A quoi elle jouait ? Les fesses enfoncées dans son canapé, elle s’était mise à envoyer des messages à Jake, dans un ultime but : Le voir pour parler de Shana. Et sans même s’en rendre compte, elle était en train de l’allumer, complètement, par message. Et cet abruti y répondait. Des menottes, ils étaient en train de parler de menottes. Parfois elle avait envie de se couper la tête, se mutiler personnellement, et enfoncer sa tête sur un piquet qu’elle planterait à la Bastille. Quelle sotte elle était. Bon bah fallait assumer maintenant. Elle allait souffrir cette nuit. Enfin, dans le bon sens du terme. Parce que les tortures de Jake sont loin d’être cruelles, au contraire. Est-ce que rien d’y penser, elle était en train de frissonner ? Oui, complètement. Bon, avant tout ça, il fallait qu’il survive à la nouvelle qu’elle avait à lui annoncer... Et ça c’était moins sûr.

Levant ses fesses, elle s’empressait de faire un peu de ménage chez elle. Ce qui était encore une fois, complètement stupide. Parce que lui l’avait reçu dans un dépotoir. Et il l’avait même culbuté dans son dépotoir. Mais peut-être comprendrait-il que c’était plus glamour dans un lit qui sent bon, une maison qui sent le monsieur propre fraîcheur alpine ? Tout était en ordre, absolument tout. Même Orteil était dans sa cage, et elle l’y avait enfermé pour qu’il ne laisse aucune crotte se promener sur son parquet luisant. Elle était ensuite sortie faire quelques courses, pour acheter à manger. Si Jake était trop choqué pour sortir, il fallait assurer ses arrières. Et en bonne cuisinière qui se respecte, elle avait acheté des pizzas surgelées.  

Une fois chez elle, elle avait rangé ses gros sacs pleins de bonnes choses grasses, puis elle s’était dirigée vers sa salle de bain. Une douche rapide, un joli maquillage naturel, puis elle avait enfilé un grand pull, et une minijupe en jeans (tenue) pour ne pas en faire trop. Ce n’était pas un rencard... Pas un rencard! Gardant ses longs cheveux détachés, elle vérifiait l’heure sur son téléphone. Bientôt 20h. Pour patienter, elle avait préparé de petits bols avec quelques gâteaux apéritifs, au cas ou Jake ait faim. Par contre, pour boisson, elle n’avait aucun alcool. Et puis de toute façon, elle ne voulait pas qu’il picole. Serait-il aussi doué à jeun, qu’alcoolisé ? Non de dieu, fallait qu’elle arrête de penser comme ça. Elle devenait pire qu’une chaudière! Elle qui fuyait le sexe comme la peste, voilà que par sa faute, elle ne faisait plus qu’y penser... Ce type là, il doit semer le désordre partout ou il passe. Ha si Shana savait... Elle la tuerait. Posant ses petits bols sur la table, elle sursautait légèrement en entendant sonner à la porte. Jake... Une petite excitation dans le corps – et les reins surtout – elle se faufilait vers l’entrée de son petit appartement. Un studio dans le style du vieux New-York, au deuxième étage. Il ne comprend qu’une pièce principale avec un espace cuisine, une salle de bain, un toilette et une chambre. Le tout donnant sur une rue tranquille, avec seulement des vieux immeubles à la friends (son salon). S’arrêtant face à la porte, elle posait ses mains bien manucurées sur la poignée, pour l’ouvrir à la volée.

« Pile à l’heure! »

Elle tirait sur la chemise de Jake pour l’entraîner à l’intérieur, puis elle refermait sa porte, ainsi que le verrou, derrière eux.  

« Garde la chantilly et les menottes pour toute à l’heure, je dois te parler sérieusement avant tout. »

Elle aurait certainement dû commencer par l’engueuler pour la dernière fois. Il était quand même parti sans une seule explication, hein. La laissant seule dans ce miteux studio. Mais qu’attendait-elle de lui à dire vrai ? Elle ne le savait pas elle-même. Tout ce dont elle était sûre, c’était qu’elle aimait qu’il la fasse sienne. Pour le reste, elle y réfléchirait probablement plus tard. Elle se posait dans le canapé, croisant élégamment ses jambes en tapotant la place à côté de la sienne. Jake ne pourrait que reconnaître que son sofa à elle, était cent fois plus confortable.

« C’est à propos de Shana. Je l’ai retrouvé à l’hôpital hier. Rien de grave, c’était pas pour un accident mais... Je ne sais pas comment te dire ça, sans risquer de te provoquer un anévrisme, ou une crise cardiaque. »

Croisant ses mains sur ses cuisses, elle le fixait sérieusement, tout en se mordillant la lèvre. Il fallait qu’elle mesure ses mots. Sinon elle allait perdre son vieil amant, et elle ne s’enverrait pas en l’air ce soir. Ce qui serait furieusement triste.

« Elle... Va avoir un petit bébé. »

Sur le “petit”, elle avait relevé une main, pour mimer quelque chose de petit avec son index et son pouce, juste sous ses yeux. Le tout en grimaçant, par craint que Jake ne s’énerve. Et à moins que son agacement ne le rende encore plus sauvage dans leurs ébats, elle préférait qu’il conserve son calme.

« Tout petit, petit... »

Murmurait-elle, comme si un plus petit bébé rendrait les choses moins compliqués à digérer. Elle aurait dû mettre un décolleté, la pilule serait mieux passée...  Hors là, il n'y avait que son épaule de dénudée.

« Je peux enfiler de la dentelle si tu as besoin. »

Elle baissait légèrement la tête pour chercher à capter le regard de Jake. Et comme pour s’assurer qu’il ne tombe pas, elle venait poser ses deux mains sur ses épaules, autour de son cou, pour que ses petits doigts câlinent doucement cette parti de son corps qu’elle aime tellement embrasser.  

« Ou de la chantilly, je peux me barbouiller de chantilly! Je t’en prie, dis quelque chose... »

Même si c’est pour hurler, elle préférait cent fois une réaction, qu’un silence figé.  

Adossé contre un mur d'une ruelle de Brooklyn, le quarantenaire pistait une femme suspectée d'infidélité par son mari. La situation était peu habituelle pour le détective qui, d'ordinaire, était plutôt confronté au cas de figure opposé. Mais comme on dit, il faut de tout pour faire un monde et ce n'était pas lui, l'exemple même du parfait loufoque alcoolique qui dirait le contraire. Suivant alors la femme de près, Jake fût surprit par le son d'une notification provenant de son smartphone. Merde! C'était clairement pas le moment pour le contacter! D'un geste maladroit, il empoigna son téléphone pour y lire le début d'un message de Mary-Kate. Levant les yeux au ciel, il reportait le regard vers sa cible qui, ayant vraisemblablement senti sa présence, s'était éclipsée en l'espace de deux secondes. Énumérant donc divers jurons à l'encontre de la meilleure amie de sa fille, l'ancien militaire décida finalement de se poser sur un banc afin d'y lire l’entièreté de l'sms. Surpris d'y voir que sa fille aurait un éventuel problème, Jake s'était levé d'un bond pour finalement s'asseoir à nouveau afin de répondre à la brune.

S'en suivit une conversation des plus étranges. Les voilà en train de parler de sexshop, de menottes et de chantilly, sérieux, pouvait-il être plus con ? La main contre le visage, l'homme émit un large soupir, à la fois inquiet pour sa progéniture et intrigué par la soirée qui l'attendait. N'ayant pas pour habitude de mentir, l'alcoolique tâtonna ses poches pour y vérifier qu'elles contenaient bien son porte-feuille puis, d'un pas décidé, prit le chemin d'un sexshop qu'il connaissait bien. Car oui, Jake était un habitué de l'endroit, fervent admirateur des coïts sortant de l'ordinaire, il s'y était rendu tellement qu'il en avait sympathisé avec le propriétaire. le quarantenaire envoya d'ailleurs un message à ce dernier pour lui demander un petit service, le laisser passer par la porte de derrière pour faire sa petite course, le magasin étant ouvert d'ordinaire à une heure plus tardive.

— J'voudrais tes meilleures menottes s'teuplait! s'était-il exclamé devant le vendeur. Oh, et t'a moyen de me faire un rabais sur le p'tit costume de fliquette là-bas ?

Amusé, le propriétaire leva le regard au ciel, conscient que rien ni personne ne pourra changer le détective. Laissant ses achats sur le comptoir de son ami, Jake resta en sa compagnie en attendant l'heure du rendez-vous (qui n'est pas un rencard, on l'a tous comprit). Encombré d'un sac en plastique, l'homme salua le propriétaire pour ensuite prendre la route de l'appartement de Mary-Kate. Devant la porte, il vérifia l'heure sur son téléphone, il était pile à l'heure, comme il l'avait indiqué par sms. L'américain en fût d'ailleurs plutôt fier, bien qu'il ait spécifié qu'il n'était jamais en retard, ce n'était pas toujours vrai. Décidé, il appuya sur la sonnette pour indiquer sa présence. « Pile à l’heure! » s'était alors exclamé la brunette, étrangement bien habillé pour un rencard qui n'en est pas un.

— Je t'avais dit que j'étais toujours à l'heure! répondait-il.

Sans qu'il ne s'y attende, la jeune femme vint tirer sur sa chemise pour l'entraîner à l'intérieur de son appartement, comme si elle avait peur qu'on ne puisse le trouver au seuil de l'entrée. Ce que Jake pouvait comprendre, lui non plus ne tenait pas particulièrement à ce que Shana connaisse leur relation, elle ne le portait déjà pas dans son cœur mais si elle l'apprenait, il pouvait dire adieu à une éventuelle réconciliation! « Garde la chantilly et les menottes pour toute à l’heure, je dois te parler sérieusement avant tout. » Ah la chantilly, il n'y avait pas pensé, après tout n'était-ce pas elle qui lui avait dit qu'elle en possédait ?

— J'l'ai pas la chantilly, t'a dit que t'en avait dans ton frigo, j'allais pas me ruiner. se contentait-il de dire avant de poursuivre. Vas-y, dis moi tout.

Car oui, ils parleraient sérieusement avant tout, Jake s'était pointé bien équipé mais la réelle raison de sa venue était sa fille. Inquiet pour cette dernière, Jake avait même réussi à rester à jeun le temps d'une journée pour connaître cette information visiblement trop importante pour qu'elle la garde pour elle. D'ailleurs, pourquoi l'appeler, lui ? Si ce n'était pas une question de vie ou de mort, Mary-Kate était plus à même de l'aider, non ? lui n'était pas aussi proche de Shana que elle l'était, si vraiment elle avait un problème, pas sûr qu'elle accepte l'aide de son paternel...« C’est à propos de Shana. Je l’ai retrouvé à l’hôpital hier. Rien de grave, c’était pas pour un accident mais... Je ne sais pas comment te dire ça, sans risquer de te provoquer un anévrisme, ou une crise cardiaque. » L'hôpital ?! Les yeux du plus vieux s'était écarquillés en apprenant la nouvelle. Pourquoi s'était-elle retrouvé à l'hôpital si ce n'est un accident ? Ce serait une maladie ? quelle genre de maladie pouvait-elle être aussi grave qu'il en ferait une crise cardiaque ou un anévrisme en l'apprenant ?

— À l'hôpital ?! s'était-il exclamé.

Perturbé, il s'était néanmoins assis aux côtés de Mary-Kate sur son canapé qui, au passage, était bien plus confortable que le sien. « Elle... Va avoir un petit bébé. » Fronçant les sourcils, le plus âgé blêmit. Un bébé ? genre un vrai de vrai ? pas le genre de bébé en plastique qu'on trouve dans les supermarchés ? Non, impossible, pas sa fille, elle était trop jeune pour ça! Il se rappelait encore des rares fois où il l'avait vu bébé comme si c'était hier, il ne pouvait pas avoir manqué tant de choses dans sa vie, n'est-ce pas ? « Tout petit, petit... » Le détective ne se préoccupa pas des gestes de son interlocutrice, trop choqué par la nouvelle. Le visage fermé, l'alcoolique prit ce dernier entre ses mains tandis qu'il échappa un soupir. « Je peux enfiler de la dentelle si tu as besoin.» Fronçant à nouveau les sourcils, l'homme pivota le visage vers la brune pour la fixer d'un air contrarié. « Ou de la chantilly, je peux me barbouiller de chantilly! Je t’en prie, dis quelque chose... » Conscient qu'elle tentait de faire passer la pilule par divers moyens tout aussi maladroits les uns que les autres, Jake émit néanmoins un coup d'épaule pour se dégager du contact de la jeune femme, là, il n'était pas d'humeur à rire, non, ce serait même plutôt le contraire.

— Enceinte...murmurait-il les yeux embués de larmes. J'ai donc été si à l'ouest que ça...continuait-il d'un faible ton. J'suis pas d'humeur à te faire l'amour là, désolé. Il me faut du whisky ou un truc fort.

Oui, il en avait besoin, urgemment même. Il aurait été sans doutes plus simple pour lui d'être saoul en apprenant cette nouvelle, il en aurait peut-être moins souffert...voilà pourquoi il était devenu alcoolique! Pour oublier qu'il avait fichu sa vie en l'air, qu'il était passé à côté de moments qu'il aurait pu vivre s'il n'avait pas été si incompétent, si trouillard. Se levant d'un bond, l'américain s'ébouriffa les cheveux d'un geste vif, énervé contre lui-même. S'il était chez lui, il aurait brisé bien des objets sous la colère mais respectant tout de même l'environnement qui n'était pas sien, il fît les cent pas sans un seul regard pour la brunette.

— J'SUIS CON! TROP CON! s'exclamait-il. IL ME FAUT DU RHUM! continuait-il sur le même ton. J'AI BESOIN D'ALCOOL! Avait-il finit par dire en s'apprêtant à quitter l'appartement.
 

« Je t'avais dit que j'étais toujours à l'heure! » Elle avait le droit d’en douter, venant d’un alcoolique chronique. Une fois trop ivre, savait-il encore ce qu’est une montre ? Ou un réveil ? Une alarme ? Roulant des yeux en ignorant sa réflexion, elle l’avait poussé vers le canapé pour parler plus sérieusement. « J'l'ai pas la chantilly, t'a dit que t'en avait dans ton frigo, j'allais pas me ruiner. Vas-y, dis-moi tout. » Si elle n’avait pas eu peur de paraître impolie, elle aurait encore soupiré. Mais elle se retenait, préférant garder toutes ses chances de son côté de ne pas se coucher seule dans ses draps froids ce soir. C’est donc délicatement, qu’elle prenait le petit sac en plastique des mains de Jake, pour le poser à ses pieds. Puis ses jolis yeux s’arrêtaient sur les siens, alors qu’elle prenait une petite inspiration pour être certaine de faire défiler ses mots sans bégayer, ni hésiter. Elle commençait donc à lui expliquer la situation, le plus calmement et le plus clairement possible. Et quand elle s’arrêtait, elle comprit bien vite que son moustachu ne prenait pas la nouvelle avec joie. Bon, c’était compréhensible, être grand-père à quarante ans, c’est comme être fauché en pleine jeunesse. A quarante ans, on commence à faire des gosses de nos jours, on n'assume pas le petit-fils encore. Lui, il allait devoir s’entraîner à faire des gâteaux. Le sourire sur le visage de Mary-Kate s’effaçait peu à peu, alors que Jake s’échappait de son étreinte pour se lever du canapé et commencer à faire les cents pas autour de sa petite table basse. « Enceinte... J'ai donc été si à l'ouest que ça.. J'suis pas d'humeur à te faire l'amour là, désolé. Il me faut du whisky ou un truc fort. » Non, pas d’alcool... Elle qui voulait s’assurer une soirée sans un seul verre de whisky. Fermant les yeux un court instant, elle grimaçait puis soupirait. Quand elle rouvrait ses paupières, Jake se dirigeait vers la sortie. Paniquée à l’idée de le voir déambuler comme un zombie, tout seul, dans les rues de New-York, elle se levait d’un bond pour lui courir après, sans même se soucier de son élégance cette fois-ci. « J'SUIS CON! TROP CON! IL ME FAUT DU RHUM! J'AI BESOIN D'ALCOOL! » C’était-il mis à hurler. Avait-elle invité Jack Sparrow dans son antre ? Sous le ton trop élevé de l’homme, elle s’était reculée légèrement, un peu craintive. Est-ce qu’il pouvait être sujet à des crises violente, comme ça ? Elle perdait peu à peu son assurance, regrettant d’avoir été trop honnête avec lui. Elle aurait mieux fait de ne rien dire... Mais d’un autre côté, Shana avait beaucoup à assumer maintenant, sans avoir à s’occuper d’une crise du quarantenaire. Autant qu’elle se charge du père, et que Shana n’ait qu’à s’occuper de son bébé. C’était déjà beaucoup.

« CA VA, CA VA, CAPITAINE SPARROW!»

Hurlait-elle à son tour, subitement, alors que ses sourcils s’étaient de nouveau froncés. Ses voisins allaient s’énerver si l’enquêteur ne se calmait pas un peu. Une main appuyée sur le mur de l’entrée, elle enfilait de petites bottines à talons, tout en surveillant la silhouette de son amant. Cette soirée allait être tumultueuse... Elle le sentait. Reposant ses deux pieds chaussés au sol, elle passait devant Jake, se retournant pour lui faire face, juste avant d’ouvrir la porte.

« Un verre! Et après tu essais d’agir comme un homme, un vrai homme! Ta fille a peut-être fait une connerie, mais c’est sa connerie, pas la tienne! Elle va avoir besoin d’un père, un vrai père, pour passer là-dessus. Elle va assumer, c’est une grande fille! Elle a juste besoin de nous, aussi sobrement que possible! Et crois moi, j’te laisserais pas prendre ton petit fils dans tes bras, si tu as une seule goutte d’alcool dans tes veines! J’suis peut-être petite, mais j’suis enragée! Souviens toi de l’autre nuit, Mr Grey!»

L’index pointé sous le nez du plus âgé, elle avait enfoncé ses yeux, avec insistance, dans les siens, manquant même de lui rentrer son index dans les trous du nez. Elle était un peu fâchée de le voir tout reporter sur l’alcool, au lieu d’affronter les problèmes. Il se faisait passer pour un lion fort et courageux au lit, mais à l’évidence, c’était une poule mouillée dans la vie. Et ça s’était navrant. Alors les dents serrées, elle le fusillait une dernière fois du regard avant de se retourner brusquement, pour ouvrir sa porte, tout en attrapant son petit sac à main au passage.

« Y'a un bar derrière la rue, j’espère que ça te conviendra. »

Pestant, elle fermait sa porte, puis elle prenait les devants. Elle marchait devant Jake, les talons lourds et furieux, qui avec un peu plus de force, auraient pu briser le béton sous leurs pieds. Il ne leur fallut que deux minutes pour atteindre ledit bar, d’un style écossais. Elle ouvrait la porte, et prenant presque la place de l’homme dans le couple, elle faisait signe à Jake de passer, avant de rentrer derrière lui. Il n’y avait pas grand monde ce soir, tant mieux.

« Prends ta dose, qu’on s’en aille d’ici. J’aime pas les bars! »

Ça ne sent pas bon l’alcool. Ne cachant pas sa frustration d’être ici, au lieu d’être tranquillement installée dans son canapé moelleux, à faire des cochonneries, menottée je ne sais ou, elle allait s’asseoir au bar, posant son sac à ses pieds. Croisant ses jambes élégamment, elle posait ses coudes sur le comptoir, scrutant curieusement la pièce puis la carte de l’établissement, accrochée au mur.

« Je voudrais un coca-cola s’il vous plait! »

Ignorant à présent le quarantenaire, elle donnait la monnaie au serveur, qui s’excusait platement parce qu’il n’avait que du Pepsy. Elle en haussait les épaules, désintéressée.

« Franchement, les gens qui voient la différence entre les deux, ce sont simplement ceux qui sont accro aux marques. »

Donnez-leur un Pepsy dans une canette de Coca, ils ne verront aucune différence. Elle remerciait le barman quand il lui tendait son verre, qu’aussitôt, elle tirait vers elle pour venir coincer sa paille entre ses lèvres rosées. Ce n’est que là qu’elle se décidait à accorder un regard à Jake, un peu blasée.

« C'est comme ça que tu affronte tous tes problèmes ? »

Lui lançait-elle, comme pour espérer le réveiller un peu, le secouer, le forcer à assumer un peu plus. Probablement qu’elle parlerait dans le vide ce soir, mais petit à petit, elle creuserait l’homme. Elle n’abandonnerait pas comme ça, elle le devait bien à Shana. La brunette avait besoin de son papa. Elle le savait bien. Qu’importe si pour ça, elle devait agacer le moustachu. Il n’en serait que plus sauvage au lit, de toute façon. Certes il lui faisait un peu peur, mais elle, contrairement à lui, elle avait du courage, du vrai courage. Un courage un peu fou, mais un courage quand même.

« CA VA, CA VA, CAPITAINE SPARROW!» L'alcoolique fronça les sourcils tandis qu'il pivotait sur lui-même pour faire face à la plus jeune. Ce n'était pas la première fois qu'on le comparait au célèbre pirate, ça aurait pu le faire sourire si la situation s'y prêtait. Malheureusement ce n'était pas le cas, et la seule réponse qu'elle eût fût un grand soupir d'exaspération. Roulant les yeux, l'homme s'arrêta net dans son élan, perdu dans ses pensées. Lui, grand-père ? à son âge ? alors qu'il n'avait pas été père ? Car oui, soyons honnête, Jake n'avait jamais agit en tant que tel. Ce n'était pas faute d'avoir essayé pourtant, durant les premières années de Shana, il allait régulièrement la voir, puis au fil des années, il s'était ravisé. Ses missions devenaient de plus en plus dangereuses, ses amis mourraient sous ses yeux, rien ne pouvait prouver qu'il ne quitterait pas ce monde lui aussi. Alors il avait prit cette décision, certainement l'une des plus dures qu'il avait dû prendre de toute sa vie : ne plus faire parti de la vie de sa fille. Le détective préférait encore que la petite fille oublie son père, qu'elle s'imagine qu'il a fuit son rôle -ce qui n'était pas tout à fait faux, plutôt qu'elle s'attache un peu trop à lui pour finalement avoir le cœur brisé en apprenant son éventuel décès. « Un verre! Et après tu essais d’agir comme un homme, un vrai homme! Ta fille a peut-être fait une connerie, mais c’est sa connerie, pas la tienne! Elle va avoir besoin d’un père, un vrai père, pour passer là-dessus. Elle va assumer, c’est une grande fille! Elle a juste besoin de nous, aussi sobrement que possible! Et crois moi, j’te laisserais pas prendre ton petit fils dans tes bras, si tu as une seule goutte d’alcool dans tes veines! J’suis peut-être petite, mais j’suis enragée! Souviens toi de l’autre nuit, Mr Grey!» Les poings serrés, l'alcoolique fit claquer sa langue, agacé par la brune. Elle n'y était pas du tout, Jake ne jetait pas la pierre à sa fille, déjà parce qu'il était bien mal placé pour ça, mais aussi parce que ce n'était pas la raison de son énervement. Shana aurait eu bien meilleure vie si Jake avait su gérer la sienne. S'il avait été assez fort pour prendre son courage à deux mains et changer de métier, histoire d'être présent pour sa progéniture...mais voilà, il ne l'avait pas fait. Pour simple raison qu'il ne se voyait faire que ça, l'armée. Bien que surdoué -ce qu'il gardait bien de dire, le monde n'a pas à savoir qu'il possède un QI plus élevé que la moyenne, il ne se trouvait que peu de qualités, pour lui, son seul but était d'être sur le terrain. Parce que l'homme y avait prit goût malgré les horreurs qu'il avait pu voir, parce qu'une fois soldat, notre état d'esprit change du tout au tout. On vit pour l'armée, on est sans cesse sur ses gardes, on ne fait plus confiance à personne, on se méfie de tout et n'importe quoi. L'alcoolique était trop sur les nerfs et le sachant, il trouvait plus judicieux d'être loin de sa fille, dans tout les cas il aurait finit par la faire souffrir. Bien sûr le plus vieux avait eu l'occasion de revoir sa fille en ayant quitté son travail, mais avec la mort de sa belle Elyzabeth, de ce bébé qu'elle portait en elle, il avait sombré dans l'alcool, parfois même la drogue lors de ses jours nostalgiques. Nombreuses fois il s'était retrouvé en cellule de dégrisement après diverses altercations où conneries en tout genre, autant vous dire qu'encore là, il était loin de la parfaite figure paternelle que Shana s'était peut-être imaginé.

— J'suis pas à la hauteur de tout ça, j'vois même pas pourquoi t'as voulu m'en parler! s'exclamait-il.

Là oui, il n'était pas courageux. Oh, il l'avait été auparavant, mais tout ça c'était loin, il avait assez prit sur lui pendant un peu plus de vingt ans, n'avait-il pas le droit de lâcher prise, lui aussi ? Jake n'avait plus la force de continuer à vivre sainement, et encore, que la jeune femme s'estime heureuse qu'il n'ait pas tenté de se suicider, parce qu'il s'imaginait en avoir toutes les raisons du monde. Le détective ne cherchait pas à ce que sa fille sache qu'il n'avait pas agit en père pour son bien, parce qu'au final, même si ça partait d'un bon sentiment, il s'était montré égoïste et nul. Avait-il ne serait-ce que le droit de connaître ce petit fils ? de le prendre dans ses bras ? même si un jour il était guéri de son alcoolémie, il ne sentait pas assez digne de Shana pour assumer son rôle de père et grand-père. Grand-père...merde alors, à seulement 41 piges...la nouvelle était dûre à encaisser. « Y'a un bar derrière la rue, j’espère que ça te conviendra.» D'un bref coup d'oeil, il considéra son interlocutrice. Qu'elle ne s'en inquiète pas, il n'était pas idiot et savait bien qu'elle faisait tout ça pour le bien-être de Shana, bien sûr il lui en était reconnaissant, en tant que "père", rien n'était plus rassurant que de voir quelqu'un d'aussi protecteur envers sa progéniture. Ce qui le poussait d'ailleurs à penser qu'il était sans doutes de trop dans tout ça. Regardez par vous-même, il avait même fait la bêtise -et le mot est faible, de coucher avec elle! En parfait abruti qu'il est, il était aussi conscient qu'il recommencerait, parce qu'au lit, cette fille était bonne, très bonne...un peu trop bonne d'ailleurs.

— Tout les bars me conviennent...murmurait-il dans sa barbe.

Du moment qu'il y avait du rhum, du whisky ou de la bière forte, il ne cherchait pas à savoir si la déco' était à son goût, si l'établissement était bien placé ou si même le personnel y était sympathique...non ça, l'américain s'en fichait royalement. « Prends ta dose, qu’on s’en aille d’ici. J’aime pas les bars! » Autant sur le point sexuel ils s'entendaient à merveille, autant là pour sûr que ce n'était pas le cas. Un pied dans le bar, l'homme fût étonné de découvrir que celui-là, il ne le connaissait pas. Natif de la grande pomme, il avait été dans une bonne partie des bars de la ville, du typique pub irlandais au bar lounge, peu d'établissements avaient échappés à son radar. Bien, ça faisait une nouvelle adresse à ajouter dans son carnet, après un petit coït avec la brune, un bon verre de whisky à deux minutes de chez elle n'était pas de refus! « Je voudrais un coca-cola s’il vous plait! » Avait demandé Mary-Kate, plus sérieuse que jamais. Prenait-elle un peu d'alcool parfois ? Le genre d'alcool "pas trop fort et fruité" que les femmes demandent ? non pas qu'il la poussait à la consommation, m'enfin un petit verre de temps en temps n'a jamais fait de mal à personne.

— Un verre de rhum, le plus fort que vous ayez. demandait-il à son tour.

Le serveur revenu alors avec les deux boissons, dont l'une d'elles s'avérait être finalement du pepsi. « Franchement, les gens qui voient la différence entre les deux, ce sont simplement ceux qui sont accro aux marques. » Tripotant son verre le regard dans le vide, l'alcoolique empoigna finalement ce dernier pour en boire une gorgée. Bon, ce n'était pas trop ça mais il ressentait déjà une sorte de soulagement. Fixant tour à tour le pepsi et sa consommatrice, Jake acquiesça à sa réflexion.

— Ouais... se contentait-il de répondre.

Prenant une seconde gorgée de sa boisson, le plus vieux fixa la belle dont le regard blasé l'agaçait. « C'est comme ça que tu affronte tous tes problèmes ? » D'un soupir, il lâchait son verre pour retourner son regard blasé. Encore une fois, elle parlait sans savoir, c'était une manie chez elle ou quoi ? Elle pouvait bien être une merveilleuse partenaire de sexe, cela n'enlevait pas le fait qu'elle était insupportable. Il connaissait son but, il n'était pas né de la dernière pluie, mais après une nuit en sa compagnie, elle devait déjà bien se douter qu'il lui serait impossible de le changer, non ? Même la psychologue qui lui avait été assigné par l'armée après sa descente aux enfers n'avait pas été assez forte pour le faire parler alors elle, lui faire avouer ses plus profondes pensées ? non, elle n'y arriverait pas.

— Tu crois que j'suis con ? lançait-il d'un ton froid. Tu crois que j'vois pas ce que t'essayes de faire ? lui avait-il dit. Écoute, j'ai pas envie de voir ce petit-fils, j'suis déjà pas un père alors un grand-père ? non, laisse tomber, j'suis un con, voit la vérité en face, ça vaut mieux pour tout le monde.

Pas sûr que sa petite soirée coquine si attendue se produise finalement, la brunette allait vite être dégoûtée de Jake. Ce n'était pas plus mal au fond, il ne voulait pas qu'elle s'attache à lui, qu'elle ne s'entête à vouloir l'aider pour le bien-être de Shana. Jake se forgeait peu à peu un cœur de pierre, seul son meilleur ami avait la chance de ne pas avoir perdu sa place à l'intérieur. Bon, il fallait aussi dire qu'il était du genre têtu...ce que Mary-Kate semblait être aussi et ça ne l'arrangeait pour ainsi dire pas du tout. Empoignant avec un peu plus de force son verre, il en termina bien vite le contenu pour ensuite le reposer. D'un geste inattendu, il laissa sa tête rencontrer la table d'un boum surprenant -qui ne l'avait pas blessé, d'où l'intérêt d'avoir la tête dure, dans les deux sens du terme, ses mains à présent sur l'arrière de son crâne, le quarantenaire tourna peu à peu le visage vers la jeune femme pour croiser son regard. Soutenant ce dernier, il émit un rictus jaune.

— Tu te fatigue vraiment pour rien Mary-Kate. Relevant le buste, l'homme leva le bras pour quémander un autre verre. Je suis là si tu veux utiliser les menottes, pour le reste n'espère rien de moi.


Prenant son second verre en main, Jake posa son coude contre la table pour reposer sa tête sur le creux de sa main. Il fit ensuite valser son regard autour de la pièce pour se donner contenance. Sentant le regard de la jeune femme sur lui, il émit un sourire, prêt à noyer le poisson.

— Enfin bref, j't'ai acheté le petit costume de fliquette. s'était-il exclamé tandis que les regards étranges du barman, du serveur et du peu de clients se posaient sur eux. C'est quand même ironique quand on y pense, c'est toi la flic et pourtant c'est moi qui te passera les menottes.

Jake, professionnel pour fuir les discussions sérieuses ? PAS DU TOUT.
 

« J'suis pas à la hauteur de tout ça, j'vois même pas pourquoi t'as voulu m'en parler! » Tripotant le contour de son verre, avec ses doigts qu’elle fixait, elle soupirait discrètement. Elle aussi elle se le demandait bien. Mais il fallait qu’il le sache, qu’il ne tombe pas de haut si Shana l’appelle. Pire encore, si elle venait à ne rien lui dire. Et puis peut-être... Peut-être qu’elle s’attachait à lui, bien malgré elle. Elle s’inquiétait pour sa personne. Elle avait eu envie de prendre soin de Shana, et maintenant, c’était de son père ? Parfois, elle se disait qu’elle ferait bien de s’occuper d’elle même, de prendre soin d’elle, avant les autres. Mais elle n’y parvenait pas. S’occuper des autres lui permettait aussi de chasser ses soucis de sa tête. C’était comme refuser d’affronter ses problèmes, en gérant ceux des autres.  

« Parce que c’est ta famille... »

Répondait-elle d’une petite voix triste, sans lui adresser le moindre regard. Shana méritait tellement mieux que ça. Son père devrait être à ses côtés. Au lieu de ça, c’était elle qui gérait les soucis, les états et les humeurs de Shana. Comme une maman, une vraie maman qu’elle n’a jamais eue.  

« On ne la choisi pas. Mais on l’aime. »

Là, elle détournait son regard vers lui, espérant réveiller un peu de responsabilités en lui. Peut-être qu’elle courrait après l’impossible, mais au moins, elle n’aurait pas le regret de ne pas avoir essayé. « Un verre de rhum, le plus fort que vous ayez. » Elle roulait des yeux en reposant son attention sur le barman, qui s’exécutait. Du rhum, rien que ça. Il n’allait plus être en état de s’occuper d’elle après ça. La frustration la prenait. Ennuyée, elle accoudait son bras au bar, et tenait sa tête sur sa main. Elle ferait bien de se trouver un amant plus stable, non ? Mais les amants plus stables sont incapables de la faire grimper comme ça. Et puis... Jamais aussi bien bâti! « Tu crois que j'suis con ? Tu crois que j'vois pas ce que t'essayes de faire ? Écoute, j'ai pas envie de voir ce petit-fils, j'suis déjà pas un père alors un grand-père ? non, laisse tomber, j'suis un con, voit la vérité en face, ça vaut mieux pour tout le monde. » Relevant sa tête, l’air fatiguée, elle haussait un sourcil. Elle ne comprenait pas bien ou il voulait en venir. S’il n’avait pas été un bon père, pourquoi ne serait-il pas un bon grand-père pour se rattraper ? Il n’est jamais trop tard. Ne sachant guère quoi répondre, elle le regardait tristement, allant jusqu’à sursauter quand il écrasait son front contre le comptoir. Surprise et perplexe, elle s’inquiétait un instant pour lui, prête à bondir de son tabouret. Mais il se redressait de lui-même, la soulageant légèrement. Elle posait d’ailleurs sa main sur sa poitrine, trahissant la frayeur qu’elle venait d’avoir. « Tu te fatigue vraiment pour rien Mary-Kate.  Je suis là si tu veux utiliser les menottes, pour le reste n'espère rien de moi. » Qu’est-ce qu’il pouvait être énervant. Au fond, elle espérait bien ne rien attendre de lui, mais elle savait pertinemment que son cœur lui, en pensait autrement. Elle s’entichait de lui, sinon elle ne se serait pas occupée de lui apprendre la nouvelle. Et surtout, elle ne lui aurait pas réclamer d’autres ébats. C’était un jeu dangereux, si Shana l’apprenait, elle ne lui pardonnerait jamais. Dangereux et si émoustillant. Soupirant d’exaspération envers elle-même, elle repoussait son verre de Pepsi, et reposait ses talons haut sur le sol. De quelques pas, elle se rapprochait de Jake, pour venir se coller à lui, passant un bras dans son dos, l’autre main venant câliner doucement son bras si musclé. S’il n’était pas habituée à un peu de tendresse – probablement depuis le décès de sa femme -, elle espérait quand même lui faire comprendre qu’il n’était pas seul, qu’il n’était pas si con, et qu’il pouvait passer au-dessus de tout ça. Elle était là pour l’aider, si besoin. De ses doigts, elle câlinait donc son bras et son dos, avant de pencher son visage vers le sien, les traits tout à coup beaucoup plus doux.  

« C'est pas grave, j’ai de l’endurance. »

Murmurait-elle, d’un ton plus amusé, avant d’arrêter sa main sur l’épaule de Jake afin de s’y appuyer pour venir poser ses lèvres sur sa joue. Elle l’embrassait chastement, mais tendrement, espérant lui remonter un peu le moral. « Enfin bref, j't'ai acheté le petit costume de fliquette. C'est quand même ironique quand on y pense, c'est toi la flic et pourtant c'est moi qui te passera les menottes. » Avait-il conscience qu’ils étaient peu dans ce bar, et que tout le monde entendait ce qu’il disait ? Se crispant soudainement, elle relevait ses yeux pour les passer sur la pièce. Les regards indiscrets se posaient sur eux, mais les fuyaient dès qu’elle les croisait. Le rouge lui montait aux joues, et très gênée, elle se penchait un peu plus vers Jake, pour approcher ses lèvres de son oreille. Tandis que sa main elle, était venue s’accrocher au col de la chemise du quarantenaire, tirant dessus brusquement.

« Tous ces gens sont de mon quartier, non de dieu! »

Elle n’avait pas trop envie que tout son quartier pense qu’elle ait des pratique louches. Même si dans le fond c’était un peu vrai. Elle qui avait plutôt l’étiquette de la sainte ni touche, qu’on ne croise jamais en compagnie masculine. C’était ça l’image qu’elle dégageait et qu’elle aurait aimé conserver. Pas qu’on jazz à son sujet. Le relâchant tout aussi brusquement, elle se reculait légèrement, s’accoudant au comptoir pour tirer son verre vers elle, l’air de rien. Elle offrait même un sourire au barman qui continuait de les dévisager.

« Il est saoul. Il ne sait pas ce qu’il dit. »

Assurait-elle en un faux petit rire, tout en venant se noyer dans son verre de Pepsi. Le terminant bien hâtivement, elle reposait le récipient vide sur le bois, et se retournait vers Jake qui terminait déjà son second verre. Plaquant sa main sur le comptoir, elle le fixait alors plus sévèrement.

« Bon, on y va maintenant ? Ou tu veux vider la bouteille de ce pauvre homme ? »

Le pire, c’est qu’il allait sûrement hésiter, non ? Pestant, elle jetait son sac à main sur son épaule, puis elle revenait vers Jake. Face à son profil, elle passait ses bras autour de son cou, et de nouveau, elle rapprochait sa petite bouche de l’oreille du jeune homme.

« Tu sais où j’habite maintenant. Alors tu as moins de dix minutes pour t’y pointer. Juste le temps que j’enfile ton costume. Et les menottes... »

Chuchotait-elle pour être certaine que personne ne les entende.

« Une minute de retard, et je le retire, et je ne le remettrais jamais... C’est moi ou le rhum... »

Habituellement, une femme dit ça avec la certitude d’être celle qu’il choisira. Mais franchement, là, elle en venait à craindre qu’il ne se pointe jamais. Jake et l’alcool, c’est comme Joey et la nourriture. Joey voudrait des femmes nues sur du pain, lui il les voudrait dans un bain de rhum. Pour simple avant-gout, et assurer ses chances, elle laissait ses lèvres glisser derrière son oreille, le long de sa nuque, puis elle se reculait vite, trop vite, tournant les talons sans un seul autre regard vers lui. Ce qui lui était difficile. Elle avait envie de le regarder, tout le temps. Ou plutôt de l’admirer. De le manger du regard. Elle était sous son emprise, c’était malsain, mais elle n’avait pas envie de lutter. La seule chose qui lui faisait mal dans cette histoire, après tout, c’était de savoir qu’elle n’était peut-être pas la seule femme à partager sa couche. Il est libertin, coureur, qui sait si demain, il n’avait pas rendez-vous avec une femme plus âgée, plus expérimentée ?  

Quittant le bar, elle reprenait la direction de son appartement. Elle laissait ses talons frapper vite le sol, son pas étant pressé. Chez elle, elle ne verrouillait pas la porte, espérant que Jake rentre sans frapper. - et que lui tourne le verrou! Rapidement, elle empoignait le petit sac plastique, aux pieds de son canapé, et vérifiait le contenu. L’uniforme avait l’air ridicule, ou plutôt, très très sexy, indécent, un truc que jamais elle n’avait osé. Se glissant dans sa chambre, elle sortait le costume de son emballage, et commençait à l’enfiler. C’était tellement serré qu’elle se demandait si elle n’allait pas étouffée là-dedans. Franchement, pourquoi est-ce qu’elle faisait ça ? Pourquoi est-ce qu’elle tenait tant à lui plaire ? Parce qu’elle est faible ? Trop faible ? C’est pas lui le con, dans l’histoire, c’est elle. Se sentant cruellement stupide, elle regardait son reflet dans la glace. Stupide, mais sexy. Jamais elle ne se serait imaginée se voir un jour dans une telle tenue. Un léger petit sourire en coin de ses lèvres se dessinait alors. Elle n’était pas si mal. Elle avait les formes pour ça visiblement. Ramassant les menottes, elle les gardait en main, puis s’allongeait sur le lit, attendant sagement de voir si Jake allait se pointer.  Elle veillait sur l’heure, affichée sur son réveil digital. Elle n’attendrait pas plus de dix minutes. S’il ne venait pas, elle enfilerait son vieux jogging et le lui ferait probablement payé longtemps. En lui envoyant les photos de sa petite tenue que jamais il ne pourra retirer de son petit corps!

« Parce que c’est ta famille... » C'est vrai. Mais Jake n'avait jamais eu de famille à proprement parlé, il avait quitté sa mère tôt pour l'armée et sa fille idem. Sa femme enceinte est décédée et désormais il se retrouvait seul dans un taudis à chasser les infidèles. « On ne la choisi pas. Mais on l’aime. » Le ton faible et triste de la jeune femme l'avait surprit. Elle devait s'être consacrée corps et âme à Shana pour être ainsi touchée. Le plus vieux compatissait, il se savait têtu et affreux par moment et que la brune en soit victime n'était absolument pas son but. Malheureusement, par son attitude désinvolte et irresponsable, il faisait souffrir les femmes et en était parfaitement conscient. L'alcoolique était seulement incapable de changer sa manière de vivre, il avait bien trop touché le fond pour s'en sortir par lui-même. Bien sûr ses amis avaient bien tenté de l'aider, en vain. Le détective pouvait se montrer très impressionnant sous le coup de la colère et personne encore ne s'était risqué à le mettre à bout. Tout cela pour dire qu'il n'avait pas pour habitude d'être en compagnie de sa famille, d'être choyé par une femme et des enfants, d'avoir une vie saine où il deviendrait un exemple pour la génération future...là clairement, on pouvait affirmer que ce n'était pas le cas.

— Je sais...se contentait-il de dire.

Jake était partagé entre la honte et l'obstination. La honte d'être aussi misérable, d'être tombé plus bas que terre. Et l'obstination, le fait de ne pas vouloir s'en sortir, parce que l'alcool faisait désormais partie intégrante de sa vie. Mais oui, il avait conscience de son alcoolémie et tout les médecins vous le diront : c'est la première étape de la guérison et elle est cruciale. Toujours assis au bar, sa boisson en face de lui, Jake lâchait de longs soupirs. La mine attristée de la belle le touchait, oui. Parce qu'il l'avait simplement vu en dure à cuire, un vrai petit bout de femme qui ne se laisse pas marcher sur les pieds! La voir dans cet état était plus perturbant qu'il ne le pensait, c'est donc pour cette raison qu'il évitait son regard. Cependant il n'eût pas le choix lorsque Mary-Kate, certainement prise de compassion, s'était montrée tendre envers lui, caressant son dos et son bras de ses mains frêles. Surpris et surtout peu habitué à ce genre de gestes, Jake s'était mit à la fixer d'un air perplexe. Ses mouvements étaient doux, presque apaisants. L'américain était toujours sur les nerfs mais bien moins qu'il y a quelques secondes. Comme quoi la brunette exerçait un petit pouvoir sur lui, quelque chose d'infime pour le moment mais que personne n'était parvenu à lui faire ressentir depuis un bout de temps. Sans se dégager, il quitta le regard de la jeune femme non sans un sourire qu'il avait tenté de dissimuler. « C'est pas grave, j’ai de l’endurance. » Oh ça il le savait, il en avait été témoin. Autant du plan caractériel que physique, elle avait de l'énergie à revendre et semblait tout aussi têtue que lui, une ennemie de taille en somme.

— Oh j'vais pas te contredire là dessus! s'était-il exclamé en lui adressant un clin d’œil.

Puis il s'était montré plus qu'indiscret en dévoilant leur plan charnel au bar tout entier. Jake n'avait pas honte et n'était pas pudique pour deux sous. Il trouvait même drôle d'être aussi explicite en public, voir les réactions des gens l'amusait beaucoup. « Tous ces gens sont de mon quartier, nom de dieu! » Haussant les yeux au ciel, l'alcoolique émit de larges mouvements de bras, semblant indigné par le pudisme de son interlocutrice. Pourquoi se taire ? le plus vieux était persuadé que toutes les personnes ici présentes étaient loin d'être des saints, pour sûr que la moitié d'entre eux se materais des vidéos pornographiques le soir même. S'indigner de son comportement en jouant les prudes étaient bien stupide!

— Oh s't'euplait! avait-il répondu, suivant sa réplique d'un court soupir. J'suis sûr qu'une bonne partie d'entre eux ont des pratiques sexuelles qui sortent de l'ordinaire, ils le cache mieux que moi c'est tout! son regard passant de tables en tables, le quarantenaire poursuivit son discours. Regarde, sur les trois couples là, j'suis sûr qu'y en au moins un qui se pointe au club échangiste tout les week-end!

Pas sûr que l'alcoolique serait le bienvenue dans ce bar à l'avenir mais on ne pouvait lui enlever qu'il était honnête -bien trop mais tout de même! « Il est saoul. Il ne sait pas ce qu’il dit. » Affichant un air étonné, Jake posa sa main contre son torse. Lui, saoul ? non, il lui fallait plus que deux verres de rhum pour être ivre, là, il était en pleine possession de ses moyens, ce qui était plutôt effrayant à vrai dire, parce que cela signifiait que même si un jour il était guéri de son alcoolémie, il conserverait cette attitude irresponsable et loufoque. Prenant une gorgée de sa boisson l'homme émit un léger rire avant de croiser tantôt le regard du barman, tantôt celui de Mary-Kate.

— Ah non j'suis pas saoul. Juste moi-même! répliquait-il d'un ton fier. 'Faut de tout pour faire un monde comme on dit! continuait-il.

Jake en avait beaucoup des excuses comme celle-ci pour expliquer son comportement à la Jack Sparrow. Malgré tout il ne s'en cachait pas et bien que ça ne plaise pas à tout le monde, il était plutôt apprécié pour sa franchise. « Bon, on y va maintenant ? Ou tu veux vider la bouteille de ce pauvre homme ? » À vrai dire l'idée était bien tentante. Pour digérer ce qu'il venait d'apprendre, boire jusqu'à n'en plus pouvoir n'était pas de refus. Mais le détective sentait le piège venir, il sentait que s'il succombait à ses pulsions alcooliques ce soir, il s'en mordrait les doigts. Hésitant, l'homme jeta un regard vers les nombreuses bouteilles au bar pour finalement croiser celui de la belle. « Tu sais où j’habite maintenant. Alors tu as moins de dix minutes pour t’y pointer. Juste le temps que j’enfile ton costume. Et les menottes... » Et voilà, il en était sûr. C'était bien les femmes ça, à poser des ultimatums à tout bout de champs pour obtenir ce qu'elles veulent! MK devait pourtant savoir que même ivre, il était très performant au lit! Bon, bien sûr il l'était davantage à jeun, un peu comme en ce moment, pour sûr que s'il la prenait là, elle serait bien plus comblée que les fois dernières, et Dieu seul sait à quel point elle avait prit son pied! Lui aussi d'ailleurs, il ressentait bien plus de sensations sans l'effet de l'alcool, et s'il s'abstenait de rhum, il était certain que leur partie de jambes en l'air serait inoubliable...mais tout de même...toutes ces bouteilles...et cette carte de crédit qui ne demandait qu'à être vidée...baissant le regard, l'homme, hésitant, fût étonné de voir la jeune femme quitter l'établissement. Alors elle disait vrai ? S'il n'était pas là dans les dix minutes, adieu le sexe ? Tapotant vigoureusement le sol de son pied droit, Jake se rongea les ongles, nerveux. Finalement il plaqua sa main sur le comptoir à son tour en se levant, décidé.

— Ah les femmes, j'vous jure! se plaignait-il au barman. Désolé pour elle, elle est trop accro à mon sexe, s'en est épuisant!

Mentait-il. Non, Jake était loin d'être fatigué d'elle. Au contraire, sentir son corps près du sien, l'embrasser, se lier pendant des heures dans une rencontre torride et affolante...il ne s'en lassait pas. Mary-Kate était appétissante, il l'imaginait déjà dans son petit costume, menottée à son lit double. Non, il serait bien fou de se priver d'un tel spectacle! Posant à la hâte la monnaie pour son second verre, l'américain salua rapidement les employés pour sortir du bar d'un pas pressé. Sur le chemin, il vérifia l'heure quelques fois, s'était énervé contre une cannette sur le sol qui l'avait ralenti d'un quart de seconde pour finalement atteindre le bâtiment dans les temps. Traversant ensuite le couloir, il pénétra dans l'appartement sans même s'annoncer, non, il n'avait pas le temps pour ça, connaissant la demoiselle, elle était plus que sérieuse et mettrait sa menace à exécution s'il n'était pas présent à l'heure exigée. Fermant la porte à clé derrière lui -être dérangés pendant le coït serait bien agaçant, Jake longea la salle pour n'y trouver personne. Bien, elle devait être dans sa chambre! D'un pas décidé, le quarantenaire se rendit vers une porte...puis une autre...puis une autre...bon, il avait une chance sur trois de se trouver dans la bonne pièce! D'un large sourire il ouvrit la première porte d'un grand mouvement. Merde les toilettes! D'un soupir il empoigna la seconde porte pour y découvrir la salle de bain. Levant les yeux au ciel, il entreprit d'ouvrir la troisième. Subjugué par ce qu'il avait devant les yeux. Jake émit un large rictus. Tout simplement splendide la brunette dans son petit costume de fliquette! Elle était tellement belle, là, allongée sur son lit...tellement que l'envie s'était imprégnée de lui immédiatement. D'une démarche féline, le détective grimpa sur le lit, s'approcha lentement de Mary-Kate pour finalement se poser au dessus d'elle.

— Je suis à l'heure, madame. avait-il dit.

Sans attendre, il s'empara des lèvres de son amante. Comment aurait-il pu passer à côté de ça ? c'était impensable! Elle était bien trop désirable pour qu'il ne succombe pas! Ce petit bout de femme vaillante, prête à dompter le pire mâle alcoolique de la planète, l'attendait là, sur ces draps qu'il se ferait un plaisir de froisser pendant leur rencontre charnelle. Mary-Kate était précieuse, sans doutes un peu trop pour lui, il n'était pas l'homme qui lui fallait, il en était persuadé! Comment un quarantenaire à la vie malsaine pourrait combler une jeune femme aussi charmante, aussi posée qu'elle ? Mais quand bien même il savait tout cela, briser cette relation lui semblait impossible. Évidemment il en paierait le prix fort plus tard, car toutes choses se savent un jour où l'autre, mais à cet instant précis, il s'en fichait bien.

— Tu es diablement sexy, tu le sais, ça ? avouait-il, ne détournant pas son regard sombre de désir du visage de la brune.
 

Faisant tourner la menotte autour de son index, les yeux rivés sur son réveil matin, elle se demandait ce qu’il pouvait bien foutre au lieu de ramener ses jolies fesses ici. A l’évidence, il devait être en train de ruiner sa réputation. Plus jamais elle ne mettrait un pied dans ce bar. Ou plutôt, plus jamais elle ne sortirait dans un lieu public avec lui, s’il ne sait pas tenir sa langue. Peut-être qu’il s’affichait ouvertement, et sans une seule honte, mais elle, c’était bien différent. Surtout pour une fille. Elle allait passer pour une putain, une perverse, une nymphomane... Alors qu’elle était tellement... L’inverse. Il était si rare qu’elle couche avec un homme. Pour une fois qu’elle s’en était trouvée un, il pourrait peut-être avoir un peu plus de respect pour son image.  

Un bruit de porte. Elle arrêtait la tornade de la menotte, alors qu’un sourire se dessinait sur ses lèvres. Il était venu. Se pinçant même la lèvre inférieure, elle s’empressait de prendre une pose sexy sur le lit, face à la porte d’entrée. Mais là encore, il était un peu long... Visiblement il se tapait toutes les pièces avant de trouver la bonne. Elle aurait peut-être dû penser à lui faire une visite guidée avant de lui annoncer sa superbe nouvelle. Enfin il se montrait. Tout d’abord immobile, il passait ses yeux sur la silhouette “déshabillée” de sa maîtresse. Elle jouissait d’avance d’être ainsi admirée. Jamais un homme ne l’avait croqué des yeux ainsi. Elle se sentait belle, et désirante dans les yeux de Jake. C’était sûrement ça qui le rendait unique pour elle. Alors quand il s’approchait du lit, son petit cœur s’emballait dans sa poitrine. Elle n’avait qu’une seule et unique envie : Qu’il la touche, qu’il l’embrasse, et qu’il s’occupe de son cas, comme l’autre fois. « Je suis à l'heure, madame. » A son tour, elle le dévorait des yeux, s’allongeant sur le dos. Lui, il venait s’allonger sur elle. Il s’emparait de ses lèvres, réveillant chez elle, un tel frisson de bien-être. Il éveillait chez elle tant de choses, elle nageait dans l’inconnu. Elle ne contrôlait rien, elle ne savait même pas vraiment ce qu’elle ressentait. Mais elle s’en fichait. Elle aimait cette sensation, alors elle voulait la vivre pleinement. Tant pis si derrière, elle devait réparer les pots cassés. Le mal était fait de toute façon. Si Shana venait à apprendre leur liaison, qu’ils couchent ensemble une fois ou deux, qu’est-ce que cela changerait ? Doucement, elle passait ses bras autour du cou de Jake, relevant légèrement son buste, pour chercher le contacte avec son corps. Ses lèvres caressaient les siennes, répondant à son baiser avec envie. « Tu es diablement sexy, tu le sais, ça ? » Elle, elle ne le savait pas vraiment, mais elle le lisait dans ses yeux. Elle se sentait belle, et c’était si bon de ressentir ça.  

« Sexy, mais mauvaise... »

Murmurait-elle près de l’oreille du quarantenaire, en relevant les menottes en l’air.  

« Quoi que c’est toi qui mériterait une correction. Ce pauvre barman va s’imaginer des choses sur moi maintenant. »

S’offusquait-elle faussement, en faisant claquer les menottes dans le dos de Jake. Elle se redressait d’ailleurs légèrement, pour faire rouler la silhouette de son amant. Une fois qu’il fut sur le dos, elle venait le chevaucher, tout en écrasant ses lèvres dans son cou.

« Alors, qui va punir l’autre le premier... »

« Sexy, mais mauvaise... » Tout simplement sublime, désirable au possible, la jeune femme se présentait ainsi, allongée dans ses draps de satin et habillée d'un costume sexy qui ne tarderait pas à lui faire tourner la tête. Si la belle était mauvaise, Jake était diabolique! Ce qui ne semblait pas lui déplaire, à sa plus grande surprise. Non pas qu'il n'appréciait pas ce petit jeu sadique, au contraire, il adorait leurs rencontres charnelles et s'amusait à lui infliger de sauvages tortures des heures durant, seulement ce n'était pas courant de trouver ce genre de jeune femme au visage angélique et aux envies aussi peu orthodoxes. D'ordinaire il s'agissait davantage des femmes mûres, un peu trop portées sur l'alcool et la drogue qui s'entichait de tels traitements, pas le genre de Mary-Kate qu'il aurait pensé plus réservée. C'était sans doutes ce contraste qui l'avait autant attiré, voir ce petit corps se contracter sous la jouissance, ce doux visage se tordre de plaisir pendant l'acte était tellement grisant qu'il ne s'en lassait pas de l'admirer. Même ses paroles, à la fois excitantes et étonnantes dans la bouche d'une aussi jolie fille le rendait dingue. Au prix d'un effort phénoménal, l'alcoolique s'arrachait à ses lèvres, poussant un léger râle de frustration.

— J'serais bien curieux de voir à quel point tu peux être mauvaise, princesse. avait-il murmuré à son oreille.

« Quoi que c’est toi qui mériterait une correction. Ce pauvre barman va s’imaginer des choses sur moi maintenant. » Ah certes, cette fois-ci, il n'y était pas allé avec le dos de la cuillère! Avec sa grande timidité -ou plutôt son bon sens mais soit, Jake pouvait comprendre qu'elle n'oserait plus se rendre au dit bar. Lui se fichait pas mal de son image, il y a de ça bien longtemps que ça ne le préoccupait plus! Ce je m'en foutisme était sans doutes dû au fait qu'il n'avait plus rien à perdre, que paraître "normal" aux yeux des autres était bien secondaire chez lui et qu'il préférait plutôt s'attarder sur le plaisir charnel et l'alcool plutôt que de s'inquiéter de ce que des inconnus peuvent penser de lui. Mais le détective savait que ce n'était pas le cas de la brune et dire qu'il s'en voulait était plutôt exagéré, disons plutôt qu'il regrettait avoir utilisé des mots aussi crû, peut-être aurait-il dû être moins explicite. « Alors, qui va punir l’autre le premier... » Sa simple réplique lui avait arraché un sourire, oui décidément, l'habit ne fait pas le moine.

— T'inquiète pas pour lui, ce pauvre barman doit avoir la trique à t'imaginer en tenue de fliquette à l'heure qu'il est. répondait-il. Moi je n'ai pas besoin de mon imagination pour m'amuser...