la famille Richards et lui donnait quelques conseils (à sa manière).

Mais ne criez pas victoire.

Non, elle ne l’acceptait toujours pas (sinon elle lui aurait proposé de l’aider à naviguer dans les eaux troubles de la haute société anglaise), et elle allait continuer à la tester, voir si elle était une fille aussi bien que le disait son frère ou bien une croqueuse de diamant. Mais Oli avait l’air tellement accroché à elle alors elle pouvait faire un effort…un petit effort…….un minuscule effort. Tellement minuscule qu’il ne se verrait sûrement pas mais pour elle, elle aurait fait sa B.A de l’année.

Il y a soudain un tel silence dans la pièce, même Nyah s’est tut, comme si elle avait compris toute l’ambiance pesante de la scène qui se déroulait sous ses yeux, à elle, et à Oliver. Comme deux intrus, le jeune papa avait cette horrible sensation de ne pas être à sa place. Il tente, de prendre sa défense. Au fond, il sent qu’il y a en lui une certaine appréhension, quant à la réaction d’Emy. Si elle décide de fuir face à Charlie, il la perd elle, et sa fille. Parce que oui, finalement, l’avoir sous son toit depuis quelques jours, a rendu sa vie étrangement... Palpitante. Plus de solitude, une vie de famille, quelque chose comme ça certainement. Un truc qu’il avait fui toute sa vie, et qui finalement, devenait naturel et chaleureux pour le jeune médecin. Charlie est en train de tout piétiner, il le sent. Alors oui, là où la blonde se serait certainement attendue à ce qu’il se range de son côté, sans réfléchir, il tentait de jouer l’avocat de la rousse. Mais elle lui fait signe de se taire, brusquement, d’une simple main levée vers lui. Il se redresse, fixant cette main, complètement crispé. Et le pire de tout : Il se tait. Parce que soyons honnêtes, Oliver est de la vieille école. Élevé dans des traditions vieilles comme le monde. Et par un père plus que macho. Et pourtant il se tait, devant sa dame. Comme un petit toutou bien éduqué, qui rentrerait dans son panier la queue entre les pattes. Emy a dompté le tigre, en seulement quelques jours. Alors sous les yeux probablement médusés de sa sœur, il se recule juste un peu, pour ne plus faire entrave à ce face à face. Le silence pesant est de retour. Charlie le rompt, mais plus elle parle, et plus Oliver a l’impression de suffoquer. Jamais il ne se serait imaginé dans une telle situation, pris en entre sa sœur et une femme. Pourtant elle a bien tenté d’en faire fuir des ladys, Charlie. Mais jamais avec autant de hargne et d’acharnement. Comme si Emy n’était vraiment que rien à ses yeux. Ce qui est des plus douloureux pour Oliver, qui lui, voit Amy comme un vrai petit diamant. La mère de sa fille. La femme qui a mis au monde, sa chaire et son sang. Il ne saura jamais l’expliquer, mais cette rouquine, il faut la chérir, la choyer.... Et Charlie manque cruellement à son devoir là.

Ses yeux bleus passent de Charlie à Emy, puis inversement. Elles semblent avoir oublier sa présence, elles se toisent, elles se fixent, à tel point que l’anglais peut en voir les étincelles jaillir de leurs prunelles. S’il filmait la scène, il ferait probablement un sacré buzz sur internet. Mais ses mains sont prises par un bébé, dommage. Bébé à qui il adresse finalement un regard interloqué. Puis comme s’ils se comprenaient, rien qu’avec leurs yeux, il hausse les épaules, puis s’éclipse. Oui, il recule, discrètement, pendant que les filles se disputent. Elles sont tellement obnubilées l’une par l’autre, qu’elles ne s’en rendent pas compte.

« Tatie et maman ont des choses à se dire. Mais c’est pas pour les oreilles d’une petite princesse, non non. »

Il grimpe les escaliers avec sa petite princesse, puis rejoint la chambre d’Emy, où sont entreposés toutes les affaires de la petite. Il ôte ses chaussures à l’entrée, puis s’allonge sur le lit avec Nyah. Légèrement adossé au mur, la petite sous son bras, presque contre son torse, il lui met un bouquin sous les yeux. Une histoire de grenouille, pour les bébés.

« A mon époque, y’avait Babar, c’était quand même vachement mieux. »

Elle a l’air de n’en avoir rien à faire, alors il pose son regard sur les quelques lignes que porte le livre, puis commence à lui lire cette histoire stupide de grenouille. Nyah semble aimer, elle lève le doigt vers les couleurs, sur les pages, elle l’écoute, mais en moins de cinq minutes, elle s’endort. Alors il finit par lire dans sa tête, parce que lui, la fin de l’histoire, il veut la connaître. Il en oublie qu’en bas, c’est la seconde guerre mondiale qui fait rage. Dieu seul sait dans quel état il va retrouver son salon. Et puis l’histoire de la grenouille, il n’en verra pas la fin. Son livre lui tombe sur le nez, il s’est endormit aussi, avec sa fille. De toute façon, si elles finissent par se battre, il sera réveillé par des cris. Et pas des cris de bébé, pour la première fois depuis plusieurs jours.

La maternité l’avait changé, bouleversé même. Emy n’aurait jamais imaginé devenir ce qu’elle était aujourd’hui. Au début, elle pensait naïvement qu’être mère c’était justement rester telle qu’elle avec un amour décuplé, mais elle était bien loin du compte. Dans les bons jours, il y avait ce sentiment de plénitude et d’accomplissement de soi et dans les mauvais jours, un stress constant, la peur de manquer quelque chose – la moindre petite chose – et la crainte de ne pas être assez. Comprenez que, aux vues de sa situation, Emy connaissait plus de mauvais jours. Elle passait déjà assez de temps à se battre pour retrouver une certaine estime et n’avait pas besoin d’une britannique pour pointer ses lacunes et piétiner ses efforts.

Après un moment de flottement à se regarder en chien de faïence, Charlie esquissa un sourire avant d’éclater d’un rire perturbant et dérangeant. « Eh bien, je suis presque impressionnée. Entre le visage de glace, la voix maîtrisée et les mots choisis, vous ne vous laissez pas faire et en beauté. Si nous étions amies, j’aurais plaisir à vous enseigner l’art et la manière de faire trembler les gens sans élever la voix, vous avez du potentiel. ». Emy fut surprise. On aurait presque dit un début de compliment, mais ayant cerné la personnalité glaciale de Charlie, elle attendait la chute. En fait, si c’était une partie de Cluedo qui était en train de se jouer, Emy était prête à mettre sa main à couper que Charlie qui avait tué le Docteur Lenoir dans le patio avec un pic à glace (ouais, elle lui voyait bien ça en arme de prédilection bien que, techniquement, ce n’est pas une arme qui figurait dans la liste du jeu de société britannique mondialement connu).  

La chute ne se fit pas attendre et même si Emy s’y était attendu, elle fut particulièrement incisive car Charlie exposa très clairement le fond de sa pensée. Pour la jumelle Richards, l’américaine n’était rien de plus qu’une traînée qui lui avait entrouvert les cuisses dans le but de soutirer de l’argent à son frère. La manière dont la jumelle d’Oliver exposer la chose prouvait que ce genre de situation était monnaie courante dans ce genre de famille et il  était vrai que, vu sous cet angle, rien ne jouait en sa faveur.

« Oh par pitié, votre fille n’a même pas deux ans, elle est obnubilée par son père et ne comprends pas un mot de ce que l’on raconte. » trancha-t-elle en balayant la justification d’Emy d’un geste de la main presque théâtral. « Il n’empêche que les bébés sont de vraies éponges et je ne tiens pas à ce qu’elle s’imprègne de cette ambiance malsaine. » répliqua-t-elle à son tour. Elle préférait passer outre les remarques insultantes que Charlie venait de proférer sans retenue.

Si Emy pouvait se permettre de se défendre lorsqu’il s’agissait de son rôle de maman qu’elle pratiquait depuis près d’un an et demi -  à l’inverse de Charlie – elle sentait pourtant qu’il valait mieux garder le silence sur tout ce qui était relatif à la famille Richards et à son mode de vie 100% britannique. « Et puis si vous et votre fille devez entrer dans la famille, ce genre de réflexion sera habituel. Votre statut social va alimenter les conversations et les scandales. Et ne parlons pas d’avoir un enfant hors mariage ! Dans le cercle restreint de la haute société dans lequel nous vivons, vous n’êtes rien. Ils passeraient à côté de vous sans vous voir. C’est cruel mais c’est le monde dans lequel vous entrez. Il falloir vous habituer à ce genre de réflexion, à vous blinder et à avoir du répondant...ce que vous avez je dois bien l’admettre. ». Wow wow wow wow wow ! Quoi ?! Emy afficha une moue complètement hébétée, essayant de faire le tri dans toutes les informations que Charlie venait de lui balancer. Venait-elle d’insinuer qu’une américaine de basse classe pouvait avoir sa chance dans une famille aussi influente ? « De toute évidence, j’ai dû louper un épisode. Nyah ne connait son père que depuis quelques jours et il ne m’a même pas parlé de la présenter à vos parents. ». Ou alors ils en avaient commencé à machiner un plan entre jumeaux avant qu’Emy ne fasse irruption dans la pièce. Elle tourna alors la tête pour exiger une réponse de… « Oliver ? » l’appela-t-elle. Emy fronça les sourcils en constatant que l’hôte de ces lieux s’était éclipsé avec leur fille sans même que les deux jeunes femmes ne s’en aperçoive. D'ailleurs, même la chienne d'Oliver avait changé de pièce... Bien que frustrée sur l'instant de ne pas l'avoir sous la main, elle appréciait tout de même le fait qu'il ait justement entraîné Nyah dans une pièce pour lui épargner toute cette mascarade. « Je n'ai fait que de lui demander son soutien en dernier recours. Il a été convenu dès le début que nos chemins se sépareraient lorsque j'aurais une situation plus stable. Les termes de cet accord tacite n'ont pas été revus depuis, mais si Oliver souhaite que Nyah fasse partie de sa vie je ne pourrais pas le lui refuser. Cependant, je pense qu'il est totalement prématuré de penser à m'inclure dans cette "rencontre". ». Et ce pour toutes les raisons évoquées plus haut...

Ils n'étaient même pas un couple, après tout.

« Il n’empêche que les bébés sont des vrais éponges et je ne tiens pas à ce  qu’elle s’imprègne de cette ambiance malsaine. » Oui, bon, on vous avait prévenu hein, en cas de besoin d’un expert en truc qui chouine (comprendre par là un enfant), surtout, ne demandez pas Charlie. Elle, elle sera plutôt le genre de tata adorée par les enfants, détestée par les parents. Une fois que Nyah serait assez grande pour ne pas avoir besoin qu’elle lui change les couches (faut pas déconner, vous la voyez la Charlie, dans ses vêtements de créateur, les mains dans les couches ?), elle allait l’emmener faire toute les bêtises du monde, la pourrir gâtée, et dès qu’elle montrera le signe d’une pleurnicherie, paf, elle la rend  aux parents. Bon plan non ?

« De toutes évidence, j’ai dû louper un épisode. Nyah ne connaît son père que depuis quelques jours et il ne m’a même pas jamais parlé de la présenter à vos parents. » Là, c’était le moment d’inclure le jumeau dans la conversation, mais Charlie se rendit compte en même temps qu’Emy que le dit jumeau s’était tout bonnement volatilisé, son chien et sa fille avec lui. Alors là…..elle ne s’était absolument pas aperçu de sa disparition Ou il était parti discrètement tel un ninja, et Oliver n’était pas forcément connu pour sa discrétion, ou les deux jeunes femmes étaient tellement prises dans leur… « conversation » qu’aucune d’entre elles ne l’avaient vu partir. Bref, en tout cas elle avait l’air sincèrement surprise à la suggestion d’une entrée dans la famille. Vrai surprise ou grande actrice ? Même si, au fur et à mesure que la conversation avançait, Charlie devait bien avouer qu’elle semblait sincère, il lui était compliqué de la croire sur paroles.

« Je n’ai fait que lui demander son soutien en dernier recours. Il a été convenu dès le début que nos chemins se sépareraient lorsque j’aurais une situation plus stable. Les termes de cet accord tacite n’ont pas été revus depuis, mais si Oliver souhaite que Nyah fasse partie de sa vie, je ne pourrais pas le lui refuser. Cependant je pense qu’il est totalement prématuré de penser à m’inclure dans cette histoire. »
Et là, ça frappa Charlie comme un train de marchandise à pleine vitesse….si elle était sincère, Emy ne savait pas du tout  dans quoi elle mettait les pieds. Comprenez bien la situation aussi, jamais de sa vie Charlie n’avait noué de lien avec des gens de « basses conditions » comme dirait ses parents. Même si elle s’enorgueillissait de voler de ses propres ailes, au fond d’elle-même elle savait que ce n’était pas vrai. Ses études de droit à l’autre bout du monde avait été payées par papa, l’appartement à SF aussi. Certes, elle avait bossé dur pour être acceptées dans des grandes écoles. Certes, sa carrière, elle ne la devait qu’à elle-même. Mais au final, même à l’école, mais au début de sa carrière et même maintenant, elle ne « traînait » qu’avec des gens de la même catégorie sociale qu’elle. Ils nageaient avec les mêmes requins qu’elle. Chaque mot, chaque attitude de sa part se devait d’être contrôlé car scrutés à la loupe par tous ces gens qui se disaient ses « amis ». Des vrais amis, elle pouvait les compter sur les doigts d’une main. Et ils étaient tous en Angleterre. Et oui, Alexander aussi était l’hériter d’une riche famille (Irlandaise quoiqu’en dise son prénom.) Alors au final, tomber sur des gens « simples » comme Emy, c’était…..rafraîchissant. Et elle commençait à comprendre ce qu’Oliver pouvait lui trouver.

C’était l’épisode « Princesse Charlie découvre le monde en dehors de sa vie dorée ». Un rire lui échappa de nouveau, amusée et un peu étonnée.

« Je connais mon frère miss. Je connais le Oliver fêtard, hautain, sarcastique, je connais la version Malefoy. Mais j’ai vu comment il regardait Nyah. Et jusqu’à présent, la seule personne qui avait le droit au Oliver adorable, affectueux et protecteur, c’était moi.  Il est fou de cette enfant. Jamais il ne sortira de sa vie. Et, je dois l’avouer, vu comment il vous regarde, il ne compte pas sortir de la vôtre non plus. Mais je crois que vous ne savez pas bien comment fonctionne les familles comme les notres. Jamais Oliver ne pourra cacher éternellement la présence de Nyah, et la votre par extension, à nos parents. Et s’il ne vous a jamais parlé de présentation, je pense au c’est parce qu’il est tellement pris de court par la tournure des évènements qu’il n’y a pas pensé. Mais moi qui regarde ça d’un autre œil, je vous le dis, il va falloir vous préparer. Il est inimaginable que vous viviez une vie normale d’un couple normale avec un enfant. Malheureusement, il est et restera un Richards avec ce qui va avec. Et à moins qu’il ne coupe définitivement les ponts avec le reste de la famille, un jour ou l’autre, il va falloir les rencontrer. »

Un soupir lui échappa et elle passa sa main sur son visage, épuisée. La journée ne s’était pas déroulée du tout comme prévu. Elle qui comptait surprendre son frère et passer une journée folle avec lui, voilà qu’elle se retrouvait avec une nièce et une potentielle futur belle-sœur sur les bras. Et un drame familial en prévision. Alors oui, aujourd’hui, dans l’intimité de cet appartement, la reine des glaces baissa légèrement le masque et accepta l’idée qu’elle aurait peut-être pu se tromper sur cette Emy. Peut-être.

« Bien. Reprenons. S’il vous plaît assez-vous, je vais finir par avoir un torticoli à vous regarder comme ça. Je m’appelle Charlie Meagan Richards et je suis la sœur jumelle d’Oliver. Enchantée. Pourriez-vous m’en dire un peu plus sur vous ? »

NAN MAIS VOU AVEZ VU CA ??? Une Charlie douce et aimable ? est-ce possible alors ? Bon, vous noterez qu’elle n’avait pas encore abandonné le vouvoiement, chose qu’elle réservait à ses plus proches amis. Et elle ne pouvait pas promettre d’être toujours gentil et plus sarcastique ou blessante hein. Après tout, elle n’était toujours pas convaincu à 200% qu’Emy n’en voulait pas qu’au nom et au portefeuille d’Oli, mais elle pouvait écouter.
Et se retournant vers les escaliers, elle éleva la voix, juste assez pour que son frère l’entende mais sans réveiller la petite.

« Oli ! Tu peux descendre ! La troisième guerre mondiale a été évitée et ton salon n’a pas explosé. »

Enfin….si, on avait l’impression qu’une bombe avait explosé dans le salon, mais ce n’était pas de sa faute cette fois !

Il aurait presque pu rêver profondément, de Babar, parce qu’il l’avait en tête, le vieil éléphant. Mais c’était sans compter sur Nyah, qui n’avait eu l’envie que d’un petit somme, et qui commençait à fourrer ses doigts dans les narines de son père. La respiration presque coupée, il se réveille alors, les sourcils froncés, se retrouvant face à Nyah qui ricane toute seule.

« Ha, non, ça c’est dégueulasse, merde. »

La petite ricane de plus belle alors qu’il lui ôte les mains de son visage, et qu’il s’assoie dans le lit, la redressant elle aussi au passage.

« Mede. »

Répète-t-elle toujours en riant. Oliver, réalisant qu’il vient d’apprendre une grossièreté à sa fille, eu soudainement les yeux exorbités. Il plaque une main contre la bouche baveuse de la petite, alors qu’il tend l’oreille, vérifiant qu’en bas, ça se tape toujours dessus, et qu’ainsi, personne n’a entendu cela. Il étire un petit sourire quand l’azure de ses yeux se repose sur sa fille.

« Faut pas dire ça. C’est un mot à papa. »

Y’a plus qu’à prier pour qu’elle ne le répète pas. « Oli ! Tu peux descendre ! La troisième guerre mondiale a été évitée et ton salon n’a pas explosé » Wow, est-ce que c’est vrai, ou ce n’est là qu’une manière dissimuler pour l’enrôler de force dans les tranchés ? Il reste sur la défensive le chirurgien, alors qu’il embarque son boulet de canon – sa fille – dans ses bras. Le soldat Richards quitte son qg, descend les escaliers, sur la défensive, toujours. Le visage endormit, et les cheveux en l'air. Puis il s’approche lentement, méfiant, vers les deux filles. Visiblement, rien n’a été brisé, c’est déjà ça.

« J'vous préviens, je ne serais le complice d’aucune des deux, s’il faut cacher un corps! »

Lance-t-il d’un ton qui laisse à supposer qu’il peut plaisanter, tout comme... Il pourrait être le plus sérieux du monde. Il passe devant Emy, vérifiant qu’elle n’a aucune marque visible de morsure – il se souvient très bien de son 5e anniversaire! - puis il passe devant sa sœur, pour aller s’asseoir dans un fauteuil, gardant précieusement sa fille sur ses genoux.

« Alors... Tu vas le dire à papa, telle une traître, ou je peux espérer vivre encore quelques jours ? »

Il fixe sa frangine suspicieusement, alors que sa chienne, Sally, vient de débarquer dans le salon, la queue gigotante. Elle renifle les doigts d’Emy, puis rejoint son propriétaire, ignorant Charlie au passage. Elle sait bien que les vêtements de haute couture ne supporte pas ses poils.

« Si elle a été ignoble, je pourrais cacher son corps! »

Avoue-t-il finalement alors que ses yeux se sont tournés vers Emy. Faut bien savoir qu’il n’a qu’une hantise : qu’elle s’enfuit avec sa précieuse petite poupée. Et si tel est le cas, il faudra qu’il tue Charlie, seule fautive dans l’histoire. - puis qu’on ne lui a pas laisser le droit d’être l’avocat du bien!

Emy ne sut pas très bien ce qui venait de se passer, mais le visage de Charlie changea radicalement. Comme si l’anglaise venait de comprendre quelque chose de nouveau. L’américaine se repassa alors en boucle les mots qui venaient de sortir de sa propre bouche, puisque, de toute évidence, elle semblait avoir trouvé l’inconnue à une équation. A vrai dire, elle arrivait comme un cheveu sur la soupe dans ces retrouvailles totalement imprévues et la conversation sur le sujet était déjà bien entamée lorsqu’Emy s’était interposée entre les deux jumeaux. Entre les ex-amants, dès le début, il avait été convenu qu’Emy et Nyah le laisseraient poursuivre sa vie sans s’y imposer. Tel était la demande de l’héritier Richards. Oliver avait-il menti à sa sœur d’une quelconque manière ?

Charlie se mit à rire de nouveau et ça en devenait perturbant pour l’américaine. Elle se lança ensuite sur sa vision des choses. « Je connais mon frère miss. Je connais le Oliver fêtard, hautain, sarcastique, je connais la version Malefoy. Mais j’ai vu comment il regardait Nyah. Et jusqu’à présent, la seule personne qui avait le droit au Oliver adorable, affectueux et protecteur, c’était moi.  Il est fou de cette enfant. Jamais il ne sortira de sa vie. Et, je dois l’avouer, vu comment il vous regarde, il ne compte pas sortir de la vôtre non plus. Mais je crois que vous ne savez pas bien comment fonctionne les familles comme les nôtres. Jamais Oliver ne pourra cacher éternellement la présence de Nyah, et la votre par extension, à nos parents. Et s’il ne vous a jamais parlé de présentation, je pense au c’est parce qu’il est tellement pris de court par la tournure des évènements qu’il n’y a pas pensé. Mais moi qui regarde ça d’un autre œil, je vous le dis, il va falloir vous préparer. Il est inimaginable que vous viviez une vie normale d’un couple normale avec un enfant. Malheureusement, il est et restera un Richards avec ce qui va avec. Et à moins qu’il ne coupe définitivement les ponts avec le reste de la famille, un jour ou l’autre, il va falloir les rencontrer. ». Oliver ? Amoureux d’elle ? Emy secoua vigoureusement la tête, niant tout en bloc. « Je pense qu’Oliver est juste séduit par l’idée de la vie de famille. » justifia-t-elle.

Emy soupira finalement en même temps que Charlie. L’américaine avait beau se persuader du contraire à l’instant où le comportement d’Oliver envers Nyah avait changé, elle savait au fond d’elle que l’étape « Famille Richards » serait inévitable. Lorsque Charlie – visiblement aussi fatiguée qu’elle - lui demanda de s’assoir, Emy obtempéra et fut surprise de découvrir une toute autre facette de la britannique. De toute évidence, les jumeaux Richards avaient chacun deux personnalités bien distincts. Un peu prise au dépourvue, Emy répéta un « Enchantée. », presque mécaniquement. Charlie l’invitait maintenant à lui en dire plus sur elle et ça rendait Emy un peu nerveuse. Ce n’était pas son exercice préféré, à vrai dire. « Emy Louise Catherine Jameson, américaine pure souche, donc… Et, mh, j’ai 23 ans. » dit-elle simplement. Le nom, les prénoms – après tout, elle avait eu droit à celui de Charlie – ainsi que l’âge. C’était déjà un bon début. La base. Elle ne se voyait pas lui déballer sa vie de famille particulière et lui rappeler ce qu’elle savait déjà : à savoir qu’elle était en situation précaire.

Finalement, Charlie interpela Oliver qui descendit presque aussitôt avec un visage endormi et les cheveux en bataille ne laissant aucun doute quant au fait qu’il s’était tout simplement endormi. « J’vous préviens, je ne serais le complice d’aucune des deux, s’il faut cacher un corps ! Alors… Tu vas le dire à papa, telle une traître, ou je peux espérer vivre encore quelques jours ? ». Emy les observe silencieusement, comprenant alors qu’Oliver et Charlie avaient bien discuté d’une éventuelle confrontation avec leurs parents. Elle passa une main furtive dans le pelage de Sally sans doute venue les renifler pour s’assurer que le sang n’avait pas été versé. « Si elle a été ignoble je pourrais cacher son corps ! ». Emy se tourne vers Oliver et perçoit qu’il cherche à la faire sourire malgré la gravité de ce que semble être la situation pour lui. Alors la rousse lui sourit à son tour en voyant cette tentative sous un autre angle. Celui de Charlie. « Non, elle n’a pas été ignoble. Juste inquiète de savoir où finira le tien, apparemment… » répondit-elle, se risquant au même humour tout en arborant un visage soucieux – désolé même – l’entrée fracassante des deux rousses dans la vie d’Oliver Richards risquait fortement de compromettre l’équilibre de toute une hiérarchie familiale et ça, Emy comprenait seulement qu’elle en était l’unique responsable.

Bon, ce n’était pas encore les grandes embrassades ni la fête de l’amitié entre les deux jeunes femmes, mais l’ambiance c’était détendue, elles n’étaient plus à la gorge l’une de l’autre. Bien au contraire, assises côté à côté, elles étaient partis pour recommencer, correctement cette fois, les présentations. Bon, apparemment, se présenter à une presque inconnue, ce n’était pas trop le délire de l’américaine, mais elle se plia à l’exercice. Attends…..23 ans ? Mais c’était une jeunette ! 23 ans, mère célibataire en situation précaire….elle débutait bien mal dans la vie active. Mais, et Charlie devait bien le reconnaître malgré toute l’animosité qu’elle pouvait avoir envers elle, Emy semblait être une battante, une de ces personnes qui ne lâche jamais l’affaire et qui, généralement, finisse par s’en sortir brillamment.

Et sur ces faits, tel un guerrier débarquant dans la bataille, d’un pas ferme et décidé Oliver William Richards entra dans la pièce tel le sauveur et………non en fait c’est pas du tout ça. Oliver entra bien dans la pièce mais les cheveux en bataille, les yeux encore à moitié fermés de sa sieste improvisée. « J’vous préviens, je ne serais le complice d’aucun des deux s’il faut cacher un corps ! » Ah ouais ? Heureusement qu’elle avait des contacts qui pouvaient faire disparaître facilement les corps en cas de problème (l’avantage d’être procureure………et d’être une Richards. Vous ne pouvez pas imaginer ce que cache les vielles familles comme la sienne.) « Alors………Tu vas le dire à papa, telle un traître, ou je peux espérer vivre encore quelques jours ? » Elle renifla dédaigneusement à cette phrase.

« Ttt……et puis quand je suis la traitresse ? Laisse ce rôle à Eléana, elle s’en sort très bien."

Eléana Elizabeth Richards. La fille parfaite des Richards. Beaucoup plus jeune que les jumeaux, elle n’était pas prévue. Elle était tout l’inverse des jumeaux. Respectueuse au possible des règles édictées par leur père, elle avait tout d’un ange. Se pliant aux exigences paternelles, elle n’avait de but dans la vie que d’épouser un fils de bonne famille, de faire des enfants et de gérer sa famille comme le faisait leur mère tout en soutenant son rang, la réputation de la famille. Quand elle est née, les jumeaux commençaient déjà à se « rebeller » contre l’autorité paternelle. Puis ils étaient partis pour leurs études et n’étaient jamais vraiment revenus. De ce fait, leur relation avec leur jeune sœur était sinon vague, mais surtout très tendue. Et effectivement, si Eléana avait eu ne serait-ce que vent d’une rumeur concernant la paternité d’Oliver, nul doute que leur père aurait débarqué en Amérique afin de régler lui-même cette affaire. Et Oli serait un homme mort et enterré.

« Si elle a été ignoble, je pourrais cacher le corps. » Tss, au temps pour la solidarité fraternelle. « Non, elle n’a pas été ignoble. Juste inquiète de savoir où finira le tien, apparemment…. » Ah bah ça, défendue, avec humour, par Emy. Elle ne s’y attendait pas ! C’est qu’elle commençait à lui plaire la petite ! Oui, avec presque 10 ans d’écart, elle avait le droit de l’appeler la petite.

« Tu serais perdu sans moi je le sais. Et non, pour ta gouverne, j’étais inquiète ok ? Je le suis toujours d’ailleurs. Ca risque de mal se finir cette histoire, je voulais juste te protéger, alors j’ai réagis un peu……violemment. »

C’est même un euphémisme, elle avait été atroce, elle en était parfaitement consciente……et ne le regrettait absolument pas. Si cela été à refaire, elle réagirait absolument pareil.

« Bon, maintenant que nous sommes une joyeuse famille unie, reste la grande question. Comment on va gérer ça ? »

Et si elle avait bien insisté sur le mot « famille » eh bien…..eh bien Charlie reste Charlie et elle ne peut pas s’empêcher d’essayer de mettre son frère mal à l’aise ne serait-ce qu’un peu. Appelez ça une vengeance pour son manque de foi envers elle.

« Non, elle n’a pas été ignoble. Juste inquiète de savoir où finira le tien, apparemment… » C’est un complot ? Les deux filles sont assises l’une à côté de l’autre, et lui sourient de manières peu convaincantes. Ça lui rappelle toutes ses soirées pyjamas que faisait Charlie avec ses copines, et qu’elles se ramenaient toutes dans sa chambre innocemment avant de l’assommer de coup d’oreillers, quand ce n’était pas à coup de chaussons. Aurait-elle retourné son Emy contre lui ? Il arque un sourcil alors que ses yeux bleus passent d’Emy à Charlie, suspicieusement. « Tsst... Et puis quand je suis la traitresse ? Laisse ce rôle à Eléana, elle s’en sort très bien. » Et pour le coup, il ne peut pas le nier. Ses yeux roulent donc avant qu’il ne détourne le regard. Eleana c’est leur bête noire. La petite sœur, la peste, la taupe. Ils ont bien trop de différence d’âge avec elle pour avoir tissé de vrais liens, mais ça ne l’a pas empêché elle, de s’immiscer dans la vie des jumeaux, avec entêtement. Elle est le petit bijou des Richards, attentive aux attentes des parents, alors qu’Oliver et Charlie eux, en sont typiquement les rebelles.

« Laissons là où elle est celle-là... »

Réplique-t-il avec amertume, la mâchoire presque serrée. « Tu serais perdu sans moi je le sais. Et non, pour ta gouverne, j’étais inquiète ok ? Je le suis toujours d’ailleurs. Ça risque de mal se finir cette histoire, je voulais juste te protéger, alors j’ai réagi un peu... Violemment. » Un peu ? C’était carrément une agression. Mais il se contente de relever la tête, continuant de la toiser suspicieusement. Charlie qui lâche l’affaire aussi vite, c’est troublant. Alors il fronce légèrement les sourcils, dévisageant la jeune femme, ne la reconnaissant finalement, qu’à peine. Il a dû s’en passer des choses à San Fransisco. « Bon, maintenant que nous sommes une joyeuse famille unie, reste la grande question. Comment on va gérer ça ? » Lui, il a la réponse, toute faite.

« Papa et maman n’ont pas besoin de le savoir. »

Il lève les yeux innocemment, tandis que sur ses genoux, Nyah s’amuse avec la truffe de Sally.

« De toute façon, ils ne viennent jamais ici. Et j’ai pas envie qu’ils viennent... Foutre la merde, dans ma famille. »

Et cette fois, c’est lui qui insiste sur le “ma famille”. En fait, on ne va pas se mentir, ce qu’il le craint le plus, c’est que Billy et Bonnie s’en prennent à Emy, et à Nyah. Ils ne mesureront pas leurs mots face à elle. Tout sera bon pour la faire fuir, qu’elle n’approche plus Oliver. C’est un déshonneur sur les Richards qu’il a fait, ça, il le sait. Et aux yeux des parents, Nyah ne sera toujours qu’une “batarde”. Ce que lui n’acceptera jamais. C’est sa fille. Son diamant brut. Et Emy, elle l’a mise au monde ce diamant brut. Ils seront une famille, toute leur vie. Même s’ils prennent des chemins différents. Même si elle préfère s’éloigner de lui. Nyah restera un lien entre eux. Toujours.

« Quand ce sera le bon moment, je le leur dirais. Et... S’ils préfèrent m’oublier, qu’accepter Emy et Nyah, il en sera ainsi. Qui a vraiment besoin d’un manoir à Londres de toute façon... »

Lui. Ce manoir, il a une piscine, un terrain de tennis, et un centre équestre. Ils y ont passé des week-ends entiers quand ils étaient gosses, à se perdre dans les immenses terrains et forêts tout autour. Ce serait quand même vachement cool que Nyah en profite un jour. Mais il ne se fait pas trop d’illusions. Dès que Billy saura, il le mettra au pied du mur : Il faudra qu’il choisisse. Les Richards, ou Emy et Nyah. Et à cette question, il sait déjà qu’il choisira la seconde option. Il ne peut pas se permettre, de les abandonner une seconde fois. Il se l’est promis intérieurement, depuis plusieurs jours. Il culpabilise déjà tant, d’être parti. Même s’il ne savait pas... Qu’il ne pouvait pas savoir. Il ne les laissera plus jamais toutes seules. Il abaisse l’azure de ses yeux jusqu’à sa fille justement, et lui sourit chaleureusement, ce qu’elle lui rend aussitôt.

« On en achètera un autre avec l’argent de la future poitrine d’Ariana Grande! »
« Mede! »

Il relève rapidement les yeux vers Emy et Charlie, et cette fois, il est plus qu’amusé de la pseudo répartie de sa fille.

« Elle est d'accord! »

Et Ariana Grande aussi, mais ça, il n’est pas sensé en parler, alors, il ne reviendra pas là-dessus.

Emy observa les jumeaux Richards en silence. Bien que concernée de près par la conversation, elle y était pourtant totalement étrangère. C’était tout un monde qu’elle ignorait. Charlie lui avait clairement fait comprendre que le mode de vie des Richards était à des années lumières de ce qu’elle pouvait bien s’imaginer. Aux yeux de la haute société anglaise, Emy n’était donc « rien ». Les mots de la jumelle Richards avaient été durs, mais nécessaires pour lui faire prendre conscience de l’ampleur du merdier où elle venait de se fourrer avec sa fille sans en avoir pleinement conscience.

« Ttt… Et puis quand je suis la traitresse ? Laisse ce rôle à Eléana, elle s’en sort très bien. »
« Laissons là où elle est celle-là. »

Qui donc était cette Eléana qui semblait être le diable en personne ? Une autre sœur ? La fratrie Richards en comptait combien, au juste ? Emy était en droit de se poser la question puisqu’ils n’avaient jamais parlé de leurs familles respectives. Jusqu’à aujourd’hui, elle ignorait même jusqu’à l’existence de sa jumelle.  

« Tu serais perdu sans moi, je le sais. Et non, pour ta gouverne, j’étais inquiète ok ? Je le suis toujours d’ailleurs. Ca risque de mal se finir cette histoire, je voulais juste te protéger, alors j’ai réagis un peu… violemment. »

Emy arqua un sourcil en inclinant la tête : ce n’était rien de le dire !

« Bon, maintenant que nous sommes une joyeuse famille unie, reste la grande question. Comment on va gérer ça ? »
« Papa et maman n’ont pas besoin de le savoir. De toute façon, ils ne viennent jamais ici. Et j’ai pas envie qu’ils viennent.. Foutre la merde, dans ma famille. »

Famille. Il y a encore peu de temps, Emy était certaine de ne jamais entendre ce mot sortir de la bouche d’Oliver Richards. Elle sentit son coeur louper un battement.

« Quand ce sera le bon moment, je le leur dirais. Et… S’ils préfèrent m’oublier, qu’accepter Emy et Nyah, il en sera ainsi. Qui a vraiment besoin d’un manoir à Londres de toute façon… On en achètera un autre avec l’argent de la future poitrine d’Ariana Grande ! »
« Mede ! »
« Elle est d’accord ! »

Emy étendit le nouveau mot prononcé par Nyah, plaqua une main sur sa bouche en se donnant un air horrifié et secoua la tête pour lui faire comprendre de ne plus l’utiliser.
Les propos d’Oliver étaient surprenants, touchants, mais aussi troublants et inquiétants. L’américaine avait presque l’impression que sa fille et elle n’étaient que des chats de gouttière recueillis par les enfants de la famille qui étaient en train de machiner un plan pour les forcer à les adopter. Et puis, un manoir ! La famille Richards possédait un manoir ?! Ça n’était pas dans la recherche Google, ça !!

« Ecoutez, je ne veux pas que Nyah et moi soyons la cause d'un déchirement familial. Je connais ça et je ne le souhaite à personne. ». Elle passa une main sur son visage pour masser ses paupières closes, visiblement en proie à un début de migraine. « Mais Charlie a raison, je n’ai pas la moindre idée de l'enjeu… » commença-t-elle, se redressant aussitôt pour faire les cent pas. Elle repassa en boucle les propos de Charlie quelques minutes plus tôt, des propos qu’elle n’avait pas compris au début, mais qui commençait à avoir un tout autre sens désormais. « Tu n’es donc pas juste un chirurgien, c’est ça ? » reprit-elle en se rasseyant dans le canapé à l’attention d’Oliver avant de finalement les regarder tour à tour. « Pourriez-vous me dire dans quoi j’ai mis les pieds exactement ? »

« Laissons là où elle est celle-là » Ouais….à Londres, avec les parents et bien loin d’eux. Même un océan entre eux ne suffit pas. « papa et maman n’ont pas besoin de savoir […] foutre la merde dans ma famille. » AHAHA !! Lui aussi utilisait le terme famille ! Oui, il était accro à ces deux nouvelles femmes dans sa vie, elle le savait ! Mais bon….là il était complètement utopiste le bonhomme. C’est la maternité qui faisait ça ?

« J’aime ton côté optimiste cher frère mais….le secret ne va pas tenir longtemps et tu le sais. Oui, ils sont loin, oui ils ne viennent que très rarement merci mon dieu pour ça, mais il suffit que Mr Collins ou pire Les Delawney et la minute qui suit, tout Londres sera au courant. »

Pour les newbies en matière de haute société, petit point Stéphane Bern. Mr Collins et Mr and Mrs Delawney font partie des vieilles familles américaines avec une branche anglaise (d’où les liens avec les Richards). Les jumeaux ne le côtoient pas mais ils habitent dans le même quartier, se rendent aux mêmes galas et sont dans l’obligation (merci papa) de garder une entente cordiale avec ces gens là. Sauf que les Collins, Delawney et tous les autres sont à l’affût du moindre faux pas pour alimenter les gossips ! (Qu’est ce que vous croyez, la série est tirée de faits réels voyons). Et si l’un d’entre eux à le malheur de voir Oliver se balader avec une gamine, paf ! Le téléphone est dégainé, la photo est prise et envoyée de l’autre côté de l’Atlantique. La crème de la crème de la haute société ? Un nid de vipère !

« Quand ce sera le bon moment, je leur dirais [….]Qui a vraiment besoin d’un manoir à Londres de toute façon…. » Charlie le regarda blasé. Genre tu veux me faire croire que le manoir à Londre t’es indifférent ? La blague. Si y’a bien un truc sur l’’héritage qu’ils souhaitaient tous les deux garder, c’était bien ce manoir (quitte à se battre contre Eléana pour ça.) Charlie gardait d’excellent souvenir des week end et vacances passés là bas quand ils étaient plus jeunes. Et même un peu plus vieux. Les jumeaux avaient regagnés leur Angleterre natale le temps d’un séjour il y a un an et demi de ça. Et une fois, leurs obligations passés à Londres, ils s’étaient enfuis pour quelques jours dans ce fameux manoir. Alors il n’allait pas lui faire croire que ça lui était indifférent.

Il y avait autre chose dans son discours qui l’embêtait, mais, et c’était une première, elle ne savait pas trop comment formuler ça.  Il semblait être sûr de lui et choisirait sans hésiter Nyah et Emy s’il le devait. Et autant Charlie pouvait comprendre, autant cela l’inquiétait. Parce qu’au final, si Oliver devait faire un choix, elle aussi. S’il « reniait » la famille, elle ne pourrait pas elle-même passer entre les deux. Elle savait d’avance que son père lui demanderait (exigerait ? ) de ne plus voir Oliver, de le rayer de sa vie. Et ça, c’était impossible. Elle ouvrit la bouche, cherchant à exprimer ses inquiétudes, mais la referma aussitôt, la discussion étant passée sur la poitrine d’Ariana Grande. Bon, elle en discuterait plus tard, quand elle aurait le temps d’y penser à tête reposée, parce que là c’était un coup à ce qu’elle en pleure.

Et pour la poitrine d’Ariana Grande ? Elle ne voulait pas savoir !
« Mede ! » Ouvrant de grands yeux, Charlie se retourna vers sa nièce.

« Oliver ! Qu’est ce que tu apprends comme mot à ta fille ? »

Ah bah ça commençais bien son éducation tiens. « Ecoutez [….]Pourriez-vous me dire dans quoi j’ai mis les pieds exactement ? » Si tu savais Emy, si tu savais…..

« Bienvenue chez les Richards Emy Jameson. Bienvenue dans la haute société anglaise. Derrière des sourires de façades, des vêtements de couturiers et des bijoux inestimables se cache un panier de crabes et des langues de vipères. »

Et elle se retourna vers Oliver. Hey ! C’était à lui de présenter leur famille, après tout, il était en partie responsable de cette situation non ?

« J’aime ton côté optimiste cher frère mais…. le secret ne va pas tenir longtemps et tu le sais. Oui, ils sont loin, oui ils ne viennent que très rarement merci mon dieu pour ça, mais il suffit que Mr Collins ou pire Les Delawney et la minute qui suit, tout Londres sera au courant. » Ho elle a sûrement raison, mais à l’évidence, Oliver est plutôt du genre à ignorer le problème, jusqu’à ce que celui-ci disparaisse complètement. Alors il se contente d’hausser les épaules. De toute façon, à part prier que personne ne l’apprenne jamais, que peuvent-ils faire d’autre ? Quoi qu’à bien y réfléchir, s’il espère que sa fille hérite du manoir, il faudrait que son père signe des papiers avant sa mort. « Oliver ! Qu’est ce que tu apprends comme mot à ta fille ? » Là, il pointe son index vers sa sœur, presque offusqué :

« Rien du tout, elle a de bonnes oreilles c’est tout! »

« Ecoutez, je ne veux pas que Nyah et moi soyons la cause d'un déchirement familial. Je connais ça et je ne le souhaite à personne. » Il lâche Charlie des yeux pour divaguer vers Emy. Son visage devient presque inquiet à l’idée qu’elle ne s’enfuit pour éviter toutes les histoires des Richards. Il panique certainement un peu à l’intérieur, laissant ses bras faire de petits gestes rapides et négatifs.

« Non non, tu sais, ce n’est pas vous le problème! »

C’est Mr et Mme Richards le problème. Des coincés du cul. Daron et daronne balais dans les fesses, comme ils aimaient bien les surnommer quand ils étaient adolescents et peu respectueux de leurs géniteurs. Faut dire qu’il en faut pour supporter leurs parents. Trop traditionalistes et hautains. Même mesquins, dans le fond. Prêts à n’importe quel plan diabolique pour éloigner leurs rejetons de relations qu’ils jugeraient de mauvaise. Chacune des fréquentations d’Eleana, Charlie et Oliver ont toujours été filtré. Jusqu’à aujourd’hui. Bien trop loin d’eux, ils n’ont plus la main mise sur leurs vies. A leur grand désespoir certainement. Et comme pour inquiéter un peu plus le chirurgien, Emy se lève, quitte le canapé, et fait les cent pas devant eux. Ses yeux la suivent comme une balle de tennis, alors que ses doigts s’accrochent à Nyah, par crainte qu’elle ne s’en empare et ne s’enfuit pour ne plus jamais revenir. « Tu n’es donc pas juste un chirurgien, c’est ça ? » Il ouvre la bouche comme pour répondre, mais aucun son n’en sort. Il ne sait même pas vraiment comment expliquer leur situation. Alors il ferme son clapet, grimaçant un instant, cherchant ses mots pour ne surtout pas effrayer la jeune femme.

« Si. Enfin... C’est juste qu’à côté, j’ai une famille un peu... Étouffante et... Mon père est dans le gouvernement britannique. Il est juste un peu... Traditionaliste. »

Il grimace encore, s’il avait pu, il aurait enterré sa tête comme une autruche. Avoir un père politicien, ça veut tout dire. Famille riche, coincée, chiante, autoritaire, hautaine et qui en attend beaucoup autant de ses enfants que des pièces rapportées. « Pourriez-vous me dire dans quoi j’ai mis les pieds exactement ? » Il n’a pas le temps de répondre, que Charlie a déjà pris les choses en main « Bienvenue chez les Richards Emy Jameson. Bienvenue dans la haute société anglaise. Derrière des sourires de façades, des vêtements de couturiers et des bijoux inestimables se cache un panier de crabes et des langues de vipères. » Il roule des yeux, comme si elle exagérait, alors que dans le fond, elle n’a pas totalement tort.

« C'est la cour du Roi Soleil, mais sans le Roi Soleil. Parce qu’ils pensent tous l’être. »

Il y a même autant, si ce n’est plus, d’histoires de coucheries. Mais qu’il faut taire. Sans quoi le déshonneur vous tombe dessus. Un peu comme celui qui survole le crâne d’Oliver à l’instant présent.

« T'inquiète pas, j’ai la situation bien en main! »

Assure-t-il en hochant la tête avec certitude, les yeux clos, plutôt bon acteur.

Aux prises avec un sentiment de panique, Emy parvenait tout de même à garder une certaine maîtrise et ce, au prix d’un début de migraine qui s’annonçait particulièrement tenace. Les propos d’Oliver l’avaient quelque peu apaisée, mais c’était sans compter une énième intervention de Charlie qui raisonna son frère une fois de plus en le mettant de nouveau face à la réalité du milieu où ils avaient grandi et qui dépassait complètement l’américaine.

« J’aime ton côté optimiste cher frère, mais… le secret ne va pas tenir longtemps et tu le sais. Oui, ils sont loin, oui ils ne viennent que très rarement merci mon dieu pour ça, mais il suffit que Mr Collins ou pire les Delawney et la minute qui suit, tout Londres sera au courant. »

Eleana, Mr Collins, la famille Delawney…
Ils étaient combien à s’intéresser aux jumeaux Richards ? Ou à leur famille, en général ? Décidément, Emy ne comprenait pas cette curiosité malsaine qu’elle ne connaissait qu’aux travers des livres ou des films jusqu’à présent. C’était une façon de faire tellement… moyennageuse ! Elle en venait même à se demander s’il était toujours question de mariage arrangé dans ce milieu.  

Oh, bien sûr, Emy ne prétendait pas que sa famille était « normale » ; son père avait été tué bien avant sa naissance et sa mère l’avait élevé seule dans des conditions financières parfois difficiles, mais la jeune femme n’avait jamais eu à craindre une quelconque pression sociale. La seule chose pour laquelle sa mère était intervenue, c’est lorsqu’elle lui avait conseillé – à juste raison - de poursuivre ses études plutôt que de se lancer dans une carrière de musicienne incertaine. Emy l’avait écouté. Pour finalement abandonner ses études afin d’élever seule une enfant à tout juste 21 ans…

« Non non, tu sais, ce n’est pas vous le problème. » lui assura Oliver, joignant ses propos à une gestuelle un brin exagérée par un effet de panique.

Il avait raison : elles n’étaient pas le problème. Du moins, pas de ce côté du Globe.

Finalement, après un temps de latence pour sans doute y chercher les bons mots, Oliver lui expliqua alors à quel niveau de l’échelle sociale britannique la famille Richards se situait.

« Si. Enfin… C’est juste qu’à côté, j’ai une famille un peu… Etouffante et… Mon père est dans le gouvernement britannique. Il est juste un peu… Traditionnaliste. »

Un père dans le gouvernement britannique. Autrement dit, l’autorité la plus haute après celle de la Reine. Plus que traditionnaliste, le patriarche de la famille Richards devait surtout être très conservateur. Ainsi donc, contrairement à ce qu’il affirmait, Oliver n’était donc pas qu’un « simple chirurgien », mais le seul fils d’une personne influente dans un pays encore sous monarchie. Ils étaient tout de même au XXIième siècle ! Bien sûr, Emy et Oliver n’étaient pas en couple et leur histoire n’était pas comparable, mais même Harry & Meghan avaient su trouver une solution.

« Bienvenue chez les Richards Emy Jameson. Bienvenue dans la haute société anglaise. Derrière les sourires de façades, des vêtements de couturiers et des bijoux inestimables se cache un panier de crabes et des langues de vipères. » intervint Charlie.
« C’est la cour du Roi Soleil, mais sans le Roi Soleil. Parce qu’ils pensent tous l’être. T’inquiète pas, j’ai la situation bien en main ! » surenchérit Oliver.

Emy les observa alors tour à tour avec attention. Le silence régna dans la pièce pendant quelques secondes tandis qu’elle décortiquait toutes ces nouvelles révélations. Oliver avait l'air tellement sûr de lui...

« Ça n’a pas dû être facile de vivre dans un environnement aussi protocolaire et de savoir que chacune de vos actions est scrutée. » dit-elle finalement.

Emy compatissait. Ils n’avaient probablement vécu qu’une « demi-vie » tous les deux, s’empêchant d’être eux-mêmes en certaines occasions et sans doute sous le coup d'un chantage sur la fortune. Entre la liberté et la richesse, Emy choisissait la liberté sans hésiter. En revanche, Oliver et Charlie, privés du premier choix, s'étaient accrochés au second pendant des années. Elle s'éclaircit alors la voix pour reprendre :

« Qu'est ce que je dois faire exactement pour avoir une chance que Nyah soit acceptée et que je sois au moins... tolérée ?  » demanda-t-elle en les regardant tour à tour, se redressant pour déjà se donner une meilleure posture. Emy n'était pas du genre à baisser les bras ni même à renoncer sans avoir essayé. Il n'y avait pas de raison que les deux Richards soient les seuls à gérer toute cette histoire. Elle avait aussi sa pierre à poser et ça tombait bien puisqu'elle était bonne élève.